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Jacques a dit que c’était le bon temps…

 
La nostalgie est de mise ces derniers temps. Les anciennes stars remontent sur scène et font salle comble, les films parlent de stars décédées pour raconter leurs vies… Tout est bon pour fuir la crise et ce monde bien compliqué qui oblige à réfléchir sur l’essentiel. Les gens sont submergés de problèmes, le chômage monte, la délinquance est partout et la peur s’installe vite. Et si on reproche aux politiques de ne pas parler assez de la crise, on ne reproche en revanche pas aux publicitaires de tout faire pour nous en éloigner (ce qui est après tout leur rôle). Par exemple, le métro se couvre depuis quelques jours d’affiches sur la (re)sortie au cinéma du Roi Lion, mais en 3D cette fois. Disney est l’un des maîtres de cette publicité de la nostalgie, ressortant notamment en DVD remastérisé tous les Disney un à un, replongeant les enfants et les anciens enfants devenus parents dans la douceur d’un monde où la fin est toujours heureuse.
Un autre exemple, le dernier en date, est celui d’Hollywood chewing-gum. Si vous avez allumé votre télévision dernièrement, vous n’avez pas pu manquer cette publicité qui commémore 60 ans de pubs télévisuelles de la marque.

On commence par voir un amoncellement de vieux postes TV sur lesquels défilent toutes les publicités des fameux chewing-gums depuis la création de la marque. Puis, au moyen d’une mise en abîme, la caméra nous fait entrer dans l’un des écrans et nous présente un paquet de chewing-gums Hollywood mentholés, les plus classiques qui soient. Ce paquet reviendra ensuite entre chaque extrait publicitaire durant les 30 secondes du spot, à la manière d’un message subliminal : moins d’une seconde à l’écran, seul élément visible sous la forme d’un de ces « freeze » d’image qu’avaient les anciennes télévisions. Ce vieil écran un peu détraqué dans notre télévision HD moderne, ainsi que ce paquet vert reconnaissable entre tous, sont les premiers éléments nostalgiques de la publicité et présentent la cible : ceux qui ont connu ces grosses et lourdes télévisions, bien avant les écrans plats et les dimensions extravagantes. Un petit retour dans le passé donc, tant par la forme que par le thème, et qui est récurrent grâce à ce « freeze » que l’on retrouve tout au long du spot publicitaire.
Ensuite, différents moments se suivent ponctués par les dates des différentes pubs : 1985, 1988, 91 et 99, 2006 puis 2009 et enfin, bien que la date ne le mentionne pas, la dernière image est celle d’aujourd’hui avec le nom de la marque et le sigle des 60 ans. L’idée de « toujours là » est parfaitement véhiculée, et en 30 secondes Hollywood chewing-gum parvient à faire revivre aux anciens enfants, désormais adultes d’une quarantaine d’années, les différents moments de vie qui ont accompagné ces différents concepts publicitaires. Pour ma part, la première fois que ma zapette m’a amenée sur ce spot, j’ai senti une bouffée nostalgique m’envahir en voyant la statue de la Liberté jeter sa culotte et plonger dans la baie de New-York : combien de fois ai-je pu voir cette publicité étant enfant ? C’est d’ailleurs l’extrait le plus long de la courte vidéo (7 secondes contre 2 à 5 secondes pour tous les autres), ce qui montre bien son impact à l’époque de sa sortie. Le retour du slogan musical « fraîcheur de vivre » à la fin est un autre rappel de ce temps qui passe et de la mémoire qui accompagne les slogans publicitaires (et donc de leur efficacité !).
Cette célébration médiatique est ainsi parfaitement adaptée non seulement par rapport au contexte mais aussi dans sa forme même. Nombreuses sont les publicités qui ont traversé les âges et que l’on évoque entre amis ou en famille (la marmotte qui emballe le chocolat notamment, qui est un grand classique). Par ce moyen, Hollywood chewing-gum aide ces réminiscences et s’ancre dans le temps médiatique comme une marque inébranlable et incontournable, mais aussi ancrée dans le présent car les trois derniers extraits sont les plus longs, comme pour bien montrer que l’évolution a été positive et que ces publicités sont les plus importantes. Il y aurait beaucoup à dire sur l’évolution des concepts publicitaires, mais un regard rapide sur la forme cette publicité nous apprend déjà  beaucoup à propos d’une stratégie communicationnelle qui fonctionne et qui dure.
 
Héloïse Hamard

Société

Idoles

 
J’entends souvent pester contre le football. Trop de violence, trop d’argent, trop de médiatisation, répète-t-on à satiété. A entendre certains, on tiendrait presque là l’origine de tous les maux terrestre, ou du moins d’un bel échantillon. Alors, ils s’inquiètent, ils méprisent, ils s’insurgent, ils condamnent, ils dénoncent… Ils s’acharnent et pourtant il tourne, le ballon rond, il continue de tourner, et d’entraîner toujours autant d’enthousiasme et d’adhésion à sa suite. Alors quoi ? L’humanité est-elle devenue irréparablement vicieuse ?
Ce n’est apparemment pas l’avis de l’Archevêque de Rennes qui, pour la Pentecôte, a décidé d’organiser un grand rassemblement au Stade de le Route de Lorient, où se retrouvent d’habitude plutôt… les supporteurs du Stade Rennais (football club local pour les incultes en la matière, qu’on pardonnera vu le contexte). C’était sûrement beaucoup déjà pour certains défenseurs de la vertu dans le sport mais Mgr Pierre d’Ornellas ne s’est pas arrêté là : il a choisi d’axer la communication de l’événement sur la proximité entre football et foi.
Ainsi, l’agence Yeti a été mandatée pour concevoir plusieurs visuels, dont l’un représente un groupe de faux joueurs du Stade Rennais. Un des ces joueurs est photographié de dos, les bras en croix, portant un maillot sur lequel est inscrit « messie » et voit ses coéquipiers converger vers lui. En bas de l’affiche est inscrit : « un seul but : le rencontrer. » Pour le quotidien Ouest France, l’idée est simple : « le diocèse de Rennes joue l’humour pour la Pentecôte. » D’ailleurs, Yann Béguin, responsable de la campagne, le confirme : « on a choisi de jouer sur le décalage et sur l’humour. Cela participe à notre volonté de toucher un public plus large que celui de nos fidèles. » Et en effet, l’image surprend, interpelle et prête à sourire.
Du coup, elle marque, elle s’imprime dans la mémoire du public. C’est la théorie mathématique de la communication : moins une information est attendue plus elle est intéressante. L’humour, dans un univers qu’il ne caractérise pas, est donc un moyen redoutablement efficace pour attirer l’attention. Le public n’est pas habitué à ce que les autorités religieuses usent de cette tonalité. Il est donc nécessairement marqué par le message. Par ailleurs, l’utilisation métaphorique de l’univers du football joue sur la même mécanique. Audacieuse, elle fait le « buzz, » et donc recette.
Cette métaphore est d’ailleurs particulièrement intéressante. Le choix du football n’est pas anodin, loin de là. En effet, s’il soulève autant de passion, d’enthousiasme et de controverses, c’est que ce sport a une place bien particulière dans nos sociétés. Il n’en est d’ailleurs plus tout à fait un sans doute ou plutôt, plus seulement un. Le football est un spectacle et donc une histoire que l’on raconte sur scène, mais aussi avant et après la représentation. Le parallèle se dresse aisément avec l’Évangile, qui est avant tout un récit, qu’on lit ou non en croyant. Ainsi, Lionel Messi, actuel superstar du football planétaire, n’est pas seulement un athlète doué mais aussi une figure mythologique, adulée par des milliers de gens. Sans faire d’un footballeur le nouveau Christ, il y a ici un lien fort et donc une résonance. En effet, la force du football, ce qui explique peut-être son hégémonie, c’est sans doute qu’il est un spectacle fait réalité, ou une réalité faite spectacle. Les personnages du roman du football sont réel, comme l’est le Christ pour le croyant. On touche là à un fantasme fondamental de l’humanité : voir son imaginaire devenir réalité.
Autre similarité, la religion, comme le football, n’est pas seulement un lien vertical, elle est aussi un lien horizontal. Le culte fait la communauté, la rassemble et la soude. Si la tenue d’un événement religieux dans un stade peut étonner en premier lieu, elle fait en fait entièrement sens si l’on y pense bien. Le stade est cet endroit où tous se rassemblent, se regardent, et se reconnaissent. Chose intéressante d’ailleurs, la télévision n’a jamais réussi à le vider. L’expérience du match à huis-clos télévisé est d’ailleurs toujours assez troublante pour l’amateur. C’est que le football, dans les travées ou devant la télévision, est comme la cérémonie religieuse un moment d’émotion collective intense, où l’on chante, où on exprime avec les autres des sentiments. Si le football a du succès, c’est aussi parce qu’il remplit cette fonction. Au détriment du culte, réduit à le copier ? Vaste question sans doute.
Quoi qu’il en soit, figures mythologiques ou pairs, un seul but en fin de compte : les rencontrer.
 
Romain Pédron
Sources :
Pentecoteensemble.fr
Yetibox.com

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Flops

En rase campagne

 
Alors qu’il ne nous reste plus qu’une poignée de soirées endiablées à passer avec la tata mélenchoniste et l’oncle bleu marine pour savoir quel billet glisser dans l’urne, de nombreux sondages convergent vers une tendance commune : les Français ne s’intéressent pas à cette campagne présidentielle — ou du moins peu.
En effet, un rapide comparatif entre les chiffres de 2007 et de 2012 permet de jauger ce décrochage en matière d’intérêt. Une étude de la TNS Sofres datée du 4 avril 2007 (avec un premier tour qui se tenait déjà un dimanche 22 avril) révèle que 78% des interrogés se déclaraient alors « intéressés par la présidentielle ». Une étude similaire menée par CSA pour BFM TV le 2 avril 2012 place le curseur une douzaine de points plus bas avec 66% d’ « intéressés ».
Plus inquiétant que l’écart en lui-même, la dynamique des résultats de ces sondages s’avère être préoccupante. En 2007, on pouvait observer un intérêt croissant à mesure que l’échéance électorale approchait. Pour la campagne qui se joue aujourd’hui sous nos yeux c’est tout le contraire qui semble se passer. La plupart des instituts de sondages (TNS Sofres, CSA ou Opinion Way) dévoilent des chiffres qui indiquent clairement un désintérêt croissant pour la présidentielle de 2012. Ce recul s’est opéré au début du mois de mars. En effet, Opinion Way note un repli de plus de 6 points en terme d’intérêt sur les deux premières semaines de mars — même constat pour TNS Sofres (4 points de perdu en deux semaines).
À rebours, les résultats de 2007 faisaient de ce tournant de février/mars le moment clé où l’intérêt pour la présidentielle décolle : en effet, en l’espace de ces deux mêmes semaines, on assistait à un gain de 8 points, pour ensuite atteindre son apogée lors de l’entre deux tours.
Plusieurs raisons peuvent être évoquées pour tenter d’expliquer ou de dédramatiser ce snobisme assumé des Français envers leur campagne présidentielle.
Tout d’abord, il faut prendre garde à ne pas forcer les comparaisons entre les élections de 2007 et celle de 2012. En effet, celle qui s’apprête à se jouer est avant tout l’élection d’un potentiel renouvellement de mandat pour un candidat Sarkozy quasiment assuré d’être au second tour. Dans le même temps, son principal adversaire — François Hollande — a été placé par médias et instituts de sondages dans la position parfois peu confortable du favori incontesté. Ainsi l’élection — les premiers et seconds tours — semble être jouée avant même l’ouverture des bureaux de vote plaçant les électeurs dans une douillette salle d’attente où il serait de toute façon trop tard pour changer les règles du jeu.
Au contraire, en 2007, le renouvellement politique s’apprêtait à être total avec la potentialité de voir revenir la gauche au pouvoir après plus de 12 ans d’absence ou bien avec l’avènement d’une nouvelle génération droitière incarnée par Nicolas Sarkozy et d’autres jeunes loups de l’UMP tels Jean-François Copé. L’excitation et l’enjeu en étaient alors sûrement renforcés.
Ensuite, les derniers évènements — notamment l’affaire Merah et ses suites — ont déplacé le curseur des thèmes de campagne vers le sécuritaire et la défense de la République délaissant ainsi crise économique et dette. Le candidat de l’UMP — et président sortant — mène désormais la danse et impose le tempo évitant soigneusement de s’égarer vers l’économie étant donné l’état de son bilan, pas vraiment reluisant sur ces sujets.
François Hollande choisit lui de laisser parler, se projetant déjà dans une position de président hypothétique au-dessus de la meute, évitant ainsi le débat avec son principal concurrent dans une course qui a du mal à s’accélérer. Le candidat de la rue de Solférino ayant fait de l’anti-sarkozysme son axe de campagne principal a évincé de fait les huit autres participants de la fête — s’auto-persuadant de sa présence au second tour. Alors, il entend garder ses cartouches pour la confrontation directe de l’entre deux tours qui l’opposera — selon lui — à Nicolas Sarkozy.
Lionel Jospin avait en 2002 opté pour cette même stratégie, en restant fixé sur le rendez-vous du deuxième tour face à Jacques Chirac avec la réussite désormais légendaire que l’on connait. À force de ne pas occuper le terrain, « Yoyo » s’était retrouvé évincé du duel final par Jean-Marie et son oeil de verre — aidé par l’affaire du Papy Voise et l’éclatement des voix à gauche.
Enfin, il serait aussi possible de pointer le rôle du CSA qui assure une répartition strictement égale du temps de parole entre les dix candidats pour le dernier mois de campagne .Certes, d’un point de vue strictement démocratique, la démarche est louable et sans doute souhaitable notamment pour permettre aux petits candidats d’exister. Cela a pu notamment permettre à chacun d’entendre Jacques Cheminade narrer le rôle de la Reine d’Angleterre dans le trafic d’opium mondial ou encore l’absolue nécessité de conquérir Mars. Avec cette image encore tenace d’une Elizabeth II fusionnée avec un Al Pacino époque Scarface, cette répartition stricte rend effectivement moins visibles les confrontations et clivages de campagne entre les principaux candidats.
Ainsi la campagne perd un peu son souffle puisque chacun se trouve avec la possibilité d’exprimer ses thèmes respectifs, menant à une impression de fouillis avec d’innombrables débats annexes qui empêchent de fixer des enjeux clairs sur lesquels chaque candidat pourrait exprimer ses différences et convictions — projet que François Bayrou tente de mener à terme en proposant un débat avant le premier tour avec les dix aspirants présidents. Reste enfin à savoir si ce désintérêt latent mènera à une abstention record pour l’élection pivot d’un pays centré sur les présidentielles.
 
PAL
Crédits photo : ©AFP PHOTO PHILIPPE

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Com & Société

Peut-on toujours « madonner » le monde à 53 ans ?

 
Ce n’est une surprise pour personne : le nouvel album de Madonna est sorti le lundi 26 mars dans les bacs. Minutieusement préparée, la communication élaborée autour de la parution de cet opus provoquait déjà une scission entre les fans impatients et les autres, partagés entre l’agacement et une curiosité réservée. Toutefois,  chacun à sa manière attendait de pied ferme le retour de la « Reine de la Pop ».
Le titre même se veut accrocheur : « MDNA », initiales qui font évidemment écho aux petits cristaux euphorisants, ainsi qu’au DNA, acronyme anglais d’ADN. On s’attend alors à un album qui serait du « pur Madonna », marqué à la fois par son ADN et ses vertus addictives. La promesse est élevée, et la communication autour du douzième album de la Reine n’est pas là pour le démentir.
L’élément paroxystique de sa promotion est bien sûr sa performance à la mi-temps du  Super Bowl 2012, diffusée sur NBC. La Madone commençait en effet son live en reprenant deux de ses titres phares : Vogue et Music, avant d’enchaîner de façon plus surprenante sur une reprise de Sexy and I Know It de LMFAO. Mais c’était surtout l’occasion de chanter son nouveau single Give Me All Your Luvin avec ses deux nouvelles collaboratrices Nicki Minaj et MIA. Devant environ 114 millions de téléspectateurs, il s’agissait d’un véritable enjeu pour créer l’engouement autour de son album.

Oui mais voilà, déjà, à ce moment, un article du Figaro soulignait : « La prestation était à couper le souffle du côté de la mise en scène. Mais la chanteuse, un peu molle et hésitante dans sa performance, a perdu de sa superbe. ». Un tel propos laisse bien entendre le principal obstacle pour Madonna : personne ne nie sa capacité à surprendre et à proposer des spectacles de qualité, mais là où le doute s’installe, c’est lorsqu’il s’agit de savoir si elle est toujours celle qui casse les paradigmes des tendances musicales, celle qui trône au royaume de la musique populaire.
En effet, celle qui a vendu le plus de disques de tous les temps se confronte à des monstres de la scène musicale, prêts à jouer sur les ressorts les plus efficaces de la communication et de la provocation pour faire parler d’eux. Citons sa principale concurrente Lady Gaga, à la fois artiste la plus suivie sur Twitter et personnalité la plus influente du monde selon le magazine Time . Celle-ci cherche l’innovation à un point tel qu’elle a opté pour un changement de look au jour le jour, la création d’un réseau social (LittleMonsters.com) ou encore des prises de position politiques (la dernière en date : création d’une association pour se battre contre les humiliations subies par les jeunes lors des bizutages). Par ailleurs, l’américaine délurée est tout aussi capable de faire des shows enflammés que des ballades au piano.
En clair : la jeune génération (oui oui, Katy Perry, Shakira, et toute la clique) a formé une nouvelle cour des Grands, dans laquelle on joue certes à provoquer aux niveaux politique et sexuel, mais également à triompher sur Twitter & Co. Voilà pourquoi le nouvel album de Madonna semble décevoir : il semble presque désuet dans les moyens qu’il exploite pour faire parler de lui.  Ainsi, le clip « Girls Gone Wild » paru tout récemment, tire les ficelles du « porno chic » dans un paysage sadomasochiste qui… non seulement ne surprend plus, mais encore fait penser aux premières vidéos de Madonna, illustrant des morceaux comme Erotica.

Madonna : Girl gone wild (2012) par tartenpion333
Enfin, on serait presque tenté de dire que quelque chose sonne « faux » dans cette exhibition de la part de cette femme de 53 ans. Elle serait allée jusqu’à s’écrier « Combien d’entre vous dans cette salle ont vu Molly ? » (pour ne pas dire MDMA) au festival Ultra Music à Miami, propos qui amènera le DJ canadien Deadmau5 à poster sur Facebook : « Très classe, Madonna. Quel super message pour les jeunes fans de musique. Mais au moins, t’es hype et branchée! J’en ai rien à faire de critiquer Madonna. Je peux admirer sa carrière et tout ce qu’elle a fait de bien, mais c’était quoi, cette connerie? C’est ça, ton message? Rechercher de la drogue? Va te faire foutre, putain d’imbécile! ».
On peut donc penser, au terme de cette argumentation, qu’il y a peut-être une erreur dans l’approche de Madonna pour continuer à régner sur le monde de la pop, qui est paradoxale : pour être « in », la diva n’aurait peut-être pas dû surfer sur la puissante vague électro-érotique qui fait la grande tendance du moment. Toutefois, il faut savoir que les plus critiqués sont en général les plus grands, et que l’album de Madonna reste de bonne qualité, beaucoup de journalistes se recoupant dans leur opinion, selon laquelle les singles ne sont pas les meilleurs morceaux, l’album proposant quelques bonnes pistes à l’instar de « Gang Bang » ou « I don’t give A ».
Il revient donc à chacun de faire le choix d’aimer ou ne pas aimer.

 
Lucas Vaquer
Crédits photos: billboard.com  

Publicité

Jacques a dit que tout n’était plus que publicité

 
Vous les connaissez murales, télévisuelles, digitales ; vous les avez vues avant votre film au cinéma ou entre deux épisodes de votre série ; vous les connaissez sous forme de tracts, de flyers, d’affiches, d’encarts, de pages, vous les voyez chaque fois que votre œil tombe quelque part dans la rue… Bariolée ou intacte, attractive ou repoussoir, pénible souvent, la publicité hante notre existence tel un spectre qu’on ne remarque pas toujours mais qui nous colle aux yeux et aux oreilles. Certains réagissent violemment : bariolage d’affiches et d’écrans dans les métros, logiciels pour empêcher la pub sur internet ou encore création de groupes tels que BAP (Brigade Anti-Pub) et RAP (Résistance à l’Agression Publicitaire), mais beaucoup d’autres en font leur gagne-pain, comme ces sociétés qui ont développé le « panneau-espion » équipé de capteurs vidéo afin de savoir combien de temps l’utilisateur reste devant l’écran.
Mais il existe encore un autre groupe de personnes à utiliser la publicité de manière toujours plus innovante afin de se faire connaître. C’est le cas de ces deux jeunes anglais de 22 ans, Ross Harper et Ed Moyse. Ayant dû s’endetter de 25 000 livres chacun pour finir leurs études et obtenir leur diplôme de Cambridge, leur entrée sur le marché du travail leur paraissait bien difficile, surtout dans un pays où le chômage est à 22% et touche en particulier la jeunesse. En Octobre 2011, ils ont donc décidé de se lancer et de créer leur propre boîte, comme de plus en plus de jeunes aujourd’hui (la fameuse « génération Y »). Avec un capital de 120 livres, ils ont eu l’idée de lancer « Buy My Face », soit en français « Visage à Vendre », et de le proposer aux entreprises comme nouveau support publicitaire.
Le succès fut au rendez-vous. D’une livre (environs 1,20 euro), leurs deux visages sont très vite passés à 100 voire 400 livres par jour et les deux jeunes en sont à plus de 30 000 livres de bénéfices depuis le lancement du projet. Grâce au bouche-à-oreille, les visites sur leur site internet ont augmenté de manière exponentielle, atteignant aujourd’hui environs 7000 visites individuelles par jour. Grandes et petites entreprises (TNS, Ernest & Young ou encore Oméga pour en citer quelques unes) se bousculent pour bénéficier de leur offre. Ayant commencé par simplement se poster dans les rues de Londres, ils réalisent aujourd’hui des actions pour leurs annonceurs comme du saut en parachute afin de donner une dimension plus sensationnelle et attractive à leur concept. Aujourd’hui, ils cherchent à étendre leur idée à l’international, ayant eu vent d’entreprises dans d’autres pays qui seraient intéressées par ce support communicationnel inhabituel.
Cette double visée, à la fois communicationnelle pour les deux jeunes et publicitaire pour leurs annonceurs, montre plusieurs choses. D’abord cette idée d’une très grande importance de l’individu, chacun cherchant à se démarquer, à faire parler de lui. Mission réussie ici pour Ross et Ed qui attirent inévitablement l’attention où qu’ils aillent avec leurs joues peinturlurées. Mais cela montre aussi que les entreprises cherchent de plus en plus à développer d’autres méthodes de communication et à surprendre leurs clients dans leurs publicités. Enfin, on peut aussi voir dans cette action que l’humour, la dérision sont au goût du jour dans l’opinion publique comme dans les entreprises, et que la communication qui se base sur ces principes a de grandes chances d’aboutir.
Ce projet ne reste malgré tout qu’un évènement éphémère qui risque de vite prendre fin. Cependant, il incarne l’idée d’une évolution de la publicité vers une tendance plus ludique et humoristique afin de toucher un public toujours plus large, sans oublier son aspect innovant qui marque donc d’avantage les esprits et donne le sentiment d’être plus efficace. Un sentiment qui semble confirmé par l’immense succès de ces deux anglais.
 
Héloïse Hamard

Société

La voix universelle

 
En matière de programmes audiovisuels, l’achat de concepts étrangers est moins coûteux que la création originale et le plagiat, gage de succès. Super Nanny et A la recherche de la Nouvelle Star (Pop Idol) sur M6, Koh Lanta (Survivor) sur TF1… Plus récemment You can dance (So you think you can dance) sur NT1. La France est friande de ces importations. L’inverse est moins vrai. Les exportations françaises sont plus rares ,bien que Camera Café ou Kaamelott (société de production CALT) se soient vendus comme des petits pains sur les autres continents et que le Fort Boyard accueille vingt-cinq nationalités entre ses murs. Ce procédé apparaît comme un moyen intelligent de minimiser les risques pour les chaînes importatrices puisque le programme, déjà installé sur un territoire, donne a priori davantage de garanties qu’une nouvelle création onéreuse. La question qui se pose pour les sociétés de production internationales (Endemol ou Fremantle pour n’en citer que deux) est l’adaptabilité des programmes de création pour l’étranger.
Médiamétrie nous apprend, le 22 mars dernier, que le divertissement se hisse en seconde place du podium des genres les plus regardés dans le monde et qu’il compte pour 38% des « 10 meilleurs programmes tous pays confondus ». Véritable exutoire aux informations anxiogènes, le divertissement rend donc la télévision plus digeste pour le téléspectateur. Parmi eux, les formats musicaux – et tout particulièrement ceux qui s’évertuent à dégoter de nouveaux talents, sont les plus exportés : Got Talent figure dans les tops 10 de 11 pays* mais le dernier spécimen, qui crève nos écrans depuis peu et se hisse en pole position n’est autre que The Voice, véritable franchise internationale pour laquelle TF1 a signé un protocole d’accord début 2011. La version française, produite par Shine France est ainsi une adaptation de « The Voice of Holland » créé par John De Mol (Endemol) diffusé sur RTL4 aux Pays- Bas.
Depuis l’arrêt de Star Academy en 2008, faute d’audience, TF1 cherchait en vain un nouveau concept de télé-crochet. Le format se veut plus original et caractérisé par trois phases : un jury composé de quatre professionnels font, dans un premier temps, passer des « auditions à l’aveugle », installés dans quatre fauteuils rouges faisant dos aux candidats – auditions qui arrivent après des sélections, semblables à tout autre casting, effectuées en amont. Chaque juré est muni d’un « buzzer » qui lui permet de faire pivoter son siège pour signifier au candidat qu’il souhaite le recruter dans ses rangs. Si plusieurs « coachs » se tournent, c’est alors au candidat de faire son choix. Le temps de quelques secondes, les rôles s’inversent ! Lors de l’étape suivante, chaque équipe s’affronte en interne lors des « battles » dans un décor de ring de boxe. Puis arrivent les « live shows », phase commune à tout télé-crochet. Ce concept d’audition aveugle nourrit cependant le débat. Malgré un véritable effort de démythification des canons de beauté et des critères physiques de sélections des autres télé-crochets et castings en tout genre, il faut avouer que les pré-sélections et les « battles », quant à elles, ne se font pas à l’aveugle ! Il est ainsi tout à fait possible qu’un physique « hors critères » soit sélectionné lors de la première étape et renvoyé chez lui dès la deuxième. Kant disait que seule la bonne intention est morale, nous nous posons ainsi la question !
Des formats qui voyagent…
Une voie/voix qui s’universalise véritablement puisque The Voice a déjà été vendu et adapté dans une quarantaine de pays sur quatre continents, de l’Australie à l’Indonésie, de la Corée du Sud à la Macédoine en passant par l’Ukraine, de la Turquie à l’Argentine et bien entendu, des USA au Royaume-Uni ! Les résultats français sont remarquables : ce programme de divertissement s’impose comme le grand leader du moment sur le grand public, les ménagères et les 15-34 ans avec 8,2 millions de téléspectateurs soit 37,3% de part de marché pour le samedi 24 mars dernier**. The Voice se place ainsi au deuxième rang des meilleures performances historiques de la chaîne ; ce qui reste exceptionnel pour un samedi soir.
Pas d’asymétrie entre les différentes versions mais une certaine homogénéité au contraire ! Le choc des cultures n’est pas au rendez-vous (ou presque) lorsque l’on visionne les différentes versions et le programme est universel.
Test réalisé avec l’Albanie, la Corée du Sud, le Royaume-Uni ou les USA qui utilisent tous la même recette : des jurés qui se disputent les candidats retenus et se veulent amicaux, des performances accompagnées par des musiciens… Les USA, le Royaume-Uni, la France et la Corée du Sud semblent s’être accordés sur le même modèle de jury : une femme et trois hommes ! On retiendra également des profils et physiques atypiques parmi les candidats (pré-sélectionnés lors d’un casting, rappelons-le !) ou encore des hommes aux voix de femmes et inversement.
De la communication à la conversation
Le programme est à la pointe de la mutation des rôles du public, passé du statut de simples téléspectateurs à celui de participants actifs et créatifs. Il n’est plus seulement question de communication lorsqu’il s’agit de The Voice mais bien de conversation, de connexion, de transmédiation. Chaque émission met en avant la présence du programme sur les réseaux sociaux Twitter (proposant le hashtag #thevoice) et Facebook. Lors de la première saison de diffusion aux USA, en 2011, un « live-tweet » était même projeté sur nos écrans lors des live shows. Les différentes adaptations ont su prendre parti des transformations médiatiques pour en user à bon escient dans une stratégie marketing bien rodée ! Tendons-nous progressivement vers une mondialisation des formats TV ?

Harmony Suard
Sources :
* selon Médiamétrie
** selon TF1

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KONY 2012
Agora, Com & Société

La génération Y n’est pas « anti-Kony »

« The better world we want is coming »
Le projet Kony 2012 a fait cette année encore plus de buzz que l’année dernière. Sa renommée désormais mondiale s’est appuyée sur une vidéo virale et le projet d’une journée d’action, revenons ensemble sur les évènements et la progression de l’association Invisible Children.
En résumé, l’association Invisible Children s’attache depuis l’année dernière à faire arrêter Joseph Kony, le dirigeant de la LRA en Ouganda : les crimes de ce dernier sont, d’après Jason Russel, le porte-parole et dirigeant de l’association, parmi les pires commis actuellement. Grâce à des actions de lobbying, l’association a réussi à faire pression sur le gouvernement pour faire envoyer en Ouganda une unité spéciale de conseil militaire, et pour faire surgir l’affaire sur la place publique. Cette année, leur campagne reprend, avec cette vidéo, qui a fait plus de 70 millions de vues en 5 jours.

Elle a bien sûr soulevé beaucoup de controverses, qu’il est inutile de détailler ici, et qu’on peut trouver dans un très bon article du Monde, en lien plus bas. Ce qui paraît très intéressant d’étudier d’un point de vue communicationnel, c’est la place et le rôle qui sont conférés aux réseaux sociaux dans ces discours. Ils sont, selon Jason Russel (et par conséquent une grande partie des adhérents à l’association), une manière de sauver le monde. Ils incarnent à la fois notre avenir et notre sauvegarde, et cette idée est par ailleurs la principale justification de la vidéo : Jason Russel affirme, en effet, que le problème va au delà des enfants ougandais, il s’agit de prouver au monde que la communion par les réseaux sociaux peut sauver des vies, et améliorer le sort de tous. « The people of the world see each other [and] this is turning the system upside down ». Il propose même une nouvelle manière d’ appréhender la vie politique dans le monde : désormais, la volonté des peuples influencerait (et devrait influencer) plus directement et radialement les gouvernants (ce qui est tout à faire discutable, et presque dangereux). Il semblerait donc que cette vidéo et ce projet retrouvent des tentations utopiques, très proches de celles liées à l’apparition d’Internet. La tonalité indéniablement épique de ces discours rappellent fortement les thèmes d’ « agora publique », de « village global » qui ont été très populaires alors. La différence aujourd’hui, c’est qu’ils sont profondément ancrés dans des histoires individuelles et des particularismes : la majorité des prises de paroles sont intimes et personnelles, rarement collectives, et elles portent sur des émotions et du ressenti. La force des arguments avancés n’est plus rationnelle, mais plutôt subjective, et peu claire.
Puisque cette vidéo se présente comme une expérience, il est intéressant également d’en évaluer les réactions et les réponses. 3 189 921 personnes « aiment » la page Facebook de l’association Invisible Children, mais il faut encore compter les centaines de milliers de fans dispersés sur les différentes pages « Kony 2012 » ou « Stop Kony ». Cependant, les critiques sont également nombreuses et agressives, et se sont renforcées après que Jason Russel a été retrouvé nu, se masturbant, dans les rues de Los Angeles. Celle qui se fait le plus entendre souligne la position américano-centrée du discours et les récents intérêts pétroliers découverts en Ouganda. Une grande partie de l’audience de cette vidéo a résisté à l’engouement qu’elle provoque pourtant très efficacement : le public est, en effet, placé au cœur de l’action à venir, tout à chacun peu ainsi devenir le super-héros un peu « underground » des temps modernes, répondre à ses pulsions vindicatives et prendre la décision d’agir –enfin ! C’est précisément là que se situe le problème : comment croire maintenant que nous pouvons changer quelque chose ? Cette campagne vise un public jeune, complètement connecté, la génération Y comme on la nomme, quelque soit son pays d’accueil. Mais cette génération n’a jamais été jusqu’alors une génération de l’action, et encore moins de l’action humanitaire. J’entends par là que l’engouement pour les causes humanitaires est récent, très « bobo » penseront certains (et cela correspond en effet à une même tendance), mais surtout toujours dominé par un discours sceptique qui « refuse de se donner bonne conscience ». On peut supposer que la génération du 09.11 et de la Fin du monde ne croit majoritairement pas au don désintéressé de soi pour une action efficace. Les jeunes de cette génération veulent bien admettre la nécessité d’être solidaire et la misère du monde, mais ils n’admettront jamais volontiers qu’ils ont été bouleversés et qu’ils se sont achetés leurs petits bracelets « Kony 2012 ». Cela se vérifie aussi pour d’autres générations ou d’autres classes sociales bien sûr, et peut-être qu’en fin de compte, cela reste une réaction plus européenne qu’américaine, mais la question se pose alors :
Pourquoi un jeune de 23 ans moyen, étudiant, parisien, peut « craquer » devant cette vidéo ?
• Même si le rêve utopique est has been, une foule de dizaine de personnes qui hurlent la même phrase produit son lot d’impressions.
• Ce n’est pas parce que cette génération n’a jamais connu de grande cause, ou de grands combats qu’elle n’en connaîtra jamais.
• Le modèle d’action d’Invisible Children est tout de même très « underground », ce qui est carrément tendance…
• Et comme le dit si bien M. Attali (voir lien), « ne gâchons pas notre plaisir » : le bonheur de croire est parfois inestimable.
 
Marine Gianfermi
Sources :
Le Monde.fr
L’express.fr

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Pub Biomen, un shampoing
Publicité, Société

« Biomen : une publicité 100% mauvais goût »

 
Et non vous ne rêvez pas! Il ne s’agit pas d’une association douteuse d’images, mais réellement de clichés tirés d’une publicité diffusée depuis une semaine sur la télévision turque. Dans ce spot, la marque Biomen détourne des images du Führer doublées en turc et sous-titrées en allemand, pour vanter les mérites de son shampooing “100% réservé aux hommes”. « Si vous ne portez pas une robe de femme, vous ne devriez pas non plus utiliser son shampoing » clame le Führer en tapant du poing devant une foule en délire. Lors de sa diffusion, ce spot a suscité l’indignation d’associations luttant contre l’antisémitisme qui ont demandé son retrait immédiat.
Cette publicité est particulièrement insultante et de mauvais gout. Ici, le raisonnement est le suivant : tout d’abord il est établi que l’achat du shampooing est seulement l’affaire des femmes et que, par défaut, les hommes n’utilisent pas leur propre shampooing. Première conclusion : les hommes n’achètent pas de shampooing. Il est vrai que les marques s’adressent en général plutôt aux femmes qui sont les premières consommatrices de produits d’hygiène et de cosmétiques, mais depuis une dizaine d’années, le marché s’est ouvert aux hommes. Ensuite il semblerait que le choix du shampooing fasse partie de ce qui caractérise les femmes, comme la robe, le maquillage ou encore le soutien-gorge. Donc se laver les cheveux avec le shampooing de sa femme ferait de l’homme une femme. Dans ce cas, pourquoi ne pas bientôt proposer du savon masculin, de la lessive masculine ou des aspirateurs 100%  réservés aux hommes ?
Certes, le message de cette publicité s’adresse aux hommes, mais il ne faut pas oublier le cœur de cible secondaire : les épouses qui achètent pour leur mari ou les mères qui achètent pour leur fils. Comment une femme peut-elle se sentir séduite par ce genre de discours ? Il semblerait que Biomen ait volontairement fait le choix de s’amputer de l’adhésion des femmes en favorisant « l’humour » car oui, il s’agit bien d’humour ici !
Le choix du personnage est également discutable. Pour quelle raison la marque Biomen a-t-elle choisi d’associer son image à la personnalité certainement la plus haïe de toute l’Histoire de l’Humanité, au lieu des habituels acteurs ou joueurs de football ? Apparemment, Hitler était un homme, un vrai. Peu importe les millions de morts causées par l’idéologie nazie, peu importe la barbarie dont elles ont été les victimes, peu importe les traumatismes de la guerre, c’est ça être un homme et un homme se lave les cheveux avec du shampooing d’homme. On en est revenu à l’homme des cavernes et sa massue, qui hurle pour faire fuir ses adversaires.
La publicité se doit de séduire sa clientèle, non de l’insulter ni de la stigmatiser. Elle doit être plaisante et on doit pouvoir s’y assimiler. Biomen a fait le choix de jouer sur l’aspect macho des hommes et ce qui lui semble être la définition de la virilité, et pourtant, quand on voit ce spot, que l’on soit un homme ou une femme, on ressent un rejet immédiat. Qui a envie d’être associé au plus tristement célèbre meurtrier de masse ? Ici, l’aspect séduction a totalement été mis de côté au bénéfice de la stratégie de buzz.
Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, l’image d’Hitler a souvent été détournée dans les campagnes de publicité afin de susciter l’intérêt des consommateurs. Il semblerait que ce soit la stratégie adoptée par Hulusi Derici qui a réalisé cette publicité ; il se justifie dans le magazine Marketing Turkiye : « Si les gens parlent de la publicité pour un produit, cela fait exister le produit ».  Cependant, le Führer reste un personnage hors du commun, qu’il faut savoir prendre avec précaution. Il est dangereux de le présenter dans une pub comme un personnage sympathique. Hulusi Derici ajoute : « s’ils ne comprennent pas la blague, c’est leur problème. » L’agence publicitaire refuse de supprimer la vidéo, affirmant que «le message du commercial était plein d’humour». Une bonne blague qui ne risque pas de faire Führer…
 
Camélia Docquin

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Com & Société

Du jamais vu dans l’histoire des palaces parisiens

 
Paris, qui jouit d’un rayonnement international, est le passage obligé pour les grandes marques de luxe qui cherchent à s’imposer sur le marché. Depuis 2010, l’arrivée du Shangri La, du Mandarin Oriental, la réouverture du Raffles Royal Monceau ainsi que l’ouverture prévue en 2013 du Péninsula, bouleversent l’échiquier du marché de l’hôtellerie de luxe. En un peu plus de 2 ans, Paris aura été le théâtre de nombreux changements. Quatre groupes hôteliers asiatiques ont pris leurs quartiers à Paris, amorçant ainsi leur implantation en Europe. Aiguisé par ces nombreuses ouvertures et audacieuses rénovations, le clan des sept (le George V, Plaza, Meurice, Crillon, Ritz, Bristol et Fouquet’s) se prépare à une lutte sans merci. La concurrence se joue plus que jamais sur le service, les compétences et les ressources humaines.

Les titans de l’hôtellerie asiatique qui arrivent sur le terrain concurrencent les prestigieux établissements historiques parisiens et cette émulation entraîne un repositionnement des acteurs. À cela s’ajoute une redistribution des cartes qui se fait dans un périmètre restreint. Le Peninsula dorénavant presque voisin du Raphaël pose ses valises avenue Kléber. Etant pour la plupart situés dans le triangle d’or du 8ième arrondissement, les hôtels de luxe se livrent une concurrence d’autant plus dure. Les fleurons de l’hôtellerie de luxe cherchent donc tous à se repositionner, à affirmer leur identité et se différencier en recrutant le personnel le plus qualifié. Emerge alors un problème crucial, celui de gérer ces nouveaux besoins en ressources humaines.
À l’aune de cette nouvelle ère du marché de l’hôtellerie, la tension se fait donc ressentir. La chasse au recrutement n’a jamais été aussi tendue. Dans un petit monde où tout le monde se connaît très bien, c’est la cooptation et le réseau informel qui prime. Le bouche à oreille est rapide, les offres du milieu circulent rapidement et les DRH et les équipes dirigeantes se battent pour conserver leurs équipes qui reçoivent sans cesse de meilleures offres. Le va-et-vient incessant des tops managers et des chefs entre les grands hôtels est désormais banal. C’est au meilleur offrant et il n’est pas rare qu’un grand chef quitte son poste pour rejoindre l’égide adverse. Ainsi, les géants asiatiques, sans pitié, n’hésitent pas à aller débaucher des employés de palaces concurrents. Paris n’est pas la seule concernée : l’Europe dans son ensemble risque d’être affectée par ce jeu de chaises musicales.
Pour contrer la concurrence grandissante sur le marché, les recrutements n’ont jamais été aussi exigeants. Mais les recruteurs, avec une demande d’expérience et d’expertise toujours plus élevée, se retrouvent face à une pénurie de candidats adéquats. À cela s’ajoute aussi un vivier de candidats restreints. Le candidat idéal, avec d’excellents acquis professionnels, des expériences significatives à l’étranger et un savoir-être accompli, se fait rare. D’où les tensions entre les anciens et les nouveaux hôtels, qui s’arrachent les meilleurs. Dans ces conditions, la gestion des ressources humaines est un véritable enjeu auquel les professionnels de l’hôtellerie sont confrontés. C’est pourquoi de plus en plus de DRH font appel à des cabinets privés ou des chasseurs de tête aux techniques et aux méthodes RH très structurées afin de pallier cette fragilité du recrutement. La concurrence venue d’Asie fait mal et s’installe plus ou moins insidieusement. Le défi est lancé, reste à voir comment les Français vont faire face à ces revirements stratégiques. À voir aussi, la capacité des tops managers, face aux géants chinois, à mener le changement et à s’adapter au marché en mutation.
 
Rébecca Bouteveille

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Jakadi : tous au ski !

 
Même si bien moins médiatisé que le sacro-saint football, Jacques nous a conseillé dernièrement un autre type de sport : la glisse.
Du 14 au 16 mars, à Tignes, ce sont déroulés les Winter X games 2012 pendant lesquels de grands champions, pourtant inconnus en France, se sont affrontés lors d’épreuves de ski, de snowboard ou encore du célèbre snowmobile… Vous faites peut-être partie, comme moi, des étrangers à ces disciplines mais cela n’est pas le cas de tout  le monde : l’édition 2012 a attiré 103 600 personnes pendant ces trois jours.
Mais ce ne sont pas les résultats sportifs qui m’intéressent aujourd’hui. C’est plutôt la couverture médiatique de l’événement réalisée non pas par un journaliste, non pas par une marque mais par les deux ! En effet, le journaliste Clément Gargoullaud, à travers des vidéos, a couvert cet événement pour Jeep, le constructeur automobile partenaire et sponsor des Winter X Games. Une manière audacieuse d’allier publicité et  journalisme, qui avouons-le, a meilleure réputation que la première. C’est aussi une nouvelle preuve qu’il n’y a pas d’information sans communication, ou de communication sans information. Au choix.
Comment marche cette alliance ? C’est très simple : le sérieux journaliste spécialiste des sports extrêmes nous livre de son œil d’expert et  professionnel, une série de vidéos pour nous faire connaître et vivre ses trois jours de  glisse. On ne remet en question aucune info et on ne critique pas. Ben non, c’est de l’information journalistique. On oublierait presque qu’il le fait du point de vue de Jeep. Enfin, on pourrait l’oublier si les vidéos n’affichaient pas constamment le logo de la marque. Mais il faut reconnaître que le tour est subtil. Quelques apparitions de 4×4 dans les vidéos qui nous montrent à quel point elles s’adaptent aux différents terrains, un rapide plan sur une banderole Jeep mais aussi la forme classique du reportage. Cette publicité est alors mieux reçue dans les différents médias.
Evidemment, quel meilleur moyen de voir les photos et vidéos produites par Clément Gargoullaud que d’aller sur la page facebook de l’évènement ? Et cette page n’est pas celle de l’événement ou du journaliste, c’est bien celle de Jeep France L’occasion d’en apprendre un peu plus sur la marque et de découvrir que l’on a vraiment besoin d’un de leur fabuleux modèle, oui même si l’on n’habite pas dans la montagne enneigée ou dans un désert de sable.
Bref (pour plagier un autre événement à la couverture médiatique étonnante) journalisme et publicité peuvent s’allier efficacement même si, une fois de plus, cette efficacité semble être plutôt bénéfique pour la marque que pour l’amateur de snowboard en route pour le magasin Jeep le plus proche.
 
Manon Levavasseur
Sources :
jeep.fr
influencia.fr
xgames.net

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