Pochette Pink Floyd - Femmes peintes
Société

Votez Pink Floyd

En tant que grande fan des Floyd (merci papa), je me devais de décortiquer les asymétries qui les entourent ces derniers temps. Rien de nouveau sous le soleil : Pink Floyd, ce sont deux cents millions d’albums vendus à travers la planète, dont quarante-cinq millions pour The Dark Side of the Moon en 1973, quatorze albums studio, trois albums live, et de multiples récompenses.
Mais, être considéré comme l’un des groupes les plus avant-gardistes ne signifie pas accepter sans compter les nouvelles pratiques de consommation de la musique… jusqu’à ce que ces dernières servent une de leurs plus grosses campagnes de communication. Je dis bien « campagne » puisque c’est le terme employé par EMI Music, l’écurie des Floyd depuis 1967 (rachetée il y a peu par Vivendi Universal).
On se souviendra de la bataille judiciaire de 2009-2010 menée par nos british préférés contre leur maison de disque, qui avait débouché sur la victoire du groupe. Pink Floyd refusait la vente de leurs œuvres sous toute autre forme que leur version originale. Il y avait alors discorde quant à l’application des termes du contrat signé entre les deux parties en 1999, remis en cause avec l’arrivée des plateformes de téléchargement sur le net. Faute d’entente, certains albums et chansons, postérieurs à The Dark Side of The Moon, avaient été retirés d’iTunes, Amazon, Music Me, entre autres. Si la principale raison devait être avant tout financière (la vente des titres à l’unité est plus avantageuse pour la maison de disque que pour le groupe), l’argument avancé par les avocats des Floyd n’était autre que la cohérence de ces « albums-concepts ». On peut aisément le comprendre, il suffit de réécouter Animals ou The Wall.
Seulement Pink Floyd est une véritable poule aux œufs d’or pour EMI Music. Ainsi, apprenait-on le 4 janvier dernier qu’un accord a finalement été signé. Exit l’épisode judiciaire. La major est désormais autorisée à proposer à la vente les titres indépendamment des albums. Je m’interroge : est-ce un hasard si ce rebondissement se profile peu avant le lancement du projet de remasterisation? Absolument pas, puisque celui-ci s’est décidé dans le même temps. Digne d’une élection présidentielle destinée à rallier les partisans et à en démarcher de nouveaux, cette campagne « Why Pink Floyd » planifie la sortie des différents coffrets selon un savant programme, du 26 septembre dernier au 27 février 2012, pleine période de fêtes. En bref, un gros coup marketing qui fera le plaisir des plus grands fans.
Pour l’occasion, un plan de communication impressionnant a été développé : un site internet participatif (offrant aux fans l’opportunité de répondre à la fameuse question « Pourquoi Pink Floyd ? »), une newsletter, un teaser diffusé sur le net,

une publicité pour la télévision britannique,

une chasse « aux trésors » – ou plutôt « aux affiches » reprenant les pochettes des 14 albums – dans divers villes du Royaume Uni, ou encore, la création d’une application officielle. Le jour du lancement, on pouvait également voir voler le fameux « cochon gonflable », Algie, au-dessus de l’usine désaffectée de Battersea (Londres) : un clin d’œil au visuel de l’album Animals.
Bref, si avec tout ça, vous ne trouvez pas encore de bonnes raisons de vous précipiter sur ces petits bijoux, monsieur le directeur d’EMI, pourquoi Pink Floyd? « Parce que leur musique est sans égal et que ces merveilleuses nouvelles parutions permettront aux fans de redécouvrir leur incroyable héritage et montreront qu’on ne se lasse jamais d’apprécier une telle qualité artistique ».
Alors à quand la signature d’une convention avec Deezer afin que nous puissions également apprécier cette qualité artistique en streaming ? Prochaine étape ?
 
Harmony Suard
Crédits Photo : ©Tony Mai/Phyllis Cohen/Pink Floyd

2