Sexisme pub
Les Fast

Sexiste ou non ?

 
“Sexisme (nm): attitude de discrimination fondée sur le sexe.” Trouvez-vous cette publicité pour un match de football sexiste ?
Je ne la considère pas comme telle. Pourtant, sur le blog Stéréopub, 76,8% des internautes pensent le contraire…
Aïe ! Suis-je « macho » ? Créé par 6 étudiants en journalisme de Sciences Po, Stéréopub nous montre plusieurs publicités de 1960 à nos jours. Face à elles, 3 choix s’offrent à nous : soit nous considérons la pub « sexiste », « non sexiste », ou cliquons sur le bouton « sans avis ».
Ainsi, il peut arriver que notre avis ne soit pas partagé par la majorité. Le sexisme serait donc une question de perception et d’interprétation. Et ces dernières ne sont pas dues à une question de genre puisque les publicités catégorisées comme sexistes sont l’avis autant des femmes que des hommes. Les internautes qui ont trouvé la publicité du Stade Rennais « sexiste » sont composés à 53,7% de femmes, et à 46,3% d’hommes. Ce qui est également intéressant, c’est l’évolution de la publicité de 1960 à nos jours. Même si les mœurs de la société ont considérablement évoluées, certains codes publicitaires d’antan subsistent encore aujourd’hui.
Ce blog permet aussi de faire un constat : il est aujourd’hui devenu extrêmement complexe pour les annonceurs de communiquer. Chaque mot, chaque insinuation peut très vite aboutir à une polémique. Toute publicité peut se retrouver accusée (à tort ?) de sexisme. Alors, discriminante la pub du Stade Rennais ?
 
Pierre Halin
Sources :
Stéréopub
Libération

Les Fast

Le ridicule : arme fatale contre le sexisme ?

 

A l’occasion de la journée mondiale de l’égalité salariale du 18 mars, l’agence Mortierbrigade a réalisé deux vidéos « ridicules » pour le compte du parti politique belge Zij-kant. Dans la lignée des Femmes Socialistes, ce parti souhaitait sensibiliser le public à propos d’une réalité peu reluisante : en moyenne, les femmes belges gagnent 21% de moins que les hommes.
La campagne s’appuie sur des clichés aberrants, non pas sexistes mais racistes ou intolérants de manière générale. Le point central de cette campagne est en effet de dénoncer le « ridicule » par la comparaison. La démonstration se veut simple : on met en scène à l’écran un cliché grotesque avec une voix off complaisante pour expliciter les choses. Rires ou malaise – du moins on l’espère, le spectateur constate le ridicule de la chose. La première vidéo reprend des clichés racistes tels que « les noirs ne savent pas conduire », « les noirs sont fainéants » tandis que la deuxième s’en prend aux personnes obèses, avec toujours pour conclusion de la voix off : « et c’est pour ça qu’ils devraient être moins payés. »
Apparait alors le message final : « Ridicule ? Pas plus que de payer les femmes 21% de moins que les hommes. »

Ridicule VS Choc ?
Le ressort du ridicule est de rendre risible une personne ou une situation et, à ce titre, ces deux courtes vidéos sont efficaces. Pour autant, le ridicule n’est pas choquant, contrairement aux usages courants de « Vidéos Choc anti X » de campagnes de sensibilisation qui ont recours à cette méthode dans le but de faire réagir toujours plus de monde. C’est là un bon moyen de faire le buzz et de créer une communication virale autour du message que l’on a à faire passer via les réseaux sociaux. Tant que le but reste de sensibiliser l’opinion publique à un enjeu important, le choquant peut aller loin. Nous pouvons penser par exemple à la très dérangeante et donc assez efficace vidéo 14 millions de cris, avec notamment Alexandre Astier et Julie Gayet en acteurs principaux, contre le mariage forcé de jeunes enfants.
Ceci nous amène à interroger l’impact de ces deux vidéos sur la perception de l’écart salarial hommes-femmes, mais aussi à questionner la banalisation des contenus « choc » des campagnes de sensibilisation. Les clichés exposés à l’écran font sourire ou provoquent tout au plus un sévère froncement de sourcil. Il semble que la réaction provoquée chez le spectateur ne soit pas l’indignation souhaitée à la hauteur de l’injustice dénoncée. Mais aborder le plafond de verre et trouver des solutions concrètes est difficile tant que l’ampleur de la situation n’est pas révélée au grand public. On observe justement un mouvement de protestation contre ces inégalités dont on ne peut que louer la démarche. Néanmoins, l’impact apparaît faible tant l’aspect « ridicule » et comique prend le pas sur l’indignation. A titre de comparaison, la précédente vidéo de Mortierbrigade sur ce sujet a rencontré un franc succès et jouait davantage sur l’aspect « choc » pour faire passer le message.

Une question demeure alors : avons-nous absolument besoin d’images « CHOC !» pour réveiller notre conscience et nous engager dans la lutte contre les inégalités ?
 
Rimond Leïla
Sources
LaRéclame
CreativeCriminals

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Flops

Numericable : bad buzz for good business ?

 
Il est là, le tout premier buzz de cette jeune année 2014. C’est l’opérateur et fournisseur d’accès Numericable qui l’a créé en présentant le lundi 6 janvier dans le quotidien 20 Minutes sa nouvelle campagne de publicité à l’humour douteux et qui, surtout, flirte avec le sexisme.
Pour commencer l’année… une pub aux frais des femmes !
Afin d’inciter ses consommateurs (qu’apparemment Numericable ne jugerait qu’être masculins) à choisir sa fibre optique de haut débit, le câble-opérateur joue d’une manière osée sur les clichés de genre. En effet, en adoptant la fibre optique (fournie par le leader du marché auto-proclamé) Numericable promet : « Téléchargez aussi vite que votre femme change d’avis ». Un énoncé périlleux qui a immédiatement déclenché une vague d’indignations et qui s’est vu fortement discuté sur Twitter.

Même Le Petit Journal s’est emparé de l’actualité pour railler à sa manière les créateurs de cette pub à caractère misogyne.
Le basculement: les hommes « soudainement » mis à l’honneur
Plus tard dans la journée, Numericable présente sur son compte Twitter « en avant-première » la suite de la campagne « que vous pourrez retrouver en version papier dès mercredi ». Cette fois-ci, la fibre Numericable permettra de « télécharge(r) aussi vite que votre mari oublie ses promesses » et ce sont donc maintenant les hommes dont on se sert pour tenter de faire rire.

Pourquoi une publicité en deux temps ?
Pourquoi Numericable n’a-t-il pas publié ces deux annonces en mêmes temps ? On peut y voir deux théories : si l’on en croit l’opérateur, cette campagne serait le fruit d’une stratégie de communication réfléchie, misant sur le buzz et l’indignation de sa première pub pour pouvoir ensuite lancer la deuxième contre-affiche, cette fois-ci en se moquant des hommes. En agissant ainsi, Numericable a de toute évidence cru bien faire bien faire et être équitable. Sauf que la parité dans le sexisme, ce n’est pas mieux que le sexisme en soi, mais le même principe : l’un comme l’autre reste dégradant, terriblement stéréotypé et surtout ennuyeux. Car faire de la publicité en jouant sur les clichés hommes-femmes n’est pas vraiment novateur, c’est avant tout un concept publicitaire archaïque et dépassé… surtout en 2014.
C’est en cela que l’autre théorie, celle du rattrapage de dernière minute, reste pour beaucoup la plus plausible comme en témoigne ce tweet :

Cela paraît surtout suspect du fait que Numericable ait prétendu auprès de la presse que « ce deuxième volet était prévu », mais sans pour autant vouloir en apporter la preuve ni fournir davantage d’explications.
Un véritable « bad buzz » ?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette polémique a été inefficace pour le fournisseur d’accès à Internet. Au contraire, Numericable a réussi à faire (beaucoup) parler de lui et cela sans grand renfort d’investissements publicitaires (se cantonnant seulement à une annonce dans le 20 Minutes et une deuxième sur Internet). Tous les médias ont voulu sauter sur l’occasion pour informer leurs lecteurs de cette publicité révoltante, et ils se sont même quasiment trouvés « contraints » de continuer de publier des articles à propos de la suite que prenait cette campagne. Comme l’illustre cette accroche commerciale « deux articles pour le prix d’un », Numericable aura donc à la fois profité du buzz ainsi que de la réinterprétation de son message. Des points de vue communicationnel et économique, une tactique plutôt maline, même si celle-ci n’était probablement pas réfléchie.
Morale de cette histoire ?
Cette communication est sans doute osée mais elle l’est surtout dans un contexte où le Gouvernement français a comme objectif de lutter contre le sexisme sur le Web et où l’Assemblée Nationale travaille sur l’égalité hommes-femmes dans la société. Eventuellement aussi une raison pour laquelle cette campagne fait tant parler d’elle.
Quoiqu’on en dise, une chose est sûre : si l’objectif de toute campagne est de faire parler d’une marque, celle-ci risque d’être une nette réussite pour Numericable. En revanche, si on en parle bien, c’est une autre question.
Teresa Spurr
Sources :
Leplus.nouvelobs.com
L’Express
Le Point
Le Huffington Post
Numerama.com
Canalplus.fr
assemblee-nationale.fr

UN Women
Les Fast

La femme selon Google ?

 
Google serait-il sexiste ? C’est ce que semble sous-entendre la dernière campagne publicitaire de UN Women (Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes), réalisée par l’agence Memac Ogilvy & Mather Dubai.
 Les différentes affiches de la campagne mettent en scène quatre visages de femmes. Si ces dernières représentent visiblement les femmes des quatre coins du monde, elles ont en commun le fait d’être bâillonnées par le célèbre moteur de recherche.
 La campagne réalisée touche un point qui demeure sensible aujourd’hui, et ce d’une façon d’autant plus percutante qu’elle s’appuie sur des preuves. Ainsi, « les femmes ne devraient pas » se trouve complétée par : « avoir de droits » , « voter » ou « travailler. »

  À une époque où Internet est gage d’une liberté d’expression qui semble illimitée, on voit ici que la diffusion et le partage des idées peut également amener à cristalliser certaines représentations sociales, quitte à faire taire ceux et celles qui sont directement concernés.
Internet crée un lien entre tous, au-delà des différences ethniques et culturelles. On abolit les frontières, on fait valoir des valeurs, des opinions. Pour le meilleur et pour le pire, semble préciser UN Women.
 Cependant, peut-être faudrait-il éviter de condamner le géant américain d’emblée. Derrière les machines, ce sont bien des hommes (et des femmes) qui nourrissent le moteur de recherche. Google tient ici le rôle du méchant mais ne fait que refléter les requêtes les plus courantes.
 Alors, véritable dénonciation de la part de UN Women ou simple mise en lumière frustrante d’un cercle vicieux qui n’en finit (toujours) pas ?
 
Annabelle Fain
Sources :
Unwomen.org

Crédits photos : Memac Ogilvy & Mather Dubai

Agora, Com & Société

Vous avez-dit sexisme ?

Le 25 avril prochain, le jugement sera rendu pour le rappeur Orelsan traduit en justice pour une énième affaire « d’incitation à la haine » et « injures ». La plainte déposée par plusieurs associations féministes, dont Les Chiennes de Garde, devant le tribunal correctionnel de Paris, n’a pour le moment abouti qu’à une relaxe, mais l’affaire n’est pas encore enterrée. On se souvient de la polémique suscitée en 2011 par le titre rendu tristement célèbre par ces débats « Sale Pute ». Le combat des féministes perdure mais pour le public cela reste une discorde nauséeuse. Aurélien Cotentin, alias Orelsan, faisait à l’époque couler l’encre de nombreux titres. La chanson, purement fictionnelle, lui aura tout de même couté cher : interdit de séjour dans de nombreuses salles de concerts, évincé de divers festivals et interdiction d’interpréter ce morceau jusqu’à nouvel ordre. La polémique lui aura certes, offert une certaine notoriété mais le chanteur est tout de même pris pour cible et devient le bouc émissaire d’une lutte qui ne semble finalement pas le concerner.
Aujourd’hui ce sont huit de ses chansons qui sont concernées par la plainte du collectif féministe contre le viol, la Fédération Nationale Solidarité Femmes, l’association Femmes solidaires, les Chiennes de garde et le Mouvement français pour le planning familial. Une attaque de front pour mieux faire tomber le rappeur. Réduire huit petites phrases de textes fictionnels, dont la part de sens critique ou de second degré n’est pas à exclure, semble donc un peu facile et triste aussi ; l’ensemble du travail d’un auteur ne se résume pas à 3% de ses chansons sorties de leur contexte. Une polémique inutile qui pointe pourtant des questions plus profondes et plus encrées dans l’inconscient collectif franco-français. Bouc émissaire d’une réalité pourtant plus complexe. La lutte, si légitime soit elle, des Chiennes de garde, semble pourtant parfois prendre pour cible les mauvais protagonistes, à l’image de ce rappeur dont les textes fictionnels sont clairement à mettre à distance (et c’est précisément ce que fait le public, pas si bête). La question des cibles semble primordiale dans la lutte féministe. On ne peut pas parler à tout bout de champ de sexisme lorsque le second degré ou la fiction est de mise. En revanche, le sexisme ordinaire, lui, perdure. Il continue presque paisiblement son bout de chemin. Sexisme ordinaire vs combat « moral », à l’image de l’expérience de Damien Saez : les affiches de l’album « J’accuse », en 2010, placardées dans les souterrains du métro parisien avaient été rapidement retirées (l’affiche, dite « sexiste », présentait une jeune femme nue, aux talons hauts, posant langoureusement dans un chariot de supermarché, voir photo ci-dessus). Il a une nouvelle fois été censuré par la RATP Medias Transports jugeant les derniers élans artistiques de la pochette de l’album Miami trop scandaleux (voir l’image ci-dessus).  Mais si les tentatives de prises de position de certains artistes restent incomprises, les véritables clichés sexistes, diffusés plus ou moins subtilement, s’inscrivent durablement dans le paysage médiatique.
Combien d’affiches présentes dans ces mêmes souterrains dévoilent sous notre nez les corps dénudés, des femmes aux postures « suggestives », des ménagères soumises ?
Question bête. On retrouve aujourd’hui une forme de sexisme faussement masqué partout, et sans complexe dans les jeux vidéos, voir l’article de Virginie Béjot à ce sujet.
Nos affiches, nos couloirs de  métro, nos publicités, nos jeux vidéos etc. C’est dans une sorte d’enlisement général dans un ensemble de clichés héréditaires que nous stagnons. À l’heure du mariage pour tous, il serait de bon ton de faire reculer quelque peu le sexisme invisible qui nous impose encore des plafonds de verre et autres comportements moyenâgeux. Mais si les français sont de plus en plus sensibilisés aux questions du sexisme, il s’avère que seulement 12% repèrent les stéréotypes sexistes dans une publicité, un sondage réalisé à l’occasion d’une étude menée par l’institut de sondage Mediaprism qui révèle clairement le problème des enjeux actuels de la lutte féministe. En ce qui concerne les campagnes de communication justement, on ne peut plus s’attaquer aux faux problèmes. Lorsqu’un artiste comme Damien Saez pointe clairement le problème avec un angle critique, on devrait se réjouir plutôt que de se désintéresser des réalités faussement masquées, qui continuent de propager un sexisme invisible.
Margot Franquet
Sources :
Capucine Cousin, « Le sexisme invisible », Stratégies n° 1714 7/03/2013
Clémentine Mazoyer, 14/03/2013, http://lci.tf1.fr/culture/musique/la-pochette-de-l-album-de-damien-saez-refusee-par-des-annonceurs-7880729.html
Alice Moreno, 21/03/2013, http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/la-justice-juge-le-sexiste-orelsan_1233740.html#article_comments