Société

 Journalisme participatif et communication : le Club Med entre deux eaux

A l’issue de l’OPA la plus longue de l’histoire de la Bourse française (plus de dix-huit mois), le Club Méditerranée a été acheté, le 2 janvier dernier, par le conglomérat chinois Fosun. Si la décision de l’autre acheteur potentiel, l’homme d’affaires italien Andrea Bonomi, de retirer son offre a été saluée par la direction du Club et a suscité l’ire du Front National, ce sont les stratégies de communication à l’éthique douteuse mises en place à l’occasion de ce rachat qui nous intéressent ici. En effet, le Journal du Net a repéré sur plusieurs sites d’information en ligne (Challenges, Les Echos-Le Cercle, Mediapart, le Journal du Net lui-même…) des articles défavorables à l’offre de M. Bonomi, écrits non pas par des journalistes, mais par des contributeurs extérieurs à leurs rédactions sous la forme de tribunes libres.
Après enquête, le JDN a déterminé que ces tribunes étaient écrites sous de faux noms : leurs auteurs sont des prête-nom créés pour l’occasion, avec des profils LinkedIn ou Google+ et de faux diplômes. Il semble donc qu’une des parties prenantes de l’OPA ait tenté d’influencer les marchés en utilisant la désinformation. La tentative de désinformation, si elle est prouvée, pourrait faire l’objet d’un procès pour diffamation et faux et usage de faux, et d’une sanction de l’AMF qui contrôle les opérations boursières. Le propos de ce billet n’est pas d’accuser, qui plus est sans preuves, mais d’interroger à la lumière de cette affaire la pratique des espaces de libre expression sur Internet et les limites éthiques des relations publiques.

L’une des tribunes incriminées
L’expression libre, pour le meilleur et pour le pire
Pour les médias en ligne, les tribunes libres et autres blogs participatifs répondent à plusieurs objectifs : proposer des contenus plus nombreux et plus variés face à une concurrence pléthorique, donner la parole à des contributeurs experts sur des sujets pointus, intéresser leur lectorat par l’effet de proximité ou encore expérimenter des formes de journalisme citoyen. Comme l’illustre l’affaire du Club Med, ces formes d’expression sont plus vulnérables à la manipulation que les articles publiés par des journalistes, dont les auteurs sont connus, les sources vérifiées et qui mettent directement en jeu la crédibilité du média qui les publie. Mais pour l’usager des médias en ligne, il n’est pas toujours évident de différencier les deux types d’articles : Les Echos-Le Cercle ou les blogs du Journal du Net utilisent par exemple la même charte graphique que les articles de la rédaction de ces médias. En conséquence, les contributeurs invités profitent de la réputation du média qui les accueille, sans être soumis aux mêmes contraintes.
En outre, il est manifestement difficile pour les rédactions de contrôler l’ensemble des articles publiés sur leurs plates-formes participatives : la subjectivité de leurs auteurs est assumée, elle fait notamment partie intégrante de la forme éditoriale du blog. Dans ces conditions, et en particulier lorsqu’un article traite d’un sujet complexe, comment déterminer s’il est volontairement manipulateur ou seulement l’expression d’une opinion tranchée ? On peut supposer que dans l’hypothèse d’une manipulation, les rédacteurs, conseillers en communication rompus au style journalistique, soient habiles à camoufler leur intention trompeuse.
Relations publiques contre journalisme ?
La deuxième question soulevée par cette affaire concerne justement le rôle des relations publiques dans la production de l’information. Tout comme la publicité, pour capter l’attention et l’intérêt de ses cibles, cherche à adopter l’apparence de l’information ou du divertissement (le publi-rédactionnel en est un exemple), les relations publiques, qui promeuvent des intérêts politiques ou économiques, agissent avec davantage d’efficacité si les prises de positions qu’elles défendent sont relayées par des sources non intéressées, comme des journalistes, des blogueurs ou des experts. L’anonymat et l’identité virtuelle caractéristiques d’Internet permettent donc à des professionnels peu scrupuleux, comme le montrait une série d’articles du Journal du Net parue en 2013, de créer des experts fictifs qui bénéficient d’une présomption d’objectivité.
Mais cette pratique, outre sa légalité douteuse, est doublement néfaste sur le long terme aux professionnels de la communication. D’abord parce qu’elle nuit à la confiance des usagers dans les médias sur Internet, alors que ceux-ci souffrent encore d’un déficit de crédibilité notamment face à la presse papier ; mais aussi parce qu’elle court-circuite les journalistes, interlocuteurs privilégiés des relations publiques, accroissant leur méfiance vis-à-vis des métiers de la communication.
Emmanuel Bommelaer
 
Sources :
Challenges.fr 1 & 2
Journaldunet.com 1, 2, 3 & 4
bfmbusiness.bfmtv.com
Lemonde.fr
Tns-sofres.com
Lefigaro.fr

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Politique

Propagande et censure: les médias russes pestiférés par leur nouvelle législation

Encadrement des médias traditionnels 
Depuis le 1er janvier 2015, CNN a cessé d’émettre en Russie. Avant elle, d’autres médias ont mis les voiles : RFI, Voice of America, BBC… Leur point commun ? Ce sont tous des médias étrangers. Alors pourquoi ? C’est la faute d’une nouvelle loi sur les médias qui a été adoptée en octobre 2014. Elle interdit à toute personne physique ou morale étrangère ou de double nationalité de posséder plus de 20 % du capital d’un média émettant en Russie : une mesure visant à limiter la participation étrangère dans les médias russes.

Au-delà du contenu de cette loi, les conditions dans lesquelles elle a été adoptée sont aussi significatives. Déposée le 17 septembre sans la consultation de la population, la loi a été adoptée par la Douma (la chambre basse du parlement russe) au bout de neuf jours, le 26 septembre – soit pratiquement sans débat – et ratifiée le 15 octobre. Nous sommes donc dans une adoption éclair qui est à recontextualiser dans les relations tendues qu’entretient la Russie avec le reste du monde depuis l’annexion de la Crimée.
Encadrements des nouveaux médias
Au-delà du contrôle grandissant sur les médias traditionnels, de nouvelles mesures touchent aussi les médias numériques. Depuis le 22 avril 2014, tout blogueur qui atteint le seuil des 3 000 visiteurs a pour obligation de se faire indexer auprès des autorités et devient autant responsable devant le gouvernement que n’importe quel média institutionnalisé. Depuis le 4 juillet 2014, les acteurs étrangers de l’Internet ont pour interdiction de stocker les données des utilisateurs russes en dehors du territoire. Une mesure qui a provoqué le départ des ingénieurs de Google le 12 novembre 2014.
Parallèlement, l’affaire Navalny révèle des demandes de censure de plus en plus nombreuses de la part du Kremlin aux géants de l’Internet. Un procès est actuellement en cours contre Alexei Navalny, avocat et opposant politique russe, et son frère Oleg. Ils sont accusés d’avoir détourné l’équivalent de 400 000 € à la société Yves Rocher Vostok, qui affirme n’avoir subi aucun préjudice de son côté. Le 19 décembre une page Facebook a été ouverte pour appeler à un rassemblement de soutien à Alexei Navalny. Mais dès le lendemain, la page était bloquée. Cette mesure répond à la demande du procureur général, qui s’en réfère de nouveau à une nouvelle loi. Celle-ci date du début de l’année 2014 et permet à tous les procureurs d’ordonner le blocage de sites sans avoir eu de mandat préalable de la cour, pour raisons de soupçons d’extrémismes, ou d’incitation à manifester contre l’accord des autorités. Twitter, Google et Youtube affirment avoir reçu des requêtes similaires, sans y avoir répondu. Pour se rattraper, Facebook a refusé de bloquer la nouvelle page de rassemblement qui a fleuri. Mais pour le blogueur Leonid Volkov, la censure menée conjointement par le procureur général, le Roskomnadzor (service de surveillance d’Internet et des médias traditionnels du ministère des télécommunications) et Facebook ont fait plus de bien que de mal au soutien à Alexei Navalny. 12 000 personnes avaient rejoint la première page Facebook du mouvement, censurée, tandis que la nouvelle compte plus de 15 000 adhérents.

 
De la propagande des uns
Selon Ilze Juhansone, représentante de la Lettonie à l’Union Européenne, la crise ukrainienne a créé un regain de propagande russe. Les chaînes russophones incitent à la haine des nationalistes ukrainiens et pratiquent la désinformation. Un reportage sur l’incendie d’Odessa, survenu en mai 2014 et qui a fait 40 morts contenait un message subliminal image par image : « L’incendie est le fait des ultra-nationalistes de Pravy Sektor » un groupe radical ukrainien. Un autre reportage, cette fois-ci sur le crash du vol MH17 arguait que ce Boeing de Malaysia Airlines avait été abattu par des avions ukrainiens.
Dernièrement, la chaîne russophone Inter a diffusé en Ukraine pour le soir du Nouvel An un concert en direct depuis Moscou avec des célébrités connues pour avoir publiquement affiché leur soutien à Vladimir Poutine dans le conflit avec l’Ukraine. Tel que le chanteur Yossif Kobzon qui a pris le parti des séparatistes du Donbass dont il est originaire.
A la censure des autres
Enfin, la propagande russe pousse les pays qui se considèrent victimes de celle-ci vers de plus en plus de censure. Cette stratégie n’est pourtant pas la bonne car elle va augmenter la défiance des communautés russes au lieu de capter son audience. En avril 2014 la Lettonie a interdit la diffusion de chaines russes sur son territoire. En juin, la Lituanie a suspendu pour trois mois trois chaînes de télévision russes. L’Ukraine de son côté multiplie les mesures : après la création un ministère de l’Information, malgré les critiques de l’Union Européenne, le pays a interdit 14 chaînes de télévision russes, a perquisitionné les bureaux du journal russophone Vesti situés à Kiev et interdit d’entrée sur le territoire une dizaine de journalistes russes. Concernant la chaîne Inter, le secrétaire du Conseil de défense et de sécurité nationale, Oleksandr Tourtchynov et le ministre de la culture Vyacheslav Kirilenko appellent à sa fermeture. Le conseil national de l’audiovisuel doit se réunir à la mi-janvier.
Marie Mougin
@mellemgn
Sources:
ITélé – CNN cesse d’émettre en Russie
Le Courrier de Russie – la participation étrangère dans les médias russes
Le Monde – la nouvelle réglementation sur les données personnelles des internautes russes
Le Monde – les ingénieurs de Google quittent la Russie
Politis – affaire Navalny
Développez – affaire Navalny et réseaux sociaux
Wall Street Journal – demandes de censure de la part de la Russie aux géants du Net
Euractiv – propagande russe en Lettonie
RFI – propagande russe en Lituanie
RFI – face à la propagande russe, l’Ukraine a recours à la censure
L’Expansion – en Ukraine une chaîne russophone menacée de fermeture
Crédits images:
Manifestation de soutien à Alexei Navalny (Associated Press)
Logos des principaux médias étrangers qui ont quitté le pays
Capture d’écran de la page Facebook censurée
 

meetic imperfections Fastncurious
Publicité et marketing

"Love your imperfections » : quand Meetic déclare sa flamme à vos défauts"

Une campagne étonnante qui rompt avec les topoï du genre
Lorsque l’on pense aux campagnes de publicité que nous proposent habituellement les sites de rencontre, ce sont de jeunes gens beaux, forts et intelligents qui se matérialisent immédiatement dans notre esprit. Jouant à fond sur l’idéal amoureux qui se traduit par le célèbre « un jour, mon prince viendra », ces entreprises nous offrent de rencontrer celui ou celle dont nous avons toujours rêvé, la personne parfaite qui n’a pourtant jamais croisé notre route. Et pour cause : elle n’existe pas. C’est bien ce que Meetic affirme avec sa nouvelle campagne « love your imperfections », qui met en avant les petits défauts qui nous rendent tous humains. Il ne s’agit plus ici de vendre du rêve, mais bien de lever le voile sur la beauté qu’il peut y avoir au sein de tout ce que la société a catégorisé comme négatif.
On peut donc observer un piètre danseur marcher sur les pieds de sa prétendante, une jolie jeune femme affirmer rechercher un homme dormant avec ses chaussettes… Qu’il s’agisse de la publicité destinée à la télévision ou des prints, le regard n’est jamais moqueur, mais on y trouve plutôt une incitation à l’attendrissement face à ces hommes et ces femmes, qui nous ressemblent plus que les mannequins idéalisés auxquels nous sommes accoutumés.

 
Une stratégie au long court : la disruption
Cette campagne, à la fois amusante et percutante, s’inscrit dans une stratégie au long court mise en place par Meetic, qui cherche à se démarquer face à la concurrence, rendue de plus en plus féroce par le florilège de nouvelles applications de rencontres tel que déjà évoqué sur ce blog. Quand Attractive World promet des rencontres pour « célibataires exigeants », que Tinder et Happn font reposer le choix d’initier une rencontre sur une ou deux photos de profil, c’est sur l’authenticité que choisit de se positionner Meetic, qui souhaite conserver sa place de numéro un français. Il s’agit d’accepter l’altérité et, plus que de les accepter, de voir dans les petits travers de l’autre autant de qualités qui lui confèrent un charme singulier. En creux, le site promet à ceux qui le choisiront des rencontres vraies, sans fard ou faux-semblants, contrairement à ses rivaux qui resteraient dans le superficiel.

C’est déjà dans cette optique que la marque avait lancé il y a quelques mois sa campagne « les gens n’attendent que vous », où l’on pouvait entendre les témoignages pleins d’autodérision de personnes ayant menti sur leur identité pour plaire aux autres. L’idée était lancée : soyez-vous-même, c’est ainsi que l’on vous aimera.

Et « les gens », cette notion floue qui à la pouvoir d’éveiller toutes les peurs sociétales, ces gens dont on craint qu’ils ne nous rejettent si l’on ne correspond pas à une norme dominante, c’est eux que Meetic démystifie ici. Stratégie intelligente, dans une période marquée par un retour au « normal » (pensons à la mode du normcore), et une critique de plus en plus acerbe des retouches photos, du maquillage et de la chirurgie esthétique. Cependant, la question de la sincérité se pose rapidement : les sites de rencontre sont-ils vraiment prêts à laisser l’idéal de côté pour ne plus vendre que de la normalité? L’attendrissant est-il le nouveau sexy ?
Décomplexante la nouvelle campagne Meetic ?
Si l’on se penche d’un peu plus près sur la campagne, on remarque très vite que tous les figurants ont des physiques différents: des petits, des maigres, des roux et des chauves… Un bon point pour la marque, qui ne se contente pas de s’attaquer aux défauts comportementaux, mais qui met aussi en exergue les différences physiques de chacun comme une force. On pourra arguer que toutes les personnes sélectionnées pour cette publicité restent physiquement attirantes. Mais dans l’univers des sites de rencontre où, nous l’avons vu, c’est toujours la dictature de la beauté qui prime, cette campagne reste un bon début, une manière de rappeler à chacun que les couples de la vraie vie sont constitués de gens comme vous et moi, qui sont trop petits ou trop ou grands et qui ont un besoin inexpliqué de dormir les pieds au chaud. Il est donc clair que cette campagne se démarque et retient l’attention. Meetic parvient à donner une image ouverte et moderne du site, tout en marquant les esprits par cette déclaration d’amour percutante à nos défauts. Alors finalement, comme dans la chanson bien connue de John Legend, on aurait presque envie de croire au pouvoir de séduction de toutes nos « parfaites imperfections ». (D’ailleurs, pour information, je suis petite et souvent en retard. Juste comme ça.).
Sarah Revelen
Sources:
Nuwave
La Reclame
Crédits images:
Facebook.com
Google.fr 1 & 2

3D zoom sur fnc
Société

Quand la science-fiction devient réalité !

 
Envoyer un outil par mail dans l’espace c’est possible ? Et bien oui.
Ce mois-ci, la NASA a envoyé les plans d’une manivelle par mail à la station spatiale internationale. Les équipes ont ainsi pu imprimer l’outil manquant grâce à une imprimante 3D. Cette innovation majeure met en exergue la rapidité de production, l’accessibilité croissante aux objets ainsi que de nombreuses possibilités que les marques semblent saisir de plus en plus.
Zoom sur les évolutions communicationnelles qui découlent de cette révolution technologique en marche vers toujours plus de personnalisation.
Barilla et TBWA intègrent la 3D
En effet, les marques ont saisi l’importance d’intégrer la 3D dans leur communication et redoublent d’efforts pour nous épater, nous satisfaire grâce au sur-mesure que propose cette technologie.
Barilla travaille donc sur un projet de pâtes personnalisables que l’on imprimera grâce à une cartouche contenant la mixture. Le client aura donc la possibilité d’exprimer sa créativité en choisissant les formes de celles-ci. Mais avons-nous tous ce désir de créativité ? Ne préférons-nous pas justement que l’on nous dicte ce qui est beau, nous facilitant ainsi la vie ?
Le philosophe Jean-Paul Sartre affirmait : « l’homme est condamné à être libre » ; ne serions-nous pas aujourd’hui condamnés à créer ?
Autre exemple : le « Toy Lab » proposé par l’agence de publicité TBWA Toronto. Ce Noël, l’agence canadienne a demandé à des enfants de dessiner leur jouet rêvé, puis a fait appel à des spécialistes qui ont reconfiguré ces dessins afin de les imprimer en 3 dimensions. Enfin, une vidéo émouvante a permis à l’agence de présenter les jouets et leurs créateurs qui affichaient un sourire jusqu’aux oreilles. Une opération innovante et réussie puisqu’elle montre étape par étape comment cette agence a su s’insérer dans ce tournant technologique et mettre à profit la 3D pour faire sa propre promotion.

 
Le mouvement Maker
Par ailleurs, la naissance de l’imprimante 3D va de paire avec un nouveau mouvement appelé « maker movement » qui peut être qualifié de « DIY (do it yourself) digital ». Il s’agit de créer des objets tangibles grâce aux nouvelles technologies ; une sorte de bricoleur 2.0.
Cette tendance s’allie à la mise en réseau des compétences, rendue possible notamment par internet. Elle permet ainsi aux « makers » de mettre en commun leur savoir-faire, par exemple grâce au système de tutorat. Il est donc plus facile de créer et de produire pour tout à chacun ce qui renverse l’ordre établi- ce rôle étant initialement attribué aux entreprises et autres structures de production.
Les « FabLab » (fabrication laboratories) illustrent également ce phénomène. Ces structures ouvertes à tous permettent à qui veut d’utiliser des machines (telles que des imprimantes 3D) et de profiter des compétences des autres visiteurs, dans le but de concevoir des objets. Preuve que ce concept se propage et surtout se démocratise : le Fablab « Maker/Seine » a cette année ouvert ses portes à Saint Paul, en plein cœur de Paris.

Un challenge pour les marques
Si les marques ont compris l’importance de la 3D, toutes n’ont pas encore intégré cette technologie dans leur communication.
Cependant, certains annonceurs commencent à l’utiliser, à l’instar de Coca-Cola qui a matérialisé ses clients en figurines à leur effigie. Une proposition créative et en totale adéquation avec leur campagne « enjoy a Coca-cola with a friend » entièrement tournée vers la personnalisation et l’individu, puisque les noms des consommateurs sont inscrits sur leurs fameuses canettes rouges et blanches.

De plus, une imprimante 3D coûte aujourd’hui entre 700 et 4000 euros. Ces machines deviennent donc de plus en plus accessibles aux « makers » mais aussi à un nombre croissant de personnes, comme par exemple les membres de la « génération y », qui intégreront cette technologie très aisément dans leurs pratiques futures.
Les marques devront donc relever ce défi technologique et créatif pour rester légitimes et essentielles dans la vie des consommateurs, signe que nous vivons désormais dans une société de plus en plus spectaculaire !
Clara Duval
Sources :
Influencia.net
Lemonde.fr
L’adn.fr
Wikipédia.fr
Crédits photos :
ladn.eu
Google.fr

TF1
Société

Les médias nous tiennent en liesse !

 
« Partageons des ondes positives », signe TF1, illustrant la tendance actuelle des médias à l’injonction au bonheur. C’est dans cette même veine positiviste que s’inscrit le premier site d’information optimiste, IVOH. Serions-nous entrés dans l’ère d’un journalisme thérapeutique ? Quel bonheur nous a-t-on réservé ?

IVOH : le site d’information qui vous rendra heureux !
Déprimés par les médias qui ne vous transmettent que les mauvaises nouvelles ? IVOH, ou « Images and Voices of Hope », se propose de valoriser pour vous des histoires plus encourageantes. Ce site d’information optimiste promeut une nouvelle approche du journalisme, sous les traits du « récit réparateur ». Il ne s’agit pas de passer sous silence les évènements tragiques, mais d’en tirer ce qui peut être encourageant. IVOH veut ainsi permettre à ses journalistes de rester plus longtemps sur la scène d’un drame pour voir se dessiner la reconstruction. Ce n’est pas la perte de dizaines d’hommes qui est mise en lumière mais la rééducation d’un rescapé, de son opération à ses premiers pas. Ce site d’information tend donc à souligner l’espoir pour le partager avec son lectorat. Avec son financement participatif −ses créateurs font une levée de fonds depuis le 1er décembre−, le site d’information vise à fédérer autour de lui une communauté optimiste. Face à la promesse de lendemains qui chantent, il ne reste plus qu’à se demander si la presse a véritablement un devoir thérapeutique auprès de ses lecteurs…

L’avènement d’un journalisme thérapeutique
IVOH s’inscrit clairement dans une tendance médiatique d’injonction au bonheur. Les médias ont une très forte influence sur notre moral. Ainsi, Mallaury Tenore, la directrice du projet, souligne qu’il a été scientifiquement prouvé que l’information optimiste crée une société optimiste. Dans le même esprit, des chercheurs d’Harvard ont montré qu’être exposé en permanence à des informations négatives « augmenterait considérablement notre degré de stress, et nous pousserait à être plus anxieux au quotidien ». Si vous vous sentez mal, c’est donc en partie à cause de ce que vous lisez dans la presse ! Dans l’Euphorie perpétuelle, Pascal Bruckner souligne que nous autres, peuples occidentaux, sommes devenus « allergiques à la souffrance ». Le bonheur présenté par les médias serait en fait la catharsis de ce qu’a produit la société par rapport au besoin impératif de bonheur. Les médias montreraient les malheurs produits par la société, certes, mais cette exposition, passant toujours par le prisme médiatique resterait éloignée du foyer à partir duquel on regarde ce malheur. Par ailleurs, celui-ci ne dure jamais bien longtemps puisqu’il est toujours remplacé par le bonheur.
Tu seras heureux, petit homme !
Le bonheur est partout, il envahit les ondes et nos écrans. Dans la société du spectacle dépeinte par Guy Debord où nous évoluons dans une perpétuelle représentation, le bonheur se dit et se montre, plus peut-être qu’il ne se vit. Le bonheur n’est plus un droit mais un devoir tyrannique, qui montre du doigt les inaptes. Au sein de cette « dictature du bonheur », les médias sont à la fois relais et émetteurs de la liesse générale. Parler de bonheur, d’une part, c’est s’assurer une audience confortable. On voit ainsi déferler d’innombrables émissions mettant en scène un bonheur mièvre, où, lorsqu’on est face à une situation critique (le petit Jason a mis ses pieds sur la table), la télévision s’impose en sauveuse (Super Nanny s’en va remettre le garnement sur le droit chemin à coup de froncements de sourcils !). Les émissions de télé-coaching comme Relooking de l’extrême, Un nouveau look pour une nouvelle vie, ou encore Pascal, le Grand Frère pour n’en citer que trois, permettent aux chaînes qui les diffusent de se montrer sous un jour positif, de faire preuve de leur pouvoir d’agir au sein de la société. Des chaînes telles que TF1 ou M6 ont ainsi basé leur identité sur leur capacité (discutable, cela va de soi) à « faire le bonheur » de leurs téléspectateurs sans cesse convoqués.

La campagne de publicité de TF1, « Partageons des ondes positives », lancée en avril 2014
D’autre part, les médias sont inséparables de la publicité, qui entoure les articles et les journaux télévisés, influençant ainsi notre réception de ceux-ci. Or on ne compte plus les allusions des publicités au bonheur. Entre « Ouvre un Coca Cola, ouvre du bonheur » et « Bien manger, c’est le début du bonheur », cette notion est aujourd’hui entièrement traversée par une logique capitaliste.

De l’idéal philosophique au Post-it mièvre : un bonheur en déliquescence ?
Loin de la philosophie antique, de l’idéal démocratique prôné par Saint-Just après la révolution française ou encore du bonheur entier pour lequel Antigone est prête à mourir, notre vision du bonheur n’a plus rien de stable ou de définitif. Il prend souvent la forme d’un bien périssable, ou il s’est dégradé en ce petit bonheur à atteindre en trois minutes, déclinable sous forme de Post-it à coller sur son frigo ou de recettes à appliquer au saut du lit. Issue des Etats-Unis, cette psychologie positive argue que le bonheur ne dépend que de nous. Aujourd’hui, le bonheur se travaille avec un coach d’épanouissement personnel ou avec une thérapie de groupe. Il suffit par ailleurs de pénétrer dans une librairie pour remarquer l’amoncellement aux couleurs pastel des guides de bonheurs aux titres évocateurs : 3 kifs par jour, Choisissez le bonheur, Le goût du bonheur, La thérapie du bonheur, Objectif bonheur, Dictionnaire du bonheur, La vie en rose, mode d’emploi, etc. Voilà, vous cherchiez le bonheur ? Pas la peine, il est dans votre tartine beurrée du matin !
C’est donc bien à l’heure d’une injonction généralisée à un petit bonheur malléable et marchand que le journalisme thérapeutique prend racine.
Louise Pfirsch
@: Louise Pfirsch
Sources :
Télérama, n° 3387, du 13 au 19 décembre 2014 : « Sois heureux et tais-toi ! »
lesinrocks.com
Virginie Spies, Télévision, presse people: Les marchands de bonheur
Pascal Bruckner, L’Euphorie perpétuelle, essai sur le devoir de bonheur
Crédits images :
tumblr.com
lesinrocks.com
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stephanhuanlla.wordpress.com

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Politique

La France de la terreur

A la suite des faits divers survenus au commissariat de Joué­-Les-­Tours où deux policiers auraient été poignardés par un individu clamant sa radicalisation ainsi qu’à Nantes en décembre dernier, le premier ministre Manuel Valls a déclaré « jamais nous n’avons connu un aussi grand danger en matière de terrorisme ». S’il s’agissait d’actes isolés les uns des autres, ces faits divers ont effectivement alimenté la glose médiatique par leur proximité avec le phénomène du djihad (« l’effort » en Arabe). Or, la réaction très directe du premier ministre, ainsi que d’autres acteurs politiques comme Florian Philippot sur le plateau de RTL, amène à questionner l’état actuel de la société française quant à son islamophobie au sens large puisque la représentation du « péril terroriste » alimente notre quotidien médiatique et politique, en faisant du terrorisme notre plus grande peur. Certes, c’est par le vote anticipé de plusieurs lois antiterroristes ainsi que par le renforcement sécuritaire, à l’œuvre en France, que l’étau se resserre un peu plus sur la peur du djihad. Par qui les Français sont-­ils vraiment terrorisés et en somme qui nous terrorise ?

 
Un attirail législatif en écho aux faits divers
En raison de l’engagement français dans la lutte contre l’État islamique en Irak et au Levant, ou encore de la participation dans la coalition internationale pour combattre le djihad en Syrie, en Libye mais surtout au Mali et en Centrafrique, le risque d’attentats et la menace terroriste à l’encontre de la France se font, chaque jour, de plus en plus sentir. Ce sont, ainsi, plusieurs mesures qui ont été mises en place afin de réduire ce risque, de le contrer, de le prévenir.
Il s’agit, d’une part, d’un projet de loi initié en juillet 2014 en réponse directe à la multiplication de faits divers relatifs au terrorisme, notamment à la suite de l’affaire Mehdi Nemmouche devant le musée juif de Bruxelles ou encore les assassinats perpétués par Mohamed Merah à Montauban et Toulouse.
Ce dispositif législatif n’est, en réalité, qu’un renforcement puisque 14 lois antiterroristes existent déjà depuis 1986. La nouveauté de la loi votée le 4 novembre 2014 autour d’un consensus des sénateurs socialistes, UMP, radicaux et centristes réside d’abord dans l’interdiction de sortie du territoire d’un individu suspecté de velléités djihadistes à l’étranger. Cette interdiction serait rendue possible par une confiscation des papiers d’identité pour une durée renouvelable de six mois à deux ans. Cette interdiction s’applique également à l’entrée sur le territoire dès lors qu’il s’agit d’un ressortissant de l’Union Européenne ou d’un membre de sa famille. Ce nouvel article pose problème puisqu’il évoque le danger que représenterait la présence de ces individus pour la sécurité des publics. Au-­delà du non­-respect des libertés individuelles, beaucoup de juristes s’inquiètent de l’interprétation qui peut découler d’une telle interdiction surtout en ce qui concerne la communauté rom en Europe.
Ensuite, c’est bien en réponse aux faits divers de ces dernières années, ainsi que du mois de décembre à Nantes ou Joué­-Les-­Tours, que le texte prévoit de parer les « entreprises terroristes individuelles » avec la fermeture de sites faisant l’apologie du terrorisme sur Internet mais aussi en anticipant la radicalisation d’un individu agissant seul ou en groupe. Il s’agirait de surveiller la détention d’armes ou d’explosifs ou la formation au maniement de ces objets. Quid de la présomption d’innocence ou des libertés individuelles ?
De fait, Christine Lazerges, présidente de la commission nationale consultative des droits de l’homme, soulignait dans une interview au Monde que les projets de loi en matière de lutte contre le terrorisme étaient désormais toujours initiés par le ministère de l’intérieur et non le ministère de la justice quelle que soit la majorité au pouvoir. Certes, c’est bien dans une logique d’actualité et de terreur que ces lois sont élaborées de sorte qu’elles provoquent un consensus large au sein des différentes factions politiques au Parlement. L’émotion provoquée par un fait divers ne peut, effectivement, qu’encourager un vote sécuritaire. Toutefois, il s’agit bien d’anticiper un risque et non de le punir. C’est pourquoi ces lois vont à l’encontre même de notre système démocratique et répondent au sensationnel sur un rythme très médiatique sans prévoir les conséquences à plus long terme ou ce qu’un changement politique pourrait entraîner si on les appliquait avec le flou laissé en suspens autour de leur interprétation.
D’autre part, la liberté d’expression est également fragilisée puisque la loi contraint les hébergeurs de sites faisant l’apologie de l’islamisme à la fermeture. S’ils sont une menace de propagande importante, ils sont aussi un moyen d’information quant à l’idéologie djihadiste et les fermer ne représente en rien une défense de la démocratie contre la radicalisation, sinon une répression punitive ayant à voir avec les méthodes djihadistes.
Vers une société paranoïaque
Ce renforcement législatif est également accompagné d’un plan Vigipirate comprenant 300 mesures confidentielles à activer selon la gravité de l’alerte. Si elles sont jugées « indispensables » pour Le Figaro, ces lois reflètent également le climat de terreur dans lequel vivent les citoyens français. En pratique, c’est en effet, une multitude de signes qui rappellent la menace : contrôles d’identités, fouilles et patrouilles dans les lieux publics indiquent bien un risque et provoquent par conséquent la peur.
Certes, cette peur se matérialise par la traque d’un ennemi intérieur et elle rapproche notre démocratie de l’enfer décrit par George Orwell dans 1984.
Islam et djihad sont, en effet, associés dans les représentations médiatiques mais également dans les faits puisque les opérations Vigipirate s’appuient sur des contrôles discriminatoires. Dès lors, c’est en traquant le terrorisme que l’on terrorise la population. D’une part, la population musulmane qui subit l’amalgame entre sa religion et un courant criminel et barbare qui s’oppose totalement à la sagesse que peut enseigner l’Islam. D’autre part, ceux qui craignent autrui et finissent par accepter une concession face à notre système démocratique pour mieux se protéger. Pis, ces mesures pourraient à terme ressembler au Patriot Act des États-­Unis mis en place après les attentats du 11 septembre et qui légitime la surveillance d’un citoyen dès lors qu’il représenterait une menace pour la sécurité du pays. Les dérives des agences de surveillance mais surtout la capacité de contrôler nos données personnelles nous orientent alors davantage vers une société paranoïaque puisqu’elle pousse beaucoup de citoyens à douter de l’État de droit et à croire aux théories du complot.
En conséquence, ces mesures préventives isolent d’elles-­mêmes une partie de la population qui n’est pas logée à la même enseigne que le reste des citoyens français à tel point qu’il est bon de se demander si les Musulmans se sentent en sécurité en France à l’heure actuelle. Ces représentations de l’intégrisme religieux poussent, d’ailleurs, de plus en plus de jeunes français à se radicaliser, qu’ils soient d’ailleurs Musulmans ou non. Ce sont ainsi plus de 1089 français impliqués dans des filières vers la Syrie et l’Irak à la date du 23 octobre 2014 d’après le socialiste Sébastien Pietrasanta, rapporteur du texte à l’Assemblée nationale. Or, dans la plupart des cas, ces individus sont présentés comme déséquilibrés ou empêtrés dans un axe du mal. Pourtant, ce sont bien les conditions sociales et l’isolement de ces personnes qui les amènent au fondamentalisme et à s’engager dans une voie où ils n’ont plus rien à perdre. Le retour de ces Français est souvent vu comme une menace à exterminer plutôt qu’une blessure à guérir. Leur détresse n’est jamais prise en compte et leur réinsertion n’est pas envisagée de sorte que la peur entraîne la haine puis l’exclusion d’une jeunesse qui ne trouve plus sa place en France.
Ainsi, c’est à travers un travail d’information sur ce qu’est le djihad et d’intégration solidaire qu’un vrai travail idéologique doit être mené en France afin que subsiste notre démocratie. Ce sont des films comme Timbuktu où la figure du jeune djihadiste Mamby rappelle que le choix de l’islamisme n’est pas rationnel et que ces jeunes qui choisissent le départ restent des êtres humains. Dès lors, si c’est la dignité et les droits de l’homme que l’on cherche à protéger en s’opposant au djihad, encore faut-­il que notre État les respecte.
Marie Vaissette
Sources :
Lesechos.fr
Rue89.nouvelobs.com
Youtube.com
Le Monde 1, 2 , 3 & 4
Lefigaro.fr
France2.fr
Ladocumentationfrançaise.fr
Libération.fr

Culture

Les fans pour vous servir

 
The Walking Dead doit une partie de son succès à la performance de ses cliffhangers (1), méticuleusement répartis à chaque épisode pour s’acheminer vers le midseason (2), qui constitue une réserve émotionnelle assez puissante pour perdurer jusqu’à la reprise de la série. 
Mais cette année, le savant engrenage se voit menacer par la rouille, après un élément narratif que certains n’hésitent pas à qualifier de meurtre. Que s’est-il donc passé pour qu’AMC se voit contraint d’expliquer à quelques 50 000 consommateurs d’apocalypse pourquoi il a « tué » leur personnage préféré ? 
La mort des personnages principaux est le lot d’un nombre croissant de séries télévisées, qui jouent ainsi avec les nerfs de leur audience – jusqu’alors dans un climat de relative complicité. Lorsque la midseason de Walking Dead paraît sur les écrans, révélant la mort de Beth, elle provoque la colère d’une vaste communauté de fans qui, aussitôt, promeuvent la pétition « Bring Beth back ». Sur change.org, cette pétition regroupe à ce jour 56 854 signataires passionnés qui strient la toile de commentaires mécontents.
Les critiques se situent généralement à deux niveaux, et révèlent une approche intéressante de ce qu’est devenu la consommation de divertissement pour beaucoup d’utilisateurs. En premier point, la frustration affective engendrée par la disparition d’un personnage devenu familier semble être désormais un motif légitime de réclamation, qu’on pourrait résumer à cet amer constat : « Ce n’était pas le produit  que j’attendais. » 
La seconde facette de ces critiques procède de cette tendance qu’a le web de donner le même temps de parole à l’amateur qu’au professionnel, et concerne directement, cette fois, la compétence des réalisateurs qui n’auraient pas exploité le potentiel scénaristique du personnage « tué ». Ce faisant, ils auraient lésé le consommateur en ce qui relèverait littéralement d’une faute professionnelle. 
C’est la naissance d’un autre type de fan service. De quoi s’agit-il ? Initialement, de clins d’oeil adressés par l’auteur d’une œuvre à ceux qui la suivent, afin de s’en attirer les bonnes grâces – procédé particulièrement employé dans l’univers des mangas, où il n’est pas rare de tomber sur un hors-série dévoilant les charmes d’une héroïne populaire…
Cette tactique devient désormais d’ordre préventif, voire impératif.
Le fan service réussi ou la tendance diplomate
Si AMC n’a pas encore répondu à ces accusations d’assassinat gratuit, d’autres producteurs se prêtent au jeu du fan service, avec plus ou moins d’élégance.
Au moment où Masashi Kishimoto relève le douloureux défi de clore une saga au succès mondial en heurtant le moins de fans possible, Gotham, nouvelle série de la FOX, se prête au jeu du fan service assumé. Véritable vitrine du genre, Gotham est aux amateurs de Marvel ce que le green-washing est aux images de marque, soit un gage de reconnaissance et, dans une certaine mesure, de prestige inattaquable.
D’autres encore entretiennent des liens plus discrets, mais tout aussi efficaces avec leur communauté – liens qui naviguent à loisir entre les clins d’oeil et les mesquineries soigneusement dosées. Sur la page Facebook d’American Horror Story, une série télévisée à la capicité de teasing redoutable, les community managers procèdent à une véritable analyse de terrain. Aussitôt un personnage est-il porté aux nues qu’un portrait en est publié sous un jour peu flatteur ; les plaisanteries devenues cultes au sein des amateurs sont rapidement intégrées au langage de la page officielle.
La palme du fan service revient peut-être à la série Supernatural, qui publie régulièrement des méta-épisodes sur le ton de l’humour, reprenant avantageusement les codes et les propos de la communauté de fans pour les intégrer à son scénario, clamant ainsi que ces derniers font partie de l’aventure.

La série-télévisée sanctionnée par ses clients
Quel message ces rapprochements entre production et consommateurs délivrent-ils ? Le brouillement volontaire de cette frontière n’est pas du goût de certaines productions, qui se réclament d’une certaine liberté artistique, ni de certains consommateurs qui estiment n’avoir aucune légitimité pour intervenir dans le processus d’élaboration d’un contenu culturel. 
Toute proportion gardée, il est difficile de donner tort à l’une ou l’autre des parties. Les fans se sont toujours emparés de l’objet culturel – livre, film, série télévisée – sans prendre massivement d’assaut ses auteurs pour exiger des prestations supplémentaires. Maintenant que les réseaux rassemblent et fédèrent les groupes d’intérêts, la force numéraire et économique des téléspectateurs est conscientisée, et s’envisage comme un contre-poids face à l’industrie culturelle.
Est-ce le devoir du producteur de se plier aux exigences du public, ou doit-il être intraitable, fidèle à sa vision artistique ? Jusqu’à quel point s’étend sa responsabilité auprès de sa communauté ?
D’aucuns répondraient simplement que la production est sanctionnée, en cas d’impair, par la simple absence de ses télé-spectateurs habituels et potentiels. Mais ce mécanisme de boycott peut-il s’appliquer de manière aussi idéalement systématique en ce qui concerne les séries télévisées, conçues pour fidéliser et créer un besoin de suivi ? Produit à la rencontre de l’art et du marketing, le format des séries télévisées engage et retient le consommateur tout en étant dégagé de toute responsabilité par le caractère artistique du produit lui-même, échappant du même coup à la plupart des obligations légales inhérentes à un produit commercial… Cet équilibre fragile est justement bouleversé par la « clientélisation » des fans, qui semblent ne plus hésiter à exiger le meilleur de leurs chaînes préférées. 
A l’exemple de Mass Effect 3, qui, sous l’impulsion de 67 000 signataires, s’est vu forcé de réécrire une fin pour son best-seller, les médias culturels doivent désormais craindre les réactions de leur public plus si dévoué.
Marguerite Imbert
Sources
Change.org
facebook.com
gamekult.com
Crédits photo
thewalkingdead.com
cuckaluhr.com
(1) Type de fin ouverte créant le suspens
(2) Période entre janvier et avril qui marque le retour de certaines séries, ou leur lancement.

Société

Gamay more gamay gamay more

À l’étranger, le vin de Bordeaux, comme la haute couture française, est une institution prestigieuse et le nom de Bordeaux lui-même est mondialement connu. Et pour cause : la promotion à l’international est une spécialité bordelaise, assurée par le CIVB (le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux) et l’Union des grands crus de Bordeaux. Si en premier lieu elles contrôlent la qualité de la production, ces organisations visent également à promouvoir le Bordeaux et éduquer les consommateurs notamment à travers les quelques 80 manifestations annuelles mettant en relation producteurs et professionnels de la distribution et de la presse, une école du vin présente dans 11 pays ou encore les Fêtes bi-annuelles du vin à Bordeaux (dont le concept a été exporté à Hong-Kong, Québec, Bruxelles). Le Bordeaux a vocation à l’exportation. Par ailleurs la nouvelle campagne, « Vins de Bordeaux il y a tant à découvrir », sortie en octobre dernier sur 7 marchés, entend se démarquer d’une communication souvent plus traditionnelle. Qualifiée d’« ovni dans le monde du vin » (elle l’est moins dans le monde de la communication), la campagne a en tout cas eu un large impact sur la presse et les consommateurs.
La nécessité d’une communication plus esthétique et frappante a pu venir de l’état des ventes actuelles du Bordeaux, en baisse en termes de volume et de valeur sur tous les marchés. D’une part, la récolte de 2013 a été très faible, 30% en moins sur une année. D’autre part, la viticulture américaine progresse de plus en plus et concurrence les Bordeaux avec des vins de qualité semblable ou du moins s’en approchant et dans un style similaire, par exemple en Californie avec des Cabernet Sauvignon, des Merlot, etc. Quant au marché chinois, s’il est devenu le plus important acheteur de grands vins de Bordeaux grâce à sa richesse croissante et l’intérêt porté à la culture occidentale de luxe, les prix ont constamment augmenté depuis les millésimes exceptionnels de 2009 et 2010, à tel point que les Chinois semblent s’en détourner depuis deux ou trois années. Mais c’est aussi l’image même du Bordeaux que cette campagne de communication tente de transformer, souvent considéré comme uniquement un produit de luxe peu accessible, complexe par ses notions de terroirs et d’appellations (alors que les Américains et les Asiatiques ont davantage une culture du cépage et raisonnent en Gamay, Pinot, Chardonnay). La campagne ambitionne alors d’attirer l’amateur occasionnel et de nouveaux consommateurs sensibilisés à la variété des vins de Bordeaux, en particulier sur le segment des produits de moins de 55$.

La précédente campagne de Vins de Bordeaux, construite autour de photographies véhiculant les notions de partage et de convivialité, s’était heurtée à la loi Evin du 10 janvier 1991 qui encadre fortement la publicité des boissons alcoolisées et est un véritable frein à la créativité. Cette fois adaptée à la législation, la campagne repense la bouteille de Bordeaux en héroïne d’une série de visuels à l’esthétique 1920-1930. Diffusées sous forme d’affiches dans les métros parisiens, londoniens et new-yorkais, dans la presse, et uniquement online en Chine et au Japon, les illustrations suivent le fil conducteur fédérateur de la découverte (la diversité des vins de Bordeaux, des terroirs, des climats, des accords mets et vins) à travers des valeurs de savoir-faire, de tradition et de modernité. Elles traduisent ainsi l’émergence d’une nouvelle génération de producteurs innovants et respectueux de l’environnement. En tout, la campagne touche 7 marchés clés : la France, la Belgique, le Royaume-Uni, l’Allemagne, les États-Unis, la Chine et le Japon et sera augmentée de nouveaux visuels en 2015 dans le but de créer une véritable saga autour de la forme si reconnaissable de la bouteille de Bordeaux.
Toutefois plusieurs caractéristiques de la campagne « Vins de Bordeaux il y a tant à découvrir » peuvent nuire à son efficacité, notamment en Chine et au Japon. Comme sa déclinaison qui reste invariablement identique sur les différents marchés. Même la signature « Vins de Bordeaux » est en français, peu importe le pays. Choix étonnant lorsque chaque pays possède ses propres codes de communication, fait appel à des imaginaires et des couleurs différents. Enfin ces infographies semblent être destinées à un public plutôt jeune et sensible à l’esthétique rétro, pourtant les 20-30 ans ne sont jamais vraiment la cible de telles campagnes. Une publicité pour du vin vise généralement un homme de plus de 40 ans. En effet, peu importe le marché, le vin est considéré comme un produit destiné à une clientèle aisée et connaisseuse. C’est précisément là que l’innovation dans la communication du vin bloque : cette cible moyenne empêche de pousser la créativité, et l’originalité de la campagne des Vins de Bordeaux n’est finalement que relative dans un milieu très traditionnel. Et pourtant le jeune consommateur, celui écarté des campagnes de communication, devrait être sensibilisé à ces vins de Bordeaux de moins de 55$, plus abordables et qui, point parfois rebutant dans un grand cru, peuvent être consommés dès leur sortie.
Marc Blanchi
Sources:
Bordeaux.com
Terredevins.com
Lepoint.fr
Crédits images:
isobel.com

Publicité et marketing

Feu vert pour Coca-Cola ?

En 2015, Coca-Cola se veut vert et sain.
Après le coca light, le coca zéro ou encore le coca cherry, la famille de la bien connue entreprise d’Atlanta s’agrandit en France avec la commercialisation du Coca-Cola Life. Un nouveau soda dit naturel qui depuis 2013 fait déjà ses preuves en Argentine et au Chili. Mais quelle est sa différence ? Plus léger qu’un Coca classique, plus calorique qu’un light, cette nouvelle gamme est composée de stévia, une plante dont l’extrait se substitue à l’aspartame, célèbre pour son aspect néfaste sur notre santé. Un nouveau Coca qui en fera sourire plus d’un au vu de la réputation peu écologique de la marque américaine. Alors soif d’avidité pour la multinationale ou bien réel intérêt pour la santé du consommateur ? Cette nouveauté parviendra-t-elle à se hisser au même rang que ses sœurs light et zéro ou figurera-t-elle dans la déjà longue liste des innovations peu convaincantes de la marque et déjà oubliées de tous ? (Quelqu’un se souvient-il du Coca-Cola BlāK corsé intense ?)
Dorénavant pour Coca-Cola, green is the new red.
Se diversifier, toujours
Depuis maintenant deux ans, les ventes de produits Coca-Cola connaissent une baisse de régime. Si en 2012 celles de la gamme classique progressaient de 3%, en 2013 elles n’atteignaient que 1% en moyenne. Face à ce déclin, Coca-Cola innova avec la campagne « Partagez un coca avec » : Un véritable succès qui reboosta les ventes. Qui n’est pas déjà parti à la recherche de son prénom dans les rayons d’un commerce de proximité ? Coca-Cola Life se présente alors comme un nouveau moyen de relancer les ventes et ainsi conquérir un public jusqu’à présent peu exploité sur ce terrain.
Ces derniers temps la tendance voulait que les consommateurs dépensent moins en sodas classiques pour davantage se focaliser sur ceux « naturels ». Un nouveau segment marketing qui commence à gagner de l’ampleur et où Coca-Cola, avec sa nouvelle boisson, pourrait s’imposer comme première référence. Coca-Cola Life apparait donc comme une décision avant tout très stratégique. Un réel intérêt de Coca-Cola pour ses consommateurs ou bien une action purement marketing dans le but de valoriser le sien ?
Pour que chaque goutte compte
Coca-Cola a toujours réussi à s’adapter à la demande de ses consommateurs: une version light pour les femmes ou encore une zéro calorie pour une cible davantage masculine. Mais avec cette nouvelle version, qui est principalement visé par la multinationale ? Une cible plutôt compliquée à définir sachant que l’étiquette Coca-Cola ne se marie pas très bien avec celle du bio ou du vert. Un challenge pour la firme qui s’aventure dans ce marché où les consommateurs font attention à leur corps, à leur environnement et se méfient des produits chimiques ajoutés aux produits alimentaires industriels. Coca-Cola Life permettrait également d’améliorer son image en Europe, affectée par les campagnes anti-aspartame plombant les ventes de son Coca-Cola Light. Coca-Cola s’adapte alors aux transformations de la consommation tout en conservant les plus fidèles à la marque. Une idée d’adaptation qui se retrouve notamment dans les spots publicitaires argentins « Primer Beso » et « Ser Padres »

La compagnie nous propose ainsi de « découvrir notre nature » aux travers d’étapes marquantes de la vie, le premier baiser, devenir parent. Des publicités remplies d’émotions jouant sur les codes classiques de Coca-Cola tels que la famille, les joies du partage ou la réunion des générations.
Reste à savoir si à présent les réticents aux produits du géant d’Atlanta souvent perçus comme mauvais pour la santé seront séduits par cette boisson naturelle.
Coca-Cola Life, le prochain New Coke ?
A peine son nouveau produit lancé, Coca-Cola semble d’ores et déjà faire quelques erreurs qui pourraient lui être fatales. Commercialisées depuis le 4 décembre, les bouteilles de Coca-Cola Life se font rares dans nos rayons ainsi que sur nos écrans de télévision. Coca-Cola communique certes sur sa nouvelle boisson, mais cette communication demeure assez restreinte. Il faudra alors attendre le 22 décembre pour voir apparaître un premier spot très sobre d’une vingtaine de secondes pour Coca-Cola Life.
Quant à son élaboration, Coca-Cola Life a le mérite de se vouloir sain, mais cela traduit une erreur dans son message, une tromperie marketing. En Europe, l’usage de la stévia pure étant interdit, il s’agit en réalité de l’usage de sa substance édulcorante, la rébaudioside, dont l’extraction n’a en définitive rien de naturel…

Quelques points noirs qui pourraient faire préjudice à l’entreprise américaine qui dans le passé a déjà eu à faire à des échecs commerciaux qui lui coutèrent cher. L’exemple le plus emblématique est évidement le New Coke qui devait concurrencer Pepsi mais qui, finalement, fut l’une des plus grandes erreurs de Coca-Cola. Cette quasi absence de communication pourrait donc être vue comme une décision venant de la multinationale afin de limiter un possible échec et ainsi ne pas tomber de haut.
Comme le dit l’entreprise avec son slogan, les choses sont meilleures avec un Coca-Cola, mais le seront-elles encore plus avec de la stévia ?
Félix Régnier
@filgato
Sources :
leplus.nouvelobs.com
rtl.fr
lefigaro.fr
dailymail.co.uk
huffingtonpost.com
cocacolaweb.fr