"Une affiche pour NKM sivoplé"
Ce lundi 2 décembre, Nathalie Kosciusko-Morizet – NKM pour les intimes – a proposé, en collaboration avec l’agence de photos en ligne My Photo Agency, un concours aux internautes afin de départager son affiche de campagne. Cette proposition semble être une tentative de reprendre la main sur sa campagne ; en effet, la candidate UMP à la Mairie de Paris connaît des temps délicats en termes d’image.
Les internautes ont ainsi jusqu’au 18 décembre pour choisir entre trois séries de photographies tantôt « urbaine », tantôt « instantanée », toutes trois insistant sur l’ancrage dans le décor parisien et la proximité avec les citoyens.
Faut-il voir cette démarche comme une proposition innovante qui souligne l’importance grandissante du numérique ou comme un pari risqué après de récents bad buzz ?
Un simple coup de pub ?
Si l’annonce de cette nouvelle, le lundi 2 décembre 2013, a suscité quelques remarques négatives NKM a du moins réussi sur un plan : faire le buzz. Cela lui a permis de signaler la reprise de sa campagne, et éventuellement de faire passer au second plan la publication de sa déclaration de patrimoine, qui est ainsi passée plus inaperçue… Jean-Didier Berthault, le directeur de campagne de la candidate, expliquait d’ailleurs à Metronews : « Ce n’est pas un sujet sur lequel on voulait faire de la pub ».
Une tentative de « faire moderne » ?
Les candidats le savent bien, les pratiques digitales prennent une place croissante dans nos vies et NKM n’est pas en reste dans ce domaine, puisqu’elle était secrétaire d’État à l’Économie numérique. La « candidate geek » est notamment à l’initiative de la politique gouvernementale en matière d’open data.
Nathalie Kosciusko-Morizet définit elle-même son projet numérique : « Mon engagement pour Paris est pour moi l’occasion d’encourager les nouveaux modèles de création liés à l’écosystème numérique et d’y associer au maximum les Parisiens afin que cette campagne soit avant tout la leur. ». Le vote en ligne correspond donc tout à fait à cette volonté.
Mettre la création au cœur d’une bataille municipale, ce serait donc une stratégie « tout bénéf » qui permettrait de mettre en valeur les nouvelles pratiques du Web comme le crowd-design, de promouvoir une start-up parisienne qui valorise les jeunes talents et, pourquoi pas, d’inventer un nouvel outil de communication politique en prise directe avec les citoyens. Ce serait en effet permettre aux Parisiens de s’introduire dans un domaine habituellement réservé aux spin doctors et autres experts de la communication.
Pour les co-fondateurs de My Photo Agency, Sarah Aizenman et Dan Kleczewski, cela permettrait aux personnalités politiques adoptant cette démarche de « renouveler leur communication » tout en donnant « de la visibilité à de jeunes photographes » (le photographe lauréat empochera de plus un chèque de 1500 euros).
Un pari risqué
L’image de NKM a souffert pendant un mois de novembre difficile (dissidence dans le 14e arrondissement, déclaration erronée sur les horaires de bus, nouveau site de campagne dont le déballage personnel est déjà ridiculisé etc…). Décembre marque-t-il un nouveau souffle pour sa campagne ? Ce n’est pas certain… On observe sur Twitter et le Nouvel Obs des commentaires allant jusqu’à l’évocation du narcissisme de la candidate UMP qui propose un choix entre plusieurs photos d’elle, en ridiculisant ses difficultés à choisir son « style ».
L’affiche, en politique, est censée résumer le positionnement et en quelque sorte l’ ADN d’un candidat : confier ce choix au public ne renvoie-t-il pas un message hasardeux ? Cela voudrait-il dire que l’image de NKM n’a pas été suffisamment définie au préalable par son équipe et par elle-même ? Pour Frédéric Dosquet, professeur à l’ESC Pau et directeur de l’ouvrage Marketing et communication politique, c’est donc une erreur tactique et « de la pseudo-démocratie participative ».
Ce concours s’annonce d’autant plus périlleux quand on sait que les affiches des politiques sont une cible de choix pour les photomontages moqueurs (il suffit pour s’en convaincre de penser à l’affiche de Nicolas Sarkozy de 2012 ou au portrait officiel de François Hollande). Mais c’était encore plus risqué pour NKM qui était déjà la cible de gags divers et variés depuis ses déclarations sur le métro (« un lieu de charme ») ou l’épisode de la carotte.
Il paraissait donc prévisible que les opposants de Nathalie Kosciusko-Morizet (ou tout simplement des petits rigolos de la Toile) prendraient un malin plaisir à détourner ses affiches, surtout que l’une d’entre elles se situe… devant une bouche de métro parisien. Les détournements n’ont pas tardé en effet : le 3 décembre le collectif L’humour de droite propose un concours de montages (intitulé « Une affiche pour NKM sivoplé »).
Ainsi les moqueries fleurissent sur le Web, que ce soit sur Twitter (#UneAfficheUneBourde #NathieDansLeMetro #NKMdr sont des hashtags fréquents), ou sur Tumblr où ont été créés des blogs dédiés.
On constate donc qu’avec ces détournements le défi était dangereux, mais l’équipe de la candidate joue le jeu : « Tout peut être détourné, lancer un concours sur le Web ne change rien à cela » a ainsi expliqué son entourage au HuffingtonPost.
Utiliser la carte de la co-création et surfer sur la tendance du « do it yourself » semblait être une idée bien trouvée par l’équipe de NKM pour faire oublier ses récentes bourdes. On pourrait donc se demander si la candidate UMP n’aurait pas mieux fait de confier la gestion de sa communication à des experts pour éviter les faux pas critiques de novembre, plutôt que de confier son image aux internautes.
Le concours se déroulera-t-il sans accroc ? Mais surtout, permettra-t-il à NKM de redorer son image sur la Toile ? Rien n’est moins sûr. Il reste trois semaines pour le savoir.
Lucie Detrain
Sources
Myphotoagency
Tumblr »QuandNKM »
Humourdedroite
BlogNouvelObservateur