la légende de Shalimar
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Jacques a dit : Shali-marre !

 
Le court-métrage de Guerlain, autour du parfum Shalimar, ne charme pas aussi bien que son légendaire élixir.
Le réalisateur, Bruno Aveillan, est également l’auteur du  court-métrage publicitaire de Cartier, l’Odyssée, dont les ficelles reposaient déjà sur le thème du voyage mythique, voire mythologique. Mais quand celui-là a émerveillé, celui-ci exaspère.  La Légende de Shalimar provoque lassitude et énervement chez le public, que relaient à leur tour la presse et les réseaux sociaux. Une « Publicité nommée dégoût », titrait un article du Figaro en ligne,  dont le ton irrévérencieux a provoqué une censure de la part de la ligne éditoriale… officiellement du moins. Toujours est-il que Guerlain titre ladite publicité, sur le format papier, de « plus belle histoire d’amour de tous les temps ». On croirait lire une hyperbole enfantine.
C’est ici que le bât blesse : le public est saturé par ce trop-plein d’inédit, auquel s’ajoutent la dimension charnelle du mini-film, l’exaspération devant le coût démentiel de sa production, parfois plus élevé que celui du « vrai film » qu’il précède, la durée de 5 minutes et 46 secondes,  soit une éternité pour un film à visée publicitaire, doublés pour certains d’un caractère sexiste.
Mais le grief majeur imputé à Guerlain, provoquant l’ire des cinéphiles, est selon eux de souiller par sa vulgarité commerciale le monde du cinéma, infligeant de plus aux spectateurs un supplice du déjà-trop-vu. D’autant plus que le court-métrage s’impose chaque jour dans les salles, sur sa période de diffusion.
Ainsi la marque imite-t-elle le support médiatique qu’est le film de cinéma. Ce support est un terreau d’imaginaire, propice au rêve, et idéal pour les marques en général puisque le public est ici offert en pâture, sans télécommande pour zapper, bien installé sur un strapontin qu’il a payé pour occuper. La réception est alors a priori positive, puisqu’elle s’inscrit dans un contexte de détente, communément valorisé.
Mais Guerlain fait plus que s’insérer dans les salles, puisqu’il imite, mélange les contours de sa publicité avec ceux d’une production cinématographique. L’objectif est de tromper l’horizon d’attente du public, le spot-film intervenant une fois les lumières éteintes, sur un espace réservé non plus aux annonces… mais aux bandes-annonces.
Guerlain brouille davantage les pistes, car La légende de Shalimar, comme pour toute sortie de film, crée justement l’attente par deux bandes annonces successives, ainsi qu’une avant-première, fait même l’objet d’un article sur Allocine et enfin s’offre la BO d’un monstre sacré de la musique cinématographique : Hans Zimmer.
Le paradoxe est celui-ci : Guerlain, voulant jouer avec la stratégie de dépublicitarisation (voir ci-dessous), c’est-à-dire de camouflage, provoque un effet de surpublicitarisation : la publicité, qui se veut délicate et raffinée, a du mal à se faire digérer. Cuit, cuit, cuit et re-cuit.
Sibylle Rousselot
Sources :

http://www.vodkaster.com/actu-cine/cinema-Shalimar-pub-de-merde-Guerlain-3500
Concept de « dépublicitarisation » du GRIPIC du Celsa

Flops

CM is the new SAV

 
Avec le développement d’Internet et des réseaux sociaux, les marques ont investi dans le digital. De nouvelles stratégies de communication se sont développées, centrées sur l’interaction directe entre l’entreprise et l’utilisateur. Cette logique a vu apparaître un nouveau métier, entièrement dédié à la gestion des communautés : le community manager.
Si ce métier a pris une si grande importance, c’est qu’il est révélateur des caractéristiques du Web 2.0. L’essor des réseaux sociaux a permis aux entreprises d’entrer directement en contact avec l’utilisateur. Dans un monde où le contact ne se faisait que par le produit ou par la publicité et dans un sens unique, celui de la marque vers l’utilisateur, les réseaux ont façonné une nouvelle communication à deux sens, fondée sur l’interaction.
Or, cela change la chronologie publicitaire. Auparavant, les marques s’offraient de manière ponctuelle une campagne de communication, pour un lancement de produit, dans le cadre d’un repositionnement ou bien pour augmenter sa notoriété. Avec le Web 2.0, la marque doit être sans arrêts présente sur les réseaux. Elle doit sans cesse proposer des contenus puisque les réseaux s’inscrivent dans un processus de flux continus – ils sont sans cesse actualisés. La publicité devient permanente, d’où l’importance de ce nouveau métier. Le community manager (aussi appelé « social guru » ou « social media strategist ») est en charge de produire ce contenu continuel.
Il devient l’une des vitrines de la marque, en faisant office d’intermédiaire entre cette dernière et l’utilisateur. Il analyse la notoriété de l’entreprise, l’image qu’elle offre auprès de ses utilisateurs et prolonge celle-ci dans les contenus qu’il met en ligne.
 La proximité avec les utilisateurs augmente largement l’image de marque. Celle ci propose un contenu divertissant, bien éloigné de campagnes de publicités harassantes, matraquant les consommateurs. C’est par exemple le cas d’Oasis, cas d’école français en la matière, spécialisé dans les jeux de mots fruitiers. On passe d’une publicité imposée à un contenu récréatif, agréable et apprécié – ce qui augmente donc la notoriété de la marque. La preuve en est qu’Oasis propose maintenant des tee-shirts reprenant ses meilleurs jeux de mots. Si les marques s’orientent vers le divertissement, c’est pour mieux s’insérer dans les usages des réseaux : il est bien plus facile de partager une publication amusante sur Facebook qu’une publicité. Faire le buzz sur les réseaux sociaux c’est peut être cela, finalement : créer un contenu publicitaire qui ne dit pas son nom, dans une logique de dépublicitarisation [1], facile à partager.
Mais paradoxalement, cette proximité pose de gros problèmes aux marques. Maintenant que le community management est bien ancré dans les pratiques et usages, des phénomènes nouveaux apparaissent. Car l’interaction est à double sens. Se positionner sur un réseau social, c’est façonner un cadre de parole pour l’utilisateur. Celui-ci a désormais le pouvoir de s’adresser directement à la marque. Le consommateur devient « consommacteur ».
Jusqu’ici, on pouvait voir les récriminations des utilisateurs dans les critiques de produits ou de marques sur les sites de vente en ligne par exemple. Désormais, cette prise de parole est publique. Mais puisqu’elle se déploie sur le réseau de la marque, on attend d’elle qu’elle réponde. Les marques ne peuvent plus se permettre d’ignorer les critiques, elles doivent y apporter une réponse. C’est l’avènement du service après-vente 2.0 qui a désormais lieu sur la place publique.
Or comme dans tout service après-vente, les utilisateurs prennent la parole pour, le plus souvent, se plaindre et signaler un problème. Mais puisqu’il s’agit d’un phénomène public, les marques doivent alors faire face au pendant négatif du buzz, le bad-buzz, impulsé par les utilisateurs.
C’est une nouvelle dimension que les community managers des grandes marques ne peuvent plus ignorer. Car le web demande une grande transparence de la part des marques, et supprimer une récrimination d’un réseau est souvent la pire des idées, puisqu’elle mène irrémédiablement à la création d’un effet Streisand [2].
L’enjeu est important, car le manque de notoriété à perdre est grand. Le community manager doit apporter une réponse claire et publique à ces récriminations, tout en conservant une certaine image de marque.
La semaine dernière, sur la page Facebook de la FNAC, une utilisatrice a fait part d’un problème qu’elle a rencontré suite à l’achat d’un ordinateur portable. Confiant l’ensemble de ses démarches et de ses problèmes, elle utilise la page publique de l’entreprise dans le but clairement exprimé [3] de nuire l’image de la marque. Il s’agit d’une forme de chantage extrêmement efficace. La FNAC ne peut que répondre positivement et aller dans le sens de la consommatrice, puisqu’elle s’est confiée publiquement, attirant l’attention des utilisateurs de Facebook face à la situation injuste qu’elle a vécue. La viralité des réseaux est donc bel et bien à double sens, servant d’écrin au buzz et au bad-buzz.
La prise de parole publique des utilisateurs dans le but d’attirer l’attention des marques sur leurs dysfonctionnements et prenant à parti l’ensemble de la communauté sociale est un phénomène qui va sans doute se généraliser. Cela fera évoluer le travail des community managers, qui devront alors prendre en charge une partie du service après-vente des marques.
 
Arthur Guillôme
[1] L’expression est empruntée à Valérie Patrin-Leclerc dont vous trouverez un interview chez l’excellente revue Effeuillage
[2] L’effet Streisand est une loi d’Internet selon laquelle la censure d’un contenu sur Internet ne peut que favoriser son partage et attirer l’attention des internautes. Plus d’informations ici
[3] « je suis 100% disponible pour vouer toute mon énergie à vous faire un bad buzz, tellement je suis outrée par votre incompétence ». L’ensemble du message ainsi que la réponse de la FNAC sont visibles dans cet article complet
Pour plus d’informations :
Cet article du site mycommunitymanager propose un tour d’horizon efficace et intelligent du communty management
Ce Tumblr nous propose une belle sélection de fails de Communty Managers