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Je t’aime, moi non plus: le paradoxe du vagin

Après l’immense succès de sa campagne #Blood Normal, lauréate du Grand Prix Glass : The Lion for Change du festival des Cannes Lions 2018 et particulièrement du spot dans lequel du liquide rouge (et non plus bleu) était utilisé pour parler des menstruations, la marque suédoise de produits d’hygiène féminine Libresse (Nana en France) nous propose, un an plus tard, une nouvelle campagne à la fois hilarante et particulièrement positive. Depuis fin novembre, il est possible de retrouver, principalement sur les réseaux sociaux, un spot quelque peu particulier, Viva la vulva, un hommage vidéo à la diversité des organes génitaux féminins.

Agora, Com & Société

Le tabou, on en viendra tous à bout

Le tabou est un outil indispensable pour les annonceurs. Il est presque un truisme de dire que les publicitaires choquent et dérangent pour communiquer. Mais ce même tabou peut aussi être un poison. En ethnologie, le terme désigne une prohibition sacrée dont la transgression peut entraîner un châtiment surnaturel. Par définition, il est donc préférable d’éviter le tabou. Suivant ce conseil, l’esprit cherche automatiquement à l’occulter : le tabou finit par tomber dans les méandres de la non-pensée. Il appartient si l’on puit dire à l’ordre de l’immonde qui menace le nôtre par son impureté ou sa dangerosité. Son évocation ne suscite alors qu’une réaction de rejet rendant toute pensée impuissante. Communiquer à travers le prisme du tabou ne revient-il donc pas à limiter le dialogue aux sentiments ? Quelles sont les limites d’une telle communication ?
Le tabou : un garde-boue sociétal
Dans son acception commune, le terme « tabou » désigne un sujet qu’il est préférable de ne pas évoquer au risque de transgresser les codes de la bienséance. Sa forme varie en fonction du temps et de l’espace. On parlera moins de son salaire en France qu’aux États-Unis, on parlera moins de sexe en Arabie Saoudite qu’en Islande … Ainsi, l’être social obéit à des règles plus ou moins tacites qui pèsent sur son comportement et sur son langage.
Le tabou auquel Freud a consacré une œuvre entière structure nos pulsions en prohibant l’inceste et conditionne l’existence de la morale et l’émergence de la culture. Freud s’appuie sur l’hypothèse d’une société primitive -la horde sauvage- dominée par un père tout puissant disposant du seul droit d’accès aux femmes. Il explique la naissance de la société par le meurtre du père qui est paradoxalement devenu objet de vénération. En voulant libérer leur désir du pouvoir paternel, la rébellion a conduit à le contenir. La proscription de l’inceste et l’interdit du meurtre ainsi que du parricide assurent les liens familiaux et sociaux. Cette explication mythique structurerait notre inconscient.
Dans l’esprit polynésien, le tabou est lié au sacré et ne peut se concevoir qu’en relation au mana, équivalent très approximatif de l’esprit qui anime les êtres et les choses que l’on ne peut toucher ou dont on se protège car les forces peuvent être négatives. Ces notions participent d’un ordre que l’on doit absolument respecter. Mais dans l’usage courant, en dehors de l’univers magique et religieux, il renvoie à ce que l’on ne peut pas dire ou faire. Sur quoi dès lors repose cette interdiction ? Quelle justification peut-elle avoir ? Quels que soient nos univers d’appartenance, sommes-nous si loin de cet univers magique, nous qui appartenons à une culture privilégiant la raison ?
Les forces surnaturelles nous menacent sans cesse si nous transgressons le tabou en l’amenant à la communication. La croyance fait sa force dans le domaine mythique et religieux. Que peut-on craindre quand on appartient à un univers laïque et désacralisé ? Si on transgresse l’interdit, on suscitera la gêne ou l’on subira le rejet car on remettra en cause les valeurs fondamentales qui régissent la société. La crainte du tabou semble inscrite dans notre esprit. Au lieu d’avoir affaire à une puissance surnaturelle, c’est la société elle-même, tel un dieu, qui nous imposera tacitement le respect de limites à ne pas franchir. Le tabou est maintenu par un système dont nous sommes nous-mêmes les garants.

Les sociétés archaïques et les sociétés modernes ont-elles un but si différent ? Derrière l’interdit, il s’agit de préserver un monde constitué de valeurs communes au périmètre plus ou moins grand. Nos sociétés se distinguent en effet par l’importance qu’elles reconnaissent à l’individu et à sa liberté. Les sociétés anciennes privilégient la communauté par rapport à l’individu qui lui appartient complètement à l’inverse des sociétés modernes. A travers le tabou, la société nous rappelle aux valeurs communes qui la fondent. C’est une limite infranchissable par laquelle elle se défend comme un corps contre des agressions extérieures qui menacent sa cohésion. Ainsi, les menaces d’exclusion qu’elle nous impose perpétuent le tabou. L’individu peut se croire totalement libre – de communiquer – mais la pression sociale lui rappelle qu’il fait parti d’un monde qui lui reconnaît dans le meilleur des cas une liberté relative.
Y a-t-il encore des tabous dans la publicité ?
La publicité semble échapper à l’interdit. Elle n’hésite pas à le braver. Elle joue fréquemment avec lui. Dans un monde saturé de messages, les communicants n’hésitent pas à provoquer, à extraire le potentiel polémique du tabou pour mieux marquer. En fait, l’utilisation du tabou s’inscrit parfaitement dans une communication dite  » transgressive ».
 

 
Comme le tabou parle à l’émotionnel, il est difficile d’avoir une vision claire de la réaction suscitée par une pub exploitant un tabou. Toutefois, le bon communicant pourra anticiper les conséquences de son énonciation.
Il y a des règles à respecter. D’abord, il paraît évident qu’il faut prendre en compte le contexte socio-culturel dans lequel on souhaite développer une campagne. Ensuite, il ne faut pas confondre communication et provocation gratuite : il faut éviter que le choc du tabou phagocyte le message. Ce phénomène correspond à ce que les communicants les plus aguerris appellent sentencieusement « le risque de monopolisation mémorielle par le tabou ».
En 2009, une publicité distribuée au nom de Carrefour Discount était publiée sur le web avec comme titre : « J’aime pas Mamie ». Carrefour démentit aussitôt son affiliation à cette pub. La pub met en scène une famille qui mange tranquillement. Le téléspectateur s’aperçoit rapidement qu’il mange “Mamie”. Le tout est brillant puisque l’humour noir dédramatise le lien grossier fait entre précarité et cannibalisme. La pub amène à penser que Carrefour Discount est assez bon marché pour éviter de tomber dans le cannibalisme. Le message est clair !

La transgression, l’énonciation du tabou doit avoir un but. Les campagnes contre les MST sont à prendre en exemple : elles tentent de lever les tabous pour libérer la parole, oublier « la honte » pour mieux se soigner. Ici, le tabou est énoncé pour mieux dénoncer. Au contraire, la campagne « Unhate » (2011) de Benetton mettait en scène des visuels sans grand rapport avec les vêtements : on y voyait des chefs d’États ou des responsables religieux s’embrasser. Cet exemple montre comment la shockvertising relève de la pure vacuité. Le tabou doit être manipulé avec pertinence.

Le propre du tabou est de gêner, de repousser et même d’horrifier. Cependant, tout comme il existe une “licence poétique”, la publicité est un lieu où le tabou peut s’énoncer sans être suivi de châtiment. Il prend un autre sens sous la bannière publicitaire. L’absence d’un sujet déterminé de l’énonciation favorise la liberté que l’on peut prendre vis-à-vis de lui. Cela ne veut pas dire que la publicité peut tout se permettre : il faut éviter les interdits archaïques tels que le tabou de l’inceste fondé à la fois sur des lois ancestrales, morales, religieuses et scientifiques. Et au-delà de ce simple constat, il faut trouver le ton qui permette d’oublier le tabou pour mieux cerner le message.
En énonçant l’imprononçable, la publicité soulève des questions et modifient les mentalités. Elle habitue à l’inhabituel et dédramatise l’inconvenant. Malgré de nombreux jeux sur les clichés, la pub ouvre parfois le débat sur des sujets tels que la sexualité ou la sécurité routière. En provoquant, en jouant sur le sentiment, la publicité éveille celui qui la regarde. C’est le bon côté de ce genre de communication : elle pousse à la polémique et donc à la réflexion.
De l’utilité du silence dans la communication : une hypocrisie nécessaire
Le tabou provoque. C’est cette vertu que le communicant exploite. Quel intérêt y a-t-il à le braver si cet acte soulève l’indignation et empêche la communication ? Au contraire, le silence fracassant propre au tabou ne serait-il pas un bienfait pour la communication ?
L’interdit de l’inceste par exemple repose sur des explications et des justifications sociologiques voire scientifiques. Statistiquement, il est prouvé que l’endogamie entraîne des conséquences génétiques graves. Lévi-Strauss, un anthropologue contemporain, voit dans la prohibition de l’inceste – une loi fondée sur la nature et la culture – une condition nécessaire pour assurer l’existence sociale en élargissant les relations matrimoniales. Le tabou préserve ainsi la société des conséquences néfastes de l’endogamie. Le respect de la loi ne fait donc pas directement appel à la raison cependant il se justifie rationnellement. Certains comportements pour le dire autrement ne sont pas prohibés pour les bonnes raisons : on ne fait pas telle ou telle chose par sagesse mais par peur, par superstition comme si les dieux allaient se retourner contre nous.
Dans notre société certaines questions sont aujourd’hui taboues. La répartition ethnique en est un exemple. Quand on parle de tabou dans ce cas, il ne faut cependant pas voir seulement le fait qu’on écarte la question, il y va aussi d’un choix de valeurs et de principes. Le risque serait de résumer les individus à des appartenances et des explications biologiques.
Que cela ne soit pas un tabou aux États-Unis relève de raisons historiques. L’absence de ce tabou peut conduire à conforter les séparations entre les hommes. À ce niveau, le tabou est une façon de parler. Il y va en même temps d’une certaine dimension du sacré qui correspond au respect de principes fondamentaux. L’histoire du XXème a vu de surcroît le développement de l’idéologie eugéniste -théorie pseudo-scientifique d’hygiène raciale – qui a entraîné les pires monstruosités politiques.
Le tabou dans l’exemple précédent donnait un sens sacré vis-à-vis de ce qu’il représentait. On pouvait y voir conséquemment la marque d’un attachement à des valeurs. Peut-on conclure de ces observations à quelque possible vertu du tabou ?
Voltaire semble allègrement franchir ce pas lorsqu’il écrit dans ses Dialogues : « Je veux que mon procureur, mon tailleur, mes valets, ma femme même croient en Dieu ; et je m’imagine que j’en serais moins volé et moins cocu. » La croyance devient garante de la morale. C’est un moyen en sacralisant ses règles de conduire les hommes. Cette formule plutôt pessimiste sur la nature des hommes relève d’un acte de prudence sauvegardant nos intérêts. En devenant intouchables, les règles garantissent un ordre impossible de discuter soumis que nous sommes à la suprême autorité qui nous prive en passant de toute autonomie. On reste dans une société d’autorité, celle des anciens opposés aux modernes pour reprendre une distinction établie par Benjamin Constant. Est-ce une entrave à la communication que d’avoir des tabous dans une société ? Supprimer le tabou pour en parler librement suppose qu’il faudrait passer du superstitieux au rationnel. Cela suppose de laisser, peut-être naïvement, les tabous aux griffes de l’intelligence individuelle. S’il n’y a plus de règles de communication, le reste dépend de l’homme. Le risque évident est que l’interdit lié au tabou ne soit plus aussi fort s’il perd sa sacralité arbitraire et que l’homme transgresse sans réfléchir.
La modernité signe-t-elle la fin progressive des tabous ? Le tabou semble appartenir à un univers théologique. En entrant dans l’univers positif ou scientifique perd-il alors son sens ? Dans la mesure où le tabou fait partie du domaine du sacré, le fait de vivre dans une société et une culture caractérisées par la raison n’en fait-il pas pour le dire autrement une relique du passé ? Sans base rationnelle, le tabou demeure un interdit fondé sur des croyances surnaturelles. Il n’est pas le fruit de l’intelligence mais de la crainte superstitieuse. C’est notre peur qui fait sans doute sa force, l’absence de pensée. C’est l’analyse que développe Spinoza en particulier dans la préface au Traité théologico-politique. Rien n’est interdit à la libre pensée. C’est la condition essentielle de notre libération. Le tabou est une limite à penser pour en comprendre la nécessité et accéder au salut pour parler comme le philosophe.
De nombreuses choses restent taboues. « Le phénomène du tabou n’a pas cessé d’exister. Il existe toujours, aussi dans les sociétés modernes, comme il existait dans les sociétés primitives. Ce qui a changé, c’est seulement son caractère, les prémisses sur lesquelles il se base, les causes pour lesquelles il existe. » écrit Stanislas Widlak. Êtes-vous homosexuel ? Combien tu gagnes ? Êtes-vous dérangé par la présence d’une personne séropositive? Êtes-vous malade ? Ces questions gênantes traduisent nos peurs et notre besoin d’ordre, d’appartenir au monde commun. C’est l’expression archaïque de notre être dont nous avons gardé la mémoire ou bien le produit de notre culture.
Existe-il des moyens de communiquer sur un tabou sans heurter ? Pour chaque tabou, il y a un vocabulaire « politiquement correct » spécifique. Le tabou et l’euphémisme sont frères. Toutefois, les mots sont tellement aseptisés qu’ils ne semblent plus renvoyer à des réalités humaines. De plus, Il y a un réel paradoxe, si ce n’est une contradiction, à utiliser ce langage à l’heure où l’on parle de « minorités visibles », de « discriminations positives » ou bien d’ « égalité des chances ». On cache en même temps que l’on essaye de lever certains tabous. On peut peut-être y voir une volonté maladroite de manipuler les sujets tabous pour les exorciser sans dévoiler totalement leur arbitraire nécessaire. En effet, le silence que le tabou suppose empêche certaines minorités d’exister normalement, c’est-à-dire à l’intérieur de la norme, et entraîne parfois des contestations politiques légitimes.
Il y a donc des sujets dont « on peut » parler et d’autres non : la communication est donc encadrée par une « normalité », des normes qui se veulent assurément civilisatrices. Toutefois, il reste une volonté de savoir comme dirait Foucault. Remplacer cette norme par une autre changerait-il quelque chose ou bien la norme actuelle est-elle particulière, organisée et réfléchie, c’est-à-dire basée sur des critères civilisateurs et visant le bien commun ? À y regarder de plus près, les constructions sociales semblent arbitraire. Le philosophe explique entre autres que les normes sexuelles se seraient développées sous l’influence des États du 17ème siècle en partant du simple constat qu’il fallait encourager la natalité. Ainsi, ils auraient soutenu la sexualisation du corps féminin en marginalisant les autres sexualités.
Ameziane Bouzid
Linkedin
Sources :
« « J’aime pas mamie »: mais qui a fait cette fausse pub Carrefour ? », Le Poste Archives, 14/12/2009
 » Comment communiquer sur un sujet tabou en publicité ? « , Études & analyses, 30/03/2008 
« Les briseurs de tabou. Intellectuels et journalistes « anticonformistes » au service de l’ordre dominant », Sébastien Fontenelle, Paris, Éd. La Découverte, coll. Cahiers libres, Paris, 2012, 180 p.2016 
 » « Unhate » : la nouvelle campagne choc de Benetton « , Pure Médias, 16-11-11 
Crédits images :
BNP
AIDES
Reuters/Stefano Rellandini
 

Perrier publicité
Flops, Publicité

À quand la fin des publicités vulgaires ?

Depuis quelques années, de nombreuses marques usent et abusent d’une tendance publicitaire traditionnelle mais pourtant toujours aussi délicate à manipuler : l’allusion à la sexualité. Alors que certaines agences font des publicités qui tombent dans le vulgaire sans passer par la case départ, d’autres produisent tout un univers en exploitant notamment les codes graphiques des sites à caractère pornographique, pour créer du contenu et faire le buzz. Or, rares sont les publicités qui sortent gagnantes de cette “stratégie”. Elles font beaucoup parler d’elles, sont très souvent critiquées car dérangeantes et peu pertinentes, lumière sur le flop général décerné aux publicités de mauvais goût.
Non non n’insistez pas, les jeux de mots ça ne marche plus
Au delà des nombreuses plaintes d’associations luttant contre le sexisme ou l’utilisation de la femme comme objet de marketing, il est intéressant de se pencher sur les publicités qui continuent de croire que faire allusion au sexe va nous faire acheter un billet d’avion ou une cannette de soda. Certes, les spots réussissent à capter notre attention pendant les 30 secondes de leur première diffusion, mais qu’en est-il de leur efficacité ?
J’aimerais commencer par parler du 4×3 qui attaque ma rétine chaque matin depuis un an sur le quai de la ligne 4, en d’autres termes la campagne pour le comparateur de vols en ligne Liligo. Incontestablement plus cheap que le vichy de mon cabas Tati, cette publicité donne envie de se jeter sur les rails du métro plutôt que de se rendre sur ce site.

Mettant en scène des personnes dont l’apparence laisse paraître leur sérieux, la marque tente de nous faire esquisser un sourire en s’appuyant sur le jeu de mot “s’envoyer en l’air”. Une idée brillante et originale en somme. Cessons l’ironie, et notons simplement la vulgarité et la lourdeur de cette annonce.
Vous en voulez encore ? Vous voilà servis ! Ouiz, une nouvelle marque d’aromatiseur d’eau, a dernièrement sorti un spot faisant lui aussi allusion au sexe, via un jeu de mot ne volant pas plus haut que celui de Liligo, soit l’utilisation ambiguë du mot “chatte”. Epoustouflant, n’est-ce-pas ?

Bien qu’il ait été créé à l’occasion de la semaine de l’égalité professionnelle, ce spot a suscité beaucoup de réactions négatives, notamment sur Twitter. Les internautes ont également dénoncé une réutilisation « sexiste » de la Tippexperience – que l’agence Buzzman avait créé 4 ans auparavant – au profit du site Ouiz.fr, sur lequel on peut trouver des solutions pour aider Charlotte à se faire entendre auprès de ses collègues masculins.

Regard sur les grandes marques  
Dans le même thème, on peut désormais parler des grandes marques, qui sont elles aussi friandes de ces allusions, mais qui en usent de manière plus qualitative et donc sensiblement plus subtile. Ces publicités font alors régulièrement objets de débats, notamment lors de séances de cinéma, ce qui en devient presque aussi agaçant que le bruit des pop corn de ma voisine pré pubère. Certains adorent ces campagnes, d’autres les trouvent vulgaires. Je pense par exemple à Schweppes, qui a misé en 2011 sur la beauté d’Uma Thurman pour jouer une scène de quiproquo autour du nom de la marque qui s’apparente facilement au mot « sexe ». Cette publicité a plutôt bien marché, bien que le relai ait été difficilement repris par Pénélope Cruz en 2014, qui a du mal à nous laisser croire qu’elle va embrasser une jeune fille dans un bar.
Autre marque de soda dont les publicités font polémique : Orangina. Le changement de positionnement de la marque, qui a personnifié des animaux pour les rendre pulpeux et sexy, a divisé les téléspectateurs.

D’un côté, la campagne a attiré les prescripteurs que sont les enfants, grâce à l’imaginaire évoqué par les couleurs et les animaux, ainsi que les adolescents pour sa touche de provocation. Mais d’un autre côté, l’aspect érotique des publicités a dérangé une grande part de téléspectateurs, notamment les parents qui sont en grande partie les acheteurs du produit. En Angleterre, le spot jugé trop sexy n’a d’ailleurs été diffusé qu’une seule fois, en 2008. On peut donc se questionner sur l’efficacité de ce repositionnement, après des années de publicités décalées, connues et reconnues.
Quid des faux sites coquins ?
Depuis quelques mois, de grandes marques ont choisi quant à elles d’utiliser les codes graphiques de sites à caractère pornographique, de façon à créer le buzz. C’est par exemple le cas de la SNCF, qui a dernièrement créé le site 28Max, consacré à des offres réservées aux moins de 28 ans. Mouais.
Plus drôle, et poussé jusqu’au moindre détail, le concept avait d’abord été développé par Oasis avec son site YouPomm, qui a beaucoup fait parler de lui l’année dernière. (On peut d’ailleurs y mater des fruit-tease ou des sextape de filf, sans se soucier de vider son historique par la suite, si c’est pas génial ça !).

La marque, voulant changer de cible et toucher les 18-25 ans, a plutôt réussi son coup grâce à l’agence Marcel, mais s’est tout de même fait critiquer par des internautes qui, l’ignorant, trouvaient cette parodie de site coquin choquante vis-à-vis des enfants.
Quoi qu’il en soit, il est important de noter que malgré le bruit médiatique qu’elles entraînent, les campagnes qui font allusion à l’érotisme n’en sont pas plus efficaces. En effet, l’étude d’Adrian Furnham et d’Ellie Parker, du département de psychologie du University College London, explique que la présence de trop de sexe dans la publicité perturbe la concentration et altère le processus de mémorisation de la marque. Et pourtant, dans Le Neuromarketing en action, Patrick Georges et Michel Badoc observent qu’un cinquième des publicités font encore allusion au sexe.
Bref, c’était mieux avant
Les marques et leurs agences devraient donc peut-être songer à changer de stratégie, car en plus d’être vulgaires et de nous énerver par la même occasion, ces publicités ne jouent pas en leur faveur. Du moins plus. Car à l’époque, Perrier avait relevé le défi de façon très explicite, mais sans une pointe de vulgarité à mon goût – bien que la publicité ait été censurée.

Mais c’était en 1976, et depuis le géant de l’eau gazeuse semble avoir du mal à rester drôle et fin. Leur campagne a effectivement animé les réseaux sociaux en avril dernier, faisant encore une fois usage d’un quiproquo autour de la nouvelle taille de leur cannette. Un changement de positionnement ne leur ferait peut-être pas de mal à eux aussi. La preuve : 592 dislikes pour seulement 438 likes sur la vidéo Youtube de leur dernier spot.
Vive Mad Men.

Louise Bédouet
@: Louise Bédouet
Sources :
lexpress.fr
e-marketing.fr
ladn.eu
Crédits images :
youpomm.fr
twitter.com
creads.fr 

kama sutra
Société

De l'art, du sexe, du buzz : la débandade cul-turelle ?

 
Entre les performances d’art contemporain massivement relayées sur les réseaux sociaux et les expositions dont la promotion crée le buzz, les événements culturels puisent généreusement dans le registre du sexe pour aguicher le public et semblent ainsi utiliser un ressort publicitaire éculé pour se faire connaître. L’art serait-il destiné à devenir une marchandise comme une autre ?
Le boom des expositions cul-turelles
Comment prendre le métro parisien sans remarquer les innombrables affiches pour les expositions sulfureuses de la saison Automne-Hiver 2014 ? Au programme : le marquis de Sade au musée d’Orsay, le Kâma-Sûtra et l’amour au temps des Geishas à la Pinacothèque. Evidemment, la nudité et la sexualité sont loin d’être des sujets artistiques nouveaux. Et il n’est pas question dans ces expositions de choquer. Au contraire, l’exposition « Kâma-Sûtra, spiritualité et érotisme dans l’art indien » vise à faire découvrir cet ouvrage du IVe siècle sous un jour nouveau, à éclairer son approche de la spiritualité, loin de l’image d’un traité pornographique et salace, comme le souligne Alka Pande, le commissaire de l’exposition. La rétrospective sur le marquis de Sade est quant à elle composée d’extraits de son œuvre, illustrés par des toiles de Goya, Picasso, Rodin, Ingres… Point de subversion scandaleuse, en somme.

En fait, c’est davantage la communication mise en place autour de ces événements qui pose question. Les deux expositions de la Pinacothèque laissent entrevoir leur postulat : le sexe attire. Mais c’est sans doute le musée d’Orsay qui joue le plus sur cet attrait, en réalisant une vidéo de promotion érotique. Dans celle-ci, des corps nus s’étreignent. Cette vidéo ne laisse personne indifférent : on est choqué, sidéré, touché. Le buzz généré par celle-ci, sanctionnée sur YouTube par l’interdiction aux mineurs, montre que le musée a vu juste en jouant sur le caractère mobilisateur du sexe, comme il l’avait fait pour son exposition Masculin/masculin dont la vidéo avait elle aussi été censurée. Ce qui dérange, c’est l’utilisation par une institution culturelle de ressorts intimement liés à la publicité. Le procédé est gros, énorme, même. Or le fait d’utiliser des procédés communs à la publicité fait entrer l’art dans le commercial, le transforme en marchandise.

L’art et la manière de faire le buzz
L’art contemporain et notamment les « performances », fonctionnent par l’étonnement, le choc ou la perplexité d’un public. On pense par exemple au sapin aux airs de plug anal exposé sur la place de la Concorde pendant la FIAC, la Foire d’Art Contemporain à Paris. Mais quand Milo Moiré assure «évoquer la création de la peur», nous, nous voyons avant tout une femme nue en train de pondre, avec son vagin, des œufs remplis de colorant qui s’éclatent mollement sur une toile blanche. Cette artiste suisse a marqué les esprits avec sa performance à l’Art Cologne 2014 et ce qui est sûr, c’est que même si on n’est pas passionné d’art expérimental ou voyeur, il a été difficile d’échapper à ses vidéos qui ont circulé sur tous les réseaux sociaux. Dans la même veine, l’australienne Casey Jenkins avait fait le buzz après avoir tricoté avec de la laine préalablement introduite dans son vagin et imbibée de sang menstruel.

La débandade culturelle ?
En fait, selon la sociologue de l’art Nathalie Heinich, « l’utilisation du vocabulaire de la transgression, et notamment de la culture pornographique […] rend ces œuvres accessibles aux néophytes. » On observe ainsi un engouement sans précédent pour l’art contemporain, en particulier pour les performances. Mi-octobre, par exemple, 500 000 visiteurs se sont pressés dans les espaces dédiés à la performance de la FIAC. Et tout au long du mois d’octobre, d’innombrables sites d’informations et journaux ont publié des articles intitulés « Comment parler d’art contemporain quand on n’y connaît rien ? ». La question ne serait-elle pas plutôt « Pourquoi vouloir parler d’art contemporain quand on n’y connaît rien ? » ? Cette popularisation de l’art contemporain est, en réalité, biaisée. Car si la transgression exposée un peu plus haut est suffisante pour faire le tour de YouTube, ces performances n’intéressent pas véritablement le monde de l’art. Elles sont périphériques et n’ont d’ailleurs fait parler d’elles que sur les sites d’information généralistes et les réseaux sociaux. Difficile de croire donc à un art mis en danger par une « publicitarisation » d’événements marginaux…
 
Louise Pfirsch
@: Louise Pfirsch
Sources :
Le Monde, « Le Kama-sutra, lointain souvenir du désir », samedi 15 Novembre 2014
konbini.com
Stylist n° 067, « Quand la performance étouffe l’art », 30 octobre 2014
Crédits images :
amessagetoindia2.wordpress.com
offi.fr
Crédit vidéo :
DailyMotion

Société

Nymphomaniac : Sexe, Mensonges et Vidéo(s)

 
Annoncé depuis 2011, le drame érotique Nymphomaniac est enfin sur nos écrans et, une fois de plus, la sortie d’un des films de Lars von Trier s’accompagne de son lot de polémiques.
 Un adepte de la controverse
On se rappelle du scandale qu’avait suscité son Antichrist au Festival de Cannes en 2009, où Charlotte Gainsbourg avait été insultée de « sale pute ! » pendant la projection d’une scène où elle se masturbait.
Rebelote lors de l’édition de 2011, qui avait choqué par les propos antisémites qu’avait tenus le réalisateur lors d’une conférence de presse pour Melancholia, où il avait affirmé sa sympathie envers Hitler.
Immédiatement déclaré persona non grata du Festival, où il avait pourtant présenté la majeure partie de ses œuvres depuis sa consécration avec Dancer in the Dark, on ne sait aujourd’hui toujours pas s’il pourra de nouveau présenter un de ses longs-métrages dans la sélection cannoise. Toujours est-il qu’après avoir été maintes fois repoussé, Nymphomaniac ne devrait logiquement pas figurer dans la compétition cette année, de quoi supposer que Thierry Frémaux, délégué général du Festival, n’est peut-être toujours pas décidé à le réintégrer parmi les habitués.
Pourtant encensé par la critique depuis ses débuts, le Danois aime toujours autant déranger, comme il le prouve avec son dernier film, où il repousse une fois de plus les limites. Ce faisant, il pose de nouveau cette interrogation cruciale : doit-on lire une œuvre artistique à travers le prisme de son créateur ?
On ne saurait que trop vous conseiller de vous faire votre propre avis sur ce réalisateur si singulier, dont l’œuvre ne peut laisser indifférent.

Une campagne promotionnelle résolument suggestive
Le buzz commence au mois de mai dernier, où la première affiche du film est dévoilée. Après un synopsis énigmatique, étayant que le film relate le parcours poétique et érotique d’une femme depuis sa naissance jusqu’à ses cinquante ans, le ton du film se précise grâce à ce qui deviendra l’emblème de la communication qui entoure le film : deux parenthèses formant manifestement l’appareil génital féminin. À noter que le titre du film change peu après pour s’approprier cette symbolique, en devenant Nymph()maniac. La mention qui l’accompagne, « Forget about love », se passe de commentaires…

S’ensuit une longue période de rumeurs, qui commence par l’évocation d’une série télévisée, pour prolonger le plaisir, avant que les acteurs ne s’y mettent. Shia LaBeouf n’hésite ainsi pas à affirmer ne pas avoir simulé les scènes de sexe et va même jusqu’à se vanter d’avoir décroché le rôle grâce à une sextape qu’il aurait confiée au réalisateur. Balivernes pour un buzz réussi, des doublures issues de l’industrie pornographique ayant été en charge des scènes en question.
Tous ces tapages permettent ainsi au film de faire parler de lui plus d’un an avant sa sortie en salles. Et comme le sexe fait vendre, il n’est pas question d’en rester là. À quelques semaines de la sortie en salles, la promotion s’intensifie via une série d’affiches et d’extraits tous plus allusifs les uns que les autres : l’ensemble de l’excellent casting est ainsi mis à contribution pour s’afficher en plein orgasme.

D’ailleurs, là où des campagnes promotionnelles du même acabit avaient été interdites sur la voie publique, à l’instar de celles d’artistes comme Saez, Étienne Daho, ou celles du film Les Infidèles, ces affiches-ci ne posent visiblement pas problème, étant donné qu’elles sont placardées dans chaque rue de la capitale.
Mais l’interdiction au moins de 12 ans est venue briser ces faux-semblants : Nymphomaniac n’est pas l’œuvre sulfureuse qui a été vendue depuis deux ans au public et à la presse, qui ne manquent d’ailleurs pas de se plaindre du mensonge qu’a constitué la campagne de promotion du film, ce qui ne l’a pas pour autant sauvé d’un échec. Mais n’est-il pas encore trop tôt pour parler d’arnaque ?
 Deux versions d’un même film
Si vous vous êtes rendus dans les salles obscures, vous n’avez pas pu passer à côté de cet avertissement, avec lequel s’ouvre le long-métrage : « Ce film est une version abrégée, et censurée, de la version originale de Nymph()maniac de Lars von Trier. Il a été réalisé avec sa permission, mais sans autre implication de sa part ».
Le film sorti en France est donc une version raccourcie, le director’s cut ayant une durée de 5h30 (4h00 chez nous, déclinées en deux volumes de 2h). La rumeur fait état d’un refus du metteur en scène de tailler dans son œuvre, dont le final cut aurait été confié aux producteurs du film. Dès lors, que penser du premier volume sorti en salles ? Difficile de répondre, précisément parce que le film projeté actuellement ne correspondrait pas à la vision qu’en a son créateur…Mais une nouvelle fois, cela semble faire partie des stratégies mises en place pour accroître le succès du film puisque, comme l’a récemment indiqué sa productrice, Lars von Trier a bien consenti aux deux versions de son œuvre : une hard et une soft, pour obtenir une meilleure visibilité internationale.
Personne n’a encore eu accès à la version intégrale, qui devrait être projetée en première exclusivité au prochain Festival international du film de Berlin, mais une chose est sûre, vous n’avez pas fini d’entendre parler de Nymphomaniac…
 
David Da Costa
Sources :
Nymphomaniacthemovie.com
Lemonde.fr
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Jacques a dit : « Triez de plaisir »

 
« Et si vous pimentiez vos relations avec les déchets ? Découvrez les plaisirs du tri sans complexe » Voilà la promesse de la nouvelle campagne de sensibilisation au tri sélectif lancée par la métropole d’Angers. Revisitant le Kamasutra en 12 positions de recyclage, lejustetri.fr cherche à capter spécifiquement l’attention des étudiants, très présents dans la ville, pour donner enfin un côté « sexy » au tri des déchets.
 
Sexe et communication, ça marche à tous les coups ?
Utiliser les connotations sexuelles pour convaincre, ce n’est pas nouveau. Déjà en 1939, dans Le viol des foules par la propagande politique, Serge Tchakhotine mettait en évidence la manière dont l’utilisation des pulsions pouvait servir une cause idéologique, et parmi elles il comptait la pulsion sexuelle.
À présent employé de manière beaucoup moins subversive, le sexe reste un ressort de communication fréquemment utilisé. Et quoi de mieux quand il s’agit de toucher la cible spécifique des jeunes, cette espèce mutante en permanence livrée à un déferlement hormonal incontrôlable ? En effet, comme l’affirme sans complexe Olivia Dansette, responsable de fabrication à Liner Communication, l’agence qui a réalisé cette campagne : « Le plaisir sexuel est l’une des préoccupations des jeunes, c’est bien connu. Nous avons donc proposé une campagne décalée et ludique, qui devrait permettre de les interpeller plus facilement. »
Une assimilation qui paraît un peu simpliste. Mais se défendant de tout côté scabreux, cette opération n’aurait que pour but d’enclencher le dialogue avec les jeunes. Le site Internet s’accompagne en effet d’une tournée au contact des étudiants dans les principales universités angevines avec, au programme, théâtre de rue (le « Trishow »), distributions de badges et de tracts informatifs…
 
Un site Internet difficilement recyclable
Toutefois, au-delà des petits jeux et tests extrêmement bien conçus et interactifs, on regrette tout de même un peu que l’information n’aille pas jusqu’au bout de sa mission. Impossible par exemple de récupérer sur le site Internet un petit récapitulatif des bons gestes à adopter, qui en gardant un ton humoristique aurait pu être placé facilement sur le frigo des étudiants. À vouloir jouer sur le ludique à tout prix, lejustetri.fr constitue donc un outil de sensibilisation selon moi trop éphémère, négligeant le fait que c’est devant sa poubelle que l’on se retrouve désarçonné à devoir trier, plutôt que devant son écran d’ordinateur.
 
Un enjeu d’image pour la métropole d’Angers
Mais au-delà du tri sélectif, il ne faut pas oublier le retentissement que peut avoir une telle campagne pour Angers et sa métropole. 
Avec des campagnes telles que « Je veux Metz » ou encore « L’Aisne it’s open », les villes et agglomérations rivalisent d’originalité pour attirer les jeunes talents.
Ainsi pour Angers Loire Métropole, capitale européenne du développement durable, cette campagne est aussi un enjeu d’image pour se montrer comme une ville dynamique et innovante, afin de continuer à attirer des étudiants mais également de jeunes actifs.
Les petites vidéos proposées sur le site sont d’ailleurs astucieusement tournées dans des lieux touristiques de la ville d’Angers, tel un placement de produit discret. De même, cette opération est lancée stratégiquement un mois avant « Made in Angers », le gros évènement annuel qui vise à promouvoir l’économie angevine et ses filières stratégiques, dont bien évidemment le développement durable.

Judicaëlle Moussier

Affiche Manix Skyn 2012
Agora, Com & Société

Long, court, serré, sans sucre…?

 
Vous l’avez vu en marchant dans le métro, et vous avez adopté deux réactions très différentes. La première : l’indifférence la plus totale, comme si elle était entièrement construite de déjà-vus ; la deuxième (la mienne) : vous êtes restés pantois, fascinés, hypnotisés.
La publicité SKYN de Manix transcende tous les codes, en effet. En communication on recycle souvent les composantes médiatiques pour faire du neuf, on hérite d’une histoire graphique, sociale, publicitaire : SKYN se situe à l’exact milieu entre les pubs L’Or Expresso, et les pop-up de sites porno qui apparaissent sur les sites de streaming. A L’Or, elle reprend les couleurs, la rhétorique des sens, le packaging et même en partie la typographie. Au pop-up elle reprend la pose lascive du modèle, la citation en exergue, et l’utilisation très objectivante du corps féminin. Ca y est ? Vous arrivez enfin à dissiper le sentiment étrange provoqué par cette pub ? Comme si elle était à la fois surprenante et invisible, exactement comme le produit qu’elle vend… Eh oui : Manix a banalisé le fait qu’on pouvait vendre du sexe (et implicitement la femme qui va avec) comme du café.
Pourtant, leur campagne en ligne était si loin de cet échec publicitaire ! Il y a le spot « SKYN REVOLUTION » à regarder plus bas, qui développe plusieurs arguments avec un humour douteux, mais dans l’ensemble plus subtil que l’affiche :
 
Et la campagne se décline avec des acteurs différents pour chaque pays. Se joignent à cela une tournée de soirées promotionnelles, un jeu de plateforme en ligne qui enjoint les utilisateurs ou les utilisatrices à attraper des préservatifs pour augmenter leur baromètre de sensations, et enfin la possibilité de devenir testeur officiel de la marque. Alors pourquoi –mais pourquoi ?- ces affiches ?! Il faut maintenant préciser que les publicités françaises ont comme phrase en exergue : « 97% des personnes qui essaient SKYN le recommande* », et l’astérisque précise que l’étude a été menée sur 244 hommes et femmes entre 16 et 50 ans (ce qui déshumanise peut-être encore plus la femme présentée, par rapport à l’affiche anglaise).
Alors pour comprendre, tentons de voir quel pourrait être l’objectif de cet affichage. On note d’abord la forte volonté de faire plus luxueux, plus sophistiqué (couleur noir et or), comme si tous les grains du latex avait été sélectionnés avec attention et amour, et enfermés avec tendresse dans une seule capsule pleine de saveur ! On ne peut s’empêcher de remarquer le graphisme qui se veut caricaturalement « oriental », ainsi que la peau métissée du modèle : cherche-t-on à nous vendre de l’exotisme ; vise-t-on une niche ? Enfin l’argument principal reste très bien résumé dans les termes « sensations » et « peau » : « SKYN » ça ne s’invente pas, et cette phrase « closest thing to wear nothing », ou « la sensation de ne rien porter », nous font bien comprendre que la cible principale reste le public masculin, en quête d’une révolution technologique de la protection sexuelle, et selon les publicitaires, incapables de considérer la femme autrement que comme l’opercule d’une capsule de café.
Il aurait pu être intéressant, cependant, de rassurer sur la qualité du produit : s’ils sont si fins qu’on ne les sent pas, pourquoi ils ne seraient pas plus fragiles que les autres ? Autre question : pourquoi avoir gardé une campagne plus ouverte et humoristique sur Internet et un affichage machiste, sexiste et insultant dans le métro ?
 
Marine G.
Sources :
Le site publicitaire de SKYN et la chaine Youtube Manix
Merci à Adèle S., Rui F., Noémie S., Xavier B., et tout ceux qui ont bien voulu parler de cette affiche avec moi.

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