Médias

Le smartphone peut-il rendre heureux ?

« Tous les hommes recherchent d’être heureux. Cela est sans exception, quelques différents moyens qu’ils y emploient. […] C’est le motif de toutes les actions de tous les hommes, jusqu’à ceux qui se tuent et qui se pendent. »

Pascal, dans cet extrait des Pensées (1670), affirme une vérité qui rejoint le bon sens: le bonheur est la fin de toutes nos actions, peu importe le moyen. Qui, en effet, ne choisirait pas le bien-être face à la souffrance, quelle que soit la situation ?
Pour le philosophe, toutefois, seule la foi en Dieu permet d’atteindre un bonheur durable et véritable. Mais Pascal n’a vécu ni l’avènement du smartphone, ni la création de la psychologie positive. Or l’association de ces deux tendances apporte, à en croire certains, une solution pour tous à l’éternel problème de la quête du bonheur.

the take application
Société

The Take : nouveau visage du placement de produit ?

Les lunettes portées par Scarlett Johansson dans Lucy vous ont fait de l’œil ? Nul besoin d’écumer les boutiques de produits dérivés à la recherche d’imitations cheap qui vous coûteraient deux points de vision. L’application pour smartphone The Take permet de les scanner dans le film et de vous les procurer, changeant le produit culturel en la plus pointue des boutiques. De quoi souffler sur les braises du débat autour du placement de produit au cinéma et dans les séries.

The Take, pour s’habiller comme dans les films américains
Lancée il y a quelques mois, l’application The Take permet d’acquérir des vêtements, des accessoires ou même l’adresse d’un restaurant repérés dans un film (profil blockbuster américain uniquement). Le principe est simple : grâce à la reconnaissance sonore, l’appli identifie le film qu’est en train de regarder l’utilisateur avant de lui proposer une sélection de modèles portés par les acteurs dans les scènes principales. Avec un hyperlien direct, le spectateur-shoppeur est ensuite conduit vers une plateforme de vente où il trouvera le produit identique ou, lorsque l’appli n’a pas réussi à le trouver, un produit similaire qui fera parfaitement illusion. Une sorte de Shazam vestimentaire, en somme. Voilà de quoi réjouir les fans et désoler les puristes réticents au placement de produit.

De l’efficacité du placement de produit : du cinéma au ciné-marque
Le placement de produit est profondément lié à l’histoire du cinéma, puisqu’il est déjà utilisé par les frères Lumière, puis industrialisé après le formidable succès des bonbons Reese’s Pieces, à la suite de E.T. : The Extraterrestrial de Steven Spielberg. Aujourd’hui, le placement de produit est de plus en plus plébiscité par les marques. En effet, il afficherait un ROI (retour sur investissement) moyen quatre fois supérieur à un spot publicitaire, ce qui se traduit par un gain de notoriété et une envie de se renseigner sur le produit bien supérieure. Comment expliquer le succès de cette publicité clandestine ?
Notre époque est à la saturation publicitaire : la plupart des publicités se confrontent à l’hostilité des spectateurs. Pour beaucoup, la pub, c’est la pause, le moment d’aller se chercher un café ou de zapper, pour ne peut-être jamais revenir, au grand damne des annonceurs. C’est en partie la raison pour laquelle la frontière entre la publicité et le film ou la série – jingle, écran noir ou encore petit garçon de Médiavision surfant gaiment sur son ticket de cinéma – tend à s’amincir et à devenir poreuse. Même au sein de cette distinction initiale, les genres se brouillent, quand certains films ressemblent à de gigantesques publicités et que les marques n’hésitent plus à réaliser de véritables courts métrages artistiques, comme La légende de Shalimar – Le film de Guerlain. Ainsi, les différentes strates du programme audiovisuel s’homogénéisent.
C’est ce double phénomène qui est conceptualisé par Valérie Patrin-Leclère, Caroline Marti de Montety et Karine Berthelot-Guiet sous le nom de « publicitarisation » et « dépublicitarisation ».

Valérie Patrin-Leclère, définit la publicitarisation comme « l’adaptation de la forme des médias, de leurs contenus, et des pratiques professionnelles dont ils procèdent, à la nécessité d’accueillir la publicité. »

La notion de « dépublicitarisation », développée par Caroline De Montety renvoie quant à elle à l’action des marques qui développent des dispositifs médiatiques et culturels dans lesquels l’aspect promotionnel est relayé au second plan.
Alors que nous sommes agacés par l’intrusion de la publicité sur nos écrans, et donc sur notre défensive vis-à-vis des marques, nous adoptons une attitude tout à fait bienveillante devant notre programme. Autrement dit, c’est le moment idéal pour une marque de se soumettre à notre regard énamouré.
  Un des multiples placements de produit dans Plus belle la vie.
Et le spectateur est étonnement tolérant ! Une enquête menée par Publicis révèle par exemple que 96% des spectateurs estiment que le placement de produit ne nuit pas à la liberté de création ni à la qualité de l’œuvre et 85% reconnaissent qu’il facilite la mémorisation de la marque.
La relation complexe entre les marques et le cinéma
Le cinéma et les marques entretiennent une relation amour-haine due à leur dépendance réciproque. Le cinéma a bien souvent besoin d’un financement externe : la liberté de création est permise par un investissement des marques, qui influencent également le processus de commercialisation du film, c’est-à-dire sa promotion.
Evidemment, la réussite du placement de produit dépend de l’équilibre entre les intérêts divergents de l’annonceur et du réalisateur. L’annonceur recherche la centralité et la visibilité, tandis que l’auteur du film qui accepte le placement a généralement intérêt à ce que le produit se remarque le moins possible, au contraire, se fonde dans le décor pour ne pas dénaturer le projet artistique initial. Et pour le spectateur, rien n’est plus irritant que d’être ramené à la réalité par un gros plan sur la montre Omega de James Bond au beau milieu d’une scène d’action. Nous voilà embarqués dans une furieuse chasse aux marques pour le restant de la séance, comme s’il s’agissait de « trouver l’intrus ».
Le placement de produit le plus efficace est celui qui s’insère pertinemment dans la fiction, qu’il soit là par simple réalisme (une voiture au logo flouté retient d’avantage l’attention qu’autre chose) ou qu’il serve l’histoire. Une marque est souvent un signe à part entière dans la construction d’un personnage. Elle en dit long sur son origine sociale ou ses revenus, sur son attachement ou son rejet de la mode, facilite l’ancrage de l’action dans un cadre spatio-temporel précis et permet aux spectateurs de se reconnaître en ces personnages. Là, la marque devient désirable car elle ne détonne pas outrageusement. C’est le spectateur qui va entreprendre la démarche de se renseigner sur le produit. C’est là qu’intervient The Take, qui pourrait instaurer une forme de placement de produit alternative et moins indigeste.
L’achat par smartphone, un marché à saisir
Nombre de marques et de producteurs ont décelé le potentiel d’une telle application. Initialement annoncée pour début 2015, l’application Shazam Fashion propose ainsi d’indiquer la provenance des vêtements et accessoires que portent les présentateurs télé et d’accompagner l’achat du spectateur. Ce qui est intéressant, c’est que Shazam Fashion ne fonctionne pas par reconnaissance visuelle du vêtement mais grâce à un système de partenariats avec les producteurs de télévisions américains. Il y a plusieurs années déjà, Andrew Fisher, le PDG de Shazam déclarait dans les pages du Guardian avoir « engagé des partenariats avec plus de 160 émissions de télévision ».
Ce n’est évidemment pas l’amour du 7ème art ou quelque philanthropie qui incite à la création de ces applications mais le marché prometteur de l’achat depuis les smartphones, en nette hausse. Selon une étude, 70% des consommateurs américains ont ainsi effectué un achat depuis leur téléphone portable dans les six derniers mois, contre 59% en 2013. Si les chiffres sont moins impressionnants en France, la tendance est néanmoins identique. C’est ainsi qu’on observe des applis de mode « sourcing » se développer sous diverses formes.
Asap54, par exemple, propose à ses utilisateurs de retrouver l’origine d’un vêtement vu sur un passant à partir d’une simple photo. Une fois la correspondance trouvée, elle redirige l’utilisateur vers le site marchand en question. Et si son système de scan ne parvient pas à trouver de correspondance exacte, plusieurs équivalents proposés. On peut aussi penser à BrandsOnAir et son système de partenariats avec les marques, ou encore à WhereToGet et sa communauté de passionnés qui mènent l’enquête pour trouver la provenance des vêtements photographiés. Cette dernière entretient également un rapport étroit avec les marques, que rien n’empêche d’être des membres à part entière et donc d’encourager les internautes à acheter leurs produits à travers un tracking des recherches et un système de pistage du profil des internautes.

Ces applications de fashion sourcing font du monde une vaste boutique, de chaque passant un ambassadeur d’une marque et de tous les instants une occasion de consommer. C’est d’ailleurs sur cette tendance que Comptoir des cotonniers avait surfé lors de sa campagne Cette page est une boutique.
Louise Pfirsch
@: Louise Pfirsch
Sources :
www.e-marketing.fr
konbini.com
lemonde.fr
histoiredesmedias.com
Valérie Patrin-Leclère, Caroline Marti de Montety, Karine Berthelot-Guiet, La fin de la publicité ? Tours et contours de la dépublicitarisation
Crédits images :
lemonde.fr
e-marketing.fr
konbini.com

Archives

Mon beau smartphone, dis-moi ce que je veux : la théorie de l'aliénation volontaire

 
Du succès des applications tyranniques
Vous avez l’impression que vos journées ne sont que successions de prises de décisions éreintantes ? Que faire ce soir ? Où manger ? Combien dépenser ? Plus besoin de vous échiner sur ces choix cornéliens (si si !), un florilège d’applications pour smartphone est là pour prendre la décision à votre place ! Roll Decisions tire au sort une décision parmi les différentes options, Yes No Decider répond à vos doutes par oui ou non, Decision King s’engage quant à elle à sélectionner une de vos dix possibilités, « vous [donnant] ce que vous voulez en rendant votre vie tellement plus simple ! ». Si le concept de ces applications n’est pas révolutionnaire − il ne s’agit que de que la version 2.0 du pile ou face ou autre lancer de dés −, la vague de téléchargement de celles-ci soulève une question, celle de l’aliénation volontaire d’un utilisateur qui se soumet à une machine. Ce comportement est révélateur d’une tendance chez les consommateurs à déléguer leurs prises de décisions.
Du panier de légume au vêtement : quand l’entreprise construit ce que nous sommes
Depuis quelques années se répand une nouvelle forme des courses alimentaires, celle du panier bio. Le client s’abonne auprès d’un producteur et reçoit chaque semaine, chez lui ou sur son lieu de travail, un panier de fruits et légumes livré avec des recettes. Il ne décide donc plus des aliments qu’il met dans son assiette ni de leurs quantités, mais le voilà débarrassé de la corvée des courses et du sempiternel « qu’est-ce qu’on mange ? », le tout complété par la satisfaction de manger sain et responsable. Cette tendance du consommateur à confier la responsabilité du choix à une entreprise s’est diffusée dans d’autres domaines, comme celui de la mode. Ainsi, avec le site sefairelamalle.com, après avoir indiqué son style, l’internaute reçoit à son domicile une malle pleine de vêtements et accessoires sélectionnés par une styliste. Il dispose alors d’une semaine pour décider de ce qu’il souhaite conserver ou renvoyer, à ses frais s’il n’effectue pas un achat d’une valeur de 100 euros ou plus. Là encore, le service répond aux manques de temps et d’inspiration (principaux maux de notre époque, semble-t-il). N’y a-t-il rien de dérangeant, cependant, à confier à autrui un choix aussi personnel que celui de l’apparence ? Paradoxalement, alors que les acheteurs n’ont jamais eu autant de choix, notamment avec le e-commerce et la disparition presque totale des frontières commerciales, ils s’érigent des limites. Comment interpréter cette recherche d’amenuisement de leur liberté de choix ?
Une aliénation volontaire
Bien sûr, cette tendance s’explique par le gain de temps et d’énergie qu’elle offre. Elle répond à la lassitude de l’individu face à une hyper sollicitation de l’offre. En fait, ce phénomène met en lumière une nouvelle façon de consommer issue du contexte de crise : le consommateur contemporain cherche à se libérer du modèle traditionnel « un bien – un prix » à travers le principe d’abonnement, par exemple. Recevoir un panier rempli suite à un prélèvement mensuel, c’est se libérer du carcan du prix, c’est oublier que les trois bâtons de rhubarbe ont coûté 3 euros, la salade 1,50. Mais les prix ne sont pas le principal moteur de ces abonnements. Plus qu’un produit, on achète une expérience, l’excitation de déballer des vêtements sectionnés pour nous, l’occasion de se sentir comme un enfant à Noël.

Dans cette même lignée, le boom des boîtes surprises telles que la BirchBox ou la GlossyBox illustre le primat de la découverte, de la surprise, de l’émerveillement. Pour 15 à 30 euros par mois en moyenne, l’abonné reçoit un paquet à l’emballage soigné contenant des échantillons de produits de beauté, des gadgets, des articles d’épicerie fine. A la manière des cornets surprise fille ou garçon d’antan, on ne choisit pas des produits mais un univers. La tendance est ainsi à la « box lifestyle ». Little Box se décline par exemple en Charity, New York ou Paris Box. Plusieurs magazines ont suivi la tendance : il s’agit de prolonger l’univers du journal au travers de produits sélectionnés. De cette façon, on se maquille Cosmo, on mange Cosmo, on vit Cosmo. L’infantilisation de la consommation, en somme, est un moyen d’offrir un souffle de légèreté au consommateur.

Enfin, être abonné à une « box », c’est intégrer une communauté ; recevoir une malle, adopter son style. Pour être soi, il faut passer par l’autre.
La promotion de Big Brother
La tendance à la délégation des choix est du pain béni, pour les entreprises. On assiste en effet à une uniformisation des comportements des consommateurs qui cherchent à intégrer un univers, une communauté. En réaction à l’affadissement de la volonté des clients, les sites internet multiplient les propositions des produits, souvent culturels, « qui pourraient vous intéresser », grâce au fichage des données. Ainsi, des pubs en rapport avec nos recherches sur Internet fleurissent de toutes parts de l’écran, Netflix nous indique les séries que nous allons aimer et Amazon projette d’envoyer près de chez nous des produits que nous n’avons pas encore commandés. Internet permet d’anticiper les envies des consommateurs, d’y répondre avant qu’elles ne soient formulées. C’est donc un double mouvement qui se crée : d’une part, une personnalisation (apparente, du moins) de l’offre, de l’autre une uniformisation des comportements.
A trop se laisser guider, ne risquons-nous pas de perdre notre individualité ? Cette angoisse prend désormais le nom de « No data », à l’heure où des sites revendiquent qu’ils n’enregistrent pas les données de leurs utilisateurs comme argument de notoriété…
 
Louise Pfirsch
 
Sources :
liberation.fr
L’Oeil By Laser, n°198
sefairelamalle.com
Crédits photos :
hrringleader.com
My Little Box
sefairelamalle.com

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Flops

C is for Cheeky

 
Il y a une petite semaine, Microsoft uploadait sur Youtube une énième vidéo parodique envers Apple et ses Smartphones : deux minutes de montage frénétique, faisant se succéder des réunions fictives où Tim Cooks et Jony Ive [1] recevaient les explications ridicules et humoristiques de deux designers sur les fonctionnalités controversées des nouveaux Iphones.
Car comme pour toutes les sorties attendues, la mise en vente des Iphones 5s et 5c était une occasion trop belle pour ne pas se fendre d’une pique, et certainement attirer l’attention sur un Windows Phone qui ne dépasse pas les 4% du marché. Après tout, la dernière image de la vidéo affiche un fringant « #timetoswitch ».
Qu’il ait été stratégique ou machinal, l’humour lesté de la vidéo n’aurait pas pu causer grand mal, si l’acteur choisi pour représenter Cooks de dos n’avait pas furieusement évoqué Steve Jobs. Or, il n’y a rien de plus vulgaire que d’entacher l’aura christique du regretté fondateur de la marque à la pomme.
Un enragement de la twittosphère et quelques émois journalistiques plus tard, Microsoft en était réduit à s’excuser et à retirer le clip de la chaîne Youtube du Windows Phone.
(Nulle crainte cependant, car de grandes âmes sont parvenues à la sauver et la garder en ligne) :

Il n’y a rien de surprenant à ce que le manque de tact de la référence ait causé une si vive réaction. Mais que dire de l’aveuglement de Microsoft ? Le support tenait certes plus du Community Management que de la publicité à proprement parler, mais il était légèrement naïf de penser que la réaction des fans de la marque éclipserait celle des internautes choqués.
Moralité : la diffusion sur Internet ne touche pas que les fanboys. Cette bête vérité semble pouvoir échapper même à des structures aussi rompues aux stratégies digitales que Microsoft, mais trahit une nouvelle fois un essoufflement intéressant dans la bataille infinie entre les deux géants. Outre une relative fébrilité de la part d’Apple dans ses choix de positionnement (les moqueries sur l’orientation résolument cheap – voire hypocrite – du Iphone 5c ne manquent pas), ce fail laisse à penser que Microsoft est lui aussi à court d’idées lorsqu’il s’agit de relancer l’intérêt autour de produits qui sont continuellement repoussés par Android.
Les imaginaires geeks, toujours friands d’anecdotes cocasses sur la rivalité médiatique entre constructeurs de Smartphones, en sont devenus suffisamment prometteurs pour que Microsoft risque l’hallali sur du simple contenu Youtube ; et ce dérèglement finit par créer une collision improbable entre communication digitale et marketing. Il y a toujours des leçons à tirer des plus grands.
 
Léo Fauvel
Sources :
Mashable
The Verge
Computer World.com
Comscore.com
 
[1] respectivement PDG et Vice-président du design de la compagnie

Blackberry
Société

Vendre la peau de l’ours (canadien) ?

Au terme de deux ans de difficulté, l’entreprise anciennement nommée RIM, rebaptisée BlackBerry à l’occasion, a présenté le 30 janvier la nouvelle version de son système d’exploitation (OS, pour Operating System), BlackBerry10, qui équipe d’ores et déjà deux nouveaux terminaux, le Z10 et le Q10.
Comment la firme, leader incontesté des smartphones il y a encore 3 ans, en grande difficulté face à la montée en puissance de Samsung et d’Apple, a-t-elle mis en scène son retour et pour quel résultat ?
La question est d’importance, parce que c’est une bonne part de l’avenir de BlackBerry qui s’est jouée dans la présentation du 30 janvier, du moins pour ce qui est de sa portée symbolique.
C’était une présentation du directeur général Thorsten Heins, retransmise sur internet en direct, une présentation telle que les a popularisées Steve Jobs sous le nom de keynote ; un exercice dans lequel on a pu voir Xavier Niel au lancement de Free Mobile et plus récemment Stéphane Richard pour la mise sur le marché de la nouvelle Livebox.
Pour BlackBerry, il s’agissait de rassurer d’une part les marchés, de l’autre les utilisateurs, sur sa capacité à être à la pointe de l’innovation et d’assurer le service fiable qui a beaucoup contribué à son succès premier. Il s’agissait également de montrer que l’on avait pris acte des déboires de ces deux dernières années, et de redonner à BlackBerry une unité, une cohésion lui permettant de reconquérir les marchés.
En ce sens, la prestation de Thorsten Heins a été exemplaire : il n’a eu de cesse de saluer et de remercier ses quelques 12 000 collaborateurs. De même la décision de donner un nom unique à l’entreprise, à sa marque et à son système d’exploitation est une façon exemplaire de mobiliser autour d’un objet unique : BlackBerry. On a pourtant senti le directeur général peu à l’aise dans cet exercice particulier, inséparable désormais de toute annonce relative aux nouvelles technologies.
C’est que l’image de BlackBerry a toujours été du côté de la discrétion, comme il se doit pour une marque dont le marché principal a été l’entreprise : rien à voir avec le charisme d’un Steve Jobs ou, plus tonitruant, d’un Xavier Niel.
Un lourd travail a été accompli pour moderniser des terminaux et un OS largement distancés par ses concurrents : des photographies de piètre qualité, une navigation internet bien en deçà de ce qui est proposé aujourd’hui, un catalogue d’applications bien trop pauvres face aux 700 000 applications d’Apple ou au 800 000 d’Androïd… Autant de points critiques sur lesquels BlackBerry a insisté au cours de cette présentation. Rattraper le temps perdu, parfaire le présent, anticiper l’avenir, tels étaient les mots d’ordre : le clavier, tactile dans le cas Z10, physique pour le Q10, a fait l’objet d’un soin particulier en tant qu’étendard de la marque, mais on a pu découvrir des fonctionnalités intéressantes comme le partage d’écran au cours d’un appel vidéo, toute une panoplie de gestes pour interagir avec son terminal, ou encore la possibilité d’accéder à ses messages sans avoir à repasser par un menu centralisé.
À noter également, l’intégration poussée de Twitter, Facebook ou encore LinkedIn, désormais réunis avec les mails et les sms.
On a retrouvé dans cette présentation tous les gènes de BlackBerry : la rigueur, la fiabilité, l’efficacité, mais également une certaine vision de l’avenir sur nos smartphones.
Par ailleurs, émanait de cette présentation un parfum de sincérité : un peu du relatif inconfort de Thorsten Heins et beaucoup de cette belle marque aujourd’hui acculée qui a joué sa dernière carte.
Mais dans ce monde technologique où les évolutions sont fulgurantes et les déclins tout autant, il serait mal avisé de vendre la peau de l’ours (canadien), d’autant que BlackBerry10 et ses deux terminaux sont alléchants, et anticipent la grande versatilité que l’on exige déjà de nos appareils en termes de manipulation, d’usages et d’efficacité.
Parce que c’est toujours un crève-cœur de voir partir à la dérive une belle entreprise, on ne peut que lui souhaiter une année 2013 dynamique, qui, à l’image de son nouveau baptême, tirera un trait définitif sur le passé.

Oscar Dassetto

CRÉDIT PHOTO Justin Sullivan/Getty Images

Les Fast

Feel Me Tender !

 
Il semblerait que nous soyons de plus en plus connectés et pourtant de moins en moins proches. C’est le constat de Marco Triverio, l’inventeur d’une nouvelle application pour le moins surprenante nommée Feel Me*. Le concept est simple : en plus d’une interface de Live Chat similaire à celle des textos sur Iphone ou à Whatsapp, l’utilisateur peut également signaler à son destinataire qu’il touche l’écran, où il le touche et de quelle ‘ »façon ». Alors que les nouvelles applications tendent majoritairement à faire appel aux sens de la vue et de l’ouïe, celle -ci se concentre sur le toucher.
Quand l’émetteur appose son doigt sur l’écran du smartphone, son récepteur peut voir s’inscrire sur le sien un cercle à l’endroit choisi lui signifiant un contact tout autre qui se veut plus émotionnel, plus tactile que jamais. Sans compter que le téléphone émet lui aussi une vibration qui décuple la sensation. Tout cela associé au Chat Video pourrait sonner le glas de l’afterwork au profit de la soirée « canapé téléphonée ».
Découvrez la video d’une application à surveiller :

Plus d’infos sur le site…
 
Marion Mons
*Ressent mon toucher
Sources : psfk.com
Crédits photo : ©Marco Triverio

FranceTV-Info-iPhone
Société

Francetv-info : l’information hybride

 
Voilà quatre mois que Francetv-Info.fr a fait son apparition sur le Web (et sur les smartphones). Une plateforme aux promesses ambitieuses qui s’inscrit dans le prolongement des évolutions médiatiques récentes.
Il s’agit d’une plateforme lancée par France Télévision avec l’envie de permettre à l’internaute de suivre l’actualité au moment même où elle se passe. L’accès au site ne nécessite pas de s’inscrire. Concrètement, dans la lignée de Twitter, on peut suivre un fil d’actualité constitué de courts messages émanant d’une équipe de journalistes et de points de bilan faits régulièrement sur l’ensemble des sujets chauds. Comme cela est possible sur Twitter, chaque post commence par un hash tag qui permet de retrouver rapidement les informations que l’on veut consulter. La plateforme veut ainsi proposer de l’actualité « sur mesure », c’est-à-dire que l’internaute peut aller directement aux informations qui l’intéressent via le mur d’actualité ou en allant sur les pages et les onglets qui regroupent les sujets qui font l’actualité sous formes d’articles plus longs et plus détaillés ou encore en parcourant les pages dédiées aux régions. Francetv-info tire ainsi profit du vaste réseau de rédactions de France Télévision puisque chaque région et chaque thème a son propre flux d’informations. Autre innovation, on peut directement interpeler les journalistes en leur envoyant une question ou une remarque. Là encore, on est dans le prolongement de Twitter et cela contribue au « sur mesure » prôné par Francetv-info.
Ainsi, Francetv-info propose de l’information en continu en mettant à disposition un journaliste qui répond en live aux possibles messages des lecteurs, des articles de fond, des liens vers d’autres sites d’analyse d’actualité ou encore des photos et des vidéos. C’est donc un hybride entre les chaînes télévisuelles d’information en continu et Twitter. De ces deux médias, Francetv-Info garde le foisonnement et l’ubiquité. Des chaînes d’information, Francetv-info conserve la légitimité et la crédibilité. Enfin, de Twitter, Francetv-info garde l’interactivité, la proximité avec les journalistes et la possibilité de ne voir que ce que l’on veut. Francetv-info cherche ainsi à réduire l’asymétrie qui existe entre journalistes et curieux autour du traitement de l’information.
 
Thomas Millard

Archives

Jacques a dit que le cadeau idéal était un smartphone

Je ne sais pas si vous le savez mais, dernièrement, Jacques a dit qu’il fallait avoir un smartphone. Bizarrement, je ne serais pas étonnée de savoir que nombreux sont ceux d’entre vous qui ont pu déballer un merveilleux IPhone 4S le soir de Noël, au pied du sapin. Pour autant, cet article n’a pas pour but de débattre du fait de savoir si l’IPhone est un smartphone mieux que les autres (Noël c’est la saison des clémentines, pas celle des pommes !) mais bien de se demander ce que révèle cet engouement actuel pour cet outil qui, sans être tout à fait un ordinateur, n’est pas non plus complètement un téléphone. En effet, force est de constater que les Smartphones sont partout, entre toutes les mains et que mis à part quelques réfractaires, personne n’y trouve rien à redire.
A première vue, cela semble être une avancée logique : on fait des progrès, on découvre de nouvelles technologies, on cherche à être plus fonctionnel et donc multitâche : avènement du Smartphone. C’est comme le passage du minitel à l’ordinateur finalement. Les applis se multiplient, et nombreuses sont celles qui se révèlent véritablement utiles. Cependant, ce nouvel outil pose aussi de vraies questions de société.

 
A-t-on besoin de ce contact permanent avec le monde ?
 
Je m’explique. Désormais on a accès avec son téléphone à : ses sms, ses mails, son Facebook, son tweeter, You tube et j’en passe. Le smartphone devient alors un outil de plus, une clé supplémentaire d’entrée dans une vie virtuelle, une vie parallèle qui se développe en ligne et qui est dotée d’une certaine réalité. Les barrières s’effondrent et entrer dans cette sphère devient aussi simple que de se lever le matin et prendre son petit-déjeuner (souvent avec son Smartphone d’ailleurs tiens !). Plus besoin d’ordinateur, rien que votre téléphone, petit, pratique à transporter et qu’on a par habitude toujours sur soi.
Merveilleux ? Je n’en suis pas si sûre. Avoir accès à l’information H 24, et pouvoir soi-même la diffuser en temps réel n’est sans doute pas un si grand bienfait pour l’humanité.  On se retrouve noyé sous une masse d’information plus ou moins utile, qu’il faut contrôler et filtrer.  Ainsi, « ce matin j’ai mangé une clémentine, parce que c’est Noël et Noël, c’est la saison des clémentines ! xD » se retrouve à égalité, au moins en terme de visibilité sur votre petit écran, avec « Alerte le Monde, l’iranienne Sakineh condamnée à la lapidation pourrait être pendue ». Et là, chose remarquable, on squeeze plus souvent la deuxième que la première que l’on s’empresse même de commenter (« Ouais mais les clémentines ça pue quand tu les épluches et puis si elles viennent d’Espagne tu contribue au réchauffement climatique ! »). Attention, je ne dis pas qu’il faudrait définir une sorte de « permis de s’exprimer » sur la toile, je dis seulement que multiplier et faciliter à ce point l’accès aux médias entraine sans doute une dérive consistant à communiquer sur tout et n’importe quoi au point de ne plus différencier l’information utile du simple spam et surtout de noyer la première sous le flot de la deuxième. Un smartphone, n’est-ce pas un moyen d’amplifier un phénomène en plein développement qui favorise l’interaction en soi plutôt que le débat de fond ?
 
Et la fonction téléphone dans tout ça ?
 
Mon deuxième souci avec le smartphone concerne la fonction téléphone. J’ai découvert il y a peu qu’il n’était pas si simple de trouver un forfait appels illimités ! Pour l’obtenir  (et que le terme « illimité » signifie encore quelque chose), on se trouve obligé de récupérer internet en prime. Et à votre avis, que faut-il pour pouvoir profiter correctement de cette offre (que vous devez quand même payer 24 mois) : un smartphone ! Alors certes, ce smartphone dispose de quelques applis utiles mais j’ai bien peur d’exploser encore régulièrement le crédit appel de ce téléphone qui n’en est plus vraiment un puisque pas vraiment conçu pour ça.
A quand la mise en place de call-conférences, visio-conférences et j’en passe à prix abordable dans les abonnements ? Finalement, le développement de produits tels que le smartphone est le fruit de choix qui ont un impact sociétal. A l’heure actuelle, il semblerait donc qu’on insiste davantage sur le relationnel de groupe, sur l’importance de partager avec le plus grand nombre que sur les relations plus personnelles, sans doute plus profondes, qui se développent elles, davantage au moyen d’outils comme… le téléphone par exemple.
(Ci-dessous la pub M6 Mobile, forfaits abordables, illustre le propos me semble-t-il)

Je m’arrête là, c’est Noël et je vais manger des clémentines. Alors je profite du temps qu’il me reste à être connectée pour vous souhaiter de Joyeuses Fêtes !
 
Justine Jadaud
 
Crédits photo : ©Banksy