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Le scandale Findus, une vraie boucherie !

 

Le 7 février dernier, les organismes de contrôle britanniques découvrent que les lasagnes au bœuf Findus contiennent en réalité plus de 60% de viande chevaline. Une véritable enquête se met alors en route, prenant une dimension internationale.

Les protagonistes

– Findus, dit la partie émergée de l’iceberg (Suédois)

– Spanghero, dit le fournisseur (Français)

– Comigel, dit le fabricant (Français)

– le Consommateur, qui ne sait plus sur quel cheval monter

– les Végétariens (qui de toute façon ne sont pas concernés)

– les Abattoirs roumains, de mèche avec les équidés

– les Négociants, dits les négociants

Les suspects

Acte 1 : la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) fait le lien entre les produits interpellés de la marque suédoise, découverts en Angleterre, et un fournisseur français de viande surgelée, j’ai nommé Comigel. Findus menace de porter plainte contre ce groupe messin, qui lui, affirme avoir été « berné » par son fournisseur Spanghero.

Acte 2 : pour s’innocenter, Spanghero met en lumière la complexité du processus d’achat intracommunautaire. Complexité, faible mot pour décrire le trajet tortueux de la viande, à partir d’abattoirs roumains jusqu’en France, en passant par des négociants chypriotes et néerlandais (dimension internationale avez-vous dit ?) !

Acte 3 : l’affaire fait un bref détour par la Roumanie, accusée d’avoir un stock important de chevaux à écouler suite au délaissement de la charrette au profit de la voiture. Les abattoirs roumains clament leur innocence, en affichant les nombreux contrôles vétérinaires à l’abattage.

Acte 4 : une fois n’est pas coutume, c’est la théorie du complot qui revient à la charge, les producteurs roumains dénonçant une « combine » entre fournisseurs et clients.

Acte 5 : nouveau rebondissement dans l’affaire avec l’avancement de l’enquête de la DGCCRF. Le 18 février, l’organisme lance des perquisitions dans l’usine Spanghero de Castelnaudary, l’accusant de tromperie sur l’étiquetage. Selon les premiers résultats de l’enquête, le fournisseur de viande aurait sciemment revendu du cheval à la place du bœuf.

J’accuse… ?

Au début de l’affaire, on nage dans un Cluedo fantastique du plat préparé et surgelé, chacun semblant donc être la victime de l’autre :

– Findus, trompé sur la marchandise, qui a donc porté plainte contre X,

– Spanghero, qui a rejeté la faute sur le fabricant Comigel,

– Comigel, qui renvoie la balle à Spanghero et aux équidés roumains.

– les Roumains, soupçonnés car en début de chaîne, et qui essaient de se défendre tant bien que mal,

– les consommateurs, floués.

Le déroulement de l’enquête met en lumière ce qui semble être une fraude gigantesque sur l’étiquetage de la viande. Première mi-temps du Cluedo : j’accuse Spanghero, avec une fausse étiquette, à Castelnaudary ! Et quid de Comigel, qui pourrait avoir sciemment fermé les yeux sur les activités peu claires de son fournisseur ?

Selon Benoit Hamon, (conférence de presse du 21.02 à la suite d’une rencontre avec des représentants du secteur agroalimentaire) cette fraude européenne pourrait ne pas se limiter à Spanghero mais concerner aussi d’autres filières de la grande distribution.

En bon Capitaine Moutarde (sans jeu de mot gastronomique, vraiment), on ne sait plus à qui jeter la lasagne, ici !

L’art de la communication de crise

À l’heure de l’instantané, impossible de fuir le scandale ni de chercher à étouffer l’affaire. Les internautes s’en sont rapidement emparés à coups de détournements plus ou moins osés, mais amusants pour la plupart. Alors que le gouvernement tente de rassurer les consommateurs en montrant sa participation active dans la gestion de la crise, soyons honnêtes : comment consommateurs et supermarchés, qui achètent des produits à si bas prix, peuvent-ils croire une seconde que le circuit de commercialisation, de l’abattoir au présentoir, n’ait rien à cacher ?

Findus s’est contenté au début de marteler les deux mêmes arguments en boucle : le consommateur ne craint rien d’une part, et Findus a justement permis cette découverte, par sa rigueur et ses contrôles. Depuis une semaine, la marque change de stratégie et tente d’effacer sur la toile les liens entre son nom et cette triste affaire. On ne trouve plus sur leur page Facebook de publications sur ce thème. Ils ont également contacté plusieurs médias web à travers l’agence Reputation Squad. Le but étant de noyer le poisson (à défaut du cheval) pour que le nom de Findus cesse, à l’avenir, d’être associé à l’affaire dans les recherches internet.

A qui profite le crime ?

– À Twitter, qui profite aussi de la créativité des internautes ! Depuis le 7 février, les tweets à #Findus ne cessent de défiler. Les journaux y évoquent les faits nouveaux de l’enquête et les twittos partagent leur indignation et leurs meilleurs jeux de mots. D’autres hashtags ont dérivé du premier comme #Findusfail, #FindusPape (la démission du Pape a laissé un peu de répit à Findus) et pour les cinéphiles : #RemplaceUnNomDeFilmParLasagne. D’ailleurs, bientôt dans les salles : L’Homme qui murmurait à l’oreille des lasagnes et Harry Potter et les lasagnes mêlées.

– À la créativité des internautes:

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– Aux végétariens, qui ont la joie de pouvoir dire aux carnivores : « tu vois, je te l’avais bien dit ! » Comme « nous serons tous végétariens d’ici un demi-siècle » selon des chercheurs suédois (la viande étant trop chère à produire et diététiquement trop pauvre), autant compter sur les scandales de la boucherie industrielle pour accélérer le mouvement. Il est temps de s’y mettre !

– À Ebay, qui inaugure un nouveau marché underground : la vente de l’édition limitée des lasagnes Findus un bon moyen pour la marque suédoise, peut-être, de récupérer ses produits entachés ?

De toute façon, tout cela retombera vite dans l’oubli : qui se souvient encore précisément de l’affaire steak haché de chez Lidl, ou du concombre infecté, arme de destruction massive ? Ce genre d’affaire, entre scandale, fascination et fantasme, révèle surtout quelque chose de la société humaine et de ses évolutions. Le cas Findus et la grande crise de confiance qui en résulte nous en dit long sur le décalage entre attachement aux cultures nationales et contraintes imposées par la mondialisation. L’Affaire Findus influencera-t-elle durablement l’ère du local face au « village global » ? Poussera-t-elle les industriels à faire preuve de plus de transparence dans la fabrication et l’importation de leurs produits ? En attendant, j’ai comme une envie de lasagnes… Pas vous ?

 
Sophie Pottier et Pauline St Macary
Sources :
La découverte du plat à lasagnes
La communication de crise Findus, tant bien que mal
Détournements en images
Spanghero : coupable avéré ?
Effets du scandale sur le végétarisme et la bio-attitude

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