Allo Nabilla
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Allô Nabilla : quand les téléspectateurs commencent à raccrocher…

 

Le mardi 12 novembre dernier, NRJ12 a diffusé le premier épisode de son programme hybride : Allô Nabilla, Ma famille en Californie. La chaîne nous donne à voir une émission qu’elle qualifie de « dynasty reality française », empruntant à la fois aux codes de la télé-réalité et à ceux de la fiction. Un format insolite et déroutant, apparaissant comme la goutte d’eau qui fait déborder le vase médiatique, après s’être emparé du buzz autour de la formule phare « Allô ». 

Une audience qui ne suit pas la promotion agressive du programme

Image 2 - Ozap

Bien que NRJ12 ait investi dans des moyens publicitaires considérables – affiches géantes dans les bouches du métro parisien ; récurrence de la diffusion du teaser et du jingle de l’émission sur la chaîne – les audiences ne sont pas à la hauteur de cette promotion rugissante.

En effet, le 1er épisode du dynasty show ne réunit que 2,9% de part d’audience (soit 690 000 curieux), et le 2ème épisode seulement 1% de part d’audience soit environ 300 000 téléspectateurs, de maigres chiffres au regard d’une tapageuse campagne de communication. Le programme s’essoufflerait-il alors déjà ?

Un programme télévisuel qui décline à l’extrême la marque Nabilla…

En plus de son format atypique, il convient d’analyser le contenu même de l’émission, qui s’appuie sur le phénomène Nabilla. Plus qu’un simple phénomène, la starification progressive de Nabilla semble s’être muée en un véritable concept, une marque qui se décline à foison dans les différentes strates du monde médiatique. Une marque associée à un slogan – « Allô » – et à une identité reconnaissable, fondée sur une parole franche et spontanée. C’est précisément cette parole sans retenue qui fut à l’origine du buzz retentissant et de la folle surenchère médiatique, incarnée par le « Allô quoi », institué comme un quasi élément de langage (et aujourd’hui marque déposée), circulant dans la sphère médiatico-sociale.

Nabilla D8

Successivement invitée sur les plateaux de Canal (Le Supplément, Le Grand Journal, Le Tube), et plus récemment, dans les émissions de D8 (Voyage au bout de la nuit) et de France 4 (C’est quoi ce boucan ?), l’omniprésence médiatique de Nabilla exemplifie clairement une course à l’audience effrénée qui exploite l’image et la marque de la jeune femme. NRJ12 la porte à son paroxysme, en déclinant son slogan « Allô », pour l’insérer dans le titre même de son programme : Allô Nabilla, Ma famille en Californie.

… et dénature l’authenticité de la parole nabillesque*

NRJ12 propose assurément un programme au format nouveau, directement inspiré du dynasty reality américain filmant le quotidien de la famille Kardashian, mais son contenu semble toutefois nébuleux.
L’émission est à mi-chemin entre télé-réalité et fiction : Nabilla Benattia est érigée en narrateur et les dialogues sont scénarisés. Or, c’est incontestablement sa spontanéité et sa répartie naturelle qui constituent la marque de fabrique de Nabilla. Celle-ci a tissé son image sur une stratégie du buzz, fondée sur une parole impulsive et désinhibée, qui ne fait plus sens dès lors que celle-ci est écrite par avance. Dans Allô Nabilla, cette parole perd de son authenticité en devenant fictionnelle et réflexive (« Je vais tout vous raconter », dixit Nabilla dans la vidéo de lancement de son reality show). Sa scénarisation tacite, s’appuyant sur un script artificiel et stéréotypé, falsifie et sclérose son naturel.

Médias le magazine, sur France 5, tourne en dérision cette parole falsifiée qui se meut dans un scénario qui regorge de clichés :

Une stratégie du buzz vide de tout contenu – une « promotion du vide » ?

 L’émission semble incarner ce qui constitue l’attribut même de Nabilla : que l’on parle d’elle, même quand il n’y a rien à dire. A contrario d’une prise de parole reposant sur la rareté et le pondéré, le phénomène Nabilla est tel une coquille vide, qui s’appuie sur un contenant omniprésent et hautement médiatisé, et un contenu pauvre – si tant est qu’il y ait un message.

Un chroniqueur du Plus du Nouvel Observateur va même jusqu’à parler de « promotion du vide », soulignant la contradiction entre cette parole du buzz vouée à l’éphémère, et une stratégie communicationnelle qui s’établit dans le long terme. La limite réside en cela même : la parole nabillesque est singulière en ce qu’elle se cristallise et surgit dans un court terme médiatique, mais elle finit par s’étioler et se désagréger du fait de son omniprésence télévisuelle prolongée.

 A force de vouloir prolonger le buzz, Nabilla et la chaîne NRJ12 se heurtent aux limites de ce tapage médiatique, résolument volatile et périssable. C’est précisément ce caractère épisodique et précaire qui empêche le buzz de se constituer en une stratégie durable de communication. Par conséquent, le programme Allô Nabilla a-t-il des chances de s’ancrer dans le paysage audiovisuel français de manière pérenne ?

 Dès lors, je conclurais sur cette interrogation de Guillaume Jouteux que je laisse volontairement en suspens : « Jusqu’où ira la promotion du vide ? »

Alexandra Ducrot
 
*Nabillesque : terme dérivé dudit prénom Nabilla, ironiquement utilisé en référence au personnage médiatique (toute situation surprenante qui se prête à la formule « Allô quoi ; ou encore, toute exhibition de ses atouts féminins, on parle alors de « décolleté nabillesque »).
Sources :
Leplus.nouvelobs :
« Allô Nabilla » sur NRJ 12 : pourquoi l’audience va dégringoler dès mardi prochain » par François Jost
« Nabilla sur Canal Plus, D8, iTélé : jusqu’où ira la promotion du vide ? » par Guillaume Jouteux

« Allo Nabilla » sur NRJ12 : une émission qui ne casse pas trois pattes à un chihuahua » par Virginie Spies
Crédits photos :
Image de Une : visuel NRJ12
 
 
 

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