Des paroles et des actes, Marine Lepen
Politique

De DPDA à Face à France: vers un renouveau du débat politique à la télévision

Marine Le Pen, la star. Marine Le Pen, la diva, « à qui on n’impose rien ». C’est en ces termes que la présidente du Front National a annulé à la dernière minute sa venue dans l’émission politique phare de France 2, Des Paroles et Des actes, obligeant la chaîne à supprimer l’émission de sa grille du soir. Cet épisode fait suite à une lettre envoyée par les présidents du PS et des Républicains au CSA, pour qui la visibilité accordée à la candidate dans la région Nord Pas de Calais-Picardie aux régionales est contraire à l’égalité politique Ces évènements remettent en question la légitimité du format de l’émission de France 2 face à de nouvelles formes mises en avant, jugées plus authentiques.
Une occasion manquée pour le FN
L’invitation de Marine Le Pen – une cinquième fois, un record pour l’émission – souligne l’incapacité du parti à mettre en avant médiatiquement des figures autres que celles de son leader. Cela ne peut que souligner, dans un parti où les mandats nationaux se font rares, l’échec de surexposition d’un Florian Philippot qui truste la part du lion médiatique de son parti et qui se voit critiqué par des ténors comme Louis Alliot, pour qui « c’est Marine qui décide »
La vraie question qui se pose pour le Front National, qui veut s’inscrire dans la logique des partis dits “de gouvernement” et s’institutionnaliser, c’est de se construire des personnalités plus visibles médiatiquement, qui peuvent être vues comme une alternative au leader, au risque de passer pour une entreprise familiale où, pour diriger, le bon patronyme est nécessaire.
La réalité du « système » ?
L’erreur la plus notoire vient sans doute de Jean Christophe Cambadélis et de Nicolas Sarkozy qui, soucieux de ne pas laisser une « tribune » de deux heures à Marine Le Pen, ont alerté le CSA , permettant ainsi à Marine Le Pen de dénoncer une fois de plus le fameux UMPS et de s’embourber dans sa stratégie du « seul contre tous » Elle met en avant une supposée collusion d’un système médiatico-politique – dont elle serait la victime. Les Républicains et le PS sont les meilleurs alliés de Marine Le Pen, qui se niche volontiers dans les draps de la démocratie et s’offusque dans un communiqué de presse de la volonté de l’émission d’organiser un débat « excluant d’ailleurs sans raison les autres candidats à cette élection ». Par leur erreur stratégique, les Républicains et le PS ne font que donner plus de force à l’argumentaire traditionnel du FN.
En annulant l’émission, France 2 ajoute de l’huile à la communication d’un FN qui s’affirme comme étant au centre de la vie politique française, en plaçant sa présidente dans une situation où elle peut se permettre de refuser une émission en prime time.
Une perte de crédibilité pour l’émission
Alors que France 2 avait réussi à s’imposer comme la chaîne des rendez-vous phares de la politique, avec ses émissions de débat comme Mots croisés et Des paroles et des actes (qui permettent d’interroger sur une volonté quasi-exhaustive des personnalités politiques), France 2 écorche son image de chaîne du service public en mettant clairement en avant une volonté d’audimat et un besoin de rentabilité, et donc une volonté de susciter de fortes audiences en invitant des personnalités médiatiques susceptibles de créer l’événement.
Comment la télévision – considérée comme le quatrième pouvoir – peut-elle répondre aux injonctions de présidents de partis politiques qui, conscients de la visibilité procurée par l’émission, se sont précipités pour fixer les modalités de son organisation ? Comment l’émission peut-elle continuer à prétendre être indépendante de la mêlée politique ?
Le face aux Français pour plus d’authenticité

Il semble que la formule en place depuis 2011 doit être repensée et actualisée, surtout dans le contexte d’élections régionales, que France 2 peine à couvrir. Est-ce pertinent d’inclure un débat avec seulement une partie des candidats à la présidence d’une région, dans une émission à portée nationale ?
L’imbroglio de Des paroles et des Actes souligne l’incapacité actuelle du service public français à assurer une bonne couverture médiatique des élections locales.
Bien que France télévisions déclare ne pas vouloir remettre en cause le format de l’émission de France 2, « seule émission du PAF sur une grande chaîne généraliste à une heure de grande écoute », jouissant d’un quasi-monopole sur le paysage audiovisuel français ; le retour de Face à France , sur NRJ 12 (une émission crée en 1987) remet au goût du jour une tendance qui s’inscrit dans les émissions politiques : celle d’un désir d’authenticité de la parole qu’une simple confrontation entre personnalités politiques ne pourrait remplir. L’objectif est clair : arracher le masque du pouvoir à ces hommes et à ces femmes pour les mettre face au quotidien. L’utilisation actuelle des réseaux sociaux dans ce type d’émissions à la manière de C dans l’air, avec sa séquence questions-réponses, s’inscrit dans cette lignée. Il faudrait ainsi voir la confrontation portée par les vrais français, ces gens lambdas qui sans détours sauront apporter un peu de spontanéité dans un débat, alors qu’ils en sont traditionnellement exclus, comme le souligne la visite récente de François Hollande chez Lucette.
Un rapport au parlement sur les orientations de la chaine paru en octobre prévoit la création d’une nouvelle chaine d’information, animée d’une volonté explicative qui se voudrait plus pédagogique. On pourrait penser à un nouveau format court en cohérence avec la ligne éditoriale de la chaîne, qui s’adapte au phénomène du buzz politique amplifié par les réseaux sociaux : le paysage audiovisuel français est peut-être en quête d’une émission politique de type débat accessible à l’ensemble des citoyens.
Jérémy Figlia 
Sources :

http://lelab.europe1.fr/louis-aliot-critique-lomnipresence-mediatique-de-florian-philippot-2540967
http://www.frontnational.com/2015/10/monsieur-pujadas-on-ne-mimpose-rien/
 
Crédits photos : 
http://www.rtl.fr/actu/politique/marine-le-pen-sur-france-2-exigences-contradictoires-colere-et-grande-confusion-avant-l-emission-des-paroles-et-des-actes-7780210304 
http://www.non-stop-people.com/actu/tv/face-france-christophe-beaugrand-cloue-le-bec-christine-boutin-89922

Banlieue
Société

Banlieues et médias : jusqu'ici tout va bien

« Cette semaine, il y avait le procès de Zyed et Bouna qui est hautement symbolique en ce qu’il est symptomatique de l’impunité policière particulièrement dans les quartiers. Il faut savoir que c’est la mort de ces deux enfants dans un transformateur qui avait embrasé les banlieues en 2005 » affirme le youtubeur Bonjour Tristesse dans sa vidéo du 23 mars 2015. Et en effet, l’accident tragique du 27 octobre 2005 eut à l’époque des répercussions nationales, forçant le Président d’alors, Jacques Chirac, à déclarer l’état d’urgence, une mesure qui n’avait pas été prise depuis l’époque de la guerre d’Algérie.
Les images de ces émeutes violentes restent encore aujourd’hui dans de nombreux esprits : les chaînes internationales comme CNN ou la BBC montraient une France à feu et à sang, dans un déluge de commentaires alarmants qui laissaient présager un futur désastreux pour le pays. Si dix ans plus tard, les émeutes ont bel et bien fini par s’éteindre, l’angoisse née à cette période, celle d’une banlieue dangereuse, mère de tous les crimes et de tous les vices, reste bien ancrée dans l’inconscient collectif.
https://www.youtube.com/watch?v=28cA-L7mB4o
L’accident de trop
Les faits : Clichy-sous-Bois, banlieue de Seine-Saint-Denis, aux alentours de 17 heures. Un employé de funérarium voit deux adolescents, Zyed Benna (17 ans) et Bouna Traoré (15 ans) et leurs amis traîner autour d’un chantier de logements sociaux. Il s’inquiète : ces jeunes pourraient venir voler quelque chose. Suite à son appel, des agents de la brigade anticriminalité (BAC) arrivent dix minutes plus tard. Les deux jeunes garçons, effrayés, s’enfuient aussitôt, poursuivis par les policiers. Leur course les amène devant l’enceinte de la centrale EDF, où ils se réfugient. Les trois garçons : Muhittin, Zyed et Bouna, reçoivent une décharge de 20 000 volts. Si le premier, miraculeusement, survit, ce n’est pas le cas des deux autres. S’ensuivent, dès le 30 octobre, deux semaines d’émeutes dans la banlieue qui rapidement, se propagent à travers toute la France. Le 17 novembre, la France redevient calme.
Les derniers soubresauts de l’opinion sont pour le procès des policiers qui ont poursuivi les deux adolescents, accusés de « non-assistance à personne en danger ». Le 18 mai 2015, ils seront définitivement relaxés.
La France divisée : « Ils en ont parlé ! »
L’affaire Zyed et Bouna a divisé l’opinion publique en deux camps bien distincts. D’un côté, ceux qui affirment que les émeutes sont dues à un dysfonctionnement de la justice et qui croient que les deux adolescents sont les victimes d’une société inégalitaire. De l’autre, ceux qui pensent que cet accident est anodin et ne montre pas de faille policière. Partisans de l’une et de l’autre thèse s’affrontent particulièrement violemment sur les raisons de leur mort : les uns prétendent que les jeunes hommes devaient bien avoir quelque chose à se reprocher pour fuir ainsi devant la police ; les autres affirment que bien qu’innocents, la terreur policière est si forte en banlieue qu’ils voulaient fuir les représentants de l’ordre.

 
 

« À la fin tu es las de ce monde ancien »
Le 27 octobre signe les dix ans de la disparition de Zyed et Bouna. Les médias relaient alors de nombreux articles, séries de photos, portraits pour l’occasion, tous marqués par la même interrogation lancinante : « Qu’est-ce qui a changé en 10 ans ? ». Dr Jekyll et Mr Hyde, la banlieue a cette double facette : zone oubliée de la République, coupable de laxisme pour les uns – la popularité de Nicolas Sarkozy s’explique en partie à l’époque par son célèbre : « On va nettoyer au Karcher la cité », de déroger à son principe d’égalité et de fraternité pour les autres. Les médias ont tour à tour relayé ces deux visions antagonistes d’une même affaire, hésitant à décrire un espace qui reste pour beaucoup une terra incognita. Des images-catastrophe de 2005, avec voitures en feu et affrontements multiples aux rétrospectives d’aujourd’hui, comment parler de la banlieue ? Mais a-t-elle vraiment changé, cette banlieue tant fantasmée ? Le constat après tant d’années est largement amer dans la presse aujourd’hui : « Une explosion de colère pour rien ? » titre Libération le 25 octobre.
La nécessité du témoignage : le Bondy Blog
Mardi 27 octobre, je rencontrais Patrick Apel-Müller, directeur de rédaction de L’Humanité, qui au cours de l’interview affirma qu’un projet avait été mis en place avec les étudiants de l’université de Marne-la-Vallée pour qu’ils parlent de leur expérience et de leur vision de la banlieue qu’ils connaissent tant au sein des pages du journal. Le projet n’a pas encore pu aboutir, suite au manque de moyens du journal lui-même, mais cela prouve bien que plus de 10 ans après la mort des deux adolescents, le sujet reste encore présent dans les médias, à travers des initiatives sur le temps long. Le cas le plus célèbre est celui du Bondy Blog, créé par Serge Michel, journaliste au magazine suisse L’Hebdo en 2005 pour couvrir les émeutes. Au fil des années, le blog, véritable pieuvre, s’est diversifié, et aujourd’hui on le retrouve à la fois sur les chaînes de la TNT France Ô et LCP, et sur le site du journal Libération. Le projet est donc au devant de la scène médiatique, et la simple survie du blog semble être déjà un hommage rendu aux victimes du 27 octobre.

 
« Morts pour rien »
Pourtant, loin de se féliciter de leur rôle de porte-parole essentiels pour la survie d’une véritable démocratie, les contributeurs du Bondy Blog sont moroses. Leur réussite personnelle – bien des anciens blogueurs se retrouvent dans des grands médias- n’éclipse pas la réalité bien plus grise de l’environnement dont ils sont issus. Dans « En 10 ans, qu’est-ce qui a vraiment changé ? » Claire Diao affirme: « Si vous me parlez de ces jeunes qui, en 2005, brûlaient des voitures pour rappeler qu’ils existaient, je vous répondrai sans doute qu’en dix ans, la République, elle leur a bien ri au nez ». De même, le 27 octobre, le Figaro publiait un article dans lequel le rappeur Youssoupha revenait sur les évènements de 2005 et leurs répercussions: « Malheureusement les leçons de ces drames n’ont pas été tirées ». Quant au Huffington Post, il titrait dans un article du 16 mai dernier « Dix ans après les émeutes de 2005, où est passée la colère des banlieues ? » La répétition monotone des médias – qui adoptent tous le même titre au mot près – montre que le changement n’a rien d’évident.
Le constat n’est pas seulement présent dans la presse écrite et web. La télévision partage également ces impressions mitigées. C’est ainsi que France 3 réalise un documentaire intitulé « Sous la capuche » qui évoque différents habitants de Clichy-sous-bois et de Villepinte en 2015. Le documentaire conclut « il est toujours aussi difficile de trouver sa place quand on est jeune, enfant d’immigrés, et que l’on vit dans ces territoires ». Quant à la radio, elle se fait l’écho de ces mêmes préoccupations: Europe 1 publie pour l’occasion un reportage signé Salomé Legrand et Cécile Bouanchaud qui conclut: « Car la seule chose qui n’a pas vraiment changé à Clichy-sous-Bois, c’est le sentiment d’injustice, toujours vivace ».
Des médias sans mémoire
Aussi, pour une fois, les voix qui s’élèvent sont harmonieuses: la banlieue est désespérément identique à elle-même. Mais à quoi cela est-il dû ? Pourquoi les médias qui retournent sur le terrain cinq, dix ans après les faits retrouvent la même situation, la même réalité peu glorieuse et s’en étonnent ? Peut-être que la réponse se trouve dans une déclaration de Renaud Epstein, sociologue. Il explique pourquoi il a lancé sur Twitter un « rétro-live-tweet » (rediffusion des tweets de l’AFP pendant les émeutes): « Publier ces dépêches était une manière de sortir de ce que je voyais se dessiner : un gros moment de mobilisation politique et médiatique … pour mieux oublier ensuite ».
Une explication au phénomène d’immobilisme affirmé jusque-là se dessine alors: peut-être que si la banlieue n’a pas changé, c’est que rapidement elle s’est retrouvée loin des feux des projecteurs. Les médias, et ainsi l’opinion publique, ne sont pas restés dans les banlieues après les évènements de 2005. Une actualité en chasse une autre. Certes, des initiatives comme celles du Bondy Blog et toute une culture de la banlieue s’est développée dans le monde de la musique à travers le rap, mais l’actualité ne s’est faite que sporadiquement, au gré des évènements qui pouvaient interpeller l’opinion. C’est ainsi que la plupart des reportages télévisuels ou écrits ont livré au fil des années une image négative de la banlieue, montrant les habitants sous l’angle de la délinquance et plus récemment de la montée de l’intégrisme religieux.
https://www.youtube.com/watch?v=kPNWLSfTY88
Si bien sûr il s’agit d’une réalité qu’on ne peut négliger, il est à noter que cet angle unique est celui adopté majoritairement par les rédactions, et qui propage donc une vision unilatérale de la banlieue. Certes, la considérer seulement à travers les problèmes sociaux et les violences réelles semble réducteur. Pour autant, l’image de solidarité que veulent défendre les partisans de la banlieue sonne creux. Les journalistes semblent avoir péché en privilégiant toujours plus le temps court, et l’actualité immédiate, à l’analyse qui requiert un temps long. Les émeutes de 2005 appelaient un moment de réflexion, de pause pour pouvoir comprendre toute la complexité de cet espace imaginé. Mais cette réflexion n’a pas eu lieu, les médias étant sans doute emportés par la dictature de la vitesse, emportés à grand galop par le développement foudroyant d’Internet. Surtout, depuis le 7 janvier, l’inquiétude s’est déplacée, car le péril semble s’être émietté: il peut venir de partout, de quelques individus isolés. La banlieue n’intéresse plus puisqu’elle n’a plus le monopole de la peur ; elle n’est plus symptomatique, ou de manière bien plus amoindrie, d’un dysfonctionnement de la République.
Depuis la mort de Zyed et Bouna, deux opinions divergentes dominent sans partage: ceux qui s’offusquent de la délinquance et rejettent la faute sur des populations qu’ils identifient d’abord comme des « non-français » ; ceux qui exaltent la richesse culturelle et fraternelle de cette banlieue dans des discours qui semblent quelque peu idéalistes. Le monde des médias semble quant à lui se contenter au rôle de relai neutre d’une situation désespérée. Aucune position intermédiaire n’est donc possible, tant que qu’un temps de réflexion nécessaire n’aura pas été adopté.

 
Myriam Mariotte
Sources : 
http://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2005/12/07/le-dernier-jour-de-bouna-traore-et-zyed- benna_718481_3208.html
http://www.liberation.fr/france/2015/10/25/la-revolte-de-2005-une-piece-en-cinq-actes_1408725
http://www.liberation.fr/societe/2010/10/26/zyed-et-bouna-la-poursuite-inavouable_689160
http://www.liberation.fr/societe/2015/05/18/zyed-et-bouna-dix-ans-apres-enfin-le-verdict_1311506 
Crédits photos : 
France TV Info 
L’Obs plus 
Compte twitter du Youtubeur Bonjour Tristesse

bernie for president
Politique

Bernie Sanders, l'autre versant de l'American Dream

Nous avions déjà fait le portrait d’un autre candidat à la présidentielle américaine, celui de Donald Trump, qui se distingue par sa bouffonnerie et son étonnante visibilité médiatique. Aujourd’hui, nous vous présentons l’un des hommes politiques qui s’en distingue sans doute le plus nettement: le sympathique Bernie Sanders. À soixante-treize ans, le sénateur du Vermont rebat les cartes de la primaire du parti démocrate, et par extension celles de l’élection présidentielle. Candidat de plus en plus sérieux face à Hillary Clinton, sa popularité grandissante s’explique par un discours qui se veut aux antipodes de l’habituelle « langue de bois », et une attitude qui séduit par son authenticité. Sanders se revendique  « socialiste », un terme qui ne fait habituellement pas recette chez les Américains. Et pourtant ils sont nombreux à le soutenir, avec un pourcentage d’opinions favorables de près de 40% dans la population générale.
Good guy Bernie: un programme optimiste 

« Bernie », comme le surnomment affectueusement ses sympathisants, apparait presque comme un héros des temps modernes. Dés le début des années 1960, alors qu’il est âgé d’une vingtaine d’années, ce « good guy » milite activement contre la ségrégation des logements universitaires dans la ville de Chicago où il étudie. En 1981, il est élu maire de Burlington; en 1987, il est décrit par U.S News comme étant l’un des meilleurs maires des États-Unis.
Sanders devient ensuite sénateur du Vermont, où il est réélu à huit reprises consécutives. Antiguerre et pro-sécurité sociale, il reçoit tôt le soutien des jeunes. Aujourd’hui, sa campagne électorale s’oriente surtout autour de la classe moyenne avec un agenda progressiste qui propose, entre autres, de créer de nombreux emplois, d’augmenter le salaire moyen, de protéger l’environnement, de développer davantage le rôle de l’état par la rénovation du système éducatif et de la protection sociale…  Des problématiques relativement classiques, mais associées à une dénonciation de l’influence de l’argent en politique et d’un « gouvernement des milliardaires, par les milliardaires et pour les milliardaires ». La sphère financière est le coeur de cible ses attaques; Sanders oppose les « lucky few » aux « 99% », le gros de la population américaine qui ne jouit que marginalement des fruits de la croissance. La référence aux mouvements de Podemos ou de Syriza est évidente, Sanders leur a d’ailleurs rendu hommage à de nombreuses reprises notamment sur sa page officielle de sénateur : « La victoire de Syriza en Grèce nous prouve que, partout dans le monde, les gens n’accepteront plus une austérité subie par des familles au travail alors que les riches continuent à s’enrichir toujours plus ».
Une communication percutante 
La foule de partisans convaincus et enthousiastes que Bernie Sanders rassemble à chacun de ses meetings s’explique au moins en partie par l’efficacité de sa communication. Il cumule à la fois l’image d’un grand-père chaleureux, que l’âge a rendu sage et digne de confiance, et une énergie rafraichissante dans la défense de ses idéaux. Son statut d’ « indépendant » donne l’impression d’un homme détaché des querelles partisanes, au-dessus de cette « politique politicienne » qu’il méprise. Ces deux deniers mois, la visibilité de Sanders a augmenté de manière exponentielle, notamment sur les réseaux sociaux. Près de 2 millions de « j’aime » sur Facebook, plus de 800.000 followers sur Twitter… Ce succès est attendu dans une certaine mesure, quand on sait qu’une large partie de ses partisans est âgée de moins de 30 ans, et qu’elle est par conséquent plus encline à utiliser ces voies de communication. Avec un sens de la formule indéniable, comme la fameuse invitation : « Feel the Bern! », Bernie Sanders se distingue aussi par le respect qu’il porte à ses concurrents: « Jour après jour, on me demande de critiquer Hillary Clinton…(…) Je l’apprécie, et je la respecte » a-t-il affirmé à des journalistes lors d’un meeting dans l’Iowa en août dernier. Paradoxalement, cette douceur place H.Clinton dans une situation délicate; en critiquant Sanders trop agressivement, elle risquerait d’écorner sa propre image.
Une avancée progressive dans les sondages et dans les consciences

Bien qu’Hillary Clinton demeure favorite de la primaire du parti démocrate, la campagne de Bernie Sanders est en pleine expansion. Il est tout de même nécessaire de l’envisager avec lucidité: depuis 1852, seuls des candidats appartenant aux partis républicain et démocrate ont été élus à la présidence. Mais même si, selon toute vraisemblance, Bernie Sanders ne remporte pas cette élection, il aura laissé une marque durable dans la politique américaine en proposant une alternative courageuse à des jeunes qui rejettent massivement Donald Trump, et de manière générale un parti républicain largement porté par des idéaux et des représentations d’un autre temps. Sanders avait d’ailleurs le soutien de Barack Obama quand celui-ci n’était encore qu’un jeune sénateur démocrate prometteur. En mars 2006, celui qui deux ans plus tard allait devenir le président des Américains pour deux mandats consécutifs se rend au Vermont pour participer à la campagne sénatoriale de B. Sanders. Il y livre un discours passionné, qui rappelle ceux que Bernie prononce aujourd’hui: « Quand des gens ordinaires décident qu’ils veulent un avenir différent pour eux-même, pour leurs enfants et pour leurs petits enfants, et quand ils se rassemblent et construisent ensemble un projet à partir de rien, peu importe combien d’argent est dépensé ».
Finalement, qu’il s’agisse d’une stratégie de communication mûrement étudiée ou de sa bonhomie naturelle, Bernie Sanders arrive à convaincre. Tant et si bien qu’il pourrait surprendre en novembre 2016 !
https://www.youtube.com/watch?v=rtBVuye4fZQ
Mariem Diané 
Sources:   
http://feelthebern.org/who-is-bernie-sanders/ http://www.rollingstone.com/politics/news/the-case-for-bernie-sanders-20151103
http://elections.huffingtonpost.com/pollster/bernie-sanders-favorable-rating
http://www.huffingtonpost.com/entry/bernie-sanders-media_55dde96ae4b08cd3359e29a2 http://mic.com/articles/122011/watch-young-senator-barack-obama-campaign-for-berniesanders-in-2006  
Crédits Photos : 
http://berniesanders.com
http://mic.com/articles/122011/watch-young-senator-barack-obama-campaign-for-bernie-sanders-in-2006 

AFROSTREAM
Société

Afro on demand

Afrostream est une plateforme de vidéos à la demande créée en Novembre 2013 par Tonjé Bakang. Après une période d’essai qui a débuté le 1er septembre, puis son lancement officiel le 1er octobre 2015, zoom sur l’évolution d’un média prometteur.

 
 
 
 
 
 
AfroStream est la première plateforme française à proposer des films, des séries, des dessins animés et des spectacles (et bientôt des documentaires) afro-culturels. Ce nouveau mode de consommation de produits culturels afro, souvent laissés de côtés par les médias, a immédiatement trouvé son public, las de ne pouvoir accéder qu’à des contenus en streaming illégaux ou de mauvaise qualité. Preuve à l’appui : la plateforme réunit déjà presque 90 000 personnes sur Facebook et plus de 3000 abonnements. Le fonctionnement est simple, il y a trois types d’abonnements, de 6,99 euros par mois à 99,99 euros par an, qui permettent un accès illimité à divers contenus. La plateforme s’envole, les abonnés se multiplient et différents projets sont en cours de développement. Elle prépare la création d’une application mobile pour fin novembre et la réalisation d’une production originale en 2018 (il existe déjà une web série diffusée sur Youtube « Les Ways de Mimi »).
Aujourd’hui elle propose une sélection de Nollywood, des films à succès comme Think like a Man, Bande de filles, ou encore, depuis quelques jours, suite à son nouveau partenariat avec Sony Pictures Television, un grand nombre de films inédits en France comme The Wire, et des films plus classiques comme Bad boys avec Will Smith. Mais Afrostream ne se rêve pas seulement en diffuseur de culture afro, la plateforme a une plus large ambition et veut maîtriser l’ensemble de la chaîne, de la production à la diffusion de contenus.
 
 

 
 
 
 
 
Repérée par Y Combinator (l’incubateur de la Silicon Valley qui a aidé des sociétés comme Airbnb ou Dropbox), intégrée à la plateforme MYTF1 VOD, soutenue par Orange, et partenaire de Sony, AfroStream, la plateforme attire l’attention des géants du secteur depuis deux ans. Sont-ils séduits par la volonté de défendre une culture et de la diffuser, par le fait que le cinéma africain connaisse un succès énorme depuis quelques temps et mobilise un grand public, ou bien encore parce que l’Afrique est dans la ligne de mire de la plateforme qui veut en faire son marché numéro un ? Orange en tout cas ne doute pas du potentiel d’Afrostream et investit entre 500 000 et 3 millions d’euros via sa filiale Orange Fab France. L’opérateur explique qu’ils ont beaucoup en commun, en commençant par la diffusion de contenus. Ce dernier ne cache plus sa volonté de créer un Netflix à la française et voit dans ce partenariat la possibilité de se familiariser avec ce type de projet. Orange est d’ailleurs présent dans bientôt vingt pays africains où il réalise 10% de son chiffre d’affaire. Cet investissement va lui permettre d’appuyer sa présence et son image auprès des populations africaines (Afrostream est disponible en Côte d’Ivoire, au Sénégal mais aussi en France, en Belgique, en Suisse, au Luxembourg et le sera dans certains pays anglophones d’ici 2016), mais va également lui permettre d’enrichir son offre de contenus, car Afrostream devrait être lancé l’été prochain sur la TV d’Orange.
 
 

 
 
 
 
 
Afrostream se veut porteur d’identité pour ceux qui n’ont pas accès aux contenus afro. Les deux fondateurs veulent « montrer des héros qui ressemblent aux gens autour de nous et particulièrement l’homme et la femme noire, peu présents sur les écrans français. » Depuis quelques années, on voit se développer des médias ethniques en réponse à un sentiment d’appartenance à la société qui s’affaiblit. Les films et les séries sont à la fois des supports et des producteurs d’identités. Ils font fonctionner un imaginaire commun à travers le langage, les images, les relations ou encore les musiques. Cette culture commune nous touche, elle mobilise nos souvenirs et nos affects et nous permet de nous identifier aux personnages. Aujourd’hui, on sera plus touchés par un film qui va nous rappeler nos vacances d’été dans le Sud, ou nos repas de famille (oui, oui) qu’un film qui laisse notre partie droite du cerveau indifférente. Tonjé Bakang précise : « Durant mon adolescence, je regardais les séries et émissions américaines. J’y voyais enfin des gens comme moi, qui faisaient des blagues similaires à celles de nos familles africaines. En France, la seule représentation de la diversité dans l’humour était Jamel Debbouze » et veut ainsi « faire découvrir le monde à travers un autre point de vue, ne plus se contenter du regard caucasien ». Afrostream se considère comme plus qu’un simple média ethnique et cible toutes les personnes attirées de près ou de loin par la culture afro à travers le monde. En Afrique, grande oubliée de Netflix (pour l’instant), Afrostream veut développer la production et la diffusion de films afro, et va devoir se heurter à la concurrence que représente IrokoTV au Nigéria.
 
 

 
 
 
 
 
 
Si l’ambition sans limite du fondateur d’Afrostream laisse espérer un avenir prometteur pour la plateforme à la conquête du marché africain, ce dernier ne doit pas oublier que Netflix prévoit de « conquérir le monde » d’ici 2016, et que son arrivée sur le continent Africain risque de compromettre l’ascension fulgurante de la start-up …
Victoire Coquet
Sources :
http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/02/26/afrostream-se-reve-en-netflix-africain_4584215_3212.html
https://afrostream.tv
Crédits images : 
afrostream.tv

Brooklyn Mania - La grande épicerie de Paris
Société

Brooklyn-sur-Seine, l'influente

La revanche d’une mal-aimée
« How Does Paris Stay Chic? It Imports Brooklyn » titrait le Wall Street Journal à l’occasion de l’inauguration de l’exposition de rentrée du Bon Marché qui mettait cette année à l’honneur la « Brooklyn’ Mania ». Longtemps considérée comme la petite sœur pauvre et ingrate de l’opulente Manhattan, Brooklyn semble aujourd’hui avoir pris sa revanche. Qui aurait cru que ce quartier longtemps ouvrier, laborieux et industrieux aurait fait l’objet de tant de convoitise, jusqu’à, selon le quotidien américain, être désormais habilité à donner des leçons de style au sein du premier Grand Magasin parisien ? Dès les années 1990 s’est enclenché à Brooklyn un processus d’embourgeoisement, quelques visionnaires – jeunes, bohèmes et aisés pour la plupart – ayant flairé l’aubaine que constituaient ses loyers attractifs. Les anciens entrepôts industriels furent investis par une faune hippie, repentie de la jungle urbaine de Manhattan.
Mais au lieu de se cantonner à une simple banlieue-dortoir, Brooklyn a donné naissance à un nouveau style de vie dont le rayonnement a largement dépassé les rives de l’Hudson River. Le borough s’est (re)construit par opposition et par contraste, en se positionnant comme une alternative à Manhattan. S’y est opérée une réinvention de la manière de travailler, de s’habiller, de se nourrir … le tout en assumant de manière décomplexée la normalité, l’imperfection, voire la laideur. Une conception du style loin d’être tapageuse qui se situe aux antipodes de l’esprit de l’exposition « Brooklyn’ Mania ».
Brooklyn succède au Brésil et au Japon en tant que thème de ce rendez-vous annuel organisé par le Grand Magasin. L’ancien borough bénéficie du même statut privilégié qu’un pays-continent et qu’une île dont le « soft power » est l’un des plus influents au monde…
 

Un positionnement étonnant
La campagne réalisée par BETC Luxe est de surcroît assez surprenante. Les habitants de Brooklyn auraient ainsi difficilement pu y être représentés de manière plus caricaturale : bonnets aux couleurs criardes, chemises à carreaux, longue barbe, tatouages de loup de mer… Le tout sous le regard éberlué de l’indétrônable pigeon, emblème du Bon Marché. Comme si ce laisser-aller assumé était devenu une mode à part entière et qu’elle perdait donc son aspect marginal et hors-norme. Comme si, comme l’anticipait le sociologue américain Merton, l’innovation basculait inexorablement dans le conformisme ; ce style de vie si atypique né à Brooklyn étant tombé dans le domaine public.
Comme il est légion lors de phénomènes soudains et inattendus, les interprétations données à la « Brooklyn’ Mania » divergent. Pour la directrice du Bon Marché, Brooklyn est en réalité « très Rive Gauche ». Il y aurait un esprit français qui émanerait de ce borough, « une approche intellectuelle de la vie, du style, qui […] est aussi française que le sont Sartre et Beauvoir eux-mêmes », d’après le New York Times. Mais désigner Brooklyn comme parangon du style et de l’élégance, qualités traditionnellement reconnues aux Français, n’est-ce pas là dénaturer l’essence même de ce qui a fait de ce borough le berceau de l’avant-garde américaine ? Inversement, en laissant Brooklyn marcher sur ses plates-bandes, Paris ne risque-t-elle pas de se laisser décrédibiliser par sa toute jeune rivale ?
 

Vers la « brooklynisation » de Paris ?
Le Bon Marché, auquel on reproche souvent son image poussiéreuse, semble avoir fait le choix de la modernité. En cela, la direction s’est montrée audacieuse. A priori, l’association entre Paris et New York dans son ensemble aurait semblé plus évidente – et ce fut d’ailleurs l’idée initiale –, ces deux villes ayant en commun la sophistication et l’opulence. Mais selon la responsable du style au Bon Marché, « Brooklyn était assez forte et différente pour raconter quelque chose par elle-même ». En filigrane se devine surtout une stratégie de « brooklynisation » que les institutions de la mode parisienne élaborent pour rester « dans l’air du temps ». Elles doivent s’adapter à de jeunes citadins qui aspirent à un retour aux fondamentaux, mais qui refusent de transiger sur la créativité, l’innovation et le mouvement.
Réputés éco-responsables, soucieux de consommer local, et prônant un art de vivre plus lent, les nouveaux résidents du borough s’inscrivent dans le rejet de ce que la ville a de déshumanisant et de lessivant ; or les jeunes actifs reprochent souvent ces travers à Paris. Mais Brooklyn n’en demeure pas moins un eldorado pour les jeunes entrepreneurs et un haut lieu de création technologique et artistique désormais reconnu à l’échelle mondiale. Le borough a le vent en poupe en France – et a fortiori à Paris – parce qu’il parvient à faire la synthèse du local et du mondial, de l’authentique et du précurseur. Le positionnement du Bon Marché, au-delà de l’effet de décalage voire de surprise, traduit une volonté de séduire ces trentenaires surmenés qui aspirent à la « slow life » plus qu’au « fast living ». Tout cela sans renier leurs origines franchouillardes : le sweat à inscription « Brooklyn parle Français » commercialisé par la jeune marque parisienne branchée BWGH s’est écoulé à des milliers d’exemplaires.
Erwana Le Guen
Sources : 
 

http://www.wsj.com/articles/how-does-paris-stay-chic-it-imports-brooklyn-1442408401
http://www.vogue.com/13331344/le-bon-marche-brooklyn-style/
Crédits images : 
1. L’ADN
2. L’ADN
3. Vogue

NICOLAS HULOT
Société

Nicolas Yolo Break the Internet

 
Il y a quelques semaines, Nicolas Hulot, épaulé par Golden Moustache, a publié une vidéo visant à sensibiliser les jeunes aux enjeux du climat et à l’événement que constitue la COP 21. L’objectif : que sa pétition soit au maximum agréée pour interpeler les chefs d’états. Pour faire passer son message, il convoque les codes de l’humour 2.0 et prouve par le même biais son engagement pour la planète.

La vidéo s’intitulant « Nicolas Yolo, Break the internet » n’a pas fait que nous casser de rire, puisque dès les premiers jours, le serveur de sa fondation n’a pas résisté au nombre faramineux de visiteurs. C’est ce qu’on peut appeler un coup de com’ réussi, puisqu’on recense aujourd’hui 500 000 signataires et plus de 7 millions de vues sur la page Facebook de la fondation Nicolas Hulot.
Mise en abyme
« Faire passer le message de la manière la plus efficace possible » est l’enjeu même de ce clip ; sorte de mise en abyme du brainstorming qui a du vraiment avoir lieu, lorsque  Nicolas Hulot a frappé à la porte des studios Golden Moustache. L’équipe, désireuse de soutenir cette cause s’est portée bénévole durant les trois jours de tournage (Le making-off)
Ce qui est intéressant dans cette vidéo, c’est qu’elle est construite autour de la vraie problématique rencontrée par le personnage principal Hulot/Yolo : faire passer son appel à la pétition. D’un point de vue communicationnel, même si ce procédé est assez courant, mettre en scène de faux essais, qui prennent en compte les enjeux de départ, permet de montrer l’ampleur des débats et mises en gardes à l’égard de toutes les cibles.

Transparence et références
Admettons aussi que ce genre de procédé médiatique est efficace par sa transparence apparente (comme lorsque nous sommes amenés à voir les fonds verts du tournage). Comme nous le rabâchent nos médias, notre époque est plus que jamais celle de la transparence, du « décryptage », et c’est pourquoi montrer les processus de création, l’envers du décor (même s’ils sont biaisés par la mise en récit) reste très efficace.
Aussi, ce qui provoque le rire (et le buzz) , c’est évidement le contenu en lui même. Ces cinq minutes sont saturées de références à la génération Y. Les intonations et blagues plus ou moins douteuses de Bapt et Gaël, la présence de Kyan Khojandi, le « rainbow-cat » qui surgit avec vigueur et son « nyanyanya », ou encore l’ouverture du clip avec un clin d’œil à « Norman fait des Vidéos » … autant de références qui s’adressent aux jeunes que d’arguments d’autorité. Ou d’arguments utilisant l’autodérision… Car une grande part du comique réside dans le contraste entre l’équipe de com ultra branchée, incarnant un stéréotype poussé à l’extrême, et l’authenticité de Nicolas Hulot.

Léger décalage
Ce dernier est une personnalité médiatique habituée aux caméras, puisqu’il a été candidat aux présidentielles de 2012 et présentateur d’Ushuaïa pendant 25 ans. Il incarne donc un visage familier, que nous avions l’habitude (ou pas…) de voir dans des contenus orientés planète et écologie, donc peu humoristiques, c’est le cas de le dire. Le changement de style de son discours et de cadre d’élocution sont donc aussi des clefs de voûte du succès viral de ce clip.
Ainsi, l’autre tension que nous pouvons soulever suite à un tel buzz, c’est l’écart qui sépare l’importance des questions écologiques et la difficulté à trouver un bon moyen de les communiquer, de les faire résonner avec impact. Pourquoi la cause écologique, aussi importante soit-elle, continue à être un sujet rébarbatif, qui rebute et ennuie nombre de nos concitoyens ? Comment est-il possible que l’écologie souffre encore de son image austère, « terre à terre » et peu sexy, alors qu’elle constitue un enjeu clef pour les générations à venir ? Les « sympathisants » n’auraient donc pas besoin de se faire draguer par une com’ édulcorée ? Il faut envisager que si, à en croire les chiffres énoncés précédemment. Et il faut espérer que certains continueront à être drôles et inventifs, si c’est pour la bonne com, euh… cause.
Julia Lasry
Sources : 
www.osons-agir-pour-le-climat.org
http://www.franceinter.fr/emission-linvite-nicolas-hulot-0
http://www.ladn.eu/actualites/nicolas-hulot-golden-moustache-interpellent-jeunes,article,28081.html#ixzz3phbZHasY
Crédits images : 
Libération, « quand Nicolas Yolo joue la carte virale »
Golden Moustache

Break the Internet : le making of !

Nicolas Hulot "Break the Internet: le making of de la vidéo" Merci encore une fois à Golden Moustache McFly Studio Bagel madmoiZelle.com Mcfly – David Coscas Kyan Khojandi Natoo La Ferme Jerome ! Bapt&Gael Kayane Raphaël Descraques François Descraques – Page officielle – Marjorie Le Noan Le Fat Show Justine Le Pottier FloBer Aude Gogny-Goubert Kemar Lucien Maine Adrien Ménielle Nad Rich' Hard Akim Omiri Julien Pestel Juliette Tresanini Comédienne Marion Seclin – Mady Nicolas Berno sans oublier Havas Worldwide ParisSi vous ne l'avez pas déjà fait, n'hésitez plus : signez l'appel !! C'est par ici: https://goo.gl/vPygyS#osons

Publiée par Fondation pour la Nature et l'Homme sur Mardi 13 octobre 2015

Accueil

2
Violence Air France
Société

Alerte au "French bashing": turbulences chez Air France, attachez vos ceintures !

Sidération, atterrement, dégoût… Autant de sentiments qui ont parcouru l’opinion publique, tant française qu’internationale, après la diffusion des images extrêmement violentes de la Direction d’Air France malmenée par certains syndicats. À l’annonce de la suppression de 2900 postes au sein de la compagnie aérienne française le 5 octobre dernier, les négociations entre les différentes parties prenantes ont rapidement tourné court, donnant lieu à des scènes de déchaînement ahurissantes.
Un atterrissage médiatique brutal
Pour le géant français, espérant représenter l’élégance et le charme de l’Hexagone à l’étranger, c’est un coup dur. Ces images donnent à voir le spectacle grotesque d’une compagnie qui n’a pas su endiguer la profonde crise sociale interne qu’elle subit et l’échec des syndicats à représenter pacifiquement l’intérêt des salariés. Le bilan est lourd : Air France a échoué à rester maître de sa propre communication. Les images des D.R.H. et Directeur d’Air France à Orly, fuyant la foule enragée, la chemise déchirée, l’honneur mis à mal, resteront probablement un traumatisme pour l’ensemble d’un groupe qui aura du mal à se défaire d’une publicité si désastreuse. Ces clichés choquent, en même temps qu’ils interpellent : la compagnie aérienne est-elle capable de gérer les conflits sociaux inhérents aux restructurations ?

Le problème est ici moins économique que communicationnel. Si le bilan financier d’Air France devrait être positif cette année, on ne saurait en dire de même de sa réputation. Après la grève des pilotes au sujet de Transavia l’an passé, ces photos prouvent à nouveau le triple échec du dialogue social, de la stratégie de communication de crise et des processus de négociation. Autant d’impairs qui fragilisent la notoriété de la compagnie auprès de l’opinion et des investisseurs étrangers qui ne comprennent pas de tels débordements, à en croire les unes des journaux européens. Comment ne pas leur donner raison ? Ajoutez à cela l’imaginaire populaire d’une France qui séquestre ses patrons, de travailleurs fainéants dont la manifestation est le sport favori depuis des générations, et vous aurez tous les ingrédients d’une méfiance internationalisée.

 La réactivation du « French bashing » dans les médias européens
Ces débordements donnent du grain à moudre aux pourfendeurs du « French bashing » (comprenez « ressentiment antifrançais »). Outre Atlantique, si les qualificatifs péjoratifs ne manquent pas pour critiquer le caractère pédant ou arrogant du Français moyen, les Britanniques préfèrent quant à eux pointer du doigt l’inefficience et la « flânerie » des travailleurs hexagonaux (n’en déplaise à Adam Smith).
D’après Patricia Blanchard-Bouvelot, spécialiste en stratégie de communication et gestion de crise, « cette image va alimenter cette petite musique qui consiste à dire que la France n’est pas une terre d’accueil pour les entreprises. » D’autant plus que le « French bashing » fait rage dans la presse étrangère, à nos dépends. L’agression des dirigeants d’Air France a profondément secoué les médias internationaux et les réseaux sociaux, comme en témoignent les Unes des principaux journaux européens et américains : El Pais, The Guardian, The International New York Times, Handelsblatt et tant d’autres réactivent les clichés sur la France. Un tel lynchage public fait invariablement penser à un fait divers. Pour le journaliste allemand Thomas Hanke, « en France, on sait faire la révolution, mais on ne sait pas réformer. » De tels constats consternent ce journaliste, puisqu’ils s’inscrivent selon lui dans une vieille tradition des stéréotypes sur les Français.

Comment ne pas s’inquiéter d’une telle réputation à l’extérieur de nos frontières, quand la répétition et la non gestion des conflits sociaux peuvent nuire à l’image de la France dans l’accueil d’investisseurs ?
Un tremplin vers de nouvelles techniques communicationnelles ?
Cependant, ne laissons pas le pessimisme nous gagner. Malcolm Forbes nous apprend qu’un « échec est un succès si on en retient quelque chose ». Comment Air France pourrait-il transformer ces bévues en victoire ? Aussi simple que cela puisse paraître, le dialogue social est la pierre angulaire de toute stabilité en entreprise. Les images dont nous avons été les témoins pourrait avoir l’effet d’une secousse qui pousserait les syndicats et le patronat à faire un pas en avant vers un processus de négociation apaisé. C’est d’ailleurs ce qui est ressorti de la rencontre entre les parties prenantes du 9 octobre, au lendemain de la diffusion des photos de l’agence Reuters. La Direction doit avoir le courage de parler clairement et sans tabou, de tous les aspects de ce plan social, la communication interne étant primordiale dans des situations aussi critiques que celles-ci.
Pour métamorphoser cette crise en une nouvelle chance, le service de communication de la compagnie pourrait réfléchir à la mise en place de nouvelles stratégies d’urgence. Certaines approches préventives existent pour limiter les débordements sociaux. Ces méthodes s’appuient principalement sur des outils psychologiques. Le but est de maintenir constamment le lien entre les employés et les dirigeants afin d’empêcher toute rupture de communication menant au déchirement. Air France sera-t-il en mesure de saisir au vol cette nouvelle opportunité qui s’offre à lui ?
Les issues de secours étant situées à l’avant, au milieu et à l’arrière de l’appareil, espérons qu’Air France suivra le marquage lumineux qui le mènera à la confiance des passagers et des partenaires commerciaux. Bon voyage !
Céline Viegas
LinkedIn
Sources : 
http://www.lefigaro.fr/societes/2015/10/06/20005-20151006ARTFIG00171-air-france-ces-images-vont-alimenter-le-french-bashing.php
http://www.courrierinternational.com/article/air-france-en-france-sait-faire-la-revolution-mais-ne-sait-pas-reformer
http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/quand-une-chemise-arrachee-fait-renouer-la-france-avec-le-french-bashing-511313.html
http://www.liberation.fr/futurs/2015/09/08/pourquoi-tant-de-haine_1378303 
Crédits : 
RFI
Le Figaro 
Le Parisien 
Niooze 
 

Réseaux et internet
Société

Qui a le pouvoir sur Internet ?

Un récent article du Monde a mis en lumière Jukin, une compagnie américaine fondée en 2009 qui se charge de repérer des vidéos à fort potentiel de viralité mais encore méconnues sur internet, puis d’organiser leur diffusion à des fins commerciales, notamment sur YouTube. Le succès de cette compagnie prouve que sur internet, la viralité (soit le phénomène de diffusion rapide d’un contenu via internet et les réseaux sociaux) est un processus tout sauf spontané et qu’il ne relève que partiellement de l’action des internautes eux-mêmes.
De telles organisations doivent-elles nous faire sentir tous petits ? Est-ce que nous – les internautes – avons tout de même de l’influence sur internet ? Deux questions se posent : pouvons-nous peser dans le phénomène de médiatisation d’un contenu, et notre jugement est-il lui aussi influencé par les médias sur internet ?
Avons-nous de l’influence sur internet ?
Aujourd’hui les médias sociaux insistent sur la notion d’individualité : tout est personnalisé et personnalisable. Nous avons notre mur Facebook, notre compte Twitter, notre page d’accueil personnelle sur YouTube avec des recommandations… A travers l’utilisation de ces médias nous sommes vus sur la toile comme des êtres originaux, uniques, qui partagent ensemble. Avec la fonction retweet, chaque personne a de l’influence et contribue à la viralité d’un contenu.
Pourtant cela n’est pas tout à fait vrai : des compagnies ont pour objectif de nous rendre un contenu attractif, nous amenant sans que nous ne nous en rendions vraiment compte à le partager pour le rendre omniprésent sur internet.

Ainsi des entreprises comme Jukin ont pour fond de commerce de rendre des contenus viraux, de nous les faire aimer, car cela rapporte de l’argent. Le fonctionnement de Jukin est simple : il effectue une veille continue sur internet pour détecter des vidéos à fort potentiel de viralité, mais encore méconnues, puis en rachète les droits de distribution exclusifs et à perpétuité à leurs auteurs pour ensuite les diffuser, et surtout monétiser cette diffusion. En effet Jukin gagne de l’argent de deux manières : avec un clip publicitaire avant que l’on n’accède à la vidéo sur YouTube, et en vendant ses vidéos à des médias. Son plus gros succès, ‘‘Pizza Rat’’, avec huit millions de vues en un mois, a par exemple été racheté par de nombreux journaux américains comme le New York Daily News 
 

Ce business est très rentable. Jonathan Skogmo, PDG de Jukin et producteur de télévision à Hollywood, explique dans son interview au Monde que son entreprise bénéficie du développement de deux marchés. Celui des vidéos en ligne, avec des sites comme YouTube qui « à lui seul reçoit chaque minute plus de 400 heures d’images, dont la plupart seront très peu regardées », et celui des technologies numériques : « Avec l’explosion mondiale des smartphones, des mini-caméras GoPro et de la vidéosurveillance, notre choix s’élargit de jour en jour ». L’entreprise de Jonathan Skogmo grossit sans qu’il ne dépense le moindre centime.
Comment sommes-nous influencés sur internet ?
Ainsi nous n’avons qu’une influence relative dans le processus de viralité d’un contenu, qui se décide avant même sa promotion et sa diffusion sur internet. Cela fait surgir une autre interrogation : parvenons-nous à garder notre opinion, notre jugement propre sans être influencé par les médias ? Autrement dit, l’avis des médias sur la qualité d’un contenu nous influence-t-elle plus que nous ne le pensons ?
De nombreux médias ont en effet une grande influence sur l’appréciation que l’on a d’un contenu – leur avis fait figure d’argument d’autorité. Cela est très visible sur les sites qui proposent une notation : AlloCiné note les films avec des étoiles allant de 1 à 5 par exemple, ou le site Pitchfork spécialisé dans la musique propose une notation sur 10 des albums et des singles.

Ces deux exemples sont édifiants car ils interrogent notre manière de consommer des contenus sur internet. Par exemple, lorsqu’elles veulent choisir un film, de plus en plus de personnes se tournent vers la rubrique des films ‘‘Les mieux notés’’ d’AlloCiné. Dans ce cas la notation seule donne une valeur au film, qui va soit nous inciter à le regarder, soit nous en dissuader. De même le site Pitchfork a un grand poids dans le domaine de la musique indépendante, autant que des magazines comme Rolling Stone ou Spin. La notation qu’il propose d’un album a une grande influence sur le jugement de l’internaute, avant même qu’il ne l’écoute. En effet la note est plus mise en avant que la critique musicale elle-même sur le site : lorsque l’on clique sur un album, la note apparaît à droite de l’image de la pochette de disque, comme un label de qualité ; l’article ne vient qu’ensuite.
Le pouvoir relatif des internautes
Malgré tout, il n’est pas possible de penser que nous n’avons aucun discernement et aucune influence sur internet.
La preuve de l’existence bien réelle de ce discernement, et de la capacité de réaction de chacun est également présente sur internet : les blogs, les fonctions ‘‘Commentaires’’ des sites, les pouces verts ou rouges sur YouTube, la possibilité de répondre sur Twitter sont autant de preuves qu’il n’y a jamais consensus sur internet, et qu’on ne nous impose jamais un contenu – nous avons le choix.
Par ailleurs les internautes ont eux aussi de l’influence, et c’est pour cela que leurs réactions sont recherchées par les médias. A la télévision, par exemple, les émissions sont nourries par les interventions des téléspectateurs sur internet et c’est pour cela qu’elles ont chacune un hashtag rappelé en début de programme.
L’exemple le plus évident de l’influence des internautes à la fois sur le fonctionnement et sur le contenu des médias, démontrant au passage leur attractivité, est très certainement la création de la Europe 1 Social Room en septembre dernier. La ‘‘Social Room’’ est une pièce créée depuis la rentrée où les invités de la station vont prolonger leur interview en dialoguant avec les internautes. Ces derniers sont le cœur de cible d’Europe 1, qui est la radio française la plus présente sur les réseaux sociaux.

La question de l’influence des internautes est donc épineuse. Elle heurte notre fierté car il est légitime de penser que notre parole a du poids, et cette recherche constante de feedback des médias à la fois sur internet et en-dehors en est la preuve. Il serait pourtant naïf de ne pas voir derrière le succès d’un contenu sur internet des stratégies pour nous le rendre attractif, à la fois dans sa production et dans sa diffusion multi-supports. Ce n’est en effet pas par hasard si le PDG de Jukin est également producteur de télévision pour Hollywood.
Clément Mellouet
Sources :
Le Monde
Jukin.com 
YouTube
Twitter
Crédits images :
Google Images
Twitter
Pitchfork.com
Europe1.fr

1
JO Paris
Publicité et marketing

#JO 2024: le poids de la communication digitale

Elles sont cinq villes candidates: Budapest, Hambourg, Rome, Los Angeles et Paris. Chacune d’entre elles propose un projet en adéquation avec les nouvelles orientations éthiques du Comité International Olympique (CIO) : innovation, respect de l’environnement et abaissement des coûts. Au delà de la pertinence du projet, il est déterminant d’obtenir l’adhésion des populations. Puisque ce sont les jeunes générations qui feront les Jeux 2024 et qu’elles passent aujourd’hui beaucoup de temps derrière leurs écrans, quoi de mieux que la communication digitale pour obtenir cette adhésion ?
Sur la ligne de départ : 5 villes disparates
Avec un budget réduit, Budapest ne part pas favorite. C’est qu’elle a affaire à une concurrence rude. Hambourg présente un programme axé autour de l’écologie qui pourrait séduire le CIO, mais ce n’est pas une capitale et les infrastructures permettant d’accueillir les Jeux y sont quasi inexistantes. Rome mise quant à elle sur un patrimoine culturel imposant ainsi que sur la mise en place du recyclage des installations des JO de 1960. Mais la peur des dettes et une récente affaire de corruption viennent mettre à mal cette candidature. En effet le scandale « Mafia capitale », un réseau de corruption au sein de l’administration principale, secoue la ville depuis qu’il a été démantelé en décembre dernier. Le réel poids lourd face à Paris est donc Los Angeles. En tant que ville organisatrice des jeux de 1932 et 1984 elle est un adversaire sérieux. Seulement, après l’Amérique avec l’attribution des JO 2016 à Rio et l’Asie avec celle des JO 2020 à Tokyo, l’équilibre voudrait que les JO 2024 soient attribués à une ville européenne. Dans cet perspective, Paris pourrait prendre l’avantage. Un budget à « taille humaine » de 6,2 milliards partagé entre financements publics et privés et infrastructures existantes, profitant des chantiers du grand Paris : la ville a une longueur d’avance.

L’atout clé pour obtenir les Jeux reste cependant l’engouement des populations. A cet effet, de véritables stratégies de communication sont mises en place, à commencer par une intense web-communication.
La communication digitale comme tremplin des candidatures
Réseaux sociaux et sites officiels : la bataille commence. Et elle s’arbitre d’abord en nombre d’abonnés. Rome domine sur Facebook avec ses 26 000 fans mais sur Twitter c’est Paris qui écrase la concurrence avec 17 000 abonnés, laissant loin derrière les 2 239 de Los Angeles ou, moins brillant, les 11 de Budapest. Sans être l’unique objet de la course aux jeux, le nombre d’abonnés reflète toutefois les stratégies de communication digitale des villes : avantage à Paris, là encore. Au delà des chiffres, Paris est aussi la seule à s’adresser aux citoyens en les prenant à parti: « avec vous, Paris se lance dans la course ».
Si Paris a autant d’abonnés tandis que Budapest peine à convaincre, c’est que chaque ville n’a pas la même stratégie. En effet la ville de Paris, bien qu’elle ait beaucoup d’atouts dans la course aux Jeux, doit obtenir l’adhésion de ses citoyens. C’est pourquoi elle mise d’ores-et-déjà sur une web-communication dense, présente sur les réseaux sociaux les plus influents. Ce que ne fait pas, pour l’instant, Budapest, qui prend ainsi un train de retard. Hambourg attend quant à elle les résultats du référendum qui doit sonder l’engouement de sa population le 26 novembre. Peut-être lancera-t-elle alors une campagne de web-communication plus intense.
Deux écoles pour les sites officiels : Budapest et les autres. Los Angeles, Rome, Hambourg et Paris ont des sites modernes, épurés et attractifs. A la vidéo de campagne de la première page succède un simple scroll pour découvrir d’autres informations. Paris se démarque encore en proposant de cliquer sur un « participer » dès la page d’accueil. Le site de Budapest s’illustre lui par un design accumulant des informations visuelles diverses, bien moins attractif donc.

Le rêve Parisien
Le rêve est le thème phare de la campagne de communication de Paris. Le slogan « Je rêve des jeux » est véhiculé par les plus grands sportifs français, répété par des enfants dans les publicités télévisées et inscrit sur chacune des publicités de la candidature de Paris.

 
Sur le site éponyme, une communication originale : le crowdfunding. Le financement participatif repose sur une démarche habile : la mise aux enchères d’objets appartenant aux meilleurs sportifs français, dédicacés et utilisés lors de grands évènements. Cette semaine on s’est ainsi disputé le maillot de Thierry Omeyer, porté lors des qualifications de l’Euro 2016 et dédicacé par celui qui a été élu meilleur gardien de handball de tous les temps en 2010, finalement adjugé à moins de 200€. L’originalité de l’appel au financement ne s’arrête pas là. Vente de rubans « je rêve des jeux » à 2€ et envoi de sms à 0.65€ : chaque participation compte.
Cependant, bien qu’en avance sur celle des villes concurrentes, la web communication de Paris reste à améliorer. Elle peine par son manque de dynamisme et de cohérence. Le site « je rêve des jeux » ne figure qu’en page 3 des résultats d’une recherche google « Paris 2024 ». Rares seront ceux qui s’aventureront jusque là lorsqu’on sait qu’une page 2 de Google est déjà reconnue comme « l’endroit idéal pour cacher un cadavre », pour citer un même devenu viral sur tweeter. Très faible visibilité donc. Autre défaillance : les comptes des différents réseaux sociaux ne redirigent pas dans leur description vers le site officiel. Un problème d’unité difficilement concevable. Le compte Instagram, pour sa part, mérite un bon point pour son unité visuelle et ses graphisme épurés et ludiques.

La communication digitale pour remporter les Jeux ? Paris s’est dotée du meilleur atout en terme de communication en la personne de Mike Lee, celui qui a réussi à faire basculer quasiment chaque campagne en sa faveur. Le directeur du cabinet de communication Vero a déjà décroché Londres 2012, Rio 2016 et la Coupe du monde de football 2022 au Qatar. Un vrai guerrier, son cabinet est connu pour ses méthodes peu tendres, capable de déstabiliser chaque adversaire. Son rôle est de crédibiliser la candidature de Paris auprès du CIO. Pour cela, il va connaître les 102 membres de l’organisation sur le bout des doigts car ce sont eux qui éliront la ville des JO 2024. Le poids lourd de la communication réussira-t-il à porter Paris jusqu’aux Jeux ?
Adélie Touleron
LinkedIn
Sources : 
http://www.lexpress.fr/actualite/sport/jo-2024-les-points-forts-et-les-points-faibles-des-adversaires-de-paris_1716079.html
JO 2024 : Un mois après l’ouverture de la course, Rome vire en tête sur Facebook et Paris sur Twitter
http://abonnes.lemonde.fr/jeux-olympiques/article/2015/06/25/paris-2024-la-boite-de-com-qui-fait-gagner-les-jeux_4661244_1616891.html
http://tempsreel.nouvelobs.com/sport/20150623.OBS1362/jo-2024-mike-lee-le-roi-du-lobbying-qui-peut-faire-gagner-paris.html
Crédits : 
Captures des comptes officiels de la candidature de Paris aux JO: Facebook, Instagram, Twitter 
AFP 
Site officiel de la candidature de Budapest 

AYLAN KURDI
Société

Du racolage médiatique : le cas Aylan Kurdi

Aylan Kurdi, 3 ans, retrouvé mort sur la plage turque de Bodrum le 2 septembre, sa photo a fait des Kurdi le symbole d’une tragédie vécue par des milliers de migrants.
Une image racoleuse
La photographe turque Nifüler Demir s’est déclarée très émue devant cet enfant qui n’a pu être sauvé des eaux. Une image qui ne manque pas de faire écho à notre image judéo-chrétienne de ces enfants hébreux assassinés par le pharaon qui voulait éradiquer leur « race ». Il n’est pas étonnant que la presse à sensation anglo-saxonne et plus largement européenne ait saisi le potentiel émotionnel de la photo et son levier tire-larme : un enfant de 3 ans, rejeté par la mer et laissé comme endormi sur un lit de sable. Autrement dit, elle avait tout pour devenir virale : la tragédie, l’horreur fascinante de la mort et du désespoir, servie sur un plateau d’argent pour une société de plus en plus voyeuriste. Mais la scène est trop belle, trop parfaite, on croirait le début d’un polar, le moment où l’on découvre le cadavre, puis le gros plan sur le bel inspecteur qui doit retrouver le meurtrier – pour les amateurs de séries, comment ne pas penser au premier épisode de Broadchurch ? Mais ici, les responsables sont multiples, les pouvoirs politiques comme l’opinion endormie. L’image est propice à une explosion de storytelling autour de l’enfant, de sa famille. Seul le père a survécu. Comment rêver meilleur synopsis pour un film dramatique ?
La Repubblica titre « L’image qui fait taire le monde », El Periodico annonce le « Naufrage de l’Europe ». Mais pourquoi a-t-on attendu cette image-là pour s’indigner ? Les morts se comptent par milliers depuis des mois, la précarité de ces migrants est visible au quotidien. La famille Kurdi est devenue le « symbole de la tragédie des migrants ».

Certains parlent même de décerner le prix Nobel de la paix 2015 au petit kurde, une manière de réserver des fonds à la cause humanitaire des réfugiés.
Peut-être que l’on passe totalement à côté du débat en se focalisant sur l’allégorie d’un corps dénué de vie, semblable à une poupée ; une poupée qui fonctionnerait peut-être comme une poupée vaudou, entre les mains de fétichistes qui savent où appuyer pour faire mal, ou faire le buzz, au choix. Peut-on d’ailleurs parler de ces personnes rassemblées, habillées de t-shirts rouges, shorts bleus et qui s’allongent sur une plage au Maroc en hommage à Aylan ? Le manque de tact et le ridicule de cet événement cérémonial tiennent plus de la sieste collective de mauvais goût que d’une réaction constructive pour remédier à la situation. La réappropriation de la scénographie de la photo n’est-elle pas une usurpation émotionnelle de son contenu sémantique ?

Sans parler des stars qui se sont autoproclamées porte-paroles de la tragédie des réfugiés, en quête d’humanisation et de valorisation médiatique. On pense alors à Alex Lutz et sa pétition signée par 66 artistes comme Marc Lavoine, Laurent Laffite, Michèle Laroque ou Mélanie Laurent, « pour qu’il n’y ait jamais plus d’Aylan sur les plages turques ». L’intention est peut-être noble, mais elle est à l’image des manifestations publiques, où l’on fait sa bonne action, on se sent appartenir à une cause, avant que la situation ne se tasse.
La polémique de « l’oubli » des Unes françaises
D’autre part, il a fallu attendre le vendredi 4 septembre pour que les Unes françaises commencent à montrer Aylan et sa famille. Scandale médiatique, pourtant cela ne relevait pas d’un refus de parler de la détresse des migrants, qui est pourtant au cœur de l’actualité. Mais cette absence a été interprétée comme un déni de voir la réalité, « cachez ce petit corps que les français ne sauraient voir » (Source : Challenges). Le journal, comme de nombreux internautes, a réagi de manière très émotionnelle à une image très puissante. Une image qui a d’ailleurs été accusée de tous les maux, de tous les complots et manipulations. Voilà que la mort d’un enfant est devenue « l’Affaire Aylan », digne des conversations de café, autrement dit, chacun y va de son opinion. Cela montre bien que le tour du monde de la photo ne relevait pas de l’information, mais d’une allégorie en formation, capable de faire du bruit.
Le Monde a eu le temps de réagir grâce à son planning de publication. Le quotidien a pu mettre l’image en couverture le jeudi 3 septembre. Sauf qu’une erreur de coordination a apposé aux cotés de la couverture une campagne pour Gucci avec un mannequin allongé sur une plage. L’ironie est belle, et l’excuse du Monde aussi. On est face à une illustration de la tension du double lectorat, entre l’annonceur et le public.
Les autres quotidiens ont dû suivre le vendredi. Et la presse française a été « sommée » de s’expliquer. Libération s’est excusé collectivement sous la plume de Johan Hufnagel, ils n’avaient pas saisi l’importance de cette image. Pourquoi ? Parce qu’ils ont publié des images d’enfants morts avant, qu’ils suivent ces dossiers depuis longtemps. Cette photo a fait l’effet d’une décharge électrique, parce que certaines photos se cristallisent plus que d’autres dans nos esprits, même chose pour l’image du rassemblement à la place de la République le 11 janvier 2015. Libé en a vu d’autres, mais pas celle-là.
N’est-il pas aberrant que les médias, appareils vecteurs d’information, aient dû se plier à un caprice de l’opinion qui prenait soudain conscience d’une injustice somme toute de plus en plus banalisée ? La contrainte n’est pas seulement émotionnelle, elle est bien sûr économique. Il faut vendre, au risque d’aller vers une standardisation des médias dans leur forme et leur contenu. L’info est devenue un bien de consommation comme un autre, ingurgitée rapidement, massivement, et sans distance critique.
Mais l’opinion n’est jamais rassasiée, elle s’est aussi insurgée contre la Une de Charlie Hebdo et de sa caricature du tableau tragique. Bien que les codes de l’image permettaient de déceler l’absence d’humour et une vraie dénonciation de la situation, le journal a eu la vie dure. Merci à ce fameux décryptage (osons les gros mots) relayé par Konbini.
Quant à notre chère garde des sceaux, on peut lui décerner le prix de la fausse bonne idée, lorsqu’elle n’a pu s’empêcher d’exhiber sa plume littéraire par un tweet qui a fait bad buzz : « Son prénom avait des ailes, son petit cœur a dû battre si fort que les étoiles de mer l’ont emporté sur les rivages de nos consciences » . A vouloir toucher les étoiles, on se brûle Christiane…

Finalement, si la photo du petit Aylan a suscité autant de réactions, peut-être est-ce davantage dû à un retour d’un conservatisme moral qui s’immisce dans toutes les sphères de la société ; mais est-ce bien légitime lorsque l’on pense à tous ces enfants qui meurent chaque jour dans des conditions similaires ?
Judith Gasnault
Sources : 
France Info : http://www.franceinfo.fr/actu/monde/article/aylan-kurdi-ce-que-l-sait-du-parcours-de-la-famille-725087
Bfmtv : http://www.bfmtv.com/international/migrations-l-europe-sous-le-choc-apres-la-photo-d-un-enfant-mort-noye-911785.html 
Médiapart : http://blogs.mediapart.fr/edition/le-prix-nobel-de-la-paix-2015-pour-aylan-kurdi 
Twitter : https://twitter.com/ChTaubira/status/639436472001646594?ref_src=twsrc%5Etfw
Libération : http://www.liberation.fr/monde/2015/09/03/pourquoi-nous-n-avons-pas-publie-la-photo-d-aylan-kurdi_1375094 
Crédits images : 
– Slate.fr
– France Info
– Twitter