Publicité et marketing

Thalys dépoussière la communication des compagnies de transports

 

D’ordinaire, les campagnes de publicité pour les réseaux de transports ne sont jamais bien charmantes. Au mieux elles sont insipides, dans le pire des cas elles frisent la désuétude. C’est donc avec beaucoup de surprise que j’ai pu observer récemment les nouvelles affiches de Thalys, dans beaucoup d’arrêts de métro et de transilien. La compagnie transeuropéenne avait déjà une longueur d’avance niveau communication sur les campagnes nettement moins réjouissantes, au hasard, de la SNCF qui en possède pourtant 62% des parts, ou même de la ratp. En effet, Thalys jouait déjà plus sur le graphisme que sur les photos de destination ou de trains. J’en veux pour exemple ce visuel datant de 2009 :

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Thalys se distingue beaucoup par son originalité et particulièrement par le ton que la compagnie emploie : très souvent l’humour. Pensez à la campagne « Bienvenue chez nous » de 2012 ou à celle « A quoi bon voler » de 2010. Thalys joue rarement sur les avantages intrinsèques de ses lignes ferroviaires, et prend le parti de mettre en valeur la personnalité de ses voyageurs ou des destinations qu’elle dessert.

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Une campagne de jeuns

C’est dans cette perspective que Thalys affiche aujourd’hui sa nouvelle campagne avec fraîcheur, sobriété, et surtout beaucoup d’esthétisme et de classe. Pour les trois affiches que j’ai pu apercevoir, il s’agit de mettre en scène un couple dont les corps se touchent obligatoirement. Chaque élément du couple représente une ville, et sur son dos sont reproduits les éléments architecturaux emblématiques de la ville qu’il ou elle représente. Voici l’exemple à mon sens le plus réussi :

Thalys paris

Les villes de départ et d’arrivée sont mises en valeur avec beaucoup de pureté et d’élégance, et les affiches se dégustent et se découvrent petit à petit. Au départ, le slogan semble banal, on regarde ensuite l’image et il faut un petit temps avant que cela fasse « tilt » et qu’on finisse par se dire que c’est une réussite. Sur le visuel seul (sans les slogans et les logos Thalys), la présence même de la compagnie est modeste mais amplement suffisante puisque le train est représenté graphiquement sur les bras d’Amsterdam, de Cologne, de Düsseldorf et de Paris.

Le voyageur, parce que la ville est personnifiée, est de fait beaucoup plus mis en valeur et permet une identification du client potentiel. Fidèle à son image de compagnie légèrement déjantée, de part ce qu’elle décide de mettre en avant dans les destinations qu’elle propose, Thalys choisit de cibler les jeunes adultes, les touristes, ou ceux qui, et ils sont de plus en plus nombreux, ont des contacts dans les grandes villes européennes hors travail.  Thalys connait ses clients et sait comment les séduire, c’est, et cela l’a été pour toutes ses campagnes, une de ses grandes forces : des migrateurs pendulaires aux jeunes baroudeurs, la compagnie ne laisse personne de côté dans ses campagnes en les faisant passer à tour de rôle pour les toucher plus contentieusement.

Politique, toute en subtilité

Vous l’aurez bien compris, Thalys ne fait, pour cette campagne, que suggérer un certain mode de voyage, motivé par des raisons personnelles. L’implicite du couple, de la relation amoureuse entre deux villes, c’est avant tout suggérer celle entre les habitants des dites villes. Les photographies des jeunes couples des trois affiches transpirent la sensualité et la douceur, comme une sorte de tendresse qui n’est pour une fois pas suggérée par la sexualisation des sujets. Bien au contraire, ils sont tous habillés décemment, ce sont simplement leur inclinaison les uns vers les autres, subtile mais tangible, et l’expression de leurs visages quand nous pouvons les voir.

Dans cette perspective de couple et n’ayant en premier lieu vu que l’affiche Paris-Amsterdam, j’ai dû avoir le sourire en coin de la plupart d’entre vous en pensant : « ça alors, un couple hétérosexuel !» Car oui, vous n’en entendiez (presque) plus parler, mais dans ce contexte de mariage pour tous, le parti de mettre en scène un couple plus ou moins implicite d’homosexuels pour l’affiche Paris-Düsseldorf ne me parait pas tout à fait innocent. On peut y voir une opinion politique subtilement affichée ou la conscience que le mariage pour tous remporte l’adhésion de beaucoup de jeunes.

Le mot (parisien) de la fin

Un autre détail m’a surprise également : le visage du jeune homme ou de la jeune femme représentant Paris et souvent caché ou à moitié dissimulé. Une manière pour Thalys de mettre un peu plus en valeur, non pas la ville d’où l’on part, mais celle où l’on arrive, tout en conservant l’ego parisien intact en le représentant tout de même sur le dos des sujets photographiés. Une audacieuse subtilité sur toute la ligne, qu’elle soit réelle ou simplement le fruit de mon imagination, qui ne manque pas de séduire un peu plus.

Il n’y a pas à tergiverser, la compagnie Thalys parvient à se rendre sympathique et réussit même à éclipser par l’originalité de sa nouvelle campagne l’information principale qu’elle donne : vous l’aviez vu, vous, le « à partir de 35€ » ?

 

Noémie Sanquer

Sources :
http://www.thalys.com/img/pdf/presse/release/fr/10.09.21._CP_Thalys_-_Campagne_business.pdf
http://www.strategies.fr/creations/annonceurs/Thalys/

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