BFM TV vs François Hollande
Politique

Hollande, « média-tueur » ?

 
« Priorité au direct », ce slogan bien connu de BFM TV n’est visiblement pas du goût de l’exécutif. Aux dernières nouvelles, le chef de l’État n’aurait guère apprécié la façon dont les médias ont donné la parole à Leonarda. Ainsi avait-on appris la colère du Président à l’égard des chaînes d’information ; et notamment BFM TV qui avait donné la parole à l’adolescente juste après l’intervention présidentielle en octobre dernier.
Les faits
À la suite de l’intervention de Monsieur Hollande à la télévision à la mi-octobre, lors de laquelle il autorisait Leonarda à revenir seule en France poursuivre sa scolarité, BFM TV avait donné la parole en direct à la jeune fille qui, depuis le Kosovo, avait violemment rejeté la proposition du Président.
Si Caroline Roux, éditorialiste politique sur Europe 1, précisait que « l’Élysée n’avait pas anticipé la réponse en direct de la collégienne », Hollande, lui, estimait avoir été « planté » par les médias.
François Hollande qui ne s’attendait probablement pas à une réponse aussi virulente de la part de Leonarda, choisissait d’accuser BFM TV afin de se défier de toute responsabilité quant au scandale politique qu’il faisait surgir suite à ses décisions quelque peu nébuleuses concernant cette affaire. Selon Le Point, qui se dit citer des propos tenus par le chef de l’État, ce dernier serait même allé jusqu’à exprimer nettement son mécontentement du traitement de l’information par la chaîne BFM TV et lui aurait opposé un traitement plus professionnel de la part de LCl.
Néanmoins, le 29 novembre, l’Élysée démentait catégoriquement : une telle accusation ne correspondrait ni à sa pensée ni à sa façon de s’exprimer, comme l’expliquait un conseiller à l’Élysée. Preuve en est : le 18 novembre, lors de son déplacement en Israël, François Hollande a accordé une interview à Ruth Elkriefsur sur BFM TV. Selon l’Élysée, le Président aurait choisi un autre média s’il était mécontent de la chaîne d’information.

Les conséquences : médiatiques et politiques
L’accusation portée par le chef de l’État à l’égard de la chaîne d’information BFM TV déclencha de nombreuses critiques de la part de certains hommes politiques. En effet, au mécontentement de François Hollande s’est ajoutée une dramatisation de la part des socialistes : lorsqu’Arnaud Montebourg parle d’une bfm-isation de la vie politique française, Bruno Leroux, lui, ironise en feintant le lapsus suivant : « Fox news … pardon BFM » – référence peu flatteuse à la chaîne conservatrice et populiste américaine. D’autres renomment la chaîne « BFN TV », en référence à l’accusation lancée contre BFM de jouer dans la cour du parti d’extrême droite.
En outre, le dialogue, par médias interposés, entre un Président de la République et une adolescente de 15 ans, Leonarda, ainsi que le scandale politico-médiatique qui en surgit, résument l’urgence de doter enfin François Hollande d’une communication à la hauteur de sa fonction. Quand tout va mal, la tentative de trouver un bouc-émissaire est forte. Accuser les médias de tous les maux quand rien ne va : le procédé est classique.
Si François Hollande, dès le début de sa campagne présidentielle, se définissait comme un président normal – refusant d’abord d’habiter à l’Élysée, puis de se déplacer dans la voiture de fonction qui lui était attribuée – et invoquait par là-même une stratégie de communication que l’on pourrait qualifier de « normale », il semblerait que cette perspective soit abandonnée dès lors que les médias salissent sa fonction en le plaçant à la même hauteur que Leonarda.
Monsieur Hollande récolterait-il aujourd’hui les fruits de la désacralisation de la fonction présidentielle qu’il prônait à l’origine de sa campagne ?
 
Juliette Courtillé
Sources :
Europe 1
L’Express
Le Figaro
Le Plus du Nouvel Observateur
Crédits photos :
BFM TV

campagne NKM
Politique

"Une affiche pour NKM sivoplé"

 
Ce lundi 2 décembre, Nathalie Kosciusko-Morizet – NKM pour les intimes – a proposé, en collaboration avec l’agence de photos en ligne My Photo Agency, un concours aux internautes afin de départager son affiche de campagne. Cette proposition semble être une tentative de reprendre la main sur sa campagne ; en effet, la candidate UMP à la Mairie de Paris connaît des temps délicats en termes d’image.
Les internautes ont ainsi jusqu’au 18 décembre pour choisir entre trois séries de photographies tantôt « urbaine », tantôt « instantanée », toutes trois insistant sur l’ancrage dans le décor parisien et la proximité avec les citoyens.
Faut-il voir cette démarche comme une proposition innovante qui souligne l’importance grandissante du numérique ou comme un pari risqué après de récents bad buzz ?
Un simple coup de pub ?
Si l’annonce de cette nouvelle, le lundi 2 décembre 2013, a suscité quelques remarques négatives NKM a du moins réussi sur un plan : faire le buzz.  Cela lui a permis de signaler la reprise de sa campagne, et éventuellement de faire passer au second plan la publication de sa déclaration de patrimoine, qui est ainsi passée plus inaperçue… Jean-Didier Berthault, le directeur de campagne de la candidate, expliquait d’ailleurs à Metronews : « Ce n’est pas un sujet sur lequel on voulait faire de la pub ».
Une tentative de « faire moderne » ?
Les candidats le savent bien, les pratiques digitales prennent une place croissante dans nos vies et NKM  n’est pas en reste dans ce domaine, puisqu’elle était  secrétaire d’État à l’Économie numérique. La « candidate geek » est notamment à l’initiative de la politique gouvernementale en matière d’open data.
Nathalie Kosciusko-Morizet définit elle-même son projet numérique : « Mon engagement pour Paris est pour moi l’occasion d’encourager les nouveaux modèles de création liés à l’écosystème numérique et d’y associer au maximum les Parisiens afin que cette campagne soit avant tout la leur. ». Le vote en ligne correspond donc tout à fait à cette volonté.
Mettre la création au cœur d’une bataille municipale, ce serait donc une stratégie « tout bénéf » qui permettrait de mettre en valeur les nouvelles pratiques du Web comme le crowd-design, de promouvoir une start-up parisienne qui valorise les jeunes talents et, pourquoi pas, d’inventer un nouvel outil de communication politique en prise directe avec les citoyens. Ce serait en effet permettre aux Parisiens de s’introduire dans un domaine habituellement réservé aux spin doctors et autres experts de la communication.
Pour les co-fondateurs de My Photo Agency, Sarah Aizenman et Dan Kleczewski, cela permettrait aux personnalités politiques adoptant cette démarche de « renouveler leur communication » tout en donnant « de la visibilité à de jeunes photographes » (le photographe lauréat empochera de plus un chèque de 1500 euros).
Un pari risqué
L’image de NKM a souffert pendant un mois de novembre difficile (dissidence dans le 14e arrondissement, déclaration erronée sur les horaires de bus, nouveau site de campagne dont le déballage personnel est déjà ridiculisé etc…). Décembre marque-t-il un nouveau souffle pour sa campagne ? Ce n’est pas certain… On observe sur Twitter et le Nouvel Obs des commentaires allant jusqu’à l’évocation du narcissisme de la candidate UMP qui propose un choix entre plusieurs photos d’elle, en ridiculisant ses difficultés à choisir son « style ».

L’affiche, en politique, est censée résumer le positionnement et en quelque sorte l’      ADN d’un candidat : confier ce choix au public ne renvoie-t-il pas un message hasardeux ? Cela voudrait-il dire que l’image de NKM n’a pas été suffisamment définie au préalable par son équipe et par elle-même ? Pour Frédéric Dosquet, professeur à l’ESC Pau et directeur de l’ouvrage Marketing et communication politique, c’est donc une erreur tactique et « de la pseudo-démocratie participative ».
Ce concours s’annonce d’autant plus périlleux quand on sait que les affiches des politiques sont une cible de choix pour les photomontages moqueurs (il suffit pour s’en convaincre de penser à l’affiche de Nicolas Sarkozy de 2012 ou au portrait officiel de François Hollande). Mais c’était encore plus risqué pour NKM qui était déjà la cible de gags divers et variés depuis ses déclarations sur le métro (« un lieu de charme ») ou l’épisode de la carotte.
Il paraissait donc prévisible que les opposants de Nathalie Kosciusko-Morizet (ou tout simplement des petits rigolos de la Toile) prendraient un malin plaisir à détourner ses affiches, surtout que l’une d’entre elles se situe… devant une bouche de métro parisien. Les détournements n’ont pas tardé en effet : le 3 décembre le collectif L’humour de droite propose un concours de montages (intitulé « Une affiche pour NKM sivoplé »).

Ainsi les moqueries fleurissent sur le Web, que ce soit sur Twitter (#UneAfficheUneBourde #NathieDansLeMetro #NKMdr sont des hashtags fréquents), ou sur Tumblr où ont été créés des blogs dédiés.
 On constate donc qu’avec ces détournements le défi était dangereux, mais l’équipe de la candidate joue le jeu : « Tout peut être détourné, lancer un concours sur le Web ne change rien à cela » a ainsi expliqué son entourage au HuffingtonPost.
Utiliser la carte de la co-création et surfer sur la tendance du « do it yourself » semblait être une idée bien trouvée par l’équipe de NKM pour faire oublier ses récentes bourdes. On pourrait donc se demander si la candidate UMP n’aurait pas mieux fait de confier la gestion de sa communication à des experts pour éviter les faux pas critiques de novembre, plutôt que de confier son image aux internautes.
Le concours se déroulera-t-il sans accroc ? Mais surtout, permettra-t-il à NKM de redorer son image sur la Toile ? Rien n’est moins sûr. Il reste trois semaines pour le savoir.
 Lucie Detrain
Sources
Myphotoagency
Tumblr »QuandNKM »
Humourdedroite
BlogNouvelObservateur

Président Hollande
Politique

Au secours ! Le Roi se meurt !

 
Voilà maintenant une semaine que le pays entier retient son souffle. Le chômage, la crise, les taxes… passe encore. Mais la prostate du Président !
C’est lors de la cérémonie du lever, mercredi dernier, que nous, peuple de France, avons appris la funeste nouvelle. Voilà presque trois ans que François Hollande se serait fait opérer pour un problème de prostate, bénin certes, mais un problème tout de même !
Rassurons-nous cependant, tout va mieux depuis que les médias se sont emparés de l’affaire. Experts médicaux, flashs d’information, envoyés spéciaux à l’Elysée… tous les moyens ont été mis en œuvre pour nous rassurer. Ou plutôt nous inquiéter.
Car il est bon en effet de s’inquiéter pour son Président-Roi quand on est Français, dans un système où celui-ci apparaît sinon omnipotent, du moins indispensable. D’ailleurs d’aucuns se sont empressés de faire le lien, pourtant disproportionné, avec le sort de Messieurs Pompidou et Mitterrand.
Il faut dire que le pouvoir lui-même a laissé faire et même encouragé ce battage. D’un côté cela lui a permis de mettre en scène une normalité, rendue pathétique jusque dans ses problèmes, et d’un autre, cela a été une habile façon d’esquiver, au moins pour une journée (celle du Conseil des ministres comme par hasard), les échecs qui s’accumulent. Une bonne tactique en somme pour un monarque devenu infertile !
Mais au-delà de ce coup de com’ l’affaire semble révéler une tendance plus grave. Celle d’un système médiatique sans cesse à la recherche de scoops, pour qui l’information transparente devient malheureusement une information sans épaisseur.
Aussi serait-il temps de revenir aux vraies préoccupations. Car quand le Roi tousse, c’est bien le peuple qui s’enrhume.
 
Grégoire Larrieu

Sarkozy D8
Politique

« Campagne Intime, Nicolas Sarkozy » : simple documentaire ou véritable outil de communication ?

 
La diffusion de « Nicolas Sarkozy, Campagne intime » sur D8, mardi dernier, aura fait couler beaucoup d’encre. Le programme, présenté comme un documentaire inédit sur la campagne présidentielle de l’ancien chef de l’Etat, a en effet suscité de nombreuses réactions sur la toile. Décrié sur les réseaux sociaux, ressassé et analysé par les chaînes d’information et dans la presse, le programme a tout de même rassemblé 1,5 millions de téléspectateurs et enregistré 5,2% de part d’audience, à tel point qu’il devient légitime de se demander quel a été le véritable enjeu de sa diffusion. Stratégie de communication ou simple documentaire à regarder avec recul et second degré ? La question se pose, d’autant plus qu’il s’agit bien ici d’un reportage ambivalent.

Information ou communication ?
« Campagne Intime » retrace les mois de campagne précédant l’élection présidentielle de 2012 avec un objectif affiché : montrer ce que ni le public ni les journalistes n’auraient vu jusqu’ici.
Caméra à l’épaule, Farida Khelfa a en effet suivi le couple présidentiel dans des moments de vie quotidienne, ou intime, comme le titre du programme l’indique. Il est néanmoins possible de se demander si l’intimité n’est pas ici la grande absente, car bien qu’il soit présenté comme un film à caractère documentaire, le programme fait montre d’une subjectivité affichée. La réalisatrice, ex-mannequin et amie de Carla Bruni Sarkozy, nous donne ainsi à voir l’image d’un couple quasi parfait : elle, soutien sans faille toujours prête à pousser la chansonnette, lui, père attendrissant et homme politique engagé.
Une vision sans recul et pour le moins subjective qui nous laisse penser qu’il pourrait bien s’agir d’un outil de communication politique. Difficile en effet d’envisager qu’un homme politique puisse réellement être naturel face aux caméras, et c’est en cela qu’il devient légitime de se demander si la communication n’aurait pas ici pris le pas sur l’information.

De plus, si le but de ce documentaire n’est pas clairement établi, le choix de sa période de diffusion pourrait aussi être questionné. Dans le cas où l’on serait face à un reportage purement informatif, quel pourrait être l’intérêt pour la chaîne de le diffuser maintenant ?
L’hypothèse de l’outil de communication semble d’autant plus plausible si l’on tient compte du contexte politique actuel. Ainsi, dans le cadre d’une stratégie politique, il semblerait opportun pour Nicolas Sarkozy de véhiculer l’image d’un homme proche du peuple et digne de confiance, alors même que la communication du président actuel semble lui faire défaut et ne cesse de faire augmenter son impopularité. La chaîne affirme néanmoins qu’il ne s’agit pas ici d’une stratégie de communication ni d’une commande des équipes de Nicolas Sarkozy, accentuant ainsi l’ambivalence du programme.
Un relai médiatique pour le moins surprenant
 Qualifié de « film de propagande, tourné avec le cœur et filmé avec les pieds » par Médiaslemag, « Campagne Intime » aura donc été vivement critiquée et tournée en dérision par les téléspectateurs et les journalistes.

Pourtant, le dispositif médiatique mis en œuvre autour du reportage semble lui conférer la légitimité et le sérieux d’un véritable événement politique. Un teasing important a ainsi été mis en place sur la chaîne D8, mais le reportage a surtout fait l’objet d’une analyse postérieure sur la chaîne d’information i>télé. Un débat a ainsi été proposé en seconde partie de soirée, décryptant le documentaire et rappelant les analyses proposées lorsqu’un événement politique important survient.
Et les chaînes publiques n’étaient pas en reste puisqu’au lendemain de sa diffusion, France 2 commentait le programme dans son journal de 13 heures, mettant en exergue son caractère exclusif. Le reportage a été relayé et commenté par les chaînes d’information, au même titre que les évènements politiques majeurs. Ce qui peut sembler paradoxal puisque toute ambition politique est ouvertement niée.
Nicolas Sarkozy, le retour ?
En conclusion, il semble important de souligner l’ambivalence d’un tel documentaire qui, malgré une volonté affichée de simplement faire découvrir au public la face cachée d’un homme politique, participe au retour de Nicolas Sarkozy dans la conscience collective. En témoigne notamment la réapparition du hashtag #SarkoNostalgie le soir même de la diffusion du reportage.
Un caractère ambivalent qui pourrait notamment expliquer les critiques virulentes des téléspectateurs et autres journalistes, habitués à ce genre d’exercice communicationnel. En effet, l’initiative de dévoiler les coulisses d’une campagne n’a rien de novateur. Bon nombres d’hommes politiques avaient déjà jugé judicieux de se mettre en scène durant leur campagne. Car il s’agit véritablement ici d’un exercice de mise en scène au travers duquel l’acteur principal cherche à véhiculer une certaine image ; en l’occurrence celle d’un homme serein, engagé et authentique aussi bien en politique que dans l’intimité.
Les enjeux communicationnels d’un tel outil semblent ainsi avoir été identifiés par le public, conscient que ce qu’on lui donne à voir ne reflète pas nécessairement une réalité objective, mais qui semble pourtant se prêter au jeu, comme en témoignent les scores d’audiences.
Néanmoins, le documentaire « Nicolas Sarkozy, Campagne intime » semble se différencier nettement de ses prédécesseurs dans la mesure où l’enjeu politique et communicationnel n’y est pas assumé. Il semble donc légitime de se demander s’il s’agissait ici de préparer un possible retour en politique de l’ex président.
 Amandine Verdier
Sources :
Europe1.fr
Nouvelobs.com
Huffingtonpost.fr
 
 
 

Page facebook Marche des républicains
Politique

La marche des Républicains : une mobilisation face aux extrémismes

 
Depuis quelques mois déjà, les propos à tendance homophobes, racistes et extrémistes, occupent le devant de la scène publique.
Les scandales et les bourdes politiques se succèdent : les propos homophobes dans le cadre du débat sur le mariage pour tous (et les agressions en marge de celle-ci !), les insultes racistes auxquelles a du faire face Christiane Taubira, les propos controversés de Manuel Valls sur les Roms… Des actes, des propos, qui se multiplient.
Tous ont un point commun : la provocation, qui fait aujourd’hui presque office de norme. L’ascension fulgurante des discours du FN, qui cherche à choquer afin de créer le buzz, en témoigne.
C’est contre ce sentiment que comptent s’élever les instigateurs de l’évènement « La marche des républicains. » Le discours de François Hollande lors des commémorations du 11 novembre en a constitué l’élément déclencheur. Si certaines personnes ont profité de l’occasion pour huer le président, cela a provoqué de vives réactions chez les internautes. Au milieu de celles-ci, un hashtag émerge : #lamarchedesrépublicains. Un compte Twitter et une page Facebook sont créés dans la foulée. La création d’un site est même à venir. L’évènement, qui se déroulerait le 8 décembre prochain, place de la Bastille à Paris, invite ses participants à marcher « tous ensemble afin de raviver l’esprit républicain. »
Le mouvement, créé à l’origine par des militants de gauche, espère fédérer des partisans centristes et UMP. Certains ont d’ailleurs déjà rejoint le mouvement.
Celui-ci va-t-il réussir à s’affranchir des clivages politiques pour embrasser une population soucieuse de s’unir pour préserver ses valeurs ?
Mais surtout, la mobilisation des internautes va-t-elle entraîner une mobilisation des citoyens ?
 
Adeline Mateus
Sources :
Le Huffington Post
LeLab – Europe 1
La page Facebook de la Marche des Républicains

François Hollande
Politique

L’Homme sans com’

 
La popularité de François Hollande est au plus mal. Il est récemment tombé à 26 % d’opinions favorables, un record d’impopularité pour un président de la Ve République dans l’histoire des sondages BVA. Le franchissement de cet énième seuil est le symbole du désamour entre le Président et les français. Et si le problème était surtout communicationnel ?
DÉROUTE
Il faut dire que depuis cet été les couacs et polémiques s’enchaînent dans les médias, donnant l’impression d’une véritable cacophonie au gouvernement. Entre la déconvenue de François Hollande sur la pause fiscale, le bug des résultats du chômage en août causé par SFR, le conflit Duflot-Valls et la polémique sur les Roms, celle sur Léonarda, la révolte bretonne et la reculade du Premier Ministre sur l’écotaxe, l’exécutif se noie dans une parole qui tend à réagir dans l’urgence.
Concernant l’affaire Léonarda, la maladresse de François Hollande n’a pas seulement été le choix d’un entre-deux douteux, mais surtout de s’être directement adressé à la jeune adolescente devant les caméras, établissant un dialogue surréaliste rythmé par les chaînes d’information en continu, abîmant au passage son statut de chef d’Etat.
Quant à la reculade concernant l’écotaxe en Bretagne, toutes les tentatives d’en minimiser les conséquences ne parviendront pas à stopper les procès de la droite en indécision et en manque d’autorité. Elle risque par ailleurs de compromettre toute tentative de réforme d’ici les municipales.
Enfin, même la libération des otages français au Niger n’a pas profité à François Hollande dans les sondages et ce malgré tout le dispositif communicationnel engagé. Selon Le Parisien, plus de la moitié des Français (54%) estiment que François Hollande a joué un rôle qui n’est « pas important » dans cette libération.
Finalement, ces affaires successives donnent l’impression d’un « exécutif girouette » et rendent la politique gouvernementale inaudible et sans visibilité.
Sans oublier le reproche majeur que l’on fait à François Hollande, hautement communicationnel : son soi-disant problème d’autorité. Le fait est qu’il a rarement recadré fermement ses ministres devant les caméras. Mais il est loin de manquer d’autorité. Libération a d’ailleurs rapporté les propos d’un ministre :
« Hollande est sur notre dos en permanence. Qui, au gouvernement, n’a pas pris un SMS sur la gueule ? (…) Il sait aussi être très méchant. »
La vraie question est donc la suivante : peut-il vraiment se passer de la mise en scène de son pouvoir, et donc de son autorité ? François Hollande a choisi une autorité plus moderne , mais il doit convaincre qu’à terme, elle sera plus efficace.

L’AXE HOLLANDE-VALLS
Au chapitre des choix communicationnels douteux du Président, l’axe Hollande-Valls est incontournable. Ce choix est stratégique : c’est de leurs différences, de leur « complémentarité » que vient la nécessité de leur « mariage » (Libération).
La rigidité de Valls sur les questions d’intégration et d’immigration sert de rempart contre les critiques de la droite sur le laxisme. Là ou Hollande cherche à incarner l’apaisement et l’espoir en faisant toujours preuve de prudence, Valls va « affronter frontalement ses positions », selon un ministre. Sa virtuosité en communication compense les lacunes du Président.
On peut néanmoins s’interroger sur la pertinence de ce choix. La popularité de Valls est loin d’avoir l’effet contagieux escompté sur celle de Hollande, sans doute car l’impression est donnée que c’est François Hollande qui s’aligne sur Manuel Valls, et non l’inverse. Hollande aurait même confié, selon Le Canard Enchaîné : « Ça me fait de la peine de constater à quel point Manuel ne pense qu’à lui ».
Par ailleurs, le tandem que forme Hollande avec Manuel Valls escamote celui qu’il devrait former avec Jean-Marc Ayrault. Cela n’a rien d’étonnant : le premier ministre joue son rôle de fusible en assumant seul la ligne sociale-démocrate.
PERSPECTIVES
Il semblerait finalement que François Hollande paye toujours le prix de son pari risqué d’une présidence normale, qui comme on le constate aujourd’hui, ne désignait pas un retour à la figure présidentielle gaullienne que les français ont toujours aimé admirer.
François Hollande a fait le pari d’un renouveau de la culture démocratique : puisque la société française évolue vers une organisation sociale horizontale plutôt que pyramidale, la monarchie républicaine à la française devait être abolie.
Ce pari était risqué, la majorité des français n’étant pas prêts, en période de crise économique et sociale, à renoncer au mythe de l’homme providentiel. Il aurait sans doute été avisé que François Hollande choisisse d’incarner ce rôle.
Denis Pingaud, dans son récent ouvrage L’Homme sans com’, analyse la politique communicationnelle du président :
« En se débarrassant volontiers de tous les colifichets trop voyant de la communication, le Président remet la politique au centre. Mais, ce faisant, l’homme sans com’ oublie que la communication n’est pas un don mais un métier ».

François Hollande veut privilégier la politique sur le spectacle, mais il oublie que la politique aujourd’hui est du spectacle. Electorale, la politique est image. C’est ici peut-être son erreur la plus fondamentale.
Elle peut lui être fatale, le risque étant que l’impopularité du Président devienne le marqueur de sa personnalité politique. Mais L’Homme sans Com’ se défend.
« J’essaie de trouver l’équilibre, qui n’est pas facile, entre l’expression franche de qui je suis, de ce que je pense, et la représentation symbolisée qu’impose la présidence de la République ».
Si Aristote faisait de la tempérance une vertu, dans le monde politique d’aujourd’hui, un tel positionnement risque néanmoins de manquer de force communicationnelle.
 
Clarisse Roussel
Sources :
Libération – Hollande Valls mairage de raison
Libération – Manuel Valls les coups de force permanents
Libération – Le président recadre de l’intérieur
Libération – Hollande un chef qui ne dit pas son nom
Libération – Le président comme si de rien n’était
Le JDD – Sondages
Le Monde – François Hollande le président le plus impopulaire de la Ve
Le Monde – La méthode Hollande critiquée
La Croix – Le recul de l’écotaxe fragilise encore François Hollande
Le Parisien – La libération des otages ne profite pas à Hollande
Photos :
Une – AFP
François Hollande – Lnt.ma
Caricature – Dessin de Mis et Remix paru dans l’Hebdo, Lausanne

1
Politique

Poutine, pas prêt d’égayer la Russie

 
« Nous faisons tout pour que les sportifs, les spectateurs, les visiteurs se sentent bien aux Jeux olympiques, quelles que soient leur nationalité, leur appartenance ethnique ou leur orientation sexuelle », tempérait Vladimir Poutine, en bon prince, le 28 octobre dernier, devant Thomas Bach, président du Comité international olympique.
Oui. Ce même Poutine, qui quelques jours auparavant, affirmait pourtant que si les « sportifs qui ont une orientation sexuelle non traditionnelle […] sortent dans la rue pour en faire la propagande, ils devront en répondre devant la loi ».
D’emblée, une question se pose : qu’entend précisément le Président de la Fédération de Russie en ajoutant les termes « faisant la propagande de relations sexuelles non traditionnelles» à la loi fédérale sur la protection des enfants contre les informations nuisibles à leur santé et à leur développement ? Évoquer la tradition et la propagande paraît excessif et lourdement connoté pour parler d’innocentes manifestations d’amour de la part d’individus de même sexe. Et après une – très courte – réflexion, il peut même sembler risible d’imaginer que deux femmes s’embrassant dans les jardins de Pavlovsk puissent chercher à mettre en œuvre une stratégie de persuasion en vue de propager une façon d’aimer nuisible à la santé, au développement des enfants, et non conforme à l’usage ancestral russe de surcroit.
Cette pointe d’ironie n’est bien évidemment là que pour mettre en avant l’ambivalence de cette loi, qui témoigne d’une certaine habileté d’un point de vue communicationnel : en accentuant le flou autour des termes choisis, Poutine permet à ce texte ambigu d’être interprété de manière très large, de sorte qu’il puisse s’appliquer à quantités de cas de figure, pouvant aller des cours d’éducation sexuelle donnés aux jeunes, en passant par le simple baiser remarqué au détour d’une ruelle et jusqu’à l’organisation de mouvements tels que les gay prides.
Quoi de plus efficace que de faire une analogie entre une prise de position résolument discriminatoire et un risque pour l’avenir de la nation – la jeunesse ? Que dire de l’évocation d’un moyen de persuasion tel que la propagande dans un pays qui, il n’y a même pas un siècle en arrière, en subissait tous les méfaits sous la dictature stalinienne ?
La stratégie employée par le Président de la Fédération russe, qui mise manifestement sur le danger que peut représenter l’homosexualité, s’avère ainsi presque rhétorique ; rappelons qu’en-dehors des termes « relations sexuelles non traditionnelles », jamais le mot « homosexualité » n’est cité dans le texte. Pascal le premier disait qu’« il y a une éloquence du silence qui pénètre plus que la langue ne saurait faire ».
Plus frappant encore est l’enracinement de la tradition dans les mœurs russes, puisque 88% de la population soutient Poutine et plus de la moitié des citoyens juge nécessaire de pénaliser l’homosexualité, d’après un sondage de l’institut Vtsiom. En somme, 12% de sympathisants à la cause LGBT en Russie, 12 petits pourcents de personnes désormais privées de parole, comme l’affirment ces couples de lesbiennes photographiées par Anastasia Ivanova.

Kate et Nina : « En public, nous essayons de ne pas cacher nos sentiments, et nous sommes déterminées à nous tenir la main et nous embrasser librement. Mais la situation des droits des homosexuels en Russie est mal partie. La façon dont nous vivons fait de nous des hors-la-loi. »,
From Russia with Love, série photo d’Anastasia Ivanova.
Une voix leur est heureusement offerte à l’international, où les réactions vont quasi-unanimement à l’encontre de cette décision, non seulement en raison de la violation de la liberté d’expression que cette législation induit, mais aussi en vertu de l’incitation à l’intolérance qui découle de la lecture des amendements. Ainsi, Amnesty International qualifie cette loi de « clairement discriminatoire » ; Human Rights Watch y voit « une violation flagrante de l’obligation juridique internationale de la Russie de garantir la non-discrimination et le respect de la liberté d’expression » ; le gouvernement canadien ne mâche pas ses mots en déclarant que cette loi est « mesquine et odieuse » ; Obama, pour sa part, est catégorique, il n’a « aucune patience pour les pays qui tentent de traiter les homosexuels ou les lesbiennes ou les personnes transgenres de façon à les intimider ou à les mettre en danger ».
 L’organisation des Jeux Olympiques de Sotchi 2014 est donc questionnée, puisque la Russie, pour accueillir cet évènement, se doit de respecter la Charte olympique, qui veut que « toute forme de discrimination à l’égard […] d’une personne fondée sur des considérations de race, de religion, de politique, de sexe ou autre est incompatible avec l’appartenance au mouvement olympique », d’où la subite tempérance de Poutine évoquée en début d’article. Face à cela, les campagnes solidaires abondent, à l’instar de la Human Rights Campaign, qui met en avant des célébrités gay-friendly arborant un t-shirt clamant fièrement et en russe : « L’amour peut vaincre la haine ».
Jamie Lee Curtis, Ricky Martin et Wentworth Miller, pour la Human Rights Campaign, sur Instagram.
 
Également remarquable, cette campagne de la Fondation Émergence va même jusqu’à créer sa propre promotion des Jeux de Sotchi 2014. Vous avez dit provoc’ ? Peut-être, mais dans ce cas-ci et tout comme Brecht, on pense que « la provocation est une façon de remettre la réalité sur ses pieds ».
Campagne Sotchi 2014 de la Fondation Émergence
David Da Costa
Sources:
Lemonde.fr
Huffingtonpost.fr
Fondationemergence.org
Crédits photos : From Russia with Love, photographies d’Anastasia Ivanova.

1
Alain Finkielkraut
Politique

Alain Finkielkraut : entre identité et modernité

 
Ce serait peu de dire que L’Identité malheureuse, le nouveau livre d’Alain Finkielkraut, suscite la polémique – conduisant même un individu à entarter le philosophe lors de son discours d’adieu à Polytechnique où il fut professeur.
 Si l’on en croit les médias dont le philosophe ne cesse de déchaîner les passions,  ce récent ouvrage n’est autre qu’un ramassis de propos racistes anti-immigration… Surprenant pour un membre de la LICRA (Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme).
 Dès lors, peut-être faut-il dépasser les discours médiatiques enflammés pour tenter de comprendre l’une des problématiques posées par Finkielkraut dans cet ouvrage. En tant que philosophe, ce dernier propose avant tout une réflexion sur les concepts d’identité et de diversité. À l’heure où la question de l’immigration semble de plus en plus importante,  Finkielkraut s’interroge sur la possibilité d’appartenir ou non à une nation, définie par une identité nationale. Or, cette problématique peut prendre sens lorsque l’auteur pose les questions de l’évolution technique et de la consommation au chapitre intitulé « Une chose belle, précieuse, fragile et périssable ».
 Pour Alain Finkielkraut, s’est perdu le contact avec le passé et avec ce qui faisait l’identité française, aujourd’hui attaquée par la technique et la consommation. En effet, comme pour ce dernier l’identité se définit par l’héritage, et que l’héritage est ruiné par le présentisme dans lequel nous vivons du fait même de l’interconnexion et de la technicisation, alors l’identité n’est plus. Malgré la polémique qu’un tel discours peut susciter, l’ouvrage a au moins un mérite : il permet de poser la questions du lien entre identité et médiatisation, héritage et technicisation.
 Ainsi, peut-on toujours parler d’identité nationale alors que les nouveaux médias sont vecteurs d’instantanéité et d’interactivité et ruinent par là-même le passé et l’héritage communs à la nation ? Jusqu’où y a-t-il un impact des médias et de la communication sur la question aussi bien philosophique que sociétale de l’identité et de l’appartenance à un groupe ? Enfin, comment accueillir lucidement les transformations du monde actuel ?

 
Juliette Courtillé

Politique

"My friends call me Batman"

La double vie d’un collaborateur d’Obama sur Twitter.
Un haut responsable de l’administration Obama a été démis de ses fonctions le 23 Octobre dernier pour avoir proféré des insultes à l’encontre des membres du gouvernement sur un compte Twitter anonyme. Depuis 2011, Jofi Joseph, responsable de la lutte contre la prolifération nucléaire et membre de l’équipe en charge des négociations avec l’Iran autour des armes nucléaires, tweetait régulièrement sous le pseudonyme @natsecwonk, n’hésitant pas à critiquer ouvertement la politique de la maison blanche ou même à divulguer des informations internes sur l’administration Obama. « My friends call me Batman », avait-il tweeté, narguant les services de sécurité lancés à sa recherche.
Egalement soupçonné d’avoir ouvert un second compte anonyme, @dchobbyist, sur lequel il publierait cette fois-ci des commentaires sur ses recours aux services de prostituées, Jofi Joseph, a finalement avoué les faits avant de s’excuser auprès de ses collaborateurs et de déclarer :« ce qui avait commencé comme une parodie de la culture de Washington est devenu un ensemble de commentaires déplacés et mesquins. J’endosse la responsabilité totale de cette affaire et je présente mes sincères excuses à tous ceux que j’ai insultés ».
A l’heure où certains supérieurs hiérarchiques n’hésitent plus à licencier leurs employés pour des discussions sur Facebook, cette affaire aux apparences de simple scandale politique fait pourtant ressurgir une problématique récurrente. Entre parole publique et échange à caractère privé, la prise de parole sur les réseaux sociaux ne bénéficie pas encore d’un statut clairement défini. Il est donc légitime de se demander où se situe aujourd’hui la frontière entre ces deux statuts autrefois clairement dissociables.
 
 
Amandine Verdier

Politique

Le Qatar ou l'art de séduire

 
Le Qatar peut se flatter d’avoir réussi à jeter un voile opaque et duveteux sur sa politique intérieure.
Mohammed Aj-Jami, alias Ibn al-Dhib regrette probablement à l’heure actuelle de n’avoir pas saisi plus tôt la supercherie savamment orchestrée par cette petite nation du Golfe Persique. Arrêté en novembre 2011, condamné à la prison à perpétuité en novembre 2012 pour « atteinte aux symboles de l’état et incitation à renverser le pouvoir » suite à l’écriture d’un poème exprimant son désir d’assister un jour à une propagation du printemps arabe jusqu’aux monarchies du Golfe, il sera finalement condamné à quinze ans de réclusion par la Cour de cassation de Doha en ce 22 novembre 2013. Paradoxal dans un pays ayant fait l’apologie  de ce même printemps arabe me direz-vous ? Effectivement. Mais cette frasque ne fait que faire écho à de nombreux autres écarts régulièrement commis par le Qatar : participation active avec les autres pays du Conseil de Coopération du Golfe à la création d’un test médical visant à détecter l’homosexualité afin d’empêcher la présence d’émigrés homosexuels sur leur territoire ; mais aussi implication dans de nombreux scandales dits « d’esclavage moderne », ayant notamment donné lieu à la publication le 17 octobre d’un rapport de la Walk Free Foundation affirmant qu’entre 4000 et 4500 personnes étaient actuellement réduites en esclavage moderne dans ce pays. N’oublions pas non plus que cet émirat est aussi le plus grand émetteur au monde de CO2 par personne.
En dépit de tous ces dysfonctionnements internes, les relations entre les grandes puissances européennes comme la France ou l’Allemagne et le Qatar semblent cependant n’avoir jamais été aussi bonnes. François Hollande, lors d’une visite officielle à Doha en juin 2013 qualifia ainsi la relation de son pays avec celui de l’émir Hamad ben Khalifa al-Thani de « relation de confiance, de transparence et de réciprocité. ». C’est à peine pourtant si une quelconque tonalité de réprobation pu être décelée lorsque le porte-parole du quai d’Orsay affirma que la France enjoignait les autorités quatariennes de manifester un « geste de clémence » envers Mohammed Aj-Jami et rappela « l’attachement de la France à la liberté d’opinion et d’expression ».
On ne compte plus en outre les accords commerciaux passés entre le Qatar et les pays européens. A titre d’exemples, mentionnons simplement le fait que depuis 2011 le Qatar soit le premier actionnaire de Lagardère, détenant ainsi plus de 12% de son capital ; l’entrée en octobre 2013 de fonds qataris dans le capital de Volkswagen ; ou encore la première place du Royaume-Uni sur la liste des pays récepteurs de capitaux en provenance de l’émirat. De manière plus générale, rappelons également que la monarchie du cheikh Al-Thani a même été choisie pour accueillir la Coupe du Monde de football de 2022.
Comment expliquer alors cette séduction que semble exercer le Qatar sur les pays européens ?
Outre des motifs économiques évidents –l’Europe ne pouvant se permettre de refuser des capitaux étrangers en cette période de crise-, il se trouve que de nombreuses stratégies de communication furent successivement mises en place par le Qatar afin d’apparaître comme un pays moderne et résolument disposé à resserrer ses liens avec les pays européens.
La première innovation communicationnelle de génie du Qatar fut ainsi de créer en 1996 la chaîne de télévision Al-Jazeera, chaîne ayant aujourd’hui le plus haut taux d’audience au sein du monde arabe (25.23 millions de téléspectateurs en moyenne). On constate en effet que depuis sa création, Al-Jazeera semble avoir toujours eu pour vocation de servir de tribune de contestation, allant jusqu’à s’enorgueillir d’avoir activement participé au « Printemps arabe », notamment via la retransmission en direct des soulèvements. L’accueil par la chaîne des  Doha Debates depuis 2011 – sorte de shows à l’américaine retransmis notamment par la BBC au sein desquels sont traités les sujets les plus controversés au sein du monde arabe – semble s’inscrire dans cette même lignée, le paroxysme de la supercherie étant toutefois atteint dans le fait que ces fameux débats soient victimes de la censure au Qatar.
Les incessantes tentatives du Qatar pour apparaître comme un pays favorable au développement des arts et de la littérature semblent également destinées à courtiser les pays occidentaux et à masquer sa propre politique intérieure. On remarque ainsi d’une part que de nombreux artistes européens -tels que Plantu- ont déjà reçu différents prix de la part de d’instances qataris, et d’autre part que les codes adoptés par le Qatar dans son développement culturel suivent bien plus une logique d’occidentalisation qu’une logique de modernisation accompagnée d’un respect des traditions et coutumes. La Cheikha Mozah bint Nasser al-Missne, mère de l’actuel émir, joue ainsi un rôle emblématique à ce sujet, notamment dans le domaine de la mode, le caractère typiquement occidental de ses tenues lui ayant ainsi par exemple valu d’être nommée deuxième femme la mieux habillée du monde par le magazine américain Vanity Fair en 2011. Il parait également intéressant de souligner qu’Al-Jazeera propose depuis quelques années un service d’e-learning destiné aux étrangers désireux de se perfectionner en arabe.
 S’il est un véritable Janus des temps modernes, il s’agit donc bien du Qatar.
Héloïse Lebrun-Brocail
Sources
Lepoint.fr
expressiondz.com
courrierinternational.com
Lefigaro.fr
Bloglemonde.fr
Nouvelobs.com