Play to Cure cancer
Société

Si jouer pouvait guérir

 
On nous annonçait il y a encore quelques jours que les jeux vidéos n’avaient pas d’impact négatif sur « les performances scolaires et cognitives » de ses joueurs. Aujourd’hui, le Cancer Research UK (institut de recherche mais aussi association caritative) fait mieux, en vous proposant de les aider à vaincre la maladie en installant un jeu intergalactique sur votre Smartphone.
Play to Cure – Genes in Space : un moyen de mettre à contribution le moins scientifique d’entre nous dans le traitement de données utiles à l’analyse des gènes responsables des dysfonctionnements cellulaires à l’origine du cancer.
Le message du Cancer Research UK est simple : nous pouvons tous contribuer à faire avancer la recherche sur le cancer – avec ou sans blouse -, et plus étonnamment, avec ou sans don*.
L’occasion de donner bonne conscience aux plus réticents à apporter leur contribution financière à la recherche, ou réelle campagne de sensibilisation ?

« The more players we have, the quicker we get the results, bring forward the day, when all cancers are cured »
 
Eléonore Péan
Sources :
CancerResearchUK.org
LaReclame.fr
* une application gratuite, disponible uniquement en anglais à l’heure actuelle

Facebook
Société

Facebook, notre meilleur « ami »

 
Depuis début février, Facebook convie ses quelques 1,2 milliards d’usagers actifs à son dixième anniversaire, et le réseau social numéro un ne ménage pas ses efforts pour intégrer ses invités à la fête. La nouvelle activité phare de cette période de célébration ? La possibilité de visionner une petite vidéo rétrospective, retraçant le parcours de chacun sur le site.
Le principe est simple, attractif et permet la mise en place d’une stratégie de communication des plus efficaces. Sur fond de musique émouvante, Facebook nous permet à nous, simples utilisateurs généralement anonymes, de nous remémorer nos « premiers moments », nos « publications préférées » et autres « photos que [nous avons] partagées. » Et justement, c’est là tout l’intérêt d’une telle démarche. Le rythme de la vidéo, la succession d’images et le zoom final sur notre photo de profil actuelle nous donnent l’agréable impression d’être quelqu’un d’important, d’unique au milieu de la masse d’usagers inscrits sur le réseau social. Chacun peut, le temps d’une minute, se rêver une vie palpitante, pleine de rebondissements et de bonheurs quotidiens.
Mais surtout, Facebook réussit à s’accorder une place non négligeable dans ce conte de fée que ses usagers sont censés vivre. Toujours présent, il serait là pour les accompagner à chaque moment clé de leur vie. Ce nouveau tournant communicationnel est d’ailleurs cohérent avec les efforts précédents visant à faire de Facebook un véritable journal intime (pensons à la mise en place de la Timeline en 2009 par exemple). Une telle stratégie de communication joue ainsi sur l’émotion et cette méthode semble s’avérer judicieuse, notamment pour un site dont le succès s’appuie sur les relations sociales, la fonction « like » ou encore le « partage » de photos et d’informations.
Plus qu’un réseau social, Facebook serait donc un « ami » qui nous accompagnerait et nous épaulerait tout au long de notre vie. Une stratégie que l’on « like », sur le papier du moins.
Margaux Putavy

DELL
Société

Dell, professionnel du Hackintosh

 
Il semble que Dell ait réussi un prodige à la fois informatique mais aussi légal : faire tourner son nouvel ordinateur portable, le XPS 15 sur Mac et sur PC. Tout du moins c’est ce que semble promettre la vidéo publicitaire qui présente une couturière en train de retoucher ses modèles sur son fabuleux ordinateur Dell passant, sans problème, d’un système d’exploitation à l’autre en effleurant l’écran. En outre, le design de l’ordinateur est très proche de celui d’un MacBook Air, ce qui renforce la possible confusion d’utilisation des logiciels.

L’erreur en a fait sourire plus d’un puisqu’Apple est connu pour protéger ses logiciels légalement en les autorisant seulement à être utilisés sur ses machines. De plus, la réalisation d’un Hackintosh (faire fonctionner OS X sur un PC) est une manipulation compliquée qui nécessite des connaissances très techniques et pointues dans le domaine informatique. Il parait amusant d’envisager la jeune et jolie couturière de la publicité être une geek professionnelle capable de créer un logiciel qui regrouperait Mac et Windows.
Une communication interne défaillante
Comment est-il alors possible qu’une telle erreur apparaisse dans la publicité Dell ? Il semble probable que la faute n’ait pas été commise lors du tournage mais seulement après. En effet, lors du tournage de la publicité, l’écran était probablement vierge afin d’éviter les reflets sur la vidéo. Il s’agit du travail d’un créatif qui, chargé de s’adapter aux mouvements des doigts de l’actrice, a recréé un enchaînement logique entre un logiciel de couture et l’interface Windows 8. L’enchainement des plans paraissant plausible, aucun des créatifs n’a fait attention à ce problème d’incrustation de Mac visible grâce à la barre de fonction et aux boutons qui s’apparentent à ceux de l’interface des Mac. Il semblerait que l’équipe publicitaire ait focalisé le message sur le design des produits et la modernité de l’entreprise. De manière originale, elle met en exergue, dans une publicité pour un ordinateur très performant et novateur, une femme créative au travail rappelant le programme de Dell « Initiative Women Powering Business ». Simplement, en oubliant de prendre en compte les contraintes propres au produit même, leur publicité apparait comme risible.
Ceci pose le problème de la segmentation des services dans les grandes entreprises. Un manque de communication entre les différents pôles de compétences est l’une des causes de cette bourde. Il n’est sans doute pas venu à l’idée aux concepteurs de la publicité de faire réviser la vidéo promotionnelle par un ingénieur ou un informaticien qui aurait pu leur signaler l’incident et aurait épargné à Dell un « bad buzz » relativement ridicule et des dépenses publicitaires inutiles. Surtout quand le groupe ne se porte pas bien et qu’il prévoit un programme de restructuration et de licenciements.
Le mutisme : une réponse insuffisante
Enfin la dernière erreur de communication de Dell aura été le déni. En effet, un mois après la publication de la réclame, celle-ci a été tout bonnement enlevée et aucun communiqué de presse ou article concernant leur malentendu n’a été rédigé. Lorsque les dirigeants sont interrogés, ceux-ci éludent les questions ou répondent  « ne pas être aussi familier avec OS X » sans pour autant assumer pleinement leur malheureuse campagne, ce qui alimente les railleries sur le Net et leur mauvaise image.
La mauvaise communication passe pour être monnaie courante chez Dell ; annonçant, il y a quelques jours, au Register son programme de restructuration et de licenciements, l’entreprise a manifesté un refus de donner le chiffre exact du nombre d’employés concernés au journal. Celui-ci s’est empressé de fouiller et a divulgué une suppression de 15.000 emplois entachant ainsi l’image de l’établissement.
Limiter, dans une juste mesure, les informations pour gérer sa communication est une bonne idée. N’en donner aucune présente la firme sous un mauvais jour en lui conférant un aspect dissimulateur. « Trop d’infos tue l’info » mais « aucune info tue l’image ».
Caroline Dusanter
Sources :
Macworld.fr
Iphoneaddict.fr
Pompomcomedy.fr
Crédit photo : Iphoneaddict

Société

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Woody Allen sans jamais oser le demander

 
Scoop
Il y a quelques jours, Dylan Farrow, fille adoptive du fameux cinéaste Woody Allen, a publié un témoignage dans le New York Times où elle raconte qu’il a abusé d’elle alors qu’elle avait 7 ans. Des allégations que le réalisateur juge « fausses et honteuses ». Retour sur une dénonciation qui fait polémique, à quelques semaines des Oscars pour lesquels le réalisateur est nominé pour son dernier film Blue Jasmine.
En janvier, lorsque Woody Allen s’était vu décerner un Golden Globe pour l’ensemble de son œuvre, son fils adoptif, Ronan Farrow, rédigeait un tweet pour le moins ironique : « Missed the Woody Allen tribute – did they put the part where a woman publicly confirmed he molested her at age 7 before or after Annie Hall ? »* Il fait ici référence à sa sœur, Dylan, qui déjà en octobre dernier affirmait avoir été victime d’abus sexuels lorsqu’elle était jeune.
La lettre ouverte de Dylan Farrow, parue dans le New York Times, explicite largement cette affirmation : « Quand j’avais sept ans, Woody Allen m’a prise par la main et menée dans un grenier sombre, qui ressemblait à un placard, au deuxième étage de notre maison. Il m’a dit de m’allonger sur le ventre et de jouer avec le train électrique de mon frère. Puis il m’a agressée sexuellement. Pendant ce temps-là il me parlait, me murmurant que j’étais une bonne petite fille, que c’était notre secret. » Ce récit, à la fois témoignage et accusation, par sa précision, n’est pas sans revêtir un caractère réaliste.
La question que pose une telle dénonciation est celle de la vérité : pourquoi l’accusation est-elle dévoilée aujourd’hui ? Simple cas de conscience ou perverse stratégie de communication à quelques jours des Oscars ? Mia Farrow, mère biologique de la victime, ne fait qu’attiser les braises en alimentant son compte Twitter. Vengeance d’une ancienne compagne, manipulation du cinéaste pour le voir évincé de la course aux Oscars, ou soutien d’une mère pour sa fille ? Autant de questions que l’on est en droit de se poser suite à cette révélation.
Woody dans tous ses états

Leslee Dart, porte-parole de Woody Allen, a affirmé que le cinéaste avait lu l’article et le considérait comme faux et honteux. Selon elle, une enquête avait déjà été menée par des experts indépendants mandatés par la Cour. Ceux-ci avaient conclu qu’il n’y avait aucune preuve crédible de l’agression. Et d’ailleurs, le réalisateur a reçu le soutien sans faille de l’un des enfants qu’il avait adopté avec Mia Farrow. Dans un entretien au magazine People, Moses Farrow accuse en effet sa mère d’avoir implanté de faux souvenirs dans l’esprit de sa sœur. Il lui paraît donc évident que Woody Allen n’a pas agressé sa sœur Dylan.
Mieux, le 7 février dernier, Woody Allen publie à son tour dans le New York Times une lettre ouverte en réponse à celle de Dylan Farrow en affirmant les propos qui suivent : « Bien sûr je n’ai pas agressé Dylan (…) J’espère qu’un jour elle saisira comment elle a été privée de la présence d’un père aimant et exploitée par une mère plus intéressée par sa colère putride que par le bien-être de sa fille ».
Ce conflit médiatique et médiatisé semble bien poser ces questions : à quelle fin faut-il utiliser les médias ? Permettent-ils de prescrire ou sont-ils le moyen de proscrire ? Doivent-ils informer, déformer ou bannir ?
La seule réponse qui soit pour le moment est la suivante : la course aux Oscars pour le réalisateur américain et son héroïne Cate Blanchett semble bien compromise.
Règlement de compte interconjugal ou dénonciation d’un crime juridique ? Telle est l’interrogation qui reste encore sans réponse à ce jour.
 
Juliette Courtillé
Sources :
Lefigaro.fr
Leparisien.fr
Francetvinfo.fr
Lemonde.fr
Crédits photos :
Actucine.com
Awfulannouncing.com
* « J’ai raté l’hommage à Woody Allen. Est-ce qu’ils ont mis le moment où une femme a publiquement confirmé qu’il avait abusé d’elle à l’âge de 7 ans, avant ou après Annie Hall ? »

famille royale espagne
Société

Seize centimes de trop ?

 
Tout semble s’effondrer pour la monarchie de Juan Carlos. Seuls 57% des espagnols se disent ainsi encore favorables au régime monarchique, et 62% d’entre eux aimeraient que le roi abdique en faveur de son fils, selon un sondage publié dans le quotidien El Pais. En cause ? De nombreux scandales, allant d’une coûteuse chasse à l’éléphant secrète du roi au Botswana en une période où l’Espagne est frappée de plein fouet par la crise ; à la mise en accusation de l’infante Cristina dont le procès pour fraude fiscale et blanchiment d’argent s’ouvrira en ce 8 février.

La publication le 3 février dernier d’un communiqué de presse de la Zarzuela dans le journal conservateur La Razón intitulé « La Monarchie coûte à chaque espagnol 16 centimes par an » n’est donc pas anodine et vise à rassurer les espagnols sur la pertinence économique de leur régime politique tant contesté. Le communiqué insiste en effet également sur la baisse du budget consacré à la Couronne pour cette année 2014 et sur la modification du mode de rémunération de la reine et de sa belle-fille, qui toucheront non plus une somme décidée subjectivement par le roi mais un salaire évalué par un comité.
Reste à voir si cette initiative sera suffisante pour contenir l’exaspération ambiante envers la famille royale.
 
Héloïse Lebrun-Brocail
Sur le même sujet voir le Curious d’Inès Garmon
Sources :
CourrierInternational.com
LeFigaro.fr
LaVie.fr

Société

François, le pape 2.0.

 
Sur le podium des personnalités les plus recherchées sur Google dans le monde entier, on tombe sans grande surprise sur le boys band britannique One Direction, ainsi que Justin Bieber, dont la réputation n’est plus à faire… Rien de bien étonnant, somme toute : il nous est facile de le comprendre face à l’engouement ou au doute que sont capables de susciter ces jeunes pop stars faisant chavirer le cœur des adolescentes mais aussi couler l’encre de nombreux détracteurs.
Cependant, juste après ces jeunes célébrités à mèche, devançant même le si charismatique président Barack Obama, sur la troisième marche du podium, on trouve… Le pape François !

C’est en effet le Saint-Père qui arrive en tête des mentions sur Internet, et obtient ainsi le titre de personnalité politique la plus « googlée » – en tous cas ce mois-ci – selon une étude commandée par Aleteia, un site d’information catholique. Mais la question qui se pose est : est-ce réellement une surprise ?
Dans un premier temps, ne nous mentons pas : oui. Indéniablement. Cela faisait longtemps qu’un souverain pontife n’avait pas été la source d’autant d’intérêt de la part des internautes, qu’ils soient fidèles ou non. Peut-être, et même sûrement, à cause de l’image un peu « vieillotte » et traditionnelle que renvoie le Vatican en général ; et même si les jeunes catholiques sont nombreux et actifs (comme cela peut se voir lors des Journées Mondiales de la Jeunesse), il n’en demeure pas moins que les hashtags #vatican ou #pape n’avaient jamais été très hype.
Et voilà que depuis l’élection du nouveau représentant mondial de la religion catholique, le Vatican change de visage, au sens propre comme au sens figuré. Jamais un pape n’avait été aussi populaire et aussi inscrit dans son temps. Depuis son investiture en effet, on entend beaucoup parler du pape François, de ses mesures, de ses réflexions, de ses objectifs pour la religion catholique, du changement et du nouveau tournant qu’il incarne, mais aussi de son image positive qui contribue à augmenter son potentiel médiatique.
« Le changement, c’est maintenant ». Oui, c’est bien ce que semble aussi dire ce François-là, de manière plus ou moins explicite. Et quel changement : tandis que Benoît XVI prônait le « silence » et le recueillement pour une communication réussie, saluant de manière méfiante les nouvelles technologies et les réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter, le nouveau pape accueille avec bienveillance ces alliés qui participent grandement à sa popularité actuelle.
C’est donc allègrement que le Saint-Père surfe sur sa popularité nouvelle et sur le fait qu’il semble incarner une bouffée d’air frais au sein de la religion catholique, qui semble soudain frappée d’un réel renouveau. Ainsi, on assiste à une véritable série de clichés étonnants mais touchants du pape François : dans le métro, dans les favelas, faisant un selfie avec quelques-uns de ses jeunes fidèles… Cette nouvelle figure du catholicisme va même jusqu’à inspirer de nombreux « memes » sympathiques et positifs à son égard sur la Toile, tandis que son prédécesseur ne récoltait que des comparaisons physiques – qui, force est de le constater, étaient relativement pertinentes – avec Dark Sidious de Star Wars.
Cette omniprésence du pape dans les médias est telle qu’il a été récemment élu « personnalité de l’année » par le Time Magazine. Mais, plus surprenant encore, il fait la Une du magazine culturel américain Rolling Stone : la rédaction justifie ce choix en disant que le Pape François incarne un changement, et représente particulièrement bien un côté plus « humain » de la religion catholique, en plus d’être un homme humble et prêt à parler de questions d’actualité portant à débat et relatives aux droits de l’homme.
Alors, ce nouveau chef de file de la religion catholique est-il celui que les gens attendent pour révolutionner le Vatican ? Cette popularité exponentielle et cette soudaine sympathie du pape vont-elles durer et survivre face à des critiques qui restent présentes malgré tout ? Grâce à lui, va-t-il y avoir tant de changements que cela au sein de la politique de la papauté? « The times they are a-changin’ » chantait Bob Dylan, comme nous le rappelle si bien la couverture du Rolling Stone. Mais ne disait-il pas également que « The answer is blowin’ in the wind » ? Le temps nous le dira. Affaire à suivre, donc.
 
Camille Gross
Sources:
Le figaro
France tv info
9gag

The New york Times
Société

L’information en italique

 
Nous ne lisons pas de la même manière sur le papier que sur l’écran, c’est pourquoi le développement des sites d’information en ligne, au détriment du journal, soulève de nouvelles réflexions quant à la mise en page du discours proposé. Une typographie ou une couleur influent sur notre interprétation finale d’un texte, et ces structures que nous ne voyons pas sont autant de voiles qui façonnent le discours et l’orientent.

La semaine dernière, le quotidien « The New York Times » modifiait certains éléments, discrets mais significatifs, de son site internet, ouvrant la voie à un questionnement sur ces structures invisibles qui conditionnent notre lecture à notre insu. Jusqu’ici était utilisée la police Georgia, en gras, qui ressortait avec d’autant plus de force qu’elle avait été créée pour l’écran. Désormais, il s’agit de Cheltenham, une police d’imprimerie, en rappel à l’édition papier — mais en italique. Plusieurs études ont été consacrées à l’utilisation de l’italique, qui serait à manipuler avec précaution : sa densité et son mouvement seraient apparemment plus difficiles à saisir, mais forceraient aussi le lecteur à une concentration supérieure, qui lui permettrait de mieux retenir les données en italique. Ian Adelman, le directeur de digital design du site explique ce changement par le désir d’insuffler au lecteur un sentiment d’urgence dans sa lecture, mais aussi de réaffirmer l’image du journal : moins désuet, mais toujours traditionnel.
 Ainsi, un élément aussi impalpable et fugace que la typographie d’un article porterait-il en lui le manifeste du journal tout entier, dans son rapport à l’information, au lecteur et au monde ?
Agnès Mascarou
Sources :
fastcodesign.com
slate.com
nytimes.com
Crédit photo :
nytimes.com
 
 
 

snapchat piston stage
Société

T’avais un piston ?! – J’avais Snapchat

 
« Tu vas faire ton stage chez DDB Oslo !! Trop de chance ! T’avais un piston ?!
– J’avais Snapchat. »
Les fans de selfies éphémères vont enfin pouvoir mettre leur incroyable concision au profit d’une cause durable : le stage (et l’épopée de sa recherche). Et vous, étudiants à la ramasse, vous allez enfin pouvoir ajouter un contact utile à vos 40 amis.
En effet, avec The Snapchat Pitch, l’agence DDB Oslo vient de vous lancer un défi créatif des plus audacieux. Le principe est simple : faire le pitch de votre idée du siècle (si tant est que vous l’ayez trouvée) en moins de 10 secondes sur Snapchat pour l’envoyer à DDB_Oslo et tenter de décrocher un stage dans l’agence de vos rêves (le pitch devant être une idée exploitable pour un client réel de DDB, forcément). Si votre créativité réussit à triompher de vos millions de concurrents virtuels, alors vous aurez l’honneur suprême de décrocher un entretien, avec en prime un billet d’avion à destination d’Oslo, tous frais payés par l’agence.
Dans le pire des cas, vous avez donc Snapchaté une énième fois (et vous vous êtes un peu creusé la cervelle). Au mieux, vous vous octroyez un week-end norvégien à moindre coût. Honnête.

Innovant, amusant, intéressant et… intelligent : la dimension de réalité se fond ici dans la virtualité pour un crowdsourcing dissimulé derrière le côté « funky » du concept. Avec un tel processus de recrutement, c’est autant d’idées nouvelles que de Snapchats envoyés, et ce à moindre effort et à moindre coût. The Snapchat Pitch, ou comment tirer parti au mieux des étudiants prêts à tout pour être employés ou décrocher LE stage au sein de l’agence. Mais après tout, ils le font tous. Eux ont le mérite d’être originaux.
 
Eugénie Mentré
Sources :
Iletaitunepub.fr

Société

De l’usage du stéréotype en communication

Lancée il y a quelques jours, la campagne d’affichage du mouvement de La Manif pour Tous a fait l’objet d’un amusant détournement sur les réseaux sociaux, et notamment sur Twitter. Des internautes ont en effet parodié les nouveaux visuels de la campagne, habillés aux couleurs d’un message stéréotypé (« Pas touche à nos stéréotypes de genre »), pour le moins déconcertant. À tel point qu’il devient même difficile de distinguer les affiches officielles de celles qui ont été parodiées…
Retour sur un dispositif communicationnel au slogan volontairement provocateur.
Stéréotypes et communication : à utiliser à bon escient

Jouer sur les stéréotypes peut être un moyen efficace de communiquer, puisqu’il s’agit de jouer sur des cadres de référence communs pour garantir la transmission rapide d’un message. Les clichés utilisés comme leviers de communication permettent ainsi d’entrer en résonnance avec des représentations socialement partagées et culturellement ancrées. Mais fonder une campagne entière de communication sur les seuls stéréotypes, en les affirmant comme vérité établie et en l’absence de ton décalé, s’avère une démarche périlleuse. Et encore plus quand celle-ci prend part à un débat social houleux.
La Manif pour Tous justifie sa campagne d’affichage comme se voulant provocante avec pour objectif de susciter l’intérêt autour de la question du genre et des modèles familiaux. Il est clair que s’appuyer sur de tels stéréotypes est un moyen affiché de provoquer, mais jusqu’à quel point est-ce une stratégie efficace de provoquer pour diffuser son message et faire parler de soi ? Peut-on aujourd’hui « provoquer pour provoquer » ? Sans nul doute que la provocation gratuite peine à faire sens et se révèle vite creuse.
Il apparaît aussi que le ton de cette campagne manque de subtilité, comme en témoignent les amusantes parodies qui ont surgi sur Twitter (cf. Bannière) dès la révélation des affiches par la Manif pour Tous. Appliqués aux adultes, les « stéréotypes de genre » prennent un tout autre sens, se révélant profondément drôles et absurdes : la femme est montrée comme affairée aux tâches ménagères, en contraste avec une figure masculine assise voire avachie – ou encore, l’homme promenant sa femme en laisse, traduisant la domination masculine sur une prétendue faiblesse du sexe féminin. Ce jeu de détournement des visuels par les internautes souligne le caractère quasi absurde des affiches de LMPT, faisant apparaître leur potentiel parodique intrinsèque.

Nouveau slogan de #manifpourtous ! « Pas touche à nos stéréotypes de genre » J’apporte ma contribution à leur combat ! pic.twitter.com/mD8GpJZPbm
— Allan BARTE (@AllanBARTE) 14 Janvier 2014

Cette appropriation parodique par les internautes révèle un certain rejet du message véhiculé par la campagne de LMPT. En effet, on peut analyser ces tweets jouant sur la parodie et l’humour comme des manières d’affirmer une opinion de désaccord, à l’image de La Fontaine qui utilisait le procédé de la métonymie animalière pour se moquer et dénoncer certains comportements de la Cour sous Louis XIV.
 
Le stéréotype : une fonction rassurante mais désuète ?
Jusqu’où l’usage des stéréotypes est-il pertinent dans une campagne de communication ? Ceux-ci peuvent en effet apparaître comme des archaïsmes communicationnels s’ils ne sont pas traités avec un second degré, lequel leur permettrait de revêtir une dimension contemporaine et moderne. L’argument du stéréotype de genre apparaît comme désuet, dans la mesure où il évoque un certain repli communicationnel, qui va à l’encontre de la « société ouverte » dans laquelle nous vivons (1). K. Popper avait bien analysé cet aspect de notre monde contemporain globalisé, caractérisé par le changement ainsi qu’un mouvement continu d’ouverture communicationnelle. Dans un contexte de dispersion et de discontinuité, se poser comme défenseur des « stéréotypes de genre » traduirait alors une volonté de retour à des valeurs originelles.
La campagne de LMPT peut se comprendre à l’aune de la pensée de D. Bougnoux (2) : le mouvement de LMPT aurait l’impression d’une perte de repères du fait des caprices d’une économie-monde qui n’est plus encadrée par l’Etat protecteur. La Manif pour Tous pourrait s’analyser comme l’une de ces communautés « aux identités manifestes » qui ressent le besoin de réaffirmer des valeurs qui s’inscrivent dans un mythe des origines du genre homme/femme, face à la dévastation des valeurs traditionnelles et aux désordres individualistes causés par le marché capitaliste mondial. La revendication de « stéréotypes de genre » semble exprimer comme une peur du changement, de la confrontation culturelle, des différences (ici sexuallo-identitaires).
Si la campagne de La Manif pour Tous a été parodiée aussi rapidement, c’est sans nul doute parce qu’elle brandit des stéréotypes socialement catégorisants qui s’opposent aux valeurs d’ouverture que prône notre société globalisée et ouverte au changement. D’un point de vue communicationnel, ce qui avait pour but d’être une campagne encourageant une lutte claire et affirmée, s’est mué en une campagne en contradiction avec son époque.
S’il est d’abord question dans cette campagne de légitimité des identités sexuelles/sexuées, il est aussi question de légitimité des identités mêmes qui nous fondent en tant qu’êtres particuliers.
 
Alexandra Ducrot
(1) La société ouverte et ses ennemis, Karl Popper (1945) : il y défend l’idée d’une société qui ne se tient pas à des connaissances établies mais reste ouverte à la réactualisation des connaissances avec l’idée d’un possible changement de la réalité qui nous entoure. En effet se revendiquer de vérité unique ou immuable dénierait le caractère profondément pluraliste et multiculturel de toute société démocratique.
(2) Introduction aux sciences de l’information et de la communication, Daniel Bougnoux (1993)
 
Sources :
Il était une pub : « Affiches Manif pour Tous : A peine dévoilées déjà parodiées »
Yagg : « Stéréotypes et escargots géants : Les affiches de la «Manif pour tous» parodiées »
Crédits photos :
Bannière : Il était une pub
 

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randomness
Société

Vivez heureux, vivez hasardeux

 
Tout est prévu : le clic, la recherche, tout se trouve, ce que vous voulez vous l’avez, et si vous n’en avez pas les moyens, l’on peut toujours vous le prêter. Toutes les avancées technologiques se sont fixées l’objectif d’accroître le contrôle qu’ont les hommes sur leur vie – voiture, téléphone portable et Internet en sont quelques exemples. Marshall McLuhan nous l’a montré, les nouveaux médias ne sont que des extensions du corps humain. Alors, dans une époque où les moyens d’action de l’homme se sont sans cesse accrus, comment surprendre un homme qui contrôle tous ses choix de A à Z ?
Le « random », une forte chance de succès
Le « random » en anglais, à la base des jeux de hasard, ennemi de la science et des religions, il reste un objet fascinant pour l’homme ;  mais pourquoi le hasard ?
Le hasard vient fournir ce qu’aucune des inventions technologiques n’a pu produire, ce frisson de l’inconnu. Plusieurs moyens de communication ont intégré l’aléatoire dans leur fonctionnement. On peut citer entre autres des sites comme Bazookam, Chatroulette, ou encore Stumble Upon. Ces sites connaissent un véritable succès car ils proposent une aventure numérique. Stumble Upon vous fait voyager d’une page internet à une autre selon vos goûts de manière aléatoire.  Ce site a été racheté par eBay pour 75 millions d’euros, il compte en 2013 30 millions d’inscrits. Enfin, la fonction aléatoire d’Apple pour la musique est la fonction la plus utilisée. Elle permet de vous surprendre même si vous connaissez tous les morceaux de votre iPod. L’aléatoire a réussi à fournir ce que nombre d’inventions ne peuvent fournir : de la surprise.

Reddit, propose sur sa page d’accueil des sujets aléatoires, où des débats entre personnes quasi anonymes ont lieu. La force de ce site réside dans la possibilité de sortir de son paradigme quotidien. L’anonymat et l’aléatoire permettant une liberté d’expression, une liberté de surprise quasi infinie. Car le « random », par son caractère fugace, permet une plus grande spontanéité, une plus grande liberté d’expression. Il ne s’agit plus de défendre son opinion diplomatiquement avec un ami, un membre de votre famille, mais plutôt de dire tout ce que vous pensez, sans concession, à un parfait étranger.
L’aléatoire ne doit plus être considéré uniquement comme le « bruit » par les sciences de l’information et de la communication. Il porte un véritable sens, vouloir l’aléatoire c’est vouloir quelque chose. Le hasard a un sens. Réduire l’aléatoire à l’inefficacité, à l’inutile ou au contingent est une erreur. Le « random », c’est l’errance, l’inconnu, l’aventure certes, mais qui mène à la découverte du trésor caché. Intégrer l’aléatoire à la communication, c’est intégrer le bonheur du jeu et de la surprise. De plus, le hasard a toujours été source de fascination pour l’homme – les religions et les sciences n’ont eu de cesse de vouloir l’expliquer. Le consommateur essaiera de faire de même. Ainsi, la musique aléatoire de son iPod viendra expliquer l’humeur de celui qui écoute le morceau. Faire vivre l’aléatoire à un public de consommateurs c’est faire vivre une expérience produit introspective. Celle de l’inédit continuel, et de la découverte de l’autre et de soi. Apple a parfaitement réussi cela avec l’iPod.
Pour une réhabilitation du « random » contre l’hyper ciblage du consommateur
Le « random » a déjà acquis sa place dans l’art. L’art génératif est par exemple un art numérique qui se base sur des algorithmes pour concevoir des œuvres d’art qui se génèrent elles-mêmes. André Breton avait initié le mouvement du dessin automatique, qui avait pour but de révéler le subconscient. Il s’agissait de laisser sa main guider le dessin. Il publia en 1933 Le message automatique, livre qui venait expliquer son approche artistique. Aujourd’hui la démarche est la même, hormis qu’elle passe par l’intermédiaire de l’ordinateur. L’objectif est le même : expliquer l’homme et son subconscient à travers le hasard. On peut observer ci-dessus (cf. Bannière) 3 créations aléatoires dans le « Brute Force Method » d’Andreas Nicolas Fischer.
A quoi bon toujours plus cibler, à quoi bon conforter les utilisateurs dans une routine intellectuelle ? Les vidéos YouTube proposées à droite de la fenêtre de navigation ne sont que des suggestions affinées par des centaines de recherche. Le charme, la surprise, voilà ce que peut proposer le « random » face à la routine de l’hyper choix sur internet.
De l’aléatoire naît la surprise et de la surprise la curiosité, meilleur levier de la connaissance. Après tout, le bonheur d’une bibliothèque réside surtout dans l’errance et la découverte de l’inconnu, et c’est ainsi que l’on progresse, lorsque l’on sort de son paradigme quotidien. Wikipédia a compris le potentiel du « random » en intégrant une fonction « aléatoire » qui nous transporte d’une page Wikipédia à une autre. L’aléatoire a un rôle à jouer dans les processus d’apprentissage.
Enfin, comment envisager la vente sur internet sans utiliser l’aléatoire, pourquoi essayer de vendre ce que le consommateur connaît déjà ? Ce qu’il tape dans la barre de recherche sur Amazon ou eBay, les articles similaires qui lui sont proposés, tout lui est connu d’avance. Il sait déjà s’il en a besoin, s’il veut l’acheter. Alors que proposer, des articles dont il ignore l’existence, est le meilleur moyen de créer le désir et donc la vente.
Dans une ère de l’hyper choix, il est bon de délester l’individu d’une routine quotidienne dont il est lui même l’acteur. Libre à nous de refaire d’Internet une mer sur la laquelle surfer et non une autoroute balisée.
 
Arnaud Faure
Sources :
The Guardian
The Time Science & Space
Distilled
Crédits photos :
3 tableaux d’Andreas Nicolas Fischer Brute Force Method
Distilled