Société

N'est pas Dieu qui veut…

 
Il n’aura sûrement échappé à personne (pour les autres, pas de panique, je vous mets au parfum dans un instant), mais il y a au moins une personne à Paris qui ne connaît pas Kanye West. On a pu découvrir cela en regardant le Petit Journal de Yann Barthès il y a quelques jours.
Dans cette vidéo, une parisienne tombe sur Kanye West qui se fait photographier devant un immeuble. Intriguée, elle demande le plus simplement du monde qui est cette personne. Kanye West comprend et se présente, puis rentre dans le bâtiment, visiblement très vexé…
Que vient faire ici Kanye West me demanderez vous ? Et bien cette vidéo très amusante est la preuve de l’échec total de sa communication. En effet, Kanye West ne cesse depuis quelques mois de se proclamer devant toutes les chaînes de télévision la « number one rock star on the planet ». Il est « Jim Morrisson and Jimi Hendrix ». J’en passe et des meilleures.
Or, cette femme est la preuve vivante, et loin d’être la seule, qu’il n’est pas la rock star qu’il prétend être. Coup dur pour cette star mégalo qui pense que tout le monde sait qui il est et ce qu’il fait. C’est le risque de tenir ce genre de propos devant toutes les chaînes télévisées. Pas sûr que Kanye West ait un service de communication à proprement parler, mais cette vidéo Youtube est pour lui une humiliation et un flop magistral.
Le rire est la preuve la plus visible de cet échec communicationnel. Ce rire vient sûrement du fait que Kanye West tombe de son piédestal. Il ne peut contrôler ses réactions, un peu comme un enfant à qui on vient de dire quelque chose qui ne lui plait pas, il prend cela très sérieusement. La tête de Kanye West lorsqu’il est face à son propre flop fait rire d’elle-même. Le pire ennemi de ce king quelque peu autoproclamé réside dans le rire, arme fatale brandie contre lui depuis quelques temps.
Le flop de Kanye West est manifeste. Mais cet échec lui sera peut-être bénéfique malgré tout. Yann Barthès et surtout Ophélie Menier (sa nouvelle comparse à l’écran) ont retrouvé cette fameuse « femme qui ne connaît pas Kanye West » et son mari. Maintenant, elle le connaît, et l’équipe du Petit Journal l’a montrée en train d’écouter sa musique. Le mari de cette femme surtout, qui a vivement approuvé, rejoignant l’ironie très souvent proposée par Yann Barthès. Ils ont donc diffusé sur la chaîne des extraits de ses chansons. Ironie ou non, ces morceaux sont passés à l’antenne, pour ceux qui ne connaissaient pas Kanye West non plus… Cela reste à relativiser car le Petit Journal vise avant tout un public jeune, mais la présence de Kanye West et de ses chansons restent pour lui un avantage. Quel est le but de se proposer comme la rock star du monde sinon qu’on parle de soi ?
Et ensuite que voyons-nous en suivant les nouvelles ? Eminem, pour la sortie de son nouvel album très attendu, prend exactement le même chemin… Bataille ridicule pour la suprématie ou stratégie bien sentie ?
Dans le cas d’Eminem comme de Kanye West, le but est très certainement de mobiliser les fans sur les réseaux sociaux. Les réactions aux déclarations d’Eminem ne se font pas attendre, le gagnant est alors le rappeur qui aura les fans les plus mobilisés. Alors, flop ou pas ? La question mérite d’être quelque peu reposée. Cette quête de la couronne est forcément vouée à l’échec car mettre tout le monde d’accord est impossible, cela ajouté au fait qu’une grande partie de la population ne s’y intéresse pas. Du point de vue de la mobilisation des fans déjà conquis, l’échec n’est peut-être pas si important. Kanye West et Eminem ne se lancent pas dans une campagne de conquête d’un nouveau public, ils se lancent dans la quête de contact avec leurs fans déjà existants. Ils rechercheraient alors une sorte de « feed back », chose qui était plus difficile à obtenir avec Internet qui commençait seulement à s’imposer au début de leur carrière. Tireraient-ils ainsi pleinement partie des nouvelles possibilités des réseaux sociaux ?
 
Paola Paci
Sources :
http://www.lefigaro.fr/musique/2013/10/15/03006-20131015ARTFIG00413-eminem-se-prend-pour-le-dieu-du-rap.php

La minute pop du 07/10

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Société

Pimp my visibility

 
Lorsque les marques ont investi Internet, elles ont du bouleverser leurs usages et s’adapter aux logiques de la Toile. Ce nouvel espace leur a fourni une visibilité sans précédent. Mais celle-ci doit être exploitée et constamment entretenue. Jusqu’ici, la visibilité dépendait de l’argent que les marques investissaient dans leurs campagnes. Désormais leur visibilité ne dépend plus d’elles seules : elles doivent comprendre et jouer avec des acteurs tiers, comme les moteurs de recherche qui sont devenus les principaux outils pour accéder au Saint Graal. Analyse.
Lorsqu’une marque se déploie sur Internet, elle doit être référencée. C’est le seul moyen pour qu’elle puisse atteindre ses clients. Plusieurs stratégies existent : les stratégies de buzz, qui ont pour but de créer le plus de bruit pour gagner en visibilité et le référencement naturel sur les réseaux. Là où le premier élément prend souvent place dans une campagne ponctuelle, le référencement permet d’avoir de la visibilité sur le long-court.
Le référencement naturel est né avec les moteurs de recherche. Il s’agit d’avoir un site suffisamment visible pour qu’il puisse être trouvé en première page de ces derniers. Sous l’impulsion de Google, leader du marché, les moteurs fonctionnent selon une logique de méritocratie. Lorsqu’un internaute recherche quelque chose, l’algorithme trouve les sites correspondants à ces mots clés. Il classe les sites selon leur popularité et le bruit qu’ils ont produit c’est-à-dire que plus un site aura été partagé et linké, plus il sera mis en avant dans les résultats de recherche.
Une méthode proche du buzz a été mise en place par les marques. Il s’agit de faire un maximum de bruit autour d’un sujet précis qui est celui du site que l’ont veut promouvoir. Par exemple, une marque alimentaire va faire de la création de contenu dans son domaine d’exercice et non sur un de ses produits.
Or, ces contenus doivent être facilement repris et linkés pour mieux s’afficher sur les moteurs de recherche. C’est dans ce contexte que l’on assiste actuellement à une mutation des méthodes d’écriture sur Internet. Sous l’emprise de la recherche de la visibilité, les marques s’emparent des méthodes journalistiques pour produire du contenu. Elles deviennent des médias à part entière, se déployant à 360 degrés, sur les réseaux sociaux, les sites Internet, les sites de vidéos… Tout cela pour créer un contenu partageable augmentant leur visibilité. Ce contenu portant les artifices du journalisme fait office de porte d’entrée vers un site.
Cette nouvelle stratégie, dans un premier temps propre aux marques, se diffuse largement au sein du journalisme. Les marques se font médias et les médias se font marques en adoptant leurs stratégies de référencement. C’est particulièrement visible sur les sites de pure-players, ces journaux gratuits disponibles exclusivement en ligne. En regardant la liste d’articles d’un site comme Slate, on remarque que les articles sont souvent écrits à l’infinitif (car on ne conjugue pas ses verbes quand on fait une recherche) et les titres prennent la forme d’une question et sont écrits en mots-clés. On évite les articles de fond, peu adaptés aux usages de lecture fondés sur la rapidité de la lecture. Les contenus écrits tendent clairement vers la simplification.
Pour le bien de la visibilité on assiste à une mutation des contenus qui s’emparent des règles de référencement et sont présentés d’une manière à attirer le plus de clics. Par un phénomène de contagion, cette tendance s’est ancrée dans les usages des marques et des médias. On peut donc se demander si l’ont n’assisterait pas à une baisse de la qualité des contenus disponibles sur Internet ?
 
Arthur Guillôme