Culture

L'art de se réfugier dans les clichés

Une nouvelle polémique est venue irriguer, mardi 6 octobre 2015, le chapitre déjà controversé de l’accueil des réfugiés en Europe. Le hongrois Norbert Baksa, qui se définit lui-même comme « un photographe professionnel indépendant avec vingt ans d’expérience à son actif », est à l’origine de « Der migrant », clichés de mode sur le thème des réfugiés.
 

La réaction des internautes fût virulente et sans appel. Devant l’ardeur des condamnations de son travail, Norbert Baksa retira finalement les images de sa page internet et de son compte Twitter deux jours après leur publication.
De l’objet des médias à l’objet d’art
Depuis quelques mois, et a fortiori depuis le 24 août dernier, lorsqu’Angela Merkel a annoncé une souplesse sur l’ouverture des frontières de l’Allemagne concernant le cas des demandeurs d’asile syriens, les articles et reportages médiatiques au sujet des réfugiés prolifèrent.
Aussi le thème de l’immigration est-il omniprésent dans les médias, qu’on lise la presse, qu’on écoute la radio, qu’on regarde la télévision, et par conséquent il s’inscrit dans nos quotidiens.
Entendu en tant qu’objet investi par les médias, le thème des migrants soulève un paradoxe. S’il est légitime que les travaux de Norbert Baksa dérangent et offusquent les internautes, il reste compréhensible que la thématique des migrants soit source d’inspiration pour l’art, puisqu’au cœur des préoccupations actuelles (en admettant que les clichés en question soient de l’art). Comment comprendre cette tension ?
Art et politique, les amants maudits
En partant du postulat que le projet « Der migrant » appartienne bien au domaine de l’art, il est possible d’entendre les justifications que le photographe s’est donné la peine de publier sur son compte Twitter.

Norbert Baksa soutient que son travail met l’accent sur « la complexité de la situation et adopte un point de vue différent ».
Dans l’exemple de la photographie ci-dessous, on peut remarquer un décalage évident dans le choix des personnages. Le contraste est évident entre une délicate et fragile jeune femme, représentant une migrante, et un individu violent, symbole du l’ordre étatique.
La série de photos dérange surtout par ses contrastes manichéens entre le beau et le laid, le bien et le mal. Et ce sont précisément ces oxymores visuels qui permettraient de mettre en évidence « la complexité de la situation ».
 
 

« Ingrid, est-ce que tu buzz ? »
Le problème n’est pas le choix du thème des réfugiés, mais la manière discutable, et plutôt frivole, dont il est traité. La mise en scène d’une jeune femme, respirant la fraîcheur, en train de faire un selfie aguicheur, chemisier ouvert, devant une barrière barbelée à l’aide d’un téléphone portable qui porte le logo Chanel, n’a pu naître que d’un esprit conscient du tollé que cela engendrerait. Les situations sont si grotesques qu’elles transpirent la recherche du « buzz médiatique ».

Cinquante-deux millions d’immigrés*, et moi, et moi, et moi
On connaît la position radicale de la Hongrie à propos de l’accueil des réfugiés en Europe. Après qu’il ait construit un mur « anti-migrants » à sa frontière avec la Serbie, le premier ministre hongrois Viktor Orban a fait voter une loi autorisant les militaires à faire usage d’armes non létales sur les migrants.
Certes, les jolies ambitions que Norbert Baksa a affiché sur son compte Twitter, telles que « exposer la dualité des reportages des médias », « faire se rencontrer différentes opinions pour nous ouvrir l’esprit » semblent prôner un noble objectif de compréhension de la situation dans sa globalité. Mais dans ses clichés, on retrouve en fait le leitmotiv de la décadence et du repli national.
 

Il nous assure en effet que ses « photos sont la traduction des reportages qu’on peut voir dans les médias hongrois. Certains montrent bien des réfugiés qui s’enfuient pour une question de survie, tandis que d’autres exposent des migrants agressifs ou terroristes ».
La théorie du complot revisitée ?
Peut-être Norbert Baksa entend-il en fait dénoncer les abus de tous ces migrants calculateurs, qui se cachent sournoisement sous l’appellation « réfugiés », et s’infiltrent en Europe, uniquement dans le but de profiter de la prospérité économique européenne. Cette intention de dénonciation serait sous-jacente dans l’intitulé même de son projet. Alors qu’il prétendrait nous ouvrir les yeux sur une situation complexe, puisque les médias traditionnels n’auraient pas correctement rempli leur mission d’information à ce sujet, l’accusateur nomme naturellement son travail « Der Migrant ».
Mais l’emploi de l’article défini ne sous-entend-il pas précisément une généralisation, celle-là même qu’il ambitionne de combattre ?
 

Trancher entre hypocrisie ou recherche de buzz, voilà la « dualité » que semble suggérer Norbert Baksa à travers ses clichés, à prendre dans tous les sens du terme.
Aline Nippert
Linkedin
Sources :
* chiffre tiré d’un projet-événement d’Arte reportage, où « migrants » est pris dans son sens large de « nombre d’êtres humains qui sont contraints à vivre sur une terre qui n’est pas la leur » http://info.arte.tv/fr/refugies

https://twitter.com/NorbertBaksa?ref_src=twsrc%5Etfw
http://www.rtl.fr/actu/international/en-hongrie-les-militaires-sont-autorises-a-tirer-sur-les-migrants-7779808514

Crédit photos :
http://www.konbini.com/fr/tendances-2/en-images-shooting-mode-refugies-fait-polemique/

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Société

France 3 tire son irrévérence

Avant même d’avoir pu être diffusé sur les antennes, le dernier spot publicitaire conçu par France 3 a été censuré. Alors que le CSA s’est engagé à œuvrer pour la réduction des inégalités hommes/femmes dans la sphère médiatique, la chaîne télévisée produit une campagne publicitaire au contenu indéniablement irrévérencieux, jugé sexiste. Cette dernière nous donne à voir les images d’un foyer délaissé : four brûlant désespérément le repas du soir, chambre d’enfant désordonnée, scène de repassage cauchemardesque. C’est le fameux titre de Patrick Juvet qui nous révèle le nom du responsable de ce remue-ménage : la femme. Ce recourt au stéréotype du genre, qui n’a fait que décrédibiliser et transfigurer le message transmis, nous pousse à questionner la place du cliché dans la stratégie communicationnelle.
Jouer le cliché, un pari risqué

 

Sarcasme, facilité, résurgence de lieux communs et de topoï du genre exploités depuis des décennies : tous les éléments du cliché destinés à faire exploser une polémique virulente sont réunis. La campagne publicitaire lancée par France 3 aurait pu faire sourire. Mieux, elle aurait pu éveiller les consciences et attirer l’attention des téléspectateurs sur la réalité effective d’une avancée sociale majeure : la représentation des femmes au sein de l’enceinte médiatique de la chaîne. Mais la déprogrammation du spot signe son échec.
A quoi cet échec tient-il ? «Affirmer ses valeurs à travers cette nouvelle campagne qui met à l’honneur les présentatrices»: l’intention première de la chaîne était louable. Mais en s’attaquant à la destruction d’un cliché, cette campagne semble en avoir construit un autre. De plus, elle met en scène un schéma étroitement lié à des problématiques sociétales encore brûlantes. L’utilisation du cliché est rejetée, certainement parce qu’il est le reflet d’une réalité qui dérange et qui n’est pas encore dépassée. S’il avait été utilisé quelques années auparavant, peut-être aurait-il pu s’introduire dans l’espace médiatique sans faire de bruit, à la manière du spot lancé en 1995 par l’Équipe pour promouvoir un PSG-Barcelone.
 

« Pour une esthétique de la réception »
L’ambiguïté de la vidéo a provoqué des réactions violentes sur les réseaux sociaux, notamment de la part de la  secrétaire d’État chargée des Droits des femmes, Pascale Boistard. La stratégie communicationnelle de la chaîne s’est enlisée, sans doute du fait de la sous-évaluation du potentiel polémique du cliché exploité. Ce flop médiatique pointe du doigt la problématique de la réception qui se pose à chaque fois qu’il y a tentative de communication. Ici, le message transmis n’est plus le même que le message reçu. Le premier a été transfiguré par ceux qui en on fait une interprétation nouvelle. Mais comment croire que l’équipe de France 3 ait pu être naïve à ce point ? Comment croire que ce bad buzz ne soit pas intentionnel ? Après visionnage de la vidéo, le scepticisme est à son comble.

Pourtant, des réactions bien différentes ont émergé sur la toile. Certains déplorent l’explosion de la polémique et auraient volontiers choisi d’ironiser. Finalement, pourquoi ne pas se permettre de rire de ces représentations grotesques ? Pourquoi ne pas considérer que railler le cliché lui-même pourrait contribuer à amoindrir son ancrage réel dans la société ?
La fausse bonne idée ?
Le message véhiculé par France 3 s’impose dans un contexte où acteurs sociaux et société civile ont les moyens de se manifester et de se réunir contre toute forme d’abus de pouvoir, symbolique ou non. Grâce à la démocratisation de la parole publique étendue à l’échelle citoyenne, et suite au développement de supports médiatiques participatifs, chacun peut se rendre capable d’agir sur la déconstruction de représentations, idées reçues et clichés. Mais au-delà de son caractère polémique, le cliché semble pouvoir être un puissant moyen de se contrer lui-même. C’est par exemple avec ce regard cynique et critique que Ségolène Royal fait du stéréotype sexiste un instrument de communication politique impactant lors de sa campagne pour les primaires socialistes de 2011.

 
De part l’exercice de leur profession et leur présence active dans les coulisses de France TV, Delphine Ernotte Cunci (patronne de France TV) ou encore Dana Hastier (patronne de France 3) tendent à prouver que les femmes sont véritablement mieux représentées dans l’espace médiatique. Malgré tout, une forme de malaise demeure. Le 7 septembre dernier, l’invitation au départ de Claire Chazal ouvre une nouvelle fois le débat. La présentatrice a été conviée à « savoir passer la main ». 58 ans, il est vrai, ce n’est plus tout jeune!L’ironie nous tient quand on pense à Jean-Pierre Pernault, 65 ans, qui rayonne bucoliquement dans le 13h depuis 27 ans.
« Je pense qu’en télévision, on tolère plus les cheveux blancs des hommes que les rides des femmes », Léa Salamé a joliment résumé la situation, qui attend d’être résolue. Il est temps : révolutionnons l’usage des clichés pour les mettre au service de leur propre dénonciation, car comme l’énonce Roy Lichtenstein, ils sont « des modèles simples frappants, mémorables et faciles à communiquer. Ils peuvent signifier l’essentiel d’une idée. Ils ont la possibilité de devenir monumentaux. »
Émilie Beraud
Sources : 
INA
L’ADN
Madmoizelle
Le Monde
Crédits Photos :
Le Huffington Post

je suis charlie fastncurious
Société

Dites moi pas que c'est pas vrai !

Le 7 janvier 2015. Une date qui fait froid dans le dos et échauffe les esprits. Ce n’est pas seulement la presse qui a été « punie » d’avoir blasphémé le prophète, c’est aussi et surtout les valeurs qu’elle représente et véhicule. Par conséquent, le #JeSuisCharlie résonne comme une prise de parole à la fois individuelle et collective qui revendique la liberté de l’expression sous toutes ses formes. Le slogan est entré en peu de temps dans la mémoire collective. A tel point que les marques l’ont récupéré.
Vous n’allez pas oser ?
Et si ! Elles l’ont fait ! Comment ont-elles pu ? Pourquoi les marques ont-elles arboré fièrement le slogan JeSuisCharlie pour en faire un logo ?
Le slogan #JeSuisCharlie reprend les codes publicitaires les plus basiques : une formule brève, percutante, qui concerne tout un chacun et implique toutes les mentalités. Une formule qui devient virale, se propage jusqu’à toucher tous les continents. Pourquoi se priver de l’opportunité de se donner bonne image, bonne conscience tout en saisissant une bonne occasion de s’en mettre plein les poches ? Les marques ont bien saisi la perspective pécuniaire qui leur était ouverte par les événements d’une actualité sanglante et émotionnelle. Avouez que vous aussi vous avez été stupéfait, choqué, interloqué, bref complètement atterré quand vous avez vu cette image :

 La marque a voulu montrer visuellement sa solidarité vis-à-vis des victimes et de leurs familles. Il s’agissait de faire sa bonne action tout en construisant une image de marque compatissante, solidaire et surtout engagée qui milite pour les droits et les libertés des citoyens du monde. Rien de tel pour attirer de la clientèle en masse !
De même, « jesuischarlie.net », boutique en ligne de goodies griffés JeSuisCharlie, a eu la vie courte. En effet, quelques heures seulement après sa création, le site a dû fermer face à l’indignation générale. Le concepteur et gérant du site a dû présenter ses excuses. L’homme affirme avoir voulu « aider le journal » financièrement.

Autre exemple : les sites de vente en ligne comme ebay ou encore leboncoin, mettent en place une stratégie de vente aux enchères des numéros de Charlie Hebdo. Certains exemplaires atteignent les 75 000 euros !

Indignation, excuses bidons et condamnation.
On l’a déjà vu dans les articles de Pauline Flamant et Marie Mougin, les réactions qui font suite aux attentats ont un caractère mondial qui s’exprime notamment via les rassemblements de masse et les réseaux sociaux. Or, suite à la récupération commerciale et marchande du « logo » JeSuisCharlie, pléthore de commentaires indignés ont inondé les réseaux pour exprimer leur mécontentement. Joachim Roncin, le directeur artistique de « The Stylist » qui a créé le logo déplore l’utilisation commerciale que l’on a pu faire de JeSuisCharlie.
La marque Les 3 Suisses a même été parodiée de manière à en montrer l’abjection, l’opportunisme et l’indécence voire l’immoralisme face aux événements.

Le Petit Journal a lui aussi dénoncé en vidéo cette récupération commerciale jugée inacceptable.

De tels commentaires et parodies sont plus que déplorables pour la marque dont l’e-réputation a été entachée au plus haut point. En effet, une opinion favorable est vitale pour une marque qui ambitionne ici de devenir un géant de la vente en ligne. Sans cela, la marque bât de l’aile et adieu les clients, les ventes et les recettes, on ferme la boutique ! Par conséquent, Les 3 Suisses ont essayé de prendre en compte les critiques pour ne pas négliger l’impact irrémédiable que celles-ci pouvaient avoir sur l’image de marque. Une communication de crise était essentielle pour calmer la foule. Et voici ce qu’a répondu la marque sur son compte Twitter et Facebook :
La marque a choisi de s’excuser platement en en disant le moins possible tout en donnant des justifications quelque peu vaseuses. Mais ces justifications sont-elles de bon aloi ?
Vous avez dit « newsjacking » ?
Le « newsjacking », ou marketing en temps réel, est cette tendance à surfer sur l’actualité pour la tourner à son avantage. C’est savoir et pouvoir s’approprier l’actualité pour soi afin de servir ses intérêts et créer le buzz. Aujourd’hui les marques savent très bien saisir l’air du temps et s’en jouer. Le cas des 3 Suisses est intéressant car il illustre bien de façon aussi bien positive que négative cette tendance. La marque avait su profiter de la bévue publicitaire de La Redoute en 2012 qui avait laissé échapper un arrière-plan quelque peu imprévu sur l’une de ses publicités. La marque Les 3 Suisses avait tiré profit de la situation en jouant la carte de l’humour.

 
Mais toute l’actualité n’est pas forcément bonne à utiliser dans une stratégie de communication. Et les attentats terroristes ne peuvent définitivement pas servir impunément la notoriété d’une marque. Comment le pourraient-ils quand on sait que JeSuisCharlie porte une identité qui n’a absolument rien à voir avec celle de la marque de vêtements ? L’identité de JeSuisCharlie est symbolique, elle représente une collectivité. Même si le cas est éminemment français, c’est la communauté la plus grande qui soit, celle des citoyens du monde, qui s’est sentie agressée par les terroristes islamistes. Or, en voulant fusionner son identité de marque à celle de JeSuisCharlie, la marque des 3 Suisses s’est mis à dos cette communauté créant ainsi un véritable bad buzz. Si #JeSuisCharlie peut se comprendre comme une image de marque devenue stéréotype à laquelle adhère un collectif, elle ne peut tout bonnement pas entrer dans une logique marchande. Déjà parce-que c’est contraindre une forme d’énonciation collective à faire l’objet d’un processus marchand. C’est donc entrer en collision avec le corps social. Ensuite, c’est profiter d’une situation scandaleuse et dramatique pour la tourner à son avantage, se réapproprier ce qui est vécu collectivement pour son propre bénéfice individuel, égoïste et égocentrique. Que les choses soient claires, mettre ça sur le compte de la charité financière ou de l’expression d’une forme de solidarité n’est définitivement pas une excuse valable.
Le mieux aurait été d’afficher le logo JeSuisCharlie, façon discrète de communier aux évènements à son échelle. L’heure n’était pas à la recherche à tout prix d’une forme d’originalité dans la douleur qui se traduirait par une mise en avant singulière de soi, mais à la discrétion, ce que Pierre Zaoui appelle « l’art de disparaître ». La discrétion ou la possibilité de faire l’expérience la plus authentique et donc la plus réelle du monde. L’occasion de participer anonymement aux évènements qui ont atteint et ébranlé la sphère publique.
Jeanne Canus-Lacoste
Sources :
leblogducommunicant2-0.com
konbini.com
latribune.fr
tempsreel.nouvelobs.fr
lesechos.fr
Crédits photo :
leparisien.fr
europe1.fr
Capture d’écran du site en ligne «jesuischarlie.net», finalement supprimé le 8 janvier 2015
Capture d’écran d’une vente aux enchères du dernier exemplaire de Charlie Hebdo sur eBay
lilavert.com
leblogducommunicant2-0.com
leplus.nouvelobs.com
les-perles-du-net.fr
ladepeche.fr

VietJetAir
Publicité et marketing

Comment ruiner une image de marque avec un bikini

 
Une fois n’est pas coutume. Après avoir été condamnée à 800 euros d’amende en 2012 pour avoir utilisé la femme comme objet de marketing, VietJet Air a récidivé le mois dernier. La compagnie aérienne Vietnamienne, qui avait organisé un spectacle de danse tendancieux avec des jeunes femmes en bikini, s’était pourtant offusquée de cette peine, tout en jurant de ne plus jamais le refaire.
Or VietJet Air a remis le couvert dernièrement aux besoins d’une séance photo censée rester confidentielle. Le transporteur aérien a effectivement engagé une dizaine de jeunes femmes de l‘agence de mannequinat Vénus, et les a fait poser en bikini, talons aiguille et bas résilles devant et à l’intérieur d’un avion. Bien évidemment, certains clichés se sont retrouvés sur les réseaux sociaux peu de temps après le shooting. Attachez bien vos ceintures.

Une communication de crise qui bat de l’aile
La compagnie vietnamienne a donc dû faire marche arrière et s’est défendue tant bien que mal face au bad buzz qu’elle a déclenché, expliquant que c’était une séance photo d’essai et qu’en aucun cas ces photos n’étaient supposées fuiter. « Nous sommes désolés pour cet incident et faisons le nécessaire pour que ces photos inappropriées et en aucun cas officielles arrêtent de circuler », a commenté la compagnie dans un communiqué officiel.
Se posent alors plusieurs questions. Si les photos publiées sur les réseaux sociaux n’avaient jamais du être connues du grand public, à quoi donc servaient-elles ? Et si il s’agissait réellement d’une séance d’essai, pourquoi avoir fait poser ces filles dans cette tenue ? Se seraient-elles alors rhabillées pour la séance photo officielle ?
Deux hypothèses : soit les mannequins vietnamiennes se sont concertées le matin du shooting pour mettre les mêmes sous-vêtements et ont eu des bouffées de chaleur une fois à proximité des réacteurs, ce qui les a contraintes à se dénuder. Soit VietJet Air nous prend pour des jambons et comptait bel et bien utiliser ces photos pour sa prochaine campagne, mais ne l’assumait pas du tout – contrairement à son homologue irlandais Ryanair, qui admet clairement l’utilisation de femmes-objets dans ses calendriers.

On se demande alors si la marque n’a pas surfé sur la vague du bad buzz volontaire, également qualifié de « marketing de la honte », récemment alimentée par Zara et Urban Outfitters qui ont commercialisé des vêtements faisant référence à de tragiques épisodes historiques. Dans tous les cas, la compagnie aérienne est coupable et s’est d’autant plus embourbée dans le pétrin avec une communication de crise inefficace et un mensonge aussi crédible que celui de l’ancien ministre du budget Jérôme Cahuzac l’année dernière.
Quoi qu’il en soit, ce scandale a suscité de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux, particulièrement Twitter, réinterrogeant notamment la question de la femme-objet, débat intrinsèque à la publicité depuis ses prémisses.
La femme au service du marketing
Au XXème siècle déjà, l’évolution de l’électroménager profitait du statut de femme au foyer pour jouer sur la notion de délivrance de la femme, notamment la marque Moulinex avec sa signature « Moulinex libère la femme ». La mère de famille pouvait enfin jeter l’éponge et regarder du soap opera avec pour fond sonore le ronronnement de son lave-vaisselle. Que demander de plus ? Le mari quant à lui, en offrant ce petit électroménager à sa parfaite ménagère, la comblait et s’assurait de n’avoir plus qu’à mettre les pieds sous la table en rentrant du travail, s’accordant parfaitement à l’accroche « Pour elle, un Moulinex, pour lui, de bons petits plats ».

Au fil des années, la femme est devenue de plus en plus fantasmée, et la publicité s’en est emparée comme d’un réel argument de vente. La gente féminine, totalement déshumanisée, est alors devenue aussi désirable que le produit qu’elle mettait en valeur, de la voiture de luxe à la mousse à raser, en passant par le simple déodorant masculin – pour ne pas citer la célèbre marque dont les effluves, aussi nauséabondes qu’un mélange de Shalimar et d’alcool à brûler, sont censées faire accourir des milliers de femmes à la plastique de rêve. C’est ici le cas de VietJet Air, qui joue sur le physique stéréotypé de ses mannequins, pour promouvoir ses vols low cost.
On finit par toucher le summum de la dématérialisation de la femme dans des publicités où elle n’existe pratiquement plus. On n’y aperçoit plus que de petites parties des corps, comme sa bouche bien évidemment pulpeuse, ou ses jambes de gazelle – parfois même dans des postures assez érotiques, comme dans les publicités fréquemment controversées de la marque provocatrice American Apparel.

On assiste tout de même à une revendication féministe qui hausse la voix depuis quelques années, notamment via les réseaux sociaux comme nous avons pu le constater avec le scandale VietJet Air. Les publicités en jouent d’ailleurs de plus en plus, comme la marque de chaussures Eram avec sa campagne « Aucun corps de femme n’a été exploité dans cette publicité ». D’autre part, la beauté naturelle des femmes s’impose de plus en plus face au culte du physique parfait, renforcé par le géant Photoshop. Tandis que certains artistes dénoncent ces pratiques en détournant des campagnes d’affichages, des marques comme Dove crient haut et fort la beauté naturelle des femmes, qu’elles mettent au cœur de leurs publicités.
Et pourtant, le combat des féministes contre l’utilisation de la femme-objet dans le marketing n’est pas gagné d’avance. En effet, les compagnies aériennes – surtout low cost – sont de plus en plus nombreuses à jouer sur le cliché ancestral de l’hôtesse de l’air sexy, que ce soit en Thaïlande (NokAir), en Russie (Avianova) ou en Grande-Bretagne (Virgin Atlantic).

 
Louise Bédouet
https://www.linkedin.com/pub/louise-bédouet/5a/665/761
Sources :
influencia.net
rue89.nouvelobs.com
huffingtonpost.fr
Crédits photos :
influencia.net
i2.irishmirror.ie
lesbonsprofs.com
webgirl.fr
vivelapub.fr
air-journal.fr

Société

Flop informationnel : l’annonce erronée d’un crash d’avion sur Twitter

 
La Toile s’est enflammée ce jeudi 27 mars suite à la publication d’un tweet par le 112, le service d’urgence des Canaries, qui a annoncé la « chute d’un avion en mer ». Or celle-ci s’est avérée être une erreur… n’empêchant cependant pas une reprise massive de cette information erronée par la presse locale, les réseaux sociaux, puis les médias internationaux.
Ce déluge informationnel peut, certes, trouver son explication dans le mystère du vol MH370, fraîchement sur-commenté par les médias nationaux et internationaux. Mais il souligne surtout une question intrinsèque à nos circuits d’information actuels : dans quelle mesure les journalistes peuvent-ils relayer les informations diffusées sur les réseaux sociaux et sur le Net en général ?
Sur le site de France Info, un internaute s’indigne à propos de la précipitation des journalistes qui ont réagi à chaud à l’annonce publiée sur Twitter :

Ce point d’actualité soulève effectivement un paradoxe inhérent au métier de journaliste. Celui-ci se trouve aujourd’hui recomposé avec la montée en puissance des réseaux sociaux qui ont fortement accéléré la vitesse de circulation de l’information. Nos circuits d’information contemporains semblent se caractériser par le paradoxe suivant : visant une information immédiate, les acteurs du monde de l’information s’engouffrent dans une course à l’information et au sensationnalisme, et tendent à négliger la qualité de l’information qu’ils fournissent.
Aujourd’hui, entre immédiateté et fiabilité, entre précipitation et vérification, le défi de nos circuits d’information réside ainsi dans cette double exigence d’une information à la fois réactive et fiable.
 La reprise massive de l’information erronée du crash d’avion en Espagne met en lumière un constat : l’abondance de l’information qui nous entoure se fait souvent au détriment d’une qualité de son contenu.
Ainsi peut-on voir l’émergence de nouvelles pratiques de la part des producteurs d’information, qui s’attachent à suivre une méthodologie précise qui respecte l’exigence d’une information hautement fiable et vérifiée. A ce titre, la méthode du « fact-checking », après avoir été massivement promue comme principe de vérification de la parole publique sur Twitter, commence à être utilisée comme méthodologie journalistique dans certaines rédactions.
Les Décodeurs du Monde sont l’une de ces plateformes qui s’attachent à publier du contenu de qualité. Ses journalistes s’appuient sur une démarche d’investigation basée sur des analyses strictes des données données élaborée autour du concept même du « fact-checking ».
Après avoir été un blog dédié au « fact-checking », Les Décodeurs se sont institutionnalisés en une rubrique à part entière sur le site du Monde.fr : ici.
Les journalistes « Décodeurs » affirment vouloir « traiter des rumeurs et des intox qui circulent sur la Toile pour, là encore, distinguer le vrai du faux », tout en associant réactivité à une démarche de vérification factuelle :
 Les Décodeurs du Monde, ce sont des vérifications factuelles, des explications et du contexte autour de l’actualité du moment, au rythme des réseaux.
 Une telle démarche de décryptage mérite-t-elle pour autant d’être étendue à tout média souhaitant interpréter les informations qui circulent sur la Toile ?
Quoiqu’il en soit, en cette ère de déluge informationnel, la clef pour délivrer une information fiable et de qualité réside peut-être après tout dans l’application du précepte : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point ».
A bon entendeur.
Alexandra Ducrot
Sources :
La Tribune : « Un crash d’avion annoncé par erreur enflamme la toile »
Latribune.fr
Franceinfo.fr
Crédits photos :
TwitteRadar.com 
 

Samsung
Publicité et marketing

Flop 2.0

 
Depuis quelques jours, le Net s’emballe pour commenter la nouvelle pub dénommée « Are You Geared Up » que Samsung a publiée ce week-end afin de promouvoir sa montre Galaxy Gear.
A l’heure des fêtes de Noël où chacun attend patiemment les premières chutes de neige, le géant coréen décide de mettre à l’honneur les vacances aux sports d’hiver. Dans ces deux minutes trente de publicité, deux jeunes hommes sont mis en concurrence pour séduire une ravissante blonde. Bien entendu, c’est à l’aide de sa montre Galaxy Gear que l’un d’eux va faire la différence et arriver à ses fins.

Bien que l’idée ne soit pas mauvaise pour mettre en valeur les différentes fonctions de la montre, malheureusement la somme de situations rocambolesques qui s’enchainent au cours du film publicitaire laisse apparaître le produit phare de Samsung comme un gadget et ruine les efforts marketing de la marque.
Néanmoins, malgré la flopée de commentaires négatifs qui a surgi sur la toile, la publicité a été visionnée à ce jour par plus de deux millions de fois sur YouTube et a créé un buzz.
Mais ce qui est avant tout inquiétant et nouveau, c’est le phénomène viral dont est capable Internet qui met les marques en danger, les obligeant à faire face à des situations de crise de plus en plus nombreuses et délicates.
Alors, « Are You GEARed Up ? »
 
Filipine Guyonnaud

Société

Le bad buzz médiatique des « 343 salauds »

 
Quelques semaines avant qu’une proposition de loi sur la prostitution ne soit examinée à l’Assemblée Nationale, deux bad buzz médiatiques sont venus secouer la Toile.
Tout d’abord, c’est le magazine pourtant autoproclamé féministe Causette qui a provoqué un tollé notamment sur Twitter, avec son dossier de novembre qui propose « 55 raisons de résister à la tentation » du genre : « Parce que quitte à se taper une fille qui n’a pas envie, autant la violer, c’est moins cher (mollo, on déconne). »
C’est ensuite, et en adoptant la posture inverse, le magazine Causeur qui a provoqué les ires des féministes (et des autres). Les signataires pensaient sans doute connaître la recette d’une bonne campagne de pub en réutilisant des expressions historiques connues. Or ils se sont attaqués à deux symboles forts : le « Manifeste des 343 salopes » initié par Simone de Beauvoir en 1971 et le slogan de SOS Racisme « Touche pas à mon pote ».
Tandis que le syndicat des travailleurs sexuels (STRASS) et la sociologue Françoise Picq déclarent leur écœurement, le site propose aux simples internautes un droit de réponse avec l’injonction suivante : « Réponds à ton connard ! », il suffit pour cela de cliquer sur la photo dudit personnage pour lui « tweeter un mot doux ».
A la suite de ce malaise, certains de ces « salauds » sont déjà revenus sur leurs déclarations, comme Nicolas Bedos sur Twitter. Ces deux échecs de communication sont certes le signe qu’il y a un débat de fond à avoir sur la prostitution, mais aussi et surtout la preuve – s’il le fallait – qu’en matière de communication, il vaut mieux bien méditer à ce qu’on publie, que ce soit dans la presse ou sur Internet.
 
Lucie Detrain
Sources:
Le manifeste
Les tweets malheureux de Nicolas Bedos

Publicité et marketing

C is for Cheeky

 
Il y a une petite semaine, Microsoft uploadait sur Youtube une énième vidéo parodique envers Apple et ses Smartphones : deux minutes de montage frénétique, faisant se succéder des réunions fictives où Tim Cooks et Jony Ive [1] recevaient les explications ridicules et humoristiques de deux designers sur les fonctionnalités controversées des nouveaux Iphones.
Car comme pour toutes les sorties attendues, la mise en vente des Iphones 5s et 5c était une occasion trop belle pour ne pas se fendre d’une pique, et certainement attirer l’attention sur un Windows Phone qui ne dépasse pas les 4% du marché. Après tout, la dernière image de la vidéo affiche un fringant « #timetoswitch ».
Qu’il ait été stratégique ou machinal, l’humour lesté de la vidéo n’aurait pas pu causer grand mal, si l’acteur choisi pour représenter Cooks de dos n’avait pas furieusement évoqué Steve Jobs. Or, il n’y a rien de plus vulgaire que d’entacher l’aura christique du regretté fondateur de la marque à la pomme.
Un enragement de la twittosphère et quelques émois journalistiques plus tard, Microsoft en était réduit à s’excuser et à retirer le clip de la chaîne Youtube du Windows Phone.
(Nulle crainte cependant, car de grandes âmes sont parvenues à la sauver et la garder en ligne) :

Il n’y a rien de surprenant à ce que le manque de tact de la référence ait causé une si vive réaction. Mais que dire de l’aveuglement de Microsoft ? Le support tenait certes plus du Community Management que de la publicité à proprement parler, mais il était légèrement naïf de penser que la réaction des fans de la marque éclipserait celle des internautes choqués.
Moralité : la diffusion sur Internet ne touche pas que les fanboys. Cette bête vérité semble pouvoir échapper même à des structures aussi rompues aux stratégies digitales que Microsoft, mais trahit une nouvelle fois un essoufflement intéressant dans la bataille infinie entre les deux géants. Outre une relative fébrilité de la part d’Apple dans ses choix de positionnement (les moqueries sur l’orientation résolument cheap – voire hypocrite – du Iphone 5c ne manquent pas), ce fail laisse à penser que Microsoft est lui aussi à court d’idées lorsqu’il s’agit de relancer l’intérêt autour de produits qui sont continuellement repoussés par Android.
Les imaginaires geeks, toujours friands d’anecdotes cocasses sur la rivalité médiatique entre constructeurs de Smartphones, en sont devenus suffisamment prometteurs pour que Microsoft risque l’hallali sur du simple contenu Youtube ; et ce dérèglement finit par créer une collision improbable entre communication digitale et marketing. Il y a toujours des leçons à tirer des plus grands.
 
Léo Fauvel
Sources :
Mashable
The Verge
Computer World.com
Comscore.com
 
[1] respectivement PDG et Vice-président du design de la compagnie

Société

Ils auraient mieux fait de tourner 7 fois leur pouce avant de tweeter !

 
Vieil adage inscrit dans la Bible, il est dit à propos de Salomon que “le sage tourne sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler”. A l’heure où la communication des entreprises, des politiques et des individus se fait instantanée et passe par les réseaux sociaux, l’idée reste la même mais version 2.0. Lorsque l’on est une personnalité publique, on ne peut s’exprimer impunément. Petit florilège d’exemples de ceux qui auraient mieux fait de tourner 7 fois leur pouce avant de tweeter.
Christine Boutin
En matière de buzz sur Twitter, cette dernière gagne peut-être haut la main. Dernier dérapage en date, sa “blague” à l’encontre d’Angélina Jolie, qui a décidé de médiatiser la mastectomie qu’elle a récemment subie.

Après que des utilisateurs s’en soient pris à sa page Facebook, la présidente du Parti Chrétien-Démocrate s’est justifiée dans un communiqué.
Si le tweet était maladroit, la justification l’est d’autant plus. Se permettre de critiquer une opération chirurgicale pratiquée sans que la personne soit malade, c’est limite, mais soit. Mais venant de quelqu’un qui défend la vie contre vents et marées, critiquer une personne qui a voulu préserver sa santé et la cohésion de sa famille ; balayer d’une phrase toute la souffrance physique et – surtout – psychologique de subir une ablation de la poitrine, cet attribut si profondément lié à la construction de notre identité féminine, tout ça pour habilement basculer vers le pseudo-débat d’une médecine à deux vitesses, belle prouesse, vraiment !
Le tweet, prétexte à une critique de la mondialisation
En juillet 2012, le Community Manager de Starbucks tweet ses excuses aux consommateurs argentins : les mugs et tasses classiques “Starbucks” sont temporairement indisponibles, “certains magasins utilisent des tasses et des manchons nationaux”.

Le Community Manager voulait simplement informer les clients de la situation. Rien de choquant jusque-là. Au contraire, Starbucks semble faire ainsi preuve de prévenance et de respect envers ses consommateurs. Pourtant, les réactions sur Twitter fusent via le hashtag #pedimosdisculpas (#nousdemandonspardon). Entre second degré et véritables rancœurs contre la marque qui semble dire selon certains : “A défaut de vous donner le meilleur, nous mettrons à votre disposition des produits argentins”. L’un de ses tweets est particulièrement évocateur des tensions nationales vis-à-vis des entreprises étrangères : « #nousdemandonspardon aux enfants qui consomment Starbucks parce qu’ils ne peuvent pas prendre leur café dans une tasse faite par un esclave chinois de 12 ans”.
Il est difficile de soutenir un parti plus que l’autre. Nous serions tentés de reprocher aux twittos argentins une certaine mauvaise foi, car le geste du CM relevait de l’information plus que de la critique sous-jacente des produits nationaux. Pourtant, il est clair que les chargés de communication d’une entreprise étrangère doivent porter une attention particulière à ne pas froisser la fierté nationale, et ceci doit passer par une adaptation permanente des messages au lieu d’implantation de l’entreprise.
Quand Pedobear a pris le contrôle du site La Redoute
Souvenez-vous, début 2012, tout le web avait ri de l’homme nu en arrière-plan d’une photo mode enfant sur le site de La Redoute. Erreur malencontreuse, “l’homme nu” est devenu un “même” repris à toute les sauces. Le concurrent Les 3 Suisses avait également récupéré l’évènement à son avantage.

Une fois le gros du buzz passé, La Redoute était retombé sur ses pattes en organisant un jeu-concours qui enjoignait les utilisateurs à retrouver 14 images volontairement trafiquées. A la clef : la promesse de se faire rhabiller gratuitement des pieds à la tête.
Viens sur mon compte public, je tweet à une copine
Il nous est arrivé, à tous, de se tromper de destinataire pour un message. Imaginez alors que cela concerne un homme politique et que le message soit TRÈS privé.
Le résultat:

Anthony Weiner, démocrate américain aurait dû mieux vérifier son tweet avant de montrer les contours de son sexe au monde entier.
Les conséquences : une carrière politique gâchée, un mariage en danger mais un avenir prometteur dans l’industrie du porno, puisque Larry Flint, maître du genre, lui promet un beau salaire de compensation et affirme la sincérité de son offre.
Dominée par la satisfaction client et les ambassadeurs de marque, la stratégie des entreprises répond au désir d’une relation BtoC exclusive. Sur un web où chacun a la possibilité de s’exprimer, les réseaux sociaux sont la nouvelle ligne directe du service consommateur.
Pourquoi ces affaires prennent-elles des dimensions si disproportionnées quand on sait bien que la plupart sont sans importance ? Comment un tweet de Valérie Trierweiler peut-il alimenter la chronique pendant deux mois et faire trembler la République ? A l’inverse, comment des tweets diffamants et insultants, comme ceux du footballeur anglais Joey Barton traitant Thiago Da Silva de « transsexuel en surpoids », peuvent-ils rester impunis, dans cette toile dont les contours juridiques sont parfois très difficiles à déterminer ?
Entre messages provocateurs, dérapages, malentendus volontaires pour mieux envenimer la situation, le web 2.0 est bien à l’image d’une agora contemporaine, pleine de débats plus ou moins futiles où chacun veut et peut faire entendre sa voix. Mais pas plus haut que celle de son voisin.
 
Pauline St Macary et Sophie Pottier
Sources :
http://news.fr.msn.com/hightech/petits-tweets-grosses-cons%C3%A9quences#image=3
Les dérapages de Christine Boutin : http://www.francetvinfo.fr/christine-boutin-derape-sur-twitter-au-sujet-de-la-mastectomie-d-angelina-jolie_324156.html
Anthony Weiner et sa photo compromettante : http://en.wikipedia.org/wiki/Anthony_Weiner_sexting_scandal
La Redoute : http://www.lefigaro.fr/societes/2012/01/04/04015-20120104ARTFIG00484-la-redoute-fait-le-buzz-avec-un-homme-nu-sur-une-photo.php?cmtpage=0
Le cas du Starbucks argentin :

Bad buzz : Starbucks boit la tasse sur Twitter


Pour aller plus loin sur le cas Barton :
http://www.leparisien.fr/sports/football/foot-twitter-barton-s-excuse-avant-d-en-rajouter-sur-thiago-silva-03-04-2013-2693565.php

Joey Barton sur Twitter : quelles responsabilités, quelles conséquences ?

Publicité et marketing

Abercrombie : bad buzz ou technique de com’ ?

 
En excluant certaines catégories de personnes on reconnaît à d’autres catégories la chance, et la légitimité d’entrer dans la caste des « beaux », d’appartenir à la secte des mensurations Abercrombistement parfaites. Le CEO aux idéaux physiques tordus, Mike Jeffries, descendant direct de Biff Tannen (Retour vers le Futur), nous fait avaler de force sa conception de la beauté. Il revendique ses idées et les clame de bon cœur, sans gêne aucune. Avec une bonne dose de fierté et un soupçon d’arrogance, il se permet d’exclure de ses magasins et de ses T-shirts toutes les grosses du monde. Qu’à cela ne tienne, Greg Karber à choisit de lui répondre d’une manière hautement symbolique. Non pas en l’insultant ou en le fustigeant, la lapidation de critiques ne feraient qu’alimenter la croissante notoriété de la marque en formant un nuage de bruit autour du bad buzz. Alors il a choisi de s’attaquer directement à l’image d’A&F. Une image contestable et contestée, il a donc choisi de renverser la tendance.
Le but est de mettre à mal l’image d’une marque destinée aux beaux, riches et populaires en distribuant des vêtements d’A&F aux sans-abris. Ainsi ils deviennent gratuitement les ambassadeurs indésirables de la marque. Voir la vidéo ci-dessous.
#FitchTheHomeless

Si la réponse à la polémique est aussi cinglante c’est aussi parce que la mode est rarement irréprochable en matière d’éthique et de considération morale. La marque Abercrombie avait déjà fait preuve de pratiques sociales douteuses en 2011 et 2010 en détruisant directement les produits retournés par les clients, en dépit des demandes des associations pour les récupérer. La marque ne conçoit pas que ses vêtements soient accessibles aux plus démunis, les pauvres seraient donc trop moches… Mais le groupe du petit fils du vieux Biff avait également défrayé la chronique en Avril dernier avec sa marque Hollister et de sombres, mais non moins classiques, histoires de discrimination. Les « beaux gosses » paradent à moitié nus dans le magasin pour attirer les jeunes donzelles fraiches et pimpantes, pendant que les gros et moches sont relégués à l’arrière-boutique pour « gérer le stock » (comprenez plier les Tshirts).
Alors oui il s’agit d’un positionnement marketing et de stratégie de communication. Mais depuis quand une stratégie de communication peut se faire excluante et exclusive ? Peut-on vraiment choisir de sélectionner des cibles en intégrant dans cette sélection l’exclusion de tous les autres consommateurs ?
Stratégie à part entière, bien que le personnage de Mike Jeffries semble complètement naturel, ce choix d’exclusion des personnes « imparfaites » ne dessert pourtant pas directement la marque. En réalité on pourrait comparer cette stratégie avec celle mise en place par le site de rencontre Attractive World. Sur les sites de rencontres en ligne comme dans la vraie vie non virtuelle, il existe des exclus : les gros, les moches, les analphabètes etc. Ceux qu’on ne veut pas forcément voir dans sa boutique. Alors on instaure des filtres pour ne garder que les « célibataires exigeants ». Attractive World exclut donc les moches pour contenter sa cible haut de gamme. Si vous cherchez du prêt à porter et de la rencontre en ligne passez votre chemin, ici on parle haute couture. Exclure pour mieux cibler. Revendiquer pour mieux être contesté. Et en même temps c’est en se positionnant comme une marque sélective, réservée à une sorte d’élite de la beauté que l’on suscite l’envie d’appartenir à cette élite chez le consommateur. Les personnes correspondant aux mensurations de A&F se sentiraient donc comme faisant partie d’une classe supérieure, plus belle, plus musclée. Et tant pis pour les autres.
 « Dans chaque école, il y a les enfants cools et populaires et il y a les autres. Nous, on va chercher les enfants cools. Seules certaines catégories de personnes peuvent acheter et porter nos vêtements. Excluons-nous des gens ? Absolument »
La position de Mike Jeffries est entièrement décomplexée. Et si en tant que stratégie marketing elle peut fonctionner un certain temps, le bad buzz fini par nuire à la marque. L’initiative de Greg Karber en est la preuve, et si le mouvement continue à grossir via les réseaux sociaux (déjà 5 500 000 vue sur Youtube en 5 jours), le préjudice causé ne sera pas que symbolique. #FitchTheHomeless
 
Margot Franquet
Sources :
Le Vif
Le Point
Business Insider
La Voix du Nord
Le Nouvel Obs
Le Plus – Nouvel obs
Rue89
Métro