Publicité et marketing

La prévention routière : une communication qui tient la route

Depuis sa création en 1982, la Délégation à la Sécurité Routière (DSR) n’a cessé de faire évoluer ses campagnes de communication afin de sensibiliser les citoyens à ce sujet qui nous touche tous, les accidents de la route. En tant que structures interministérielles, les campagnes émanant de la Sécurité Routière doivent faire face à un enjeu immense pour le bien commun, afin de faire prendre conscience aux personnes qui les visionnent des risques encourus quand on déroge aux règles de la circulation routière. Un vrai problème de société sachant que plus de 1000 personnes sont tuées chaque année dans des accidents de la route liés à l’alcool.

Société

Le règne du « partage » : analyse d’une tendance communicationnelle

La notion de « partage » est partout, elle semble être devenue l’une des valeurs cardinales de la génération des digital natives : elle est omniprésente dans la publicité, sur les réseaux sociaux, dans la communication institutionnelle… Alors que les inégalités économiques et sociales, ainsi que l’esprit de concurrence n’ont jamais été aussi exacerbés qu’aujourd’hui, cet appel au partage interpelle. Il est pour le moins paradoxal.
Le partage, une ouverture sur le monde ?

Est-ce un simple et curieux hasard si le terme partage vient étymologiquement du même mot que « partir » (du latin partire) ? Le désormais slogan officiel des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, « Venez partager », laisse presque entendre « Partez à Paris ».
« Depuis le lancement de la candidature, nous sommes particulièrement attachés à porter des valeurs d’ouverture sur le monde et de partage », a déclaré Etienne Thobois, le directeur général de Paris 2024. Cette volonté affichée de véhiculer ces deux notions étroitement liées, se concrétise encore davantage par le slogan écrit en anglais, dévoilé avant sa traduction française : « Made for sharing ». Ce slogan a fait couler beaucoup d’encre, mais il permettrait, selon les organisateurs, de diffuser plus largement un appel à venir à Paris lors des Jeux. Une traduction en espagnol est même envisagée, afin d’attirer le maximum de visiteurs possible. Dans cette campagne de communication, l’idée de partage est donc combinée à celle d’ouverture, jusqu’à rendre insécable les deux notions, autant sur le fond (valeurs portées par le slogan) que sur la forme (traduction en langues étrangères).
Mais ce rapprochement — voire cette association — entre partage et ouverture sur le monde est loin d’être une nouveauté en communication. Pour preuve, les réseaux sociaux ont d’une manière générale, adoptés la logique du share. Ici encore, par l’action de partager un contenu sur Internet donc d’en démultiplier l’audience potentielle, on l’ouvre sur le monde. A fortiori, et à l’ère des réseaux sociaux, il semblerait que le mécanisme de partage (sharing, retweet, etc.) ait définitivement supplanté l’URL comme constitutive principale du Web. Toutefois, si le partage n’est pas univoque et qu’il existerait, selon une étude, jusqu’à six profils de « partageurs » différents (des plus intimistes aux influenceurs), force est de constater que la tendance au partage semble aller de pair avec le processus de mondialisation. Comme l’exprimait le président de l’entreprise de services mobiles Cellfish à propos du Brexit : « Cela ne rime à rien de remettre des frontières dans un monde dominé par Facebook ».
Quand le partage devient un argument de vente

Plus qu’être synonyme d’ouverture sur le monde, la valeur partage peut s’avérer être un véritable recours commercial pour les marques. Le célèbre slogan publicitaire « On partage ? » de Kinder Bueno en est l’une des plus emblématiques illustrations. À travers cette invitation à déguster ses produits, l’entreprise du groupe Ferrero véhicule l’idée implicite qu’un biscuit Kinder se partage avant de s’acheter. On cherche, par là même, à rassurer le client : acheter un Kinder Bueno est un geste altruiste, ce qui expliquerait d’ailleurs pourquoi ces biscuits sont vendus par deux (ils ne demanderaient qu’à être partagés).
Autre usage de la valeur partage, celui de Coca-Cola. En 2014, la marque a lancé une gamme de sodas, où l’injonction au partage est non seulement inscrite sur la canette, mais se personnalise : « Partage un Coca-Cola avec Pierre, Paul, Anne ou Marie » nous intime la marque. Poussant encore plus loin l’étrange équivalence entre consommation et partage, déjà bien amorcée par Kinder, la marque Coca-Cola se positionne, avec cette gamme, en tant que créatrice de lien social : elle se donne pour mission de réinsérer de la convivialité dans l’individualisme de nos sociétés. Acheter, c’est partager, voilà l’homologie que ces deux campagnes publicitaires ont réussi à établir dans l’inconscient de millions de consommateurs.
La valeur du partage propre à la culture des millenials ?
Au vu des récentes campagnes de communication précédemment évoquées, le « partage » apparaît comme l’une des notions particulièrement mobilisées par les organisations (entreprises comme institutions), pour attirer l’attention des consommateurs, et en particulier des jeunes. Toutefois, et contrairement à ce que l’on pourrait croire, le partage n’est pas une caractéristique intrinsèque à la culture numérique et digitale. Selon une étude du New York Times Customer Insight Group, elle ne serait qu’une transposition du plurimillénaire art de la conversation, dont les enjeux sont en revanche bien plus grands, au regard des près de quatre milliards d’internautes, et tous potentiels partie prenante de cette discussion.
En tant que créateur de contenu, le partage n’est pas nécessairement plus altruiste ou bienveillant, car le partage sert parfois de faire-valoir. Autrement dit, intégrer un bouton « partager » ou « retweeter » sur l’article d’un site est plutôt une vitrine permettant de mettre en scène une popularité immédiatement visible, car chiffrable, d’un influenceur sur les réseaux sociaux, qu’une incitation au partage de contenu.
Qu’il se décline sous la forme d’ouverture sur le monde, d’altruisme ou d’acte de conversation comme un autre, le partage semble être devenu un mot passe-partout, sans cesse renouvelé par les différentes campagnes de communication l’ayant employé. Il s’est ainsi quelque peu vidé de son sens premier.
Sara Lachiheb
Linked In : Sara Lachiheb
Sources :

Nicolas Richer. « La vérité sur les boutons de partage (et la meilleure extension) », wpmarmite.com, mis en ligne le 15 mars 2016. Consulté le 29/10/2017.

Ricardo Da Silva. « 6 types de partageurs sur les réseaux sociaux. #infographie », ricardodasilva.fr, mis en ligne le 4 mai 2014. Consulté le 29/10/2017.

Elsa Bembaron. Marie-Cécile Renault. « Cela ne rime à rien de remettre des frontières dans un monde dominé par Facebook », Le Figaro, mis en ligne le 24 juin 2016. Consulté le 29/10/2017.

 
Sources images :
http://www.strategies.fr/sites/default/files/assets/images/strats-image-1064438.jpeg
https://essentiel-autonomie.humanis.com/sites/all/themes/custom/humanis_assets/images/partager-facebook.png
http://www.coca-cola.pf/wp-content/uploads/2015/04/actu_partagez.jpg
 

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Politique

Suppression de l'ISF: Petite ôde à l'impôt

La suppression de l’Impôt sur la Fortune (ISF) a été annoncée par Emmanuel Macron alors candidat pour l’élection présidentielle en février 2017. Cet impôt, auparavant nommé Impôt sur les Grandes Fortunes était apparu sous la présidence de François Mitterrand avant d’être abrogé puis réintroduit en 1988. Il est aujourd’hui question de l’instauration d’un Impôt sur les Fortunes Immobilières (IFI) prévue dans le projet de budget de 2018. L’instauration de ce nouvel impôt fait suite au constat de l’inefficacité de l’ISF : en 2016, il avait provoqué l’exil de deux familles par jour. Même si la rationalité économique souligne que cette taxe coûte plus à la collectivité qu’elle ne rapporte, la froideur de cet argument ne semble pas suffire à justifier sa suppression.

L’impôt a ses raisons que la raison ignore     
En effet, s’il existe une raison économique qui justifie le retrait de cet impôt, la façon de le suggérer n’a pas été des plus pertinentes. On peut identifier deux raisons expliquant l’échec de la communication autour de la suppression de l’ISF.

D’une part, la fiscalité tient d’une matière extrêmement technique. Elle est sujette à l’instrumentalisation par l’ensemble du personnel politique, c’est ce que l’on a pu constater durant la campagne présidentielle de 2017.
Ici, le problème est pris à l’envers. Au lieu de faire revenir les riches, il s’agit de ne pas les faire partir : cela serait possible en mettant l’accent sur la dimension contributive de l’impôt pour l’ensemble de la société. Or, Emmanuel Macron s’adresse plus aux individualités qu’à la collectivité. En opposant ceux qui réussissent et « ceux qui ne sont rien » (29 juin 2017, Discours d’inauguration d’un incubateur de start-up) le président valorise l’individu dans son aboutissement personnel en le distinguant clairement du reste de la société.
D’autre part, la mauvaise perception de l’ISF est la conséquence directe d’une défaillance de l’Etat. L’appareil public ne parvient pas à présenter comme nécessaire la participation de l’ensemble des individus dans le financement de l’activité publique.
Il est avéré que de faire comprendre aux citoyens que leur participation à l’impôt sert la collectivité et permet un plus grand assentiment à ce dernier. L’impôt permet de financer par exemple un système éducatif de qualité, et une population plus qualifiée -et de la même façon plus productive- est plus à même à participer à la vie démocratique, ce qui constitue une externalité positive pour la société.
On retrouve ici une des contradictions fondamentales de la communication macronienne. S’affrontent une volonté de satisfaire les classes moyennes et la suppression des contrats aidés ou la réduction des Aides Personnalisées au Logement (APL). La « pensée complexe » qu’avait faite valoir l’Elysée pour justifier l’absence du président dans les médias sert finalement des intérêts simples.

Marqué du sceau « Ami des nantis » 

Si la réforme de l’ISF pose problème, c’est également du fait de l’importante valeur symbolique de cet impôt. En plus du modèle « jupitérien » de la présidence Macron qui implique une grande prise de distance médiatique, le fait que cette réforme prenne tant de place dans l’espace médiatique conforte le président dans une déconnexion par rapport à la classe moyenne qui est loin des réalités que connaissent ceux qui sont assujettis à cet impôt.
Par conséquent, cette suppression contribue à créer un imaginaire de la technicité et de la distance d’un président croulant sous ses propres contradictions, tiraillé entre des interventions millimétrées dans les médias et un goût pour les phrases volées à l’occasion de ses différentes interventions.
Cette réforme renforce l’inquiétude que les richesses se concentrent à l’extrême, la répartition de celles-ci redevenant très inégalitaire. Effectivement, selon Thomas Piketty dans son livre Le Capital au XXIème siècle, depuis la fin du XIXème la part de la richesse accaparée par le 1% des plus riches a doublé pour atteindre aujourd’hui 20%. L’acrimonie sociale est aujourd’hui particulièrement vive contre des objets qui rentrent dans l’imaginaire collectif de la richesse : avec ce nouvel impôt, les yachts, voitures de luxe et lingots d’or seront épargnés de taxe.
Le « président des riches » sacrifie sur l’autel de la rationalité économique la paix sociale : la haine contre cette richesse ostentatoire devient palpable.
La présidence des riches, par les riches et pour les riches
     

 La défense de cette réforme revêt dans le discours présidentiel un aspect purement dogmatique. La parole du président devrait permettre que la surpression de l’ISF donne la possibilité aux français les plus fortunés d’investir dans les entreprises pour servir la croissance. Bien que sa posture donne de l’importance à son discours, être président ne semble plus suffire pour donner un effet concret à cette volonté. Il peut exister en plus de cela un effet d’aubaine qui détournerait la réforme de son essence : les plus riches ne sont en rien contraints d’investir leur argent dans les entreprises.

Il n’en demeure pas moins qu’Emmanuel Macron se pose dans une position autoritaire, comme si sa stature présidentielle à elle seule suffisait à donner du corps à son discours. Or, la position présidentielle n’est plus aujourd’hui un facteur de légitimation du discours, d’autant plus à l’heure de la démystification de la fonction politique. Ce sentiment est conforté par l’alimentation d’une « pensée complexe », l’intellectualité de la pensée du président serait un facteur de légitimation de son discours. La verticalité de sa parole contraste franchement avec les qualificatifs de « fouteurs de bordel » adressés aux salariés de GMS au début du mois d’octobre 2017.
Et pendant que la suppression de l’ISF nourrit cette passion bien française de dégout envers la richesse, l’extrême droite arrive en Autriche avec un président plus jeune qu’Emmanuel Macron, conséquence directe d’une distance grandissante entre ceux qui font les politiques et ceux que cela concerne. Juste sanction ou mauvaise colère?
Corentin Loubet
Profil LinkedIn

Sources: 

AFP.  La suppression de l’ISF, une réforme sans garantie de résultat, Le Dauphiné . Publié le 23/09/2017 . Consulté le 19/10/2017
« A peine présenté, le nouvel ISF de Macron menacé par le «syndrome des yachts» » ,  Le Parisien. Publié le 28/09/2017. Consulté le 19/10/2017.
Michel Ricard,  ISF : l’art délicat de la communication, Le Point. Publié le 04/10/2017. Consulté le 20/10/2017.

 Jérome Leroy; Macron : une pensée complexe au service d’intérêts simples,  Causeur. Publié le 16/10/2017 , Consulté le 19/10/2017.

Pierre Rosanvallon, Relégitimer l’impôt.  CAIRN . Publié en 2007 . Consulté le 20/10/2017.
Denis Jeambar;  Emmanuel Macron, ce président qui sait tout sur tout. Publié le 16/10/2017.  Consulté le 24/10/2017.
Ludovic Galtier.  Pourquoi la réforme de l’ISF pose problème.  RTL.  Publié le 19/10/2017 . Consulté le 23/10/2017 
Arnaud Benedetti, Emmanuel Macron s’adresse aux individus plutôt qu’à la nation . Le Figaro.  Publié le 16/10/2017. Consulté le 24/10/2017
Thomas Vampouille.  Nous pas comprendre le président Macron,  Marianne.  Publié le 29/06/2017.  Consulté le 28/10/2017 
Economie des Politiques Publiques, Antoine BOZIO et Julien GRENET, Collection Repères, Edition La Découverte, P. 71-71
Thomas PIKETTY, Le Capital au XXIème siècle, Stock, 2013
Crédit photo
Une : YVES VELTER / GAZ OF HESITATION / 2013
Photo 1 : GIANGIACOMO SPADARI / ELEMENTI MECCANICI / 1971
Photo 2 : FRANK FREED / HAVE AND HAVE NOT / 1970
Photo 3 : ANNE CHRISTINE POUJOLAT / AFP / 2017

Politique

Quand l’armée de terre recrute

Lancée en mars 2016, la campagne de l’armée de terre 2016-2018 est un véritable phénomène : trois spots télévisés, de nombreuses affiches, une nouvelle présence sur les réseaux sociaux, un meilleur suivi des candidats, rien n’est laissé au hasard pour atteindre les objectifs d’un recrutement en hausse constante (16 000 soldats recrutés en 2016 contre 10 000 en 2013), résultat immédiat des lourdes périodes que nous endurons depuis quelques années… Zoom sur cette sublime campagne signée Insign.
 
Les jeunes, cœur de cible de cette nouvelle campagne
L’objectif est clair : parler aux jeunes. Mais comment s’adresser à cette jeune génération aux noms si divers qu’on ne les comprend plus ? Millenials, génération Y, web natives, les jeunes Français sont de véritables adeptes du zapping et se lassent très vite, ce que l’on peut aisément constater au vu de la vitesse à laquelle les buzz se créent puis disparaissent. Cette campagne multicanaux et multi-supports détourne ce problème issu de l’entrée dans un nouveau paradigme. Certes, les jeunes sont de moins en moins sensibles à la publicité mais une campagne 360° semble avoir été une solution efficace. Pour se placer comme employeur de référence, l’armée de terre a compris qu’il fallait savoir entrer dans les codes de la nouvelle génération, et ce en terme de présence, de contenu et de forme.
Revenons ainsi sur le traitement de ces trois points dans cette campagne 2016-2018.
Avant tout, il faut saluer l’omniprésence de l’armée de terre sur cette campagne. Ils ont su s’adapter aux contraintes imposées par leur cible : Twitter, Facebook, Instagram, Snapchat mais aussi s’appuyer sur une refonte du site, la création d’une application mobile et une simplification de la démarche administrative… Tant d’éléments neufs qui forment les prémisses d’un processus de communication réussi. Simplifier la procédure et suivre de plus près les potentiels candidats sont des innovations primordiales que l’armée de terre a su s’approprier.
Pour sensibiliser un jeune public, il faut savoir comprendre ses attentes. L’un des trois spots TV nommé « Fraternité » est ainsi un exemple parfait de cette exigence :

On peut ainsi y entendre : « Je porte l’uniforme d’une vie » ou encore « On cherche tous l’aventure et on y trouve des frères ». Le rêve d’aventure, le besoin de se sentir utile, de trouver sa place en société ainsi que celui de vivre entouré d’amis sont des réalités dont ils ont su tirer les mots justes. En effet, en 2016, l’organisation Générations Cobayes lançait une étude sur le bonheur des jeunes français. On découvrait alors que 73 % des sondés jugeaient indispensable d’exercer une activité professionnelle dans laquelle ils se sentent utiles aux autres et à la société. Ce sont donc des valeurs engageantes et simples qui parlent immédiatement à des jeunes en quête d’identité qui pourront trouver une deuxième famille dans l’armée. Et c’est justement ce travail sur l’identité que l’on retrouve de manière récurrente dans la communication de l’armée de terre qui avait nommé sa campagne précédente « Devenez vous-mêmes ». Jouer sur la carte de l’émotion et de la fraternité est ainsi un très bon premier levier.
Mais l’acte de communication ne peut se réduire au message transmis. On ne s’intéresse pas seulement au « quoi » mais aussi au « comment ». Les visages filmés ainsi que les voix enregistrées sont ceux et celles de jeunes soldats ce qui permet l’identification directe du spectateur à la recrue. Pour un public qui s’est lassé des publicités et qui est devenu hostile aux communications commerciales, la durée des spots compte également. Il faut rendre cela simple dans un souci d’efficacité : leurs spots sont courts, dans un style minimaliste qui va à l’essentiel de manière fluide, comme pour mettre au second plan l’aspect publicitaire et montrer plutôt le côté « témoignage ». Et c’est ce jeu sur la proximité qui fait de cette campagne de recrutement un succès : elle clôt le fossé entre le vrai monde et la publicité.
 
La corde de l’authenticité
C’est justement cette authenticité qui fait la force des campagnes de l’armée de terre. En communication, réaliser un spot publicitaire sans acteur, ni décor, est une technique souvent utilisée dont le nom « Real Life Advertising » parle de lui-même. Lorsque l’on analyse un autre spot de cette campagne nommé « opération extérieure » on comprend alors tout l’enjeu de cette technique :

Une vraie peinture de l’héroïsme qui nous fait comprendre le nom donné à cette campagne
« Votre Volonté. Notre Fierté ». Et qui dit peinture, dit images : ainsi, celles que nous apercevons dans ces différents films sont l’œuvre du photographe Thomas Goisque, lui-même ancien militaire ! Question authenticité, difficile de faire mieux. Ce dernier a suivi des soldats lors de véritables opérations, on ne parle donc pas de mise en scène mais bien de photo-reportage. Il est également celui qui a su capturer l’expression des visages des jeunes soldats que l’on retrouve sur les différentes affiches de la campagne :

Ces soldats témoignent réellement devant l’objectif, provoquant une sensation de véracité supplémentaire qui est elle-même accentuée par l’usage du « je ».
Ainsi, le pouvoir de l’image, du témoignage et du message de fierté sont les leviers de cette neuvième campagne. Ajoutons à cela une présence crossmédias ainsi qu’une bonne dose d’authenticité et cela nous donne un résultat incroyable, reconnu également par de nombreuses institutions : Effie 2016, Grand Prix Stratégies de la publicité 2016, Communication et entreprise 2016…
 
Steffi Noël
@SteffiiNoel sur Twitter
 
Sources :
• Dossier de presse digital, L’armée de terre. Publié en 2016, consulté le 27/05/17
• « Votre volonté, notre fierté » l’armée de terre lance sa nouvelle campagne, Laurent Lagneau, Opex 360. Publié le 09/03/16, consulté le 01/05/17.
• L’armée de terre cherche ses nouveaux héros, Sandrine Bajos, Le Parisien. Publié le 14/03/16, consulté le 01/05/17.
 
Crédits photo :
• L’armée de terre
• 1ere photo :
https://www.recrutement.terre.defense.gouv.fr/sites/sengager/files/styles/big_teaser_content_respcustom_user_desktop_1x/public/thumbnails/image/espacecomm_sengager.fr_2.jpg?itok=a9w_BK8b
• 2eme photo :
http://www.orientation-pour-tous.fr/IMG/jpg/campagne_adt_2016.jpg

Vanish
Publicité et marketing

Une communication sans éclat

 
Après avoir vu la dernière publicité de Cif, j’ai un petit ras-le-bol sur l’industrie des produits ménagers et sa communication pas forcément sexiste, mais assurément monotone et sans surprise. Que raconte la dernière pub de Cif ? La marque a repris son style publicitaire axé sur le conte, ici La Belle au bois dormant, qui attend son prince charmant. Et ô malheur ! Le château est sale ! Elle ne peut décemment accueillir son homme dans ces conditions. Heureusement, grâce à Cif, en peu de temps le château retrouve son éclat. Ainsi, elle peut enfin recevoir son baiser… En 2012, une pub de la marque avait suscité certaines réactions négatives. Elle nous racontait l’histoire d’un chaudron que personne n’arrivait à nettoyer. Aucun homme ne trouvait le moyen idéal pour réaliser cette tâche. Jusqu’au jour où un mystérieux chevalier réussit l’inconcevable. Ce chevalier était une femme…

Un discours figé dans le temps
On peut parfaitement comprendre que ces marques cherchent à cibler un public féminin car même si les mœurs ont considérablement évoluées, il n’en reste pas moins que la majorité des tâches quotidiennes, comme les courses ou le ménage, sont réalisées par des femmes. Pourtant, cela ne doit pas signifier une communication sans originalité. Je ne défends pas l’idée d’une publicité qui mettrait la femme sur un piédestal, mais une publicité différente, originale. On voit sans cesse les mêmes mises en scène, les mêmes messages. Les pubs pour les produits ménagers en deviennent sans saveurs, prévisibles. On ne compte plus le nombre de spots qui nous montrent des femmes qui n’arrivent pas à enlever des tâches de gras sur un t-shirt ou à garder le noir étincelant de leur haut préféré, jusqu’à ce qu’elles découvrent Le produit miracle. Et ne nous attardons pas sur les doublages absurdes (quand ce n’est pas le doublage, c’est le ton adopté par les acteurs qui est risible) et les messages aseptisés véhiculés par ces marques. Il existe quand même un article de 2008 sur Buzz mode d’emploi, où l’on se plaint déjà de ce manque criant d’innovation !
Le rôle de la publicité semble paradoxal, elle veut nous en mettre plein la vue tout en s’effaçant. On doit oublier que l’on est devant une publicité. Or, avec la plupart des publicités de produits ménagers, c’est le contraire qui s’opère. On est gêné car on a l’impression d’être pris pour des ahuris. Qui, sérieusement, parle ou se conduit au quotidien comme dans une publicité de Vanish ?
Innovez !
Du coup, quand une publicité de ce secteur utilise un modèle différent, c’est un vent de fraîcheur qui souffle sur nous. On peut prendre l’exemple de la pub de Paic, avec son slogan « Adieu la graisse ! », et son format publicitaire qui ressemble à un dessin-animé. Une pub asexuée qui permet au moins d’éviter toute accusation de sexisme. C’est différent, c’est drôle, agréable à regarder. On n’en demande pas beaucoup finalement. Et pourquoi ne pas s’inspirer également des publicités qui donnent une image différente de la femme au foyer ? Décathlon avec un homme sauvé de l’attaque d’un requin par une femme, Volkswagen sur les super-héroïnes du quotidien ou encore Renault et l’histoire d’une société qui évolue.
On attend encore des publicités où la femme n’affichera pas uniquement un sourire béat devant son linge propre, tout en exhibant fièrement sa lessive préférée. La publicité est le milieu par excellence de la création. Il est temps que cette caractéristique s’applique enfin au domaine des produits ménagers.
Pierre-Yves Halin
Crédit photo : Vanish detergent « Removes grease stains » 2009, Agency : Euro RSCG Warsaw (Poland)

Michelle Obama
Politique

#BringBackOurGirls : l'opération du tout digital

 
Tout a commencé par une vidéo de quelques minutes postée le 5 mai dernier par l’organisation terroriste nigériane Boko Haram, dont le leader revendique l’enlèvement de 276 lycéennes le 14 avril en vue de les vendre comme esclaves. Un mois après le drame, la propagation du hashtag #BringBackOurGirls constitue un véritable témoignage de soutien envers les jeunes filles détenues et leurs familles.
La réaction est planétaire, mais le plus impressionnant dans cette opération reste que la mobilisation est quasi exclusivement numérique.
La réaction des internautes aux évènements internationaux et nationaux n’est pas un phénomène nouveau : on se souvient du terrible tsunami qu’a connu le Japon en 2011, face auquel Lady Gaga avait appelé ses fans à donner aux sinistrés par Twitter. Ce type d’engagement virtuel – Jacques Ion parlait déjà « d’engagement distancié » en 1997* – a fait couler beaucoup d’encre et pose la question du sens donné à ces formes de participation. Les multiples pétitions en ligne, photos de soutien et rassemblements virtuels sont souvent dénoncés comme faciles et ne serviraient pour beaucoup qu’à se donner bonne conscience. Comment dès lors aborder de la façon la plus neutre ces interventions sous le signe du buzz ?
Si le hashtag #BringBackOurGirls déferle dans le monde entier, il vient à l’origine d’une cérémonie qui s’est tenue fin avril dans le cadre de la nomination de Port Harcourt (Nigéria) comme capitale mondiale du livre par l’Unesco. Lors du discours d’Oby Ezekwesili, vice-présidente de la section africaine de la Banque mondiale, qui demandait la libération des jeunes nigérianes, deux hommes ont alors tweeté la formule, qui depuis a fait du chemin…
Quelques jours après la publication sur Youtube de l’annonce de Boko Haram, Michelle Obama s’est pour la première fois exprimée à la place du Président des Etats-Unis dans une vidéo hebdomadaire de la Maison Blanche : elle y affirme l’indignation et l’immense chagrin du couple face à la situation, à la veille du « Mother’s Day » américain.
On peut notamment en retenir ces mots :
« I want you to know that Barack has directed our government to do everything possible to support the Nigerian government’s efforts to find these girls and bring them home. In these girls, Barack and I see our own daughters. We see their hopes, their dreams, and we can only imagine the anguish their parents are feeling right now. » **
La première dame a également publié une photo et un message, retweetés plus de 50 000 fois : « Our prayers are with the missing Nigerian girls and their families. It’s time to #BringBackOurGirls. » ***
L’implication des politiques les plus hauts placés a également touché la France : Najat Vallaud-Belkacem ou encore Christiane Taubira se sont elles aussi emparées des réseaux sociaux pour affirmer leur soutien aux victimes et rappellent la mobilisation du pays pour retrouver les auteurs de l’enlèvement.

Plusieurs pages Facebook, une pétition de quelques 900 000 signatures sur change.org et un Tumblr lancé par Amnesty International… Jamais la marque du digital ne se sera autant faite sentir pour un événement localisé de ce type.
Plus anecdotique, Angelina Jolie, Alexia Chung, Emma Watson ou encore Whoopi Goldberg se sont manifestées sur Twitter, où les messages de soutien et les portraits affichant le hashtag se multiplient… Même le très connecté Pape François a fait appel à l’oiseau bleu pour appeler à la prière !
Les mauvaises langues pourront juger tout cela comme le seul moyen de pallier le manque d’investissement ou d’actions des gouvernements. Néanmoins, le tweet permet tout au moins de maintenir en haleine la communauté internationale et de diffuser l’information en masse.
La révolte est mondiale, certainement parce que l’enlèvement de ces jeunes écolières n’est pas le premier au Nigéria et relance le débat du droit à l’éducation et de la violence envers les femmes. Ces deux causes trouvent un écho bien au delà des frontières du pays et amènent certains à s’engager dans le mouvement #BringBackOurGirls, depuis leur écran ou leur smartphone.
Le hashtag viral aura in fine eu l’avantage -et pas des moindres- de réveiller les médias, qui ont fait fin avril leur mea culpa : à la surprise générale, les internautes sont à l’origine du buzz, suivis après plusieurs semaines par les médias qui ont tardé à parler de l’affaire. Boko Haram n’a pas eu besoin d’eux pour poster sa vidéo, pas plus que les millions de followers pour s’engager (?). #BringBackOurGirls laisse donc envisager un retour en force du soutien citoyen et communautaire dans l’action sociale, aux dépens des grands titres de l’actualité.
 Laura Pironnet
* Jacques Ion, La fin des militants ?, 1997, L’Atelier
**  « Je veux que vous sachiez que Barack a tout fait pour que notre gouvernement soutienne les efforts du gouvernement Nigérien afin qu’il retrouve ces filles et les ramène chez elles. Au travers de ces filles, Barack et moi voyons nos propres filles. Nous savons leurs espoirs, leurs rêves et nous ne pouvons qu’imaginer l’angoisse que leurs parents vivent à cet instant. » (http://www.youtube.com/watch?v=PAncJ3nuczI)
*** « Nos prières vont vers les jeunes filles nigérianes disparues et leur famille. Il est temps de #BringBackOurGirls ».
Sources :
Atlantico.fr
Lesoir.be
Madmoizelle.com
Crédits photos :
Twitter.com
 

Guy Cotten
Publicité et marketing

Scrollez ou coulez !

Si vous n’êtes toujours pas allé sur ce site, je vous conseille de brancher votre casque, d’éteindre la lumière et de passer en mode plein écran pour vivre  totalement l’expérience étrange (et un chouïa traumatisante) de sortie en mer.
Vous vous trouvez mystérieusement plongé dans un film tourné en première personne où vous incarnez Julien, homme expérimenté en mer sur son voilier avec un certain Charles pas très débrouillard. Les deux français semblent partis pour une excursion au large entre amis sur un joli bateau avec une météo digne de la côte d’azur quand tout bascule…
Vous vous prenez la baume (erreur d’amateur) et tombez à l’eau.
On comprend assez vite que l’expérience a pour but de nous sensibiliser aux questions de sécurités vitales sur un bateau auxquelles on ne pense pas vraiment. La vidéo semble s’inscrire dans la veine des campagnes choc de sensibilisation qui marchent plutôt bien de nos jours.
Procédé pas très innovant donc, me direz vous, mais c’est sans compter le caractère immersif et interactif de l’expérience : vous n’êtes pas simples spectateurs de l’action, vous êtes virtuellement en train de vous noyer et devez vous battre pour rester hors de l’eau. Enfin, vous devez scroller sans relâche.
Finalement, vous vous noyez et les messages suivants apparaissent :
Vous vous êtes noyés au bout de X minutes.
En mer on se fatigue plus vite qu’on ne le croit.
Portez un gilet de sauvetage.
Par GUY COTTEN L’abri du marin.
Et c’est là qu’on découvre que tout le site à l’apparence d’un jeu vidéo immersif et très bien réalisé est en réalité une publicité pour Guy Cotten, qui ne s’avère pas être un artiste réalisateur s’essayant aux jeux vidéo mais une société bretonne spécialisée dans les vêtements de protection en milieu marin.
L’idée géniale du site mystérieux et de l’expérience interactive vient de l’agence de communication CCM BBDO qui réalise là un coup de pub magistral pour l’entreprise bretonne. La campagne n’a d’ailleurs pas tardé à devenir virale de la campagne (à ma dernière tentative, c’était quelques 2 924 027 internautes qui avaient virtuellement coulé), les boutons de partage sur les réseaux sociaux étant accessibles à tout moment en bas de la page et visibles à la fin.
Une campagne inspirée
 Les références au monde du jeu vidéo et des cinématiques interactives sont claires et c’est ce qui rend vraiment intéressant le procédé de communication. On ne partage pas le site pour prévenir des risques du non port de gilet de sauvetage mais pour voir combien de temps nos collègues ou amis vont tenir à scroller et accessoirement savoir à quel point cela a été perturbant pour eux.
Le côté « choc » d’incarner quelqu’un qui lutte pour se maintenir à la surface a tout du film d’horreur. Le procédé d’immersion par la caméra en première personne a fait le succès de nombreux films du genre tels que les célèbres REC et Cloverfield. Il n’est pas non plus sans rappeler les jeux vidéos d’horreur comme FEAR qui ont aussi un très grand nombre de joueurs. Avec un tel univers en toile de fond, il n’est pas étonnant d’avoir entendu parler de cette campagne sur un réseau social de gamers à la moyenne d’âge de 30 ans comme cela est mon cas. Si c’est là la cible de cette campagne, l’angle est d’autant plus intelligent que l’on va forcément repartager le site à nos amis, parents, connaissances au pied marin amoureux de la navigation ou au moins qui partent en vacances en bateau. Là sont les vrais potentiels acheteurs de superbes gilets orange et autres accessoires de survie fluorescents.
Chapeau bas pour cette idée géniale donc. En effet, exception faite des mordus de sports maritimes, la plupart d’entre nous n’aurions sûrement jamais entendu parler de Guy Cotten et de ses gilets de sauvetages sans une telle expérience.
 Rimond Leïla
 Sources :
Sortieenmer.com
Meltybuzz
 

Société

De l’usage du stéréotype en communication

Lancée il y a quelques jours, la campagne d’affichage du mouvement de La Manif pour Tous a fait l’objet d’un amusant détournement sur les réseaux sociaux, et notamment sur Twitter. Des internautes ont en effet parodié les nouveaux visuels de la campagne, habillés aux couleurs d’un message stéréotypé (« Pas touche à nos stéréotypes de genre »), pour le moins déconcertant. À tel point qu’il devient même difficile de distinguer les affiches officielles de celles qui ont été parodiées…
Retour sur un dispositif communicationnel au slogan volontairement provocateur.
Stéréotypes et communication : à utiliser à bon escient

Jouer sur les stéréotypes peut être un moyen efficace de communiquer, puisqu’il s’agit de jouer sur des cadres de référence communs pour garantir la transmission rapide d’un message. Les clichés utilisés comme leviers de communication permettent ainsi d’entrer en résonnance avec des représentations socialement partagées et culturellement ancrées. Mais fonder une campagne entière de communication sur les seuls stéréotypes, en les affirmant comme vérité établie et en l’absence de ton décalé, s’avère une démarche périlleuse. Et encore plus quand celle-ci prend part à un débat social houleux.
La Manif pour Tous justifie sa campagne d’affichage comme se voulant provocante avec pour objectif de susciter l’intérêt autour de la question du genre et des modèles familiaux. Il est clair que s’appuyer sur de tels stéréotypes est un moyen affiché de provoquer, mais jusqu’à quel point est-ce une stratégie efficace de provoquer pour diffuser son message et faire parler de soi ? Peut-on aujourd’hui « provoquer pour provoquer » ? Sans nul doute que la provocation gratuite peine à faire sens et se révèle vite creuse.
Il apparaît aussi que le ton de cette campagne manque de subtilité, comme en témoignent les amusantes parodies qui ont surgi sur Twitter (cf. Bannière) dès la révélation des affiches par la Manif pour Tous. Appliqués aux adultes, les « stéréotypes de genre » prennent un tout autre sens, se révélant profondément drôles et absurdes : la femme est montrée comme affairée aux tâches ménagères, en contraste avec une figure masculine assise voire avachie – ou encore, l’homme promenant sa femme en laisse, traduisant la domination masculine sur une prétendue faiblesse du sexe féminin. Ce jeu de détournement des visuels par les internautes souligne le caractère quasi absurde des affiches de LMPT, faisant apparaître leur potentiel parodique intrinsèque.

Nouveau slogan de #manifpourtous ! « Pas touche à nos stéréotypes de genre » J’apporte ma contribution à leur combat ! pic.twitter.com/mD8GpJZPbm
— Allan BARTE (@AllanBARTE) 14 Janvier 2014

Cette appropriation parodique par les internautes révèle un certain rejet du message véhiculé par la campagne de LMPT. En effet, on peut analyser ces tweets jouant sur la parodie et l’humour comme des manières d’affirmer une opinion de désaccord, à l’image de La Fontaine qui utilisait le procédé de la métonymie animalière pour se moquer et dénoncer certains comportements de la Cour sous Louis XIV.
 
Le stéréotype : une fonction rassurante mais désuète ?
Jusqu’où l’usage des stéréotypes est-il pertinent dans une campagne de communication ? Ceux-ci peuvent en effet apparaître comme des archaïsmes communicationnels s’ils ne sont pas traités avec un second degré, lequel leur permettrait de revêtir une dimension contemporaine et moderne. L’argument du stéréotype de genre apparaît comme désuet, dans la mesure où il évoque un certain repli communicationnel, qui va à l’encontre de la « société ouverte » dans laquelle nous vivons (1). K. Popper avait bien analysé cet aspect de notre monde contemporain globalisé, caractérisé par le changement ainsi qu’un mouvement continu d’ouverture communicationnelle. Dans un contexte de dispersion et de discontinuité, se poser comme défenseur des « stéréotypes de genre » traduirait alors une volonté de retour à des valeurs originelles.
La campagne de LMPT peut se comprendre à l’aune de la pensée de D. Bougnoux (2) : le mouvement de LMPT aurait l’impression d’une perte de repères du fait des caprices d’une économie-monde qui n’est plus encadrée par l’Etat protecteur. La Manif pour Tous pourrait s’analyser comme l’une de ces communautés « aux identités manifestes » qui ressent le besoin de réaffirmer des valeurs qui s’inscrivent dans un mythe des origines du genre homme/femme, face à la dévastation des valeurs traditionnelles et aux désordres individualistes causés par le marché capitaliste mondial. La revendication de « stéréotypes de genre » semble exprimer comme une peur du changement, de la confrontation culturelle, des différences (ici sexuallo-identitaires).
Si la campagne de La Manif pour Tous a été parodiée aussi rapidement, c’est sans nul doute parce qu’elle brandit des stéréotypes socialement catégorisants qui s’opposent aux valeurs d’ouverture que prône notre société globalisée et ouverte au changement. D’un point de vue communicationnel, ce qui avait pour but d’être une campagne encourageant une lutte claire et affirmée, s’est mué en une campagne en contradiction avec son époque.
S’il est d’abord question dans cette campagne de légitimité des identités sexuelles/sexuées, il est aussi question de légitimité des identités mêmes qui nous fondent en tant qu’êtres particuliers.
 
Alexandra Ducrot
(1) La société ouverte et ses ennemis, Karl Popper (1945) : il y défend l’idée d’une société qui ne se tient pas à des connaissances établies mais reste ouverte à la réactualisation des connaissances avec l’idée d’un possible changement de la réalité qui nous entoure. En effet se revendiquer de vérité unique ou immuable dénierait le caractère profondément pluraliste et multiculturel de toute société démocratique.
(2) Introduction aux sciences de l’information et de la communication, Daniel Bougnoux (1993)
 
Sources :
Il était une pub : « Affiches Manif pour Tous : A peine dévoilées déjà parodiées »
Yagg : « Stéréotypes et escargots géants : Les affiches de la «Manif pour tous» parodiées »
Crédits photos :
Bannière : Il était une pub
 

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Kiss for peace
Publicité et marketing

« Kiss for Peace » ou la nouvelle campagne publicitaire intrigante et novatrice du déodorant Axe.

 

Le nouveau spot publicitaire d’Axe, sorti en exclusivité avant d’être diffusé mondialement le 2 février 2014 à l’occasion du célèbre Super Bowl aux Etats Unis, détonne par rapport aux campagnes précédentes. En effet, la ligne de conduite de la marque du groupe Unilever change du tout au tout – passant de l’humour à l’audace. Les formules Anarchy, Dark Temptation ou Apollo, mettant en scène de jeunes hommes à croquer, laissent aujourd’hui place à Axe Peace. La marque se veut jeune, moderne, et n’hésite pas à s’affirmer en dévoilant un concept audacieux et novateur.
Arrogante, la campagne fait déjà le buzz en troquant ses protagonistes privilégiés – les machos et les filles en furie – pour des dictateurs et des machines de guerres. Les conflits internationaux sont résolus par le pouvoir d’un simple baiser. Axe fait désormais place au changement, en mettant pour la première fois la femme au premier plan. La figure masculine se mue en véritable gentleman prêt à renoncer à la guerre par amour. Le coup de théâtre et l’étonnement du spectateur renforcent le message de la campagne de communication.
Son succès est enfin intensifié par l’implication qu’elle donne aux internautes : ceux-ci sont sollicités pour soutenir l’association Peace One Day. En partageant un baiser sur le hashtag #kissforpeace, certains auront la chance d’être exposés à Time Square sur un panneau d’affichage. Quoi de mieux pour pouvoir être au centre de l’attention ?
 Laura de Carné
Sources :
Tuxboard
Le monde marketing