Opération « Saint-Valentin »
Si le mois de Janvier est synonyme de restrictions budgétaires post-fêtes de fin d’année, le mois de Février rime quant à lui, avec fleurs, coeurs et chocolats. Oui, la Saint-Valentin débarque dans notre quotidien pour rappeler aux vieux couples qu’il faut économiser pour la sortie annuelle et aux célibataires que le 14 février est un jour comme les autres: métro, boulot, dodo et surtout solo !
Mais la Saint-Valentin, kézako? La célébration de l’Amour avec un grand « A » ou juste un énième prétexte pour nous pousser à sur-consommer?
Le marché de l’Amour en pleine expansion
Aujourd’hui, la recherche de l’âme soeur est devenue un process totalement décomplexé: en témoigne le succès des nombreux sites de rencontres ou applications, mêlant nouvelles technologies et instinct de reproduction. En effet, Meetic, Tinder ou encore eDarling favorisent les rencontres d’une vie… ou d’une nuit tandis que d’autres proposent, sans se cacher, d’adopter un mec (sur fond de musique et de slow motion) et même de partir à la recherche de son amant ou sa maîtresse. Sans complexes, aucun.
Avec l’essor des smartphones et autres tablettes, le « date » ou la simple sortie en club se sont transformés en « match » (comprenez Tinder), les rencontres furtives sur un quai de métro en romance parisienne via un système d’hyper-géolocalisation (Happn) et les « one-night stand » en bulletins de notes (Hookbook).
Il semblerait, en définitive, que ces nouvelles technologies n’entretiennent les relations humaines que par une illusion de proximité. Et l’Amour dans tout ça?
Mais, l’Amour c’est quoi? Un sentiment, un « état d’être » ou un simple terme pour parler d’un « contrat à durée déterminée »? Parce que oui, « en toute chose, il faut considérer la fin. »
La Saint Valentin, Opération « Marketing »
Pour une grande majorité, la Saint-Valentin n’est plus ni moins qu’une opération marketing: l’association des mots ‘Amour’ et ‘Marketing’ donne un réel aperçu antinomique de ce que représente cette fête souvent considérée comme has-been.
Mais au-delà de ce paradoxe, la similitude effrayante entre le process marketing et notre démarche de séduction est à souligner: phase d’analyse et de diagnostic, segmentation du marché, ciblage, positionnement différenciant, sans oublier le plan de communication cross-media (Facebook, textos et rendez-vous). Suivi d’une phase de fidélisation et d’une notoriété « top of mind ». (Comprenez notoriété de premier rang)
En véritable marqueteur à la recherche de l’âme soeur, on en oublierait presque que l’on alimente un filon très lucratif, une brèche dans laquelle les marques se sont engouffrées et qui, durant une période de plus en plus longue, déversent leur communication « cul cul-pidon » tout en nous faisant croire que nous avons besoin de montrer à notre moitié combien on l’aime de façon matérielle et futile.Cependant, certains annonceurs ont décidé, eux, de prendre le contre-pied de cette tendance en détournant les codes de la Saint-Valentin pour une communication créative et efficace.
A l’image de Wilkinson, qui reprend les symboles de cette fête avec humour.
Ou encore Eurostar, le plus créatif: print minimaliste, accroche courte et efficace.
Less is more.
Une instrumentalisation séduisante
Si on parle d’instrumentalisation de l’amour par les marques, il ne faut pas oublier que les médias y trouvent aussi leur compte. L’amour et ses représentations sont omniprésents dans le système médiatique, qui entretient continuellement une vision édulcorée de l’amour.
En effet, au cinéma, l’amour reste le thème le plus populaire. Et il est souvent dépeint comme un sentiment merveilleux qui vous donne des papillons dans le ventre. Oui, ça c’est vrai. Mais la plupart du temps, ce n’est qu’une mise en scène : par exemple, le film américain Valentine’s Day (LA comédie romantique au casting digne du selfie d’Ellen Degeneres aux Oscars) qui met en scène différentes situations autour de la Saint-Valentin offre un large panel d’observation: la célibataire fragile dont la seule mention de la Saint-Valentin lui donne envie de vomir, le fleuriste, amoureux de sa meilleure amie, le couple gay, etc… L’amour y est présenté de manière romantique, pure et éternelle. C’est la représentation parfaite d’un Amour auquel on aspire. Dès notre plus tendre enfance, on nous scotche devant les contes de fées dans lesquels le prince charmant délivre sa princesse du sortilège de la vilaine sorcière.
Mais la réalité est toute autre et il se crée alors un décalage entre ce que sont réellement les relations amoureuses et celles auxquelles on aspire.
Problème : quand le décalage est trop important, le retour à la réalité est assommant mais on persiste tout de même à croire que cette amourette éternelle d’aujourd’hui sera l’amour éternel de demain. La Saint-Valentin serait donc peut-être le moyen, une fois par an, d’entretenir cette illusion commune, cette norme utopique.
Alors, si pour certains, la Saint-Valentin est l’occasion de raviver la flamme, pour d’autres elle reste un événement purement commercial pendant lequel marques et médias inondent les canaux de transmission de leur discours utopique.
En somme, l’amour est une notion très subjective que chacun se fait au gré de son vécu ; il nous donne des ailes parfois, peut faire mal aussi mais la recherche constante de ce climax a des conséquences dont on connaît les répercussions. Qu’à cela ne tienne, qui ne tente rien n’a rien.
Alizé Grasset
Sources
Webmarketing-com, advertisingtimes.fr
Crédits Images
ddb-nantes.com, llllitl.fr, strategies.fr, tuxboard.com