Longue vie au podcast audio
Si les origines du mot podcast restent mystérieuses (contraction d’ « iPod » et de « broadcasting » ou initiales de « Program On Demand » ?) plus personne ne doute de son succès. Enfant de la radio et du web, le phénomène podcast – apparu pour la première fois courant des années 2000 – est assurément un petit protégé de la famille des transmédias. Alliant la fluidité de l’oral et la souplesse du digital, ce média s’érige en symbole gagnant de la remédiation. Auparavant utilisé comme moyen de rattrapage des émissions radios manquées, il se définit aujourd’hui comme un média en tant que tel.
L’audio x le digital = équation gagnante de l’infotainment
McLuhan disait « The content of any medium is always another medium ». En d’autres termes, toute médiation est par essence une remédiation : un contexte de média existant qui vient être transformé. Par exemple un film tiré d’un livre est une remédiation de ce même livre.
Dans le cas présent, les podcasts peuvent être décrits comme une version 2.0 de la radio. On y retrouve ainsi la relation d’animateur/auditeur (podcasteur/ auditeur). L’influence de la culture d’internet, toujours plus riche et variée, bouscule les programmes pour y proposer un large panel de sujets à la demande. Avec 80 millions de téléchargements, le reportage fiction Serial diffusé à l’automne 2014 aux Etats-Unis est le reflet de cet engouement pour les nouveaux formats audio qu’offre le podcast. Du divertissement à l’information, de la fiction au reportage, il mélange information et divertissement et cela plaît. France Inter, par exemple, a vu son nombre de téléchargements progresser de 50% entre les saisons 2013-14 et 2014-15.
Toutefois, bien que le podcast provienne en grande majorité du format radio, il sait également prendre ses distances de celui-ci !
Avec leur format où la parole s’étale, se nourrit du point de vue de l’auteur et invités, le podcast prône un retour à la slow information. Ses sujets sont généralement abordés avec un certain recul qui s’oppose à la culture de l’instantanéité que l’on retrouve sur la toile. Même rupture du côté de la publicité : elle est quasi-absente ! Seule l’auto-promotion – moins intrusive qu’une publicité en tant que telle – est pratiquée, bien souvent en indiquant un programme susceptible d’intéresser l’auditeur.
« Parole, parole, parole » au service du storytelling
À l’heure du règne de l’image que Régis Debray décrit comme étant la période « vidéosphère », le retour de l’audio et rien que l’audio peut surprendre. Pour autant, la parole et plus précisément la conversation s’est amorcée comme une tendance porteuse quand on voit les émissions de télévisions comme, par exemple, « conversations secrètes » de Canal Plus (où Michel Denisot se promène et converse avec son invité). Le format vidéo en moins, reste un réel engouement pour la conversation, cet acte pourtant quotidien. Et cela tombe bien puisque le podcast offre une plus grand liberté de parole : aucun format imposé que ce soit dans le style, le temps, ou encore le contenu.
« The Beautiful thing about podcasting is it’s just talking…it is one of the best ways to explore an idea » @joerogan #quotes #podcasting pic.twitter.com/A3jZMERqoH
— The Gospel Friends (@mygospelfriends) 23 décembre 2016
Face à la méfiance que peuvent avoir les publics quant aux manipulations médiatiques, le podcast plaît pour sa liberté, son authenticité. Il est question d’une polysémie et d’une primauté du podcasteur. Tous uniques, traitant le sujet à leur manière : de façon institutionnelle pour les grands noms de la radio tels que France Inter ou France Culture, ou encore et surtout avec de la subjectivité pour les billets et podcasts d’amateurs.
Ainsi, dans tous les cas, le résultat se veut humain, avec sa part d’imperfections, de spontanéité. La pratique peut aller d’un podcast improvisé (les conversations de Garance Doré dans « Pardon my french » ou celles de « Getting To Know You » de Radio Kawa) à un récit construit autour du storytelling (« Transfert » de Slate.fr, « Arte Radio : flux principal » de Arte).
L’authenticité propre au podcasteur et sa production confère à la relation avec l’auditeur un sentiment plus intime. Les enregistrements amateurs, par exemple, se font souvent dans des lieux privés (lieux domestiques, hôtels entre autres) à destination de publics qui les écoutent dans leur quotidien. C’est une relation plus personnelle qui s’instaure puisque pour un grand nombre de podcasts il n’y pas de public lors de l’enregistrement. Il n’y a pas non plus d’interventions d’auditeurs comme c’est le cas avec la radio. Cela donne l’impression à l’auditeur d’être le seul destinataire.
Enfin, la logique d’abonnement via les flux RSS (« Rich Site Summary ») renforce cette relation quasi fidèle. Étant abonnés, on retrouve une logique de communauté qui suit la conception de Walter Ong, pour qui les nouveaux médias sont censés permettre de reconstituer un lien social.
Finalement le podcast plaît pour son efficacité et sa simplicité : la fluidité de la langue couplée à la créativité d’internet. Plus qu’un simple média d’infotaiment, la liberté de ton qu’il accorde tend à le placer en instrument politique. On assiste d’ailleurs à sa réutilisation par des mouvements féministes comme « Génération XX » racontant le portrait de « wonder woman » « Badass » consacrée aux figures de femmes dans la Pop Culture, ou encore « La poudre » de Nouvelles Écoutes où Lauren Bastide converse avec des figures féminines. Il est certain que le podcast a pris ses marques dans la pop culture.
Ophélie Lepert
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Sources :
• Media meeting « Le podcast ou la délinéarisation réussie de la radio », écrit par Frédéric Courtine, publié le 1er Avril 2014.
• Le blog documentaire « Nouveaux territoires de création documentaire : podcast mon amour ! » Écrit par Fanny Belvisi et publié le 27 septembre 2016.
• Konbini « Le podcast, nouveau terrain de jeu des féministes ». Écrit par Valentine Cinier et publié Février 2017 .
• Wikipédia, RSS
Crédits :
• The average penguin
• Mygospelfriend sur Twitter
Les hologrammes à l’assaut des égéries !
Sushi, manga, cosplay et anime¹, la culture japonaise s’exporte en Europe plus que jamais et colore notre quotidien. Cette acculturation va même jusqu’à bouleverser les codes de communication associés au luxe et notamment du côté des égéries. Elles inspirent les consommateurs et incarnent les marques, mais doivent-elles pour autant être « réelles » comme nous le démontre le Japon ?
L’égérie entre lifestyles, imaginaires et représentations
En théorie, l’égérie symbolise une marque et crée une forte identification car elle représente pour le consommateur un modèle à atteindre, aussi lointain qu’accessible. Même si les plus grands acteurs et actrices appartiennent à l’univers des strass hollywoodiens, à certains égards leur quotidien peut sembler proche du nôtre. Ainsi, à la simple vue de Charlize Theron, on ne peut s’empêcher de penser au parfum J’adore de Dior. Et si vous croisez Keira Knightley, la publicité Chanel au chapeau melon recouvrant sa poitrine, apparaîtra spontanément dans votre esprit.
L’égérie se doit d’être un idéal à atteindre mais elle doit aussi correspondre par son style de vie et ses aspirations aux valeurs de la marque qu’elle représente pour rendre la collaboration cohérente et efficace aux yeux des consommateurs. Alors le plus souvent, quoi de mieux et de plus simple techniquement que de prendre une célébrité reconnue pour sa beauté, son charisme et, dans la plupart des cas, son engagement humanitaire ? Mais il semblerait que cet être idyllique puisse aussi être fabriqué de toutes pièces.
L’égérie made in Japan
L’innovation vient du Japon, où quotidiennement les personnages de manga prennent vie à travers figurines, cosplay, animes et même hologrammes. En effet, depuis une dizaine d’années, la chanteuse virtuelle Hatsune Miku² cartonne au Japon et aux États-Unis, où elle y a effectué une tournée. Alys, sa cousine française née en 2014, s’est produite en concert au Trianon le 17 décembre 2016. L’hologramme franco-japonais créé par l’équipe VoxWave est le premier de son genre en France. Alys possède une personnalité, une voix et se produit en concert sous forme d’hologramme aux cotés de musiciens et est même inscrite aux sélections françaises pour l’Eurovision 2017.
Ici on ne parle pas d’égéries mais bien d’artistes virtuels. Cependant, cette personnification digitale émettant des sons modulés artificiellement, en a inspiré d’autres. En 2016, Nicolas Ghesquière, le directeur artistique de Louis Vuitton, a choisi Lightning, célèbre héroïne du jeu vidéo Final Fantasy XIII, pour la collection printemps-été, Série 4. À savoir qu’en 2012, Lightning et ses compagnons masculins avaient aussi représenté Prada à l’occasion des vingt-cinq ans de la série.
Dans un autre registre, le Japon a désigné des personnages de jeux vidéo, d’anime et de manga comme ambassadeurs pour les JO de Tokyo en 2020 et vient d’intégrer ce mois-ci Sangoku³ dans l’équipe, le célèbre Saiyan à la queue de singe. Dans le cas du Japon, le choix de ces ambassadeurs atypiques peut s’expliquer par leur forte représentativité de la culture nippone et par leur capital sympathie dans le monde.
Pour ce qui est de la France, on observe ce phénomène à travers le parfum La Petite Robe Noire de Guerlain, un carton marketing qui se passe d’égérie et dont le visage du parfum n’est autre que La Petite Robe Noire elle-même. Cette illustration créée à l’encre de Chine par Kuntzel & Deygas est une véritable innovation en France, où les grandes marques de luxe et de beauté se disputent habituellement les peoples les plus en vogue.
L’égérie malmenée
Comment justifier un tel choix de la part des marques ? Les individus parviennent-ils à s’identifier à de telles égéries virtuelles qui semblent dépourvues de substance au premier regard ? Pour Nicolas Ghesquière, cela relève d’un choix esthétique : Lightning est le « symbole d’un nouveau processus artistique » qui met « en avant la beauté virtuelle des jeux vidéo ». Mais elle représente aussi la femme forte et courageuse bravant tous les obstacles car la femme de nos jours est « parfois si courageuse dans ses actions qu’elle en devient supérieure et iconique ».
Peut-être aussi parce que, d’une certaine manière, les égéries — bien qu’en chair et en os — semblent tout aussi « irréelles » que les virtuelles aux yeux des consommateurs. Se pose alors la question de la pertinence d’une égérie inaccessible faisant rêver au profit d’une égérie proche de ses consommateurs comme les ambassadeurs Mario Bros ou Sangoku pour les JO de Tokyo.
Ces exemples questionnent l’emploi d’égéries « réelles » souvent à des prix exorbitants au profit d’égéries digitales. Elles ont le mérite d’apporter un souffle nouveau à l’univers de la mode et du luxe bien que leur élaboration relève aussi d’une prouesse technique qui peut être également coûteuse, puisqu’il faut faire appel à des experts en graphisme et animation audiovisuelle. Pour Guerlain, l’égérie virtuelle sans visage permet à chaque femme de s’identifier à cette silhouette pétillante et virevoltante qui porte la pièce incontournable de chaque dressing, une robe noire. Même si paradoxalement, cette forme féminine peut représenter un frein à l’identification, par son corps longiligne aux jambes interminables.
Attention tout de même à ne pas tomber dans l’excès ou bien nous serons vite gouvernés par des égéries virtuelles dotées d’une intelligence artificielle. Les ingénieurs de la Silicon Valley auront eu bien raison de construire des bunkers pour se préparer contre la révolution « humanité versus IA » du XXIe siècle.
Flore Voiry
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Glossaire :
¹ Anime : une série télévisée ou un film d’animation japonais. Les animes sont souvent inspirés de manga.
² Hatsune Miku : ou Miku Hatsune, il faut préciser qu’il ne s’agit pas d’une chanteuse au sens classique du terme, mais d’une mascotte du logiciel de synthèse vocale pour artiste musicaux Vocaloid. Les chansons qu’elle interprète sont alors celles créées par les utilisateurs du logiciel. Une grande base de donnée de ces productions se trouve sur le site NicoNico Video, une plateforme d’hébergement de vidéos très connue au Japon.
³ Sangoku : il est le héros de la série Dragonball et appartient à la race des Saïyens. Ce sont les habitants de la planète Vegeta. Il s’agit d’une race de puissants guerriers à l’apparence humaine. Seule une queue de singe dans le bas du dos permet de les distinguer.
Crédits photo :
1 : Square Enix
2 : Dior
3 : Chanel
4, 5 & 6 : https://adrianongaming.wordpress.com/
7 : Japanese Olympic Commitee
8 & 9 : Guerlain
Sources :
Une campagne publicitaire sans précédent pour La Petite Robe Noire de Guerlain
Tendance-parfums.com
http://www.tendance-parfums.com/la-petite-robe-noire-guerlain-publicite.html
(pas de date ni auteurs)
Steve Ernis
Louis Vuitton : La pub de Lightning dans son intégralité en vidéo
07/01/2016
gameblog.fr
http://www.gameblog.fr/news/55864-louis-vuitton-la-pub-de-lightning-dans-son-integralite-en-vi
Tiphaine Thuillier, publié le 30/04/2015 à 15:06 , mis à jour à 15:18
ALYS, la première chanteuse virtuelle française
le 30/04/2015
lentreprise.lexpress.fr
http://lentreprise.lexpress.fr/creation-entreprise/idees-business/alys-la-premiere-chanteuse-virtuellefrancaise_1676326.html
Sacha Ramtohul
Les personnages de FINAL FANTASY présentent la collection Prada Homme printemps/été 2012
le 04/04/2012
eu.square-enix.com
http://eu.square-enix.com/fr/blog/les-personnages-de-final-fantasy-presentent-la-collection-pradahomme-printempsete-2012
Vkontakte vs. Facebook, les enjeux politiques des nouveaux médias
Dans notre monde ultra connecté, il est aujourd’hui difficile d’échapper aux réseaux sociaux. Ils sont présents partout dans le monde et ont une influence de plus en plus importante dans le champ médiatique et politique. Avec ses 1,7 milliards d’utilisateurs, le géant américain Facebook semble être un leader indétrônable. Pourtant, s’il est le numéro 1 mondial, il n’est pas pour autant premier dans tous les pays. En Chine, le leader n’est autre que Sina Weibo, avec ses 309 millions d’utilisateurs, et en Russie, Ukraine et Biélorussie, il s’agit de Vkontakte (littéralement « en contact »), qui en compte plus de 100 millions. Ainsi, la maîtrise de l’information est devenue, au XXIème siècle, un enjeu essentiel pour les plus grandes puissances de notre monde.
Une concurrence Est-Ouest jusque dans les réseaux sociaux
Profil Vkontakte du fondateur de ce réseau, Pavel Durov
Profil Facebook du fondateur de ce réseau, Mark Zuckerberg
Vkontakte et Facebook semblent incarner une rupture symbolique, un fossé communicationnel entre la jeunesse de l’Est et de l’Ouest. Nous pourrions presque voir dans la création de ce réseau, deux ans seulement après celle de son homologue américain en 2006, la volonté assumée de se démarquer culturellement, en créant son propre modèle dans un contexte d’essor des nouveaux médias. Cette volonté de concurrencer coûte que coûte son rival historique n’est pas franchement un phénomène nouveau pour la Russie, bien au contraire.
Pourtant, et c’est bien là que réside tout le paradoxe de cette démarche, des similitudes troublantes existent entre les deux concurrents. Premièrement, le concept, puisque les deux sites sont destinés à la rédaction de messages publics comme privés, au partage de photos ou de vidéos, à la création de pages publiques, de groupes ou encore événements. La ressemblance réside aussi dans les couleurs dominantes et même dans l’agencement des sites et applications qui sont quasiment identiques.
Au-delà de la volonté de concurrencer le modèle américain, la création d’un réseau social national permet d’instaurer une forme d’autarcie communicationnelle, limitant ainsi l’influence culturelle extérieure.
Les réseaux sociaux, vecteurs de contestations politiques
Manifestations de décembre 2011 en Russie
Sur la scène internationale, la Russie est connue pour sa mainmise gouvernementale sur les médias. Ce contrôle s’exerce par exemple sur la production — la majorité des imprimeries sont propriété de l’État — mais aussi à travers la nomination de proches du gouvernement à la tête des principaux organes médiatiques, comme D. Kisselev, nommé par V. Poutine à la tête de Rossia Segodnia en 2013, et surtout par une forme de pression constante sur les journalistes.
Cependant, Internet et les nouveaux médias restaient des espaces de relative liberté, dont le contrôle échappait au gouvernement qui sous estimait sans doute le rôle potentiel de ceux-ci, du moins jusqu’en décembre 2011. À la suite d’élections législatives, aux résultats jugés frauduleux, la population décide de se rassembler dans la rue pour manifester. Dès lors, les réseaux sociaux, et notamment Vkontakte, sont montrés du doigt et accusés d’alimenter un esprit contestataire envers le régime, puisqu’ils ont le pouvoir de fédérer les masses, de rassembler la foule derrière certaines idées, mais aussi d’importer des principes et idéaux venus d’Occident; ils constituent par conséquent une menace envers l’ordre politique établi.
Vkontakte : Un espace de liberté ou un domaine contrôlé ?
Pavel Durov, fondateur de Vkontakte
Suite à ces événements, le gouvernement russe décide de resserrer l’étau autour d’Internet et des réseaux tels que Vkontakte. Cela se caractérise par exemple par la rédaction d’une loi « contre la calomnie », visant à éviter la diffusion de messages allant à l’encontre de l’ordre établi, limitant ainsi la contestation politique. De même, en 2014, Pavel Durov, le fondateur du réseau social russe est évincé au profit d’Igor Setchine et Alicher Ousmanov, deux proches de Vladimir Poutine. Son éviction a lieu dans un contexte bien particulier, celui du bras de fer avec l’Union Européenne et les États-Unis sur l’Ukraine. Ainsi, sur fond de conflit géopolitique, c’est bien une bataille communicationnelle qui se déroule et dont la clé semble être la maîtrise de l’information.
Pourtant, un problème demeure encore à ce jour pour le régime russe : l’impossibilité de censurer les contenus sur Internet, et donc sur Vkontakte. En effet, une forme de censure sur les journalistes restait possible tant que celle-ci s’exerçait de façon indirecte et ce, sur un nombre limité de personnes, et qu’elle ne nuisait pas à l’image du pays. Le problème des réseaux sociaux réside justement dans le fait que chacun peut produire du contenu, politique ou autre. Censurer les contenus sur Vkontakte reviendrait finalement à censurer une grande partie de la population elle-même, chose tout à fait impensable dans un État dont toute la communication étrangère est basée sur la volonté de véhiculer l’image d’une « démocratie » forte.
Aussi, la Russie – au même titre que les États-Unis et la Chine – semble avoir parfaitement compris les enjeux culturels, mais aussi politiques et stratégiques que représente la maîtrise de l’information à l’ère du numérique.
Lucille Gaudel
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Sources :
Chupin Ivan, Des médias aux ordres de Poutine ?, Savoir Agir, 2014, consulté le 27/12/2016 https://www.savoir-agir.org/IMG/pdf/SA28-ChupinIvan.pdf
Hénin Nicolas, La France Russe : Enquêtes sur les réseaux de Poutine, Fayard, 2016, 221370113X
Laroque Clémence, « Facebook, Vkontakte : quels dangers pour le gouvernement russe ? », Le Courrier de Russie , 20/01/2012, consulté le 26/12/2016 , http://www.lecourrierderussie.com/societe/gens/2012/01/vkontakte-facebook-dangersgouvernement
Lefilliâtre Jérôme, « Comment Poutine a mis la main sur Vkontakte, le Facebook russe », Challenges, Le 22/04/2014, consulté le 26/12/2016, http://www.challenges.fr/monde/ comment-poutine-a-mis-la-main-sur-vkontakte-le-facebook-russe_158593
« En Russie, Poutine accentue son contrôle sur les médias », Le Monde, 09/12/2013, consulté le 28/12/2016, http://www.lemonde.fr/europe/article/2013/12/09/vladimir-poutineaccentue-son-controle-sur-les-medias-russes_3528033_3214.html
« Les médias russes entre contrôle interne et propagande externe », 20 Minutes, 2/11/2014, consulté le 28/12/2016
Crédits photos :
– Profil Facebook de Mark Zuckerberg
– Profil Vkontakte de Pavel Durov
– Profil Instagram de Pavel Durov
– Reuters Pictures, Denis Sinyakov
Lancer son application : le parcours d’Honi
Alexandre Le Boucher, 24 ans, a co-fondé avec Pierre Delannoy l’application Honi – Défis en couple, qui propose aux couples de pimenter leur quotidien avec des défis. Avec 30 000 utilisateurs et une forte croissance, Honi est l’exemple d’une start-up qui monte. Mais au fait, comment se lance-t-on aussi jeune dans une aventure entrepreneuriale ? Comment se faire connaître sans argent ? Et surtout, comment rendre son application rentable ? Alexandre a accepté de répondre à nos questions.
Le goût du risque
Il n’y a pas qu’un seul profil d’entrepreneur. Ce qui les lie est peut-être une chose : le goût du risque. Se lancer jeune, sans expérience, peut faire peur. Mais la jeunesse permet aussi de s’engager dans une aventure sans le poids des responsabilités familiales et des crédits (si l’on est chanceux). Pour certains l’expérience salariale permet d’acquérir la maturité nécessaire au développement d’une entreprise. Même si l’expérience est un échec, un employeur sera aussi bien attiré par le profil d’une personne ayant tenté, innové et créé.
Le risque, c’est donc le moteur de l’innovation, de la création. Lancer une application plutôt qu’une entreprise classique permet cependant de limiter considérablement les risques financiers. En effet, le codage informatique peut s’apprendre grâce à des cours en ligne. La plateforme internet UDEMY¹ propose par exemple des cours dont les prix peuvent atteindre quelques dizaines d’euros, moins risqué que d’engager un développeur dont la facture se comptera en milliers.
Une stratégie de lancement déterminante
Les coûts de lancement limités d’un format digital permettent de développer plusieurs versions. [Effectivement, une fois l’application lancée sur une plateforme de téléchargement (Apple Store, ou Google Store pour Android), les critiques des utilisateurs peuvent être virulentes, mais constructives. Elles permettent d’améliorer l’application, mais peuvent aussi effrayer de potentiels nouveaux utilisateurs. À noter que les captures d’écran de l’application sont aussi de redoutables outils marketing : en deux images seulement, qui se doivent d’être pertinentes et révélatrices, c’est l’esprit de l’application qui apparaît au grand public.
De même, le choix de la catégorie dans laquelle est rangée l’application doit être réfléchi. Pour Honi par exemple, il aurait été peu efficace de la classer dans les « réseaux sociaux ». En la faisant appartenir aux « divertissements », l’application fait face à la concurrence moins directe des autres applications de couple.
Pour accroître le nombre d’utilisateurs, une seule solution : communiquer. Comme le montre Honi, les réseaux sociaux y sont propices. L’application doit avoir sa propre identité, son propre univers pour atteindre la cible. Il est donc primordial que le développeur se détache de son univers personnel, or cette distance est parfois difficile à appréhender quand on crée de toutes pièces un produit. Le choix des réseaux sociaux doit aussi être en lien avec le contenu de l’application.
Pour Honi, Twitter semble peu opportun, puisque c’est surtout par Facebook que les couples communiquent. Posséder une page Facebook est alors indispensable, mais il faut savoir la gérer. Alexandre a par exemple constaté que publier des défis à réaliser sur la page Facebook entraînait des conversations en commentaire entre les couples et aboutissait à de nouvelles adhésions, alors que relayer des articles n’avait pas d’impact. Sur Instagram, le système de hashtag permet de cibler des contenus en rapport avec le thème de l’application. Aussi, en aimant des photos tagguées « amour », par exemple, l’application se fait connaître efficacement chez les couples grâce à des outils gratuits simples à paramétrer, comme Instagress.com qui permet d’automatiser ce processus en ciblant les photos d’un hashtag choisi.
Enfin le community manager (le porte-parole de l’application) se doit d’être exemplaire pour fidéliser et conquérir de nouveaux utilisateurs. C’est un des outils de croissance principal des jeunes start-ups, et il est gratuit. À la différence des grandes entreprises qui l’utilisent davantage comme un système de SAV, le CM est un rôle clé de la communication puisque il est capable d’interagir directement avec les utilisateurs par le biais des réseaux sociaux. Si cette gestion peut prendre du temps, certaines plateformes comme Mailchimp permettent également d’automatiser le mailing à bas coûts.
Communiquer, c’est bien. Gagner de l’argent, c’est mieux.
Un point commun chez toutes les start-up à succès du digital : le recours au growth hacking. En d’autres mots, le « détournement de la croissance ». Ce sont des manières créatives d’accroître le nombre d’utilisateurs, de les pousser à lire, ou encore à signer un contenu, en dépensant le minimum de budget. Hotmail a par exemple inclus la proposition de parrainage (moyen principal d’adhésion au réseau) directement dans l’e-mail. Avec son son “PS : I love you. Get your free e-mail at Hotmail », l’entreprise s’est ainsi démarquée de toutes les autres boites mail du marché et en est devenu le leader en 1996.
Mais Andy Johns, chez Facebook, reste le maître incontesté du growth hacking. Après avoir réuni une « équipe de croissance », testé de nombreuses idées et récolté les impacts de chacune d’entre elles sur le nombre d’adhérents Facebook, Johns et son équipe ont trouvé le hack le plus efficace. C’était le système du badge personnalisé (à l’effigie d’un drapeau, d’un site internet, d’une marque…) que l’utilisateur pouvait afficher sur sa photo de profil.
Une fois le public ciblé atteint, plusieurs options s’offrent au développeur, en fonction de la nature de son application. Le mode freemium, avec des options payantes dans une application gratuite (comme par exemple les modes « hard » de défis avec Honi), peut permettre d’engranger des bénéfices. Plus infaillible peut-être : créer une demande chez l’utilisateur, à laquelle l’application peut répondre. Pour Honi, le lancement prochain de lots d’accessoires, nécessaires dans certains défis et que les utilisateurs ne possèdent pas, constituera une source de revenus certaine.
Le système du drop shipping² semble alors une évidence : le client passe commande au commerçant, lequel transmet celle-ci au fournisseur qui gère les stocks et assure la livraison. Le commerçant ne conserve donc aucun stock. C’est un système gagnant-gagnant, qui fournit des clients aux grossistes et permet au développeur de l’application de rester dans un circuit complètement digital, à l’instar d’Amazon.
Quant à la publicité, elle reste un moyen efficace de rentabiliser un contenu. Mais sur une application, elle est rapidement intrusive et risque de faire fuir l’utilisateur. L’application peut donc prendre la forme d’une place de marché³, pour mettre en relation des utilisateurs avec des services ou des biens payants, tout en prélevant une commission. Honi a par exemple créé une « carte de l’amour » où les couples s’échangent les bons plans à proximité (activités, restaurants). À terme, l’objectif serait de pouvoir réserver directement via l’application, qui prélèverait une commission.
Le m-commerce (ou commerce sur mobile) représentait 10 % du e-commerce en 2015 en France, soit 6 milliards d’euros, avec une forte progression par rapport à 2014 (+50 %). Le format digital offre des possibilités de développement uniques et peu coûteuses.
Louise Cordier
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Index:
¹ UDEMY : https://www.udemy.com/
² Drop shipping : https://fr.wikipedia.org/wiki/Drop_shipping
³ Place de marché : Espace virtuel de rencontre entre l’offre et la demande
Crédits :
– Application honi sur le site d’apple : screens – PHOTOS 1 et 2
– Wikipedia : image drop shipping : PHOTO 5
– honeytechblog – PHOTO 4
– presswork.me – PHOTO 3
Sources :
• http://bit.ly/2ix4SxF : consulté le 22 décembre 2016
• FIDELMAN Mark, « Meet the Growth Hacking Wizard behind Facebook, Twitter and Quora’s Astonishing Success », Forbes, publié le 15 octobre 2013, consulté le 22 décembre 2016
VR et digital detox : les témoins d'une boulimie 2.0
Le temps, ce nouvel eldorado du XXIe siècle, semble recherché par tous. Je ne vous parle pas du temps qu’il faut transformer en argent, mais plutôt de celui à accorder à soi et à la réflexion. Face à la déferlante des informations, à la sur-sollicitation des médias et des réseaux sociaux, nous disons « stop ».
Néanmoins, une question demeure : comment analyser l’engouement pour la réalité virtuelle* parallèlement à l’envie de déconnexion ?
Infobésité et hyper-connexion : le nouveau mal du siècle
L’infobésité ne date pas d’aujourd’hui mais l’essor des nouvelles technologies de l’information et de la communication accroît le phénomène pour créer une véritable saturation. David Shenk, auteur de Data Smog, ajoute même qu’« au milieu du XXe siècle, on a commencé à produire de l’information plus rapidement qu’on ne peut la digérer. Jamais cela ne s’était produit auparavant. »
Ce terme d’infobésité sous-entend qu’à force d’être confronté à trop d’informations nous nous dirigeons vers l’ignorance. Face à une masse d’information toujours plus grande, il faut sans cesse choisir quel journal lire, quelle radio écouter ou quel JT regarder. Mais paradoxalement, il faut être au courant de tout, alors nous lisons sans vraiment lire jusqu’à nous désinformer. On est ici face à un cas typique de FOMO, l’acronyme de « Fear Of Missing Out » c’est-à-dire la peur de rater quelque chose, une information ou une soirée meilleure que la nôtre par exemple. Alors on se doit de mettre sa vie en scène sur les réseaux sociaux et d’être au courant des dernières news pour paraître « in* ». Ce trouble compulsif de l’époque 2.0 est donc une conséquence directe de l’addiction aux réseaux sociaux et à Internet.
« Le monde est devenu invivable ; on n’a même plus le droit de ne pas être informé ! » Joseph Bonenfant
C’est à peine si nous survolons les grands titres des journaux, histoire « d’être au courant », mais sans connaitre le fond de l’article. Certains diront que faire illusion en société c’est déjà pas mal. D’après Edgar Morin, nous sommes dans « un nuage informationnel » qui nous rend aveugles. Face à la rapidité de la circulation des informations, nous n’avons plus le temps de prendre du recul sur les évènements et les informations délivrées par les médias.
Mais il y a une prise de conscience progressive de cette pression informationnelle dans la société. En effet, le droit à la déconnexion fait parler de lui dans les entreprises tandis que de plus en plus de services se créent autour de la notion de « digital detox » ou de désintoxication numérique, un concept né aux Etats-Unis où l’on se déconnecte de ses écrans pour mieux se reconnecter à soi-même.
Joël de Rosnay, « le grand luxe de demain ce sera d’être débranché… pour prendre simplement le temps de réfléchir. »
Une société de tous les paradoxes : digital detox VS réalité virtuelle
Le temps pour soi et pour la réflexion semble être devenu le véritable enjeu du XXIe siècle dans nos sociétés occidentales où il doit être rentabilisé. Paradoxalement, cette envie de déconnexion se confronte à la curiosité pour le progrès et les nouvelles technologies. Les annonceurs s’emparent du phénomène et quand certains proposent des digital detox, d’autres misent sur la réalité virtuelle (VR) pour satisfaire le consommateur, cet être de contradictions.
Côté déconnexion, les annonceurs rivalisent d’imagination pour réduire cette envie irrationnelle de consulter nos réseaux sociaux toutes les cinq minutes. Dans le secteur du tourisme, des gîtes proposent aux personnes « hyper-connectées » des « séjours digital detox » et même des cures thermales à Vichy. Tout cela bien sûr sans WIFI avec des séances de sophrologie et des coachings personnalisés. C’est un véritable coup marketing pour le secteur qui connaît des difficultés depuis quelques années.
D’autres encore développent des solutions plus radicales pour combattre cette addiction. Le dernier en date se nomme Deseat.me. Ce site internet créé en 2016 par deux suédois permet de disparaître d’Internet. Plus précisément, les utilisateurs peuvent se désinscrire de la plupart des sites et des services associés à leur compte Gmail. Un lien est proposé pour chaque service associé au compte pour permettre de se désabonner, voire de supprimer son compte.
Par ailleurs, les marques s’engagent aussi pour la déconnexion à travers leurs campagnes publicitaires et surfent sur un insight* fort qui parlent à une grande majorité d’individus. En ces périodes de fêtes, Nike rappelle qu’il ne faut pas gâcher son temps sur Internet car il est précieux. Prenez l’air, chaussez vos baskets et sortez courir, le bonheur commence par là.
Les annonceurs semblent avoir trouvé un véritable filon autour de l’envie de déconnexion sur lequel ils peuvent appuyer leurs discours et apparaitre crédibles : volonté sincère ou opportunisme ?
Mais parallèlement, l’engouement pour la VR ne cesse de croître et semble être la solution à l’ennui des consommateurs face à la publicité. Car on l’entend sans cesse, elle est scandée comme la voie à suivre : l’expérience utilisateur mais aussi cliente est posée comme le saint Graal. Quoi de mieux que la réalité virtuelle pour sortir les individus de leur quotidien et lever les freins à l’achat par le test ?
Samsung l’a bien compris en créant le Samsung Life Changer Park avec Magic Garden et Cheil France, un parc d’attraction en VR. Les millennials* sont invités à découvrir le Galaxy S7 et son écosystème du 16 décembre au 2 janvier 2017 sous la nef du Grand Palais. Samsung démontre encore une fois sa capacité à innover entre grand huit, descente en kayak et attaque de zombie à vivre en réalité virtuelle.
Rien ne change, l’individu demeure un être de paradoxes. Fasciné par cette nouvelle technologie tout droit sortie de Matrix, elle effraie aussi par son pouvoir de déconnexion à la réalité. Et si finalement les steaks virtuels étaient meilleurs que les vrais ?
Flore Voiry
Glossaire :
• Réalité virtuelle
La réalité virtuelle (en anglais, virtual reality ou VR) est une technologie qui permet de plonger une personne dans un monde artificiel créé numériquement. Elle ne doit pas être confondue avec la réalité augmentée
• Être « in »
Etre à la mode, vivre avec son temps.
• Millennials
Ils sont 16 millions en France et représentent un tiers de la population active. Nés entre 1980 et 1994, ils ont entre 15 à 34 ans et sont scrutés par les marques comme des consommateurs hétérogènes à toucher à tout prix.
• Insight
Opinion ou attente dominante présente et détectée chez les consommateurs d’un produit qui sert à orienter les discours publicitaires et la politique de commercialisation.
Sources :
• Caroline Sauvajol-Rialland, Infobésité, comprendre et maîtriser la déferlante d’informations, Vuibert, mai 2013
• Sylvie Le Roy « Quittez internet », ladn.eu ; 29/11/2016
• Agnès Rogelet « Suivre une cure de « digital detox » » Psychologies.com; avril 2014
• Cyrille Gandolfo « Vous perdez votre temps sur internet et Nike vous le rappelle », cdusport.com; 13/12/2016
• Marine Couturier « La digital detox, le nouvel attrape-touriste 2.0 ? » Rue89.nouvelobs.com; 30/07/2015
Crédits photo :
1 : digitaldetox.org
2 : VR headset shipments ‘to boom’ in 2016 , Reuters bbc.co.uk, 22 avril 2016
3 : FOMO: Fear of Missing Out, Ria Bakshi; Baysidejournal.com
4 : Gagnez votre Pass VIP pour le Samsung Life Changer Park au Grand Palais; Golem13.fr
Pape François : un pape 2.0
Depuis 2013, le Pape François a métamorphosé la communication du Vatican. Très présent sur les réseaux sociaux, il met en place une véritable stratégie de communication prônant avant tout l’ouverture à tous. Cependant, ses actions digitales ne plaisent pas à tout le monde et les critiques de certains fidèles créent la polémique. Le pape ne deviendrait-il pas un objet marketing ?
Une rock star des réseaux sociaux
Avec près de 27 millions de followers sur Twitter, le pape rassemble une communauté de tous horizons culturels à travers des profils traduits dans toutes les langues et des publications régulières. Chaque occasion est bonne à saisir pour s’adresser à ses fidèles. En effet, que ce soit sur des problèmes économiques et sociaux, comme la crise des migrants en Europe, ou sur des préoccupations plus religieuses telles que l’Avent, le pape s’exprime assidûment, ce qui s’apparente à une authentique stratégie de fidélisation.
À travers cette hyper-activité médiatique, le pape François confirme vouloir être « le pape des temps modernes », celui qui aura su réconcilier l’Église avec l’époque médiatique. Un pape connecté : ça, c’est nouveau !
Notons également que suite à la création de son compte Instagram en mars 2016, le pape a organisé une rencontre officielle avec le fondateur de ce réseau, Kevin Systrom. Entrevue inattendue pour le jeune PDG, mais aussi pour certains des membres de l’entourage du pape François, déroutés de recevoir la magnat médiatique au Vatican.
Le 24 janvier dernier, lors de la Cinquantième Journée Mondiale des Communications Sociales, le pape à souligné que la communication est le meilleur moyen de propager la miséricorde, valeur essentielle pour le Vatican. Avec une rhétorique puissante telle que « L’amour, par nature, est communication, il conduit à s’ouvrir et non pas à s’isoler. », il développe petit à petit une stratégie nouvelle : celle de la communication 2.0. Une communication qui rapproche plutôt qu’isole et qui doit être au service de la communion : « En tant qu’enfants de Dieu, nous sommes appelés à communiquer avec tous, sans exclusion ». Il en donne ainsi l’exemple en s’intégrant pleinement aux différents canaux de notre ère médiatique. Ainsi, « tous » ou encore « union », termes qui prônent le rassemblement, reviennent de très nombreuses fois au sein de ce discours qui a marqué les esprits.
Un pape « populaire » qui ne fait pas l’unanimité
Face à cette omniprésence du pape sur les réseaux sociaux, les fidèles les plus récalcitrants à une communication digitale introduisent le débat suivant : un pape populaire est-il légitime ? C’est en effet de « populaire » et « populiste » qu’est qualifié le pape François par certains catholiques. L’idée d’une Église ouverte à tous agace une partie de sa communauté qui se sent délaissée, ayant l’impression de ne plus être le cœur de cible. À vouloir parler aux foules, le Pape ne s’éloigne t-il pas de ses fidèles ? L’hyper-activité médiatique n’est-elle pas néfaste à long terme ? À force de s’exprimer sur une pléthore de sujets, le pape pourrait perdre de son autorité et de son éloquence. Ainsi, un groupe catholique dénonce avec virulence sur Internet celui qu’ils appellent le « pape des masses » ou « pape du spectacle ».
Pape François, un produit marketing ?
C’est précisément cette notion de spectacle qui revient souvent dans la bouche des journalistes. Car , en plus du mécontentement d’une frange de sa communauté catholique, les journalistes et les médias le prennent également pour cible. Tantôt traité de pape « ultra-mondain » tantôt « d’idole virtuelle », la révolution communicationnelle du pape François est sans cesse remise en question. Il est accusé d’être un produit marketing et de mettre en place un culte de la personnalité afin de promouvoir sa religion.
Ces accusations bien que sévères, s’appuient sur de réels arguments.
En effet, le personnage du pape François est mis en avant sur la scène médiatique — rien d’exceptionnel si l’on considère les portraits presque divins de ses prédécesseurs — mais il se retrouve souvent là où on ne l’attendait pas. En février 2014, on le voit par exemple à la une du magazine Rolling Stone. Cette une plus qu’étonnante pour un homme d’Église a d’ailleurs été jugée grossière et honteuse par certains, quand d’autres la saluèrent. Ainsi, bien qu’il soit sans cesse critiqué et accusé de vouloir développer sa marque, le pape François a eu le cran d’intégrer l’Église catholique dans l’ère du numérique. Un effort à saluer quand on connaît la rigidité des protocoles pontificaux.
Steffi Noël
Sources :
• FAURE Mélanie, « Le pape François, roi de la communication digitale » Le Figaro. Publié le 16/03/2016. Consulté le 01/12/16.
• Message du Pape François pour la 50ème journée mondiale des communications sociales. Site officiel du Vatican. Publié le 24/01/16. Consulté le 04/12/16.
• TIBERI Jacques, « François, Pape de la com’ ? » J’ai un pote dans la com. Publié le 29/09/16.
Consulté le 01/12/16.
• DUCHATEAU Jean-Paul et VAN DIEVORT Charles, « Le pape François fait-il surtout du
marketing? » Lalibre. Publié le 31/01/14. Consulté le 04/12/16.
• CESARI Paulin, « Le pape François est-il devenu un produit marketing ? » Le Figaro. Publié le 13/03/2014. Consulté le 03/12/16.
Crédits :
© REUTERS/ Osservatore Romano photographe pour sputniknews.com Twitter
@Pontifex_fr Une du Rolling Stone, Février 2014
Animaux de tous les pays, connectez-vous !
Les animaux : ils sont différents et uniques à la fois, incroyables, mignons, sauvages… On aime les découvrir dans 30 millions d’amis, les observer devant un documentaire d’Arte, jouer avec eux sur Nintendogs ou Angry Birds… Mais aujourd’hui, nos propres animaux prennent le relai et deviennent de nouveaux consommateurs !
Depuis un peu plus d’un an un nouveau marché émerge : applis, chaînes de télévisions dédiées… Bien loin des rayons jouets et autres salons ou concours dédiés, nos boules de poils passent désormais au numérique. Non épargnés par la vague des objets connectés, ils en possèdent eux aussi un certain panel. Vous pourrez par exemple discuter et distribuer des friandises à distance à votre chien avec Petchatz, une sorte de boitier mural équipé d’un petit écran. Dans le même esprit, PetCube, une application mobile, vous permet d’observer votre compagnon pendant votre absence et d’interagir avec lui. Inspiré du bracelet connecté, le collier Voyce vous donne des informations sur la santé de votre chien et sa condition physique.
Spontex, Cif, Mir … Des campagnes qui déménagent !
Il fallait bien un jeu de mot aussi subtil et comique que celui-ci pour parler d’un sujet aussi grave et terrible que les campagnes publicitaires des marques de produits ménagers. Car oui, c’est tout à fait dramatique d’allumer son poste de télévision pour assister, une fois de plus, à une énième pub au cheap repoussant comme celle-ci :
NON
Non, non, non, ce n’est plus possible. Vanish et les taches qui s’évanouissent comme par magie devant nos yeux, précédées d’une scène scolaire d’un kitsch sans nom. Non, vraiment, ce n’est plus possible.
Fort heureusement, quelques-unes de ces marques ont compris que s’inscrire dans un secteur hyper concurrentiel comme celui des produits d’entretien implique un minimum d’inventivité pour se faire remarquer. Voici donc une sélection de publicités qui nettoient pour notre plus grand bonheur les codes publicitaires propres à cette douce catégorie qu’est le produit ménager.
Un humour décapant : Cillit Bang – The Mechanic (BETC – janvier 2016)
Qui n’a jamais fait son ménage en musique ? Ce spot d’une grande ingéniosité montre qu’il est tout à fait possible de montrer l’efficacité du produit avec style. Dès le début, le générique et les couleurs nous indiquent que nous avons affaire à un véritable court-métrage. Un charmant Apollon, le danseur Daniel Cloud Campos (notons que la représentation « Homme + Ménage » est encore peu courante dans les publicités) se voit alors attribuer une mission, qu’il accomplira sur une chorégraphie dingue, tout en écoutant une musique entêtante et absolument connue de tous. On peut dire que BETC a réellement cassé le moule des publicités habituelles de ce genre de produit. Le site de l’agence stipule que les créateurs du spot se seraient inspirés de cette vidéo farfelue devenue virale sur les Internet. Quoi qu’il en soit, il est clair qu’avec The Mechanic, l’agence a absolument rajeuni, modernisé et glamourisé l’image de Cillit Bang.
Mais aussi :
– Dish Therapy – Tattoo (2015 – Grey Argentina)
– Wahou de Spontex (2001 – TBWA)
L’originalité par l’évènementiel : Mir Restaurant (octobre 2015 – Ubi Bene)
Partir sans payer au restaurant est désormais possible grâce à Mir. Enfin… à condition de faire la vaisselle ! L’agence Ubi Bene a en effet proposé un concept original : rebaptiser un restaurant parisien Mir Restaurant, qui a proposé durant 3 jours à ses clients de déjeuner ou dîner gratuitement s’il lavent leurs assiettes. L’objectif de cette campagne étant de promouvoir une gamme de différents parfums de produits vaisselle, les clients du restaurant ont donc pu à la fois vivre une expérience amusante et agréable, puis tester les produits Mir. Un site internet (www.mir-restaurant.com) ainsi qu’un #MirRestaurant ont été mis en place pendant la durée de l’opération.
Mais encore :
– Cif efface le racisme des murs roumains (2014 – McCann)
Des campagnes interactives axées sur le digital : Ajax nettoie votre Facebook (janvier 2014)
Pour mettre en avant ses nouvelles lingettes Spay n’Wipe en Australie, Ajax propose de résoudre un des grands maux du siècle : effacer spams et faux-comptes résultant de nos likes et follow compulsifs sur nos réseaux sociaux préférés Facebook et Twitter. Pour cela, il suffit de se connecter au site http://www.ajaxsocialwipes.com, de sélectionner les pages honteuses ou inutiles dont nous voudrions nous débarrasser, et en un coup de lingette magique, Ajax fait notre bonheur ! Une campagne digitale cocasse, qui prolonge l’expérience de marque par le digital. La publicité semble avoir eu de bonnes retombées : « 200 000 personnes s’étant désabonnées à des pages Facebook et 20 000 à des ‘bots’ (faux comptes automatisés) sur Twitter, une semaine après le lancement de l’opération » (source : Vanksen).
Mais aussi :
– Le Compte Twitter le plus propre de Spontex (2015 – Kids Love Let Lag / Fred & Farid)
Comme souvent en publicité, l’originalité et la créativité sont essentielles pour sortir du lot. Ces exemples montrent que prendre du recul par rapport aux codes publicitaires du secteur marchand auquel la marque appartient est possible et permet une refonte de l’image très positive.
Mathilde Dupeyron
LinkedIn
Sources :
– Matthieu Hoffstetter, Bilan.ch, « Mir propose de payer son restaurant en faisant la vaisselle », 22 Octobre 2014, http://www.bilan.ch/economie-plus-de-redaction/mir-propose-de-payer-restaurant-faisant-vaisselle
– Site de l’agence Ubi Bene, « Mir vaisselle et Ubi Bene créent le premier restaurant où l’on paie… en faisant la plonge! », http://ubi-bene.fr/blog/2014/10/20/mir-vaisselle-et-ubi-bene-creent-le-premier-restaurant-ou-lon-paie-en-faisant-la-plonge/
– La Réclame, « Produits ménagers : pubs et campagnes de communication », http://lareclame.fr/produits+menagers
– ComGom, « CIF supprime les graffitis racistes de la Roumanie », 07 juin 2014, http://com-gom.com/2014/06/07/cif-supprime-les-graffitis-racistes-roumanie/
– Helene Bourgois, BETC Pop, « Cillit Bang, ou quand le ménage devient une partie de plaisir », 04 janvier 2016, http://betcpop.com/2016/01/04/cillit-bang-ou-quand-le-menage-devient-une-partie-de-plaisir/
– Solange Derrey, Blog de l’agence Vanksen, « Ajax nettoie même vos réseaux sociaux ! », 28 janvier 2014, http://www.vanksen.fr/blog/ajax-nettoie-meme-vos-reseaux-sociaux/
Crédit image :
www.Adweek.com
(1) Nouveau message de Dieu
Non, ceci n’est pas une énième intervention des témoins de Jéhovah, je ne chercherai pas à influencer un quelconque point de vue religieux, j’ai bien trop peur de toute représaille miraculeuse. Mais parce qu’aujourd’hui religion rime avec communication, il semble que la modernité technologique touche directement la foi. Nos réseaux de partage se présentent alors comme un outil éminemment pertinent dans une logique de mise en relation, d’échanges et même d’évangélisation. Mais est-ce toujours en accord avec l’éthique inculquée par la morale religieuse souvent basée sur la discrétion ? Tour d’horizon des cieux 2.0.
I believe i can tweete
Sœur Nathalie Becquart, spécialiste des réseaux sociaux pour l’Eglise de France, affirme que ce serait dans la nature de la religion catholique de communiquer, Dieu étant trinitaire donc communication en Lui-même. Les versets courts de la Bible, sont parfaitement appropriées et adaptables aux modalités d’expression propre à Twitter.
Hervé Giraud, 54 ans, décrit son métier d’évêque comme le fait « d’annoncer l’Evangile et de le commenter ». Très actif sur le réseau social, ses « tweet-homélies » nourrissent ses 1091 fidèles followers. « Autrefois, on était sur la place publique, aujourd’hui il faut habiter l’arène numérique », explique Monseigneur Giraud. « L’idée est de semer une goutte spirituelle sur les réseaux sociaux, en proposant une pensée incisive, incitative mais pas impérative. »
Le débat fut le même pour le media prédécesseur d’internet, la télévision. Si regarder la messe par retransmission télévisuelle était d’abord destiné aux personnes invalides et malades, aujourd’hui cela touche bon nombre de croyants . A ce sujet, le pape Benoît XVI était clair : “… celui qui assiste à ces retransmissions doit savoir que, dans des conditions normales, il ne satisfait pas au précepte dominical. En effet, le langage de l’image représente la réalité, mais il ne la reproduit pas en elle-même. » (cf. Exhortation post-synodale sur l’Eucharistie, 2007).
Si Benoit XVI pouvait apparaître quelque peu archaïque dans sa réticence au monde 2.0, il n’en est pas de même pour le dit évolutionniste François. Quand Benoît XVI prônait le silence et le recueillement pour une communication réussie, le nouveau pape accueille avec bienveillance ses alliés Facebook et Twitter qui participent amplement à sa popularité actuelle. François, de son nom twittos @pontifex, s’adonne donc à l’apprentissage de ces nouveaux langages dans une perspective d’innovation. Oubliez Pôle Emploi et postulez au poste de Community Manager pour le Vatican, il paraît que ce domaine est en pleine expansion.
St Facebook, priez pour nous
Les réseaux sociaux sont donc le fer de lance de la Nouvelle Evangélisation. Ils permettent aux croyants de se réunir, de s’exprimer et de se confier sans contrainte.
L’avenir est aux réseaux sociaux dans leur dimension communautaire, d’ou la multiplicité de groupes Facebook pour des événements comme les Journées Mondiales de la Jeunesse (JMJ) qui réunissent à ce jour plus de 120 000 membres. Les réseaux sociaux s’affichent aussi comme le support idéal pour partager des causes qui tiennent à cœur, le sort des Chrétiens d’Orient par exemple, en mettant en photo de profil le symbole du noun par solidarité chrétienne.
Tout comme le fameux #PrayforParis avait suivi la mise en place d’une photo de profil aux couleurs du drapeau français. A ce propos nous avons interrogé Domitille, jeune croyante catholique connectée : « Evidemment, on est sur des groupes de prières, c’est un peu le mode 2.0 pour se retrouver, et oui on participe à des événements via Facebook (messe des Etudiants à Notre-Dame de Paris, JMJ, messe en l’honneur de quelqu’un en particulier, etc), cela permet de lier l’utile à l’agréable. On peut également suivre des blogueurs cathos (du type Koz Toujours, Padreblog) qui ont souvent des pages Facebook, ou des assos religieuses. Les cathos sont des jeunes comme les autres, et donc utilisent les réseaux sociaux comme les autres. Le monde se modernise, et la religion s’adapte du coup ».
Catho Style par Spi0n
Dieu débarque également dans votre AppStore, avec notamment cette toute dernière application Hozana. Comment ça, vous ne connaissez pas ? Cette application chrétienne se donne pour vocation d’utiliser le web comme un réseau de prières.
Une autre application se distingue sur le web : Praywithme.com qui permet de donner des prières et d’en recevoir à travers le monde entier.
On pourrait également évoquer concernant la religion musulmane, les divers groupes de soutien pour le Ramadan. Car si les savants religieux préfèrent les canaux de communication traditionnels, les mises en réseaux de musulmans sont multiples. Tout comme le catholicisme, l’islam s’est d’ailleurs clairement développée avec les réseaux sociaux, elle incarne d’ailleurs d’autant plus l’avant-gardisme de la pratique de la foi concernant l’utilisation d’internet. A cet effet, UmmaUnited, le réseau social premium du monde musulman se présente comme « une fenêtre ouverte sur l’universalité fraternelle », selon Zouhair Amri son cofondateur. On y trouve aussi bien des groupes de travail, de discussions en ligne, que des vidéos de recherche d’emplois, de logements mais aussi… des plateformes pour trouver l’âme sœur ! Ce qui distingue ce réseau de Facebook ou Twitter est son caractère confidentiel : les écrits et photos sont garantis non visibles sur les moteurs de recherche. Cette discrétion plaît aux musulmans connectés car elle est en accord avec le principe de réserve de l’éthique religieuse musulmane.
Au final, il semblerait que les réseaux sociaux représentent tout de même des outils de l’immédiateté tandis que la religion au contraire prône la prise de temps, la maturation.
Pourtant selon Sœur Nathalie Becquart, un phénomène contraire aux préjugés est à observer : plus on utilise ces outils, plus les gens sentent qu’il faut remettre de l’incarnation. La visée de ces contacts virtuels reste donc la rencontre en direct en amont ou en aval. On te laisse le temps de méditer tout cela. En attendant, lève toi et tweete.
Ségolène Montcel
Sources :
Geneviève Delrue. « Les religions et les réseaux sociaux », in RFI, mis en ligne le 16/12/12
Stéphanie Le Bars. « Les tweets-homélies de Mgr Giraud, évêque de Soisson », in LeMonde, mis en ligne le 23/12/11
Pray with me
« L’appli Hozana – Coming soon, prie avec tes amis ! »
Crédits images :
http://ethique-tic.fr/2013/habemustweetum/index.html
https://www.bakchich.info/international/2013/06/07/arabie-saoudite-twitter-c-est-perdre-son-ame-62497
Spiritualité 2.0 : les médias sociaux une nouvelle religion? Mange-réseaute-aime!