Always
Publicité et marketing

#Commeunefille : Quand le féminisme fait vendre !

 
Face caméra, on demande à de jeunes gens (femmes, hommes, enfants) de courir, frapper, jeter la balle “comme une fille”. La réponse se traduit par des mouvements caricaturés, ridicules et exagérés. En revanche, la même demande est formulée à de petites filles, qui, elles, affranchies de toute idée préconçue, ne décèlent pas le côté péjoratif et se comportent tout à fait normalement.

Always a fait le choix d’une campagne publicitaire choc, à contre sens des stéréotypes qui sont généralement plus fréquents et même plus tolérés dans les publicités. Les traits sont souvent appuyés et les rôles sociaux conservés afin de correspondre à l’univers du consommateur.
Ici, la marque de produits féminins sent le changement de pratiques et des mentalités et se veut en rupture une fois pour toute  avec l’image négative accolée au mot “fille” dès qu’il s’agit de compétences ou exploits particuliers. La vidéo souligne le fait que ce sentiment d’infériorité finit par se distiller dans l’esprit des jeunes filles et se traduit par une perte de confiance en elle dès la puberté.
C’est sur ses valeurs égalitaires que la marque Always mise pour booster ses ventes de serviettes hygiéniques et s’offrir une image d’une entreprise responsable et attentive aux droits et au statut de ses consommatrices.
Même si le message véhiculé est louable, on pourrait se demander s’il appartient à des entreprises de les endosser et de les promouvoir, leur objectif étant, en fin de compte, purement commercial. Dove avec sa campagne Oneslaught (voir vidéo ci-dessous) avait suscité le même engouement et avait de ce fait réussi un beau coup de communication.

De la même manière que des entreprises peuvent miser sur des publicités provocantes, voire sexistes, d’autres comme Always prennent le contre-pied. Néanmoins l’objectif reste le même, celui de gagner en notoriété auprès de ses consommateurs et de susciter le plus de réactions. Cette vidéo peut être considérée comme une opération réussie. Déjà 2 millions et demi de vues comptabilisées sur Youtube, en plus de plusieurs reprises sur de nombreux sites d’information et de divertissement.
Par ailleurs, si l’initiative a été largement appréciée, quelques internautes mécontents se sont tout de même exprimés, la vidéo pour eux ne faisant qu’appuyer des clichés, ne traitant uniquement d’exploits physiques et ne posant pas les bonnes questions.
Qu’elle utilise l’ironie, l’humour, ou la sensibilisation, la publicité révèle quelque chose de nos sociétés. L’égalité homme/femme, entre revendications et acquis, reste au cœur de la nôtre.
Salma Bouazza
Sources :
Slate.fr
Lesechos.fr

Vanish
Publicité et marketing

Une communication sans éclat

 
Après avoir vu la dernière publicité de Cif, j’ai un petit ras-le-bol sur l’industrie des produits ménagers et sa communication pas forcément sexiste, mais assurément monotone et sans surprise. Que raconte la dernière pub de Cif ? La marque a repris son style publicitaire axé sur le conte, ici La Belle au bois dormant, qui attend son prince charmant. Et ô malheur ! Le château est sale ! Elle ne peut décemment accueillir son homme dans ces conditions. Heureusement, grâce à Cif, en peu de temps le château retrouve son éclat. Ainsi, elle peut enfin recevoir son baiser… En 2012, une pub de la marque avait suscité certaines réactions négatives. Elle nous racontait l’histoire d’un chaudron que personne n’arrivait à nettoyer. Aucun homme ne trouvait le moyen idéal pour réaliser cette tâche. Jusqu’au jour où un mystérieux chevalier réussit l’inconcevable. Ce chevalier était une femme…

Un discours figé dans le temps
On peut parfaitement comprendre que ces marques cherchent à cibler un public féminin car même si les mœurs ont considérablement évoluées, il n’en reste pas moins que la majorité des tâches quotidiennes, comme les courses ou le ménage, sont réalisées par des femmes. Pourtant, cela ne doit pas signifier une communication sans originalité. Je ne défends pas l’idée d’une publicité qui mettrait la femme sur un piédestal, mais une publicité différente, originale. On voit sans cesse les mêmes mises en scène, les mêmes messages. Les pubs pour les produits ménagers en deviennent sans saveurs, prévisibles. On ne compte plus le nombre de spots qui nous montrent des femmes qui n’arrivent pas à enlever des tâches de gras sur un t-shirt ou à garder le noir étincelant de leur haut préféré, jusqu’à ce qu’elles découvrent Le produit miracle. Et ne nous attardons pas sur les doublages absurdes (quand ce n’est pas le doublage, c’est le ton adopté par les acteurs qui est risible) et les messages aseptisés véhiculés par ces marques. Il existe quand même un article de 2008 sur Buzz mode d’emploi, où l’on se plaint déjà de ce manque criant d’innovation !
Le rôle de la publicité semble paradoxal, elle veut nous en mettre plein la vue tout en s’effaçant. On doit oublier que l’on est devant une publicité. Or, avec la plupart des publicités de produits ménagers, c’est le contraire qui s’opère. On est gêné car on a l’impression d’être pris pour des ahuris. Qui, sérieusement, parle ou se conduit au quotidien comme dans une publicité de Vanish ?
Innovez !
Du coup, quand une publicité de ce secteur utilise un modèle différent, c’est un vent de fraîcheur qui souffle sur nous. On peut prendre l’exemple de la pub de Paic, avec son slogan « Adieu la graisse ! », et son format publicitaire qui ressemble à un dessin-animé. Une pub asexuée qui permet au moins d’éviter toute accusation de sexisme. C’est différent, c’est drôle, agréable à regarder. On n’en demande pas beaucoup finalement. Et pourquoi ne pas s’inspirer également des publicités qui donnent une image différente de la femme au foyer ? Décathlon avec un homme sauvé de l’attaque d’un requin par une femme, Volkswagen sur les super-héroïnes du quotidien ou encore Renault et l’histoire d’une société qui évolue.
On attend encore des publicités où la femme n’affichera pas uniquement un sourire béat devant son linge propre, tout en exhibant fièrement sa lessive préférée. La publicité est le milieu par excellence de la création. Il est temps que cette caractéristique s’applique enfin au domaine des produits ménagers.
Pierre-Yves Halin
Crédit photo : Vanish detergent « Removes grease stains » 2009, Agency : Euro RSCG Warsaw (Poland)

Publicité et marketing

Numericable : bad buzz for good business ?

 
Il est là, le tout premier buzz de cette jeune année 2014. C’est l’opérateur et fournisseur d’accès Numericable qui l’a créé en présentant le lundi 6 janvier dans le quotidien 20 Minutes sa nouvelle campagne de publicité à l’humour douteux et qui, surtout, flirte avec le sexisme.
Pour commencer l’année… une pub aux frais des femmes !
Afin d’inciter ses consommateurs (qu’apparemment Numericable ne jugerait qu’être masculins) à choisir sa fibre optique de haut débit, le câble-opérateur joue d’une manière osée sur les clichés de genre. En effet, en adoptant la fibre optique (fournie par le leader du marché auto-proclamé) Numericable promet : « Téléchargez aussi vite que votre femme change d’avis ». Un énoncé périlleux qui a immédiatement déclenché une vague d’indignations et qui s’est vu fortement discuté sur Twitter.

Même Le Petit Journal s’est emparé de l’actualité pour railler à sa manière les créateurs de cette pub à caractère misogyne.
Le basculement: les hommes « soudainement » mis à l’honneur
Plus tard dans la journée, Numericable présente sur son compte Twitter « en avant-première » la suite de la campagne « que vous pourrez retrouver en version papier dès mercredi ». Cette fois-ci, la fibre Numericable permettra de « télécharge(r) aussi vite que votre mari oublie ses promesses » et ce sont donc maintenant les hommes dont on se sert pour tenter de faire rire.

Pourquoi une publicité en deux temps ?
Pourquoi Numericable n’a-t-il pas publié ces deux annonces en mêmes temps ? On peut y voir deux théories : si l’on en croit l’opérateur, cette campagne serait le fruit d’une stratégie de communication réfléchie, misant sur le buzz et l’indignation de sa première pub pour pouvoir ensuite lancer la deuxième contre-affiche, cette fois-ci en se moquant des hommes. En agissant ainsi, Numericable a de toute évidence cru bien faire bien faire et être équitable. Sauf que la parité dans le sexisme, ce n’est pas mieux que le sexisme en soi, mais le même principe : l’un comme l’autre reste dégradant, terriblement stéréotypé et surtout ennuyeux. Car faire de la publicité en jouant sur les clichés hommes-femmes n’est pas vraiment novateur, c’est avant tout un concept publicitaire archaïque et dépassé… surtout en 2014.
C’est en cela que l’autre théorie, celle du rattrapage de dernière minute, reste pour beaucoup la plus plausible comme en témoigne ce tweet :

Cela paraît surtout suspect du fait que Numericable ait prétendu auprès de la presse que « ce deuxième volet était prévu », mais sans pour autant vouloir en apporter la preuve ni fournir davantage d’explications.
Un véritable « bad buzz » ?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette polémique a été inefficace pour le fournisseur d’accès à Internet. Au contraire, Numericable a réussi à faire (beaucoup) parler de lui et cela sans grand renfort d’investissements publicitaires (se cantonnant seulement à une annonce dans le 20 Minutes et une deuxième sur Internet). Tous les médias ont voulu sauter sur l’occasion pour informer leurs lecteurs de cette publicité révoltante, et ils se sont même quasiment trouvés « contraints » de continuer de publier des articles à propos de la suite que prenait cette campagne. Comme l’illustre cette accroche commerciale « deux articles pour le prix d’un », Numericable aura donc à la fois profité du buzz ainsi que de la réinterprétation de son message. Des points de vue communicationnel et économique, une tactique plutôt maline, même si celle-ci n’était probablement pas réfléchie.
Morale de cette histoire ?
Cette communication est sans doute osée mais elle l’est surtout dans un contexte où le Gouvernement français a comme objectif de lutter contre le sexisme sur le Web et où l’Assemblée Nationale travaille sur l’égalité hommes-femmes dans la société. Eventuellement aussi une raison pour laquelle cette campagne fait tant parler d’elle.
Quoiqu’on en dise, une chose est sûre : si l’objectif de toute campagne est de faire parler d’une marque, celle-ci risque d’être une nette réussite pour Numericable. En revanche, si on en parle bien, c’est une autre question.
Teresa Spurr
Sources :
Leplus.nouvelobs.com
L’Express
Le Point
Le Huffington Post
Numerama.com
Canalplus.fr
assemblee-nationale.fr