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Médias

Au Tele-catching, j’attribue la note de 10.

Adieu veau, vache, cochon, couvée…
« Quelles scènes si on annonçait demain la fin du monde » se lamentait Paul Léau-taud déjà plein d’inquiétudes au milieu du siècle dernier. Et que n’avait-il pas prévu. La fin d’un monde…D’un véritable phénomène de société… D’une brèche lucrative pour la chaine… D’une émission de téléréalité culinaire pour gourmets, heureux d’en reproduire le concept à la maison et de près de six ans de loyaux services…La fin d’un Diner presque parfait sur M6 inauguré un 11 février de l’an 2008, clôturée le 4 avril dernier.
L’émission qui mettait en compétition des cuisiniers passionnés du lundi au vendredi à 17h40, quelque fois rediffusée sous une version condensée en troisième partie de soirée et qui était parvenue à attabler le non moins raffiné Francis Lalanne, laisse derrière elle d’innombrables spectateurs affamés, une quantité considérable de produits dérivés et, surtout, une part de marché à prendre ou à laisser.

Une tendance presque imparfaite
A la suite de M6, qui a lancé la tendance avec son Diner presque parfait, c’est TF1 qui a repris la chandelle pour proposer une déclinaison surprenante d’émissions de compétition, voulues bien plus acharnées, qui se positionne entre les jeux et les docu-réalité d’autant plus divertissants que le mauvais esprit des participants y est manifeste. Quelques choix stratégiques, des contradictions dans les jeux des participants, passées inaperçues et une mauvaise foi sagement dosée sont les savoureux ingrédients de ces nouvelles émissions qui occupent l’espace télévisuel, constitué en ring, pour nous distraire. En somme, des scènes de chicane amusantes entre candidats séduits par la promesse d’une formidable couverture médiatique et par des gains allant jusqu’à 3000 euros et qui prolongent à des reliefs bien plus cruels et alléchants l’art du télé-catching.
Du divertissement au théâtre de la cruauté

Voila un mythe tout naturel, la vertu purgative d’un spectacle de catch et qui exige une lecture immédiate de la part du spectateur. Des moments qui se lisent indépendamment, animés par une passion. Tels sont les mots de Barthes dans ses Mythologies. Une question demeure : Que demande le peuple ? L’authenticité de ces passions assurément. Il en réclame l’ostentatoire, la mécanique cruelle. En rejetant jusqu’à la pudeur des situations d’affront : Le télé-catching, un tele-coaching compétitif et hargneux.
Ces émissions dévoilent par des plans confession la fausseté des participants et leur rivalité ultime dans une compétition pour décrocher le titre du meilleur d’entre tous. Dans le sas d’un confessionnal, pareil à un ring de catch lors d’instants debriefs, l’hypocrisie est affichée impunément regard caméra pour justifier l’attribution des mauvaises notes qui détermineront le podium final. Le divertissement réside principalement dans la prise à témoin du spectateur qui s’amusent du combat de coqs malheureux d’un divertissement pris au sérieux par des candidats déterminés à gagner.
La tendance du tele-catching, bien marquée sur nos chaines nationales de télévision n’est pas sans rappeler d’autres programmes, pour la majorité anglo-saxons. Actuellement, la tendance est à la mise en compétition des méthodes éducatives de mères de famille tantôt désignées comme « maman maniaque » tantôt comme « maman laxiste » ou encore « maman sévère » sur D8. La démonstration d’une véritable comédie humaine où s’engendrent petites railleries, infamies, jugements et mauvais esprit semblent plus vrais que nature, et le caractère spectaculaire des émissions, au lieu de sevrer un public affamé, se changent en de véritables points de focalisation qui concentrent une attention toujours grandissante.

Après Quatre mariages pour une lune de miel, une émission qui mettait en compétition des mariages de couples modestes au même plan que des mariages de grands bourgeois et qui recevaient lors de l’attribution de la note, des commentaires méprisants tels « ça fait cheap » ou encore « je me suis cru à une kermesse », des candidats au sommet d’une médisance injustifiée et du conflit, oeuvrant librement sur le PAF, se prêtent à une indigne mascarade relayée par des restaurateurs dans L’addition s’il vous plait, des propriétaires de chambres d’hôte ou de camping, et plus récemment des propriétaires d’établissements hôteliers dans Bienvenue chez nous, orchestrent une partie conséquente de la programmation télévisuelle.
Une tendance qui s’inverse ?
La chaîne M6 a fait le deuil de son programme record Un diner presque parfait (dont on espère la reprise annoncée en Janvier 2015) en mettant l’accent sur un panel de magazines de tele-coaching bon enfant incarné par le chef étoilé Cyril Lignac, Bruno Cormerais et Gontran Cherrier pour La meilleure boulangerie de France. Cristina Cordula et ses Reines du shopping raffle l’audience avec plus récemment l’emission du chef Philippe Etchebest Objectif top chef. Une tendance qui s’inverse sur la chaîne dont les programmes tentent de s’inscrire dans la feel good tv.

Certes la compétition est toujours à l’honneur dans ces émissions, Cependant, on remarque bien l’existence d’un jury choisi pour transiger, et dont certaines tranchent avec les émissions de tele-catching de la chaine concurrente. Et l’objectif est précisément de mettre les savoir-faire en compétition et non pas les individus, et d’offrir à la fois un divertissement sympathique et des conseils de professionnels.
L’émission Objectif Top Chef, dans laquelle le chef doublement étoilé Philippe Etchebest sillonne les routes de France à la rencontre de soixante apprentis cuisiniers, les mettant à l’épreuve dans l’objectif de sélectionner les plus talentueux pour le concours professionnel Top Chef, fête ses premières semaines de diffusion et devient le nouveau leader des émissions culinaires. Témoins d’une compétition journalière d’apprentis passionnés, telle une série TV où l’on suivrait le quotidien de plusieurs personnages, la conception de la compétition sur la chaine découle d’une volonté particulière de valoriser des participants et peut-être aussi, d’attendrir et de mettre en concurrence non pas des individus mais des savoir-faire sinon réels du moins télégéniques.
Johana Bolender
@johbolen
 
Sources:
m6.fr
huffingtonpost.fr
wikipedia.org 1 & 2
Crédits images:
cdn.im6.fr
videoteque.cnrs.fr
canalvie.com
huffpost.com
Nouveautes-medias.com
nouveautes-tele.com

Agora, Com & Société

Splash, comme un cheveu sur la soupe

Un vrai faux flop ?
Retour sur une émission qui a agité le monde médiatique et suscité moult réactions dans l’opinion publique : Splash. Un concept « nouveau » : des valeurs, des vedettes, du spectacle, du vrai, du naturel… La promotion de l’émission depuis fin janvier n’est pas passée inaperçue. TF1 a lancé en grande pompe sa nouvelle émission du vendredi soir importée des Pays Bas. Les journalistes ont été intransigeants, en partie dépités, les blogueurs se sont manifestés, les twittos aussi, à leur façon, Jean-Marc Morandini a décrypté… Bref tout le monde en a parlé et tout le monde en a entendu parlé. Un nuage médiatique s’est formé avant le lancement de l’émission et s’est transformé en orage pendant sa diffusion. Un orage plutôt avantageux, c’est en effet grâce à lui que l’émission est tout de même restée au-dessus de la barre des 5 millions de téléspectateurs. Une orchestration parfaite plus qu’un buzz naturel.

Plus de mal que de peur ?
Si le fond de l’émission autant que la forme, ont suscité l’émoi des téléspectateurs et des professionnels, on peut s’interroger sur l’avenir de cette recette : une émission de divertissement qui se situe à la croisée des mondes, entre différents genres télévisuels. Elle parvient à s’imposer le vendredi en prime time sur la première chaîne grâce à l’orchestration totale de son lancement à sa production en passant par sa réception. Combien de temps encore va-t-on continuer à critiquer, à juger des émissions sans se rendre compte que l’on participe à leurs déploiements ? Il ne s’agit en aucun cas d’un jugement des téléspectateurs, chacun se divertit comme il l’entend, tant qu’il en est conscient. Pour aborder la question de l’enjeu de ce type d’émission il faut accorder au média télévisuel un certain pouvoir sur les individus.
Splash, parmi tant d’autres, c’est une adaptation du fond et de la forme pour trouver la recette miracle du succès coûte que coûte. On ne se situe pas vraiment dans la télé-réalité, trop télé-poubelle, mais on prône des valeurs humaines, tel que le dépassement de soi, comme justification de l’existence de l’émission et de la participation des « vedettes ». Un peu comme dans une autre émission elle aussi diffusée le vendredi soir, Koh Lanta, là aussi Denis Brogniart avait bien précisé qu’il ne voulait pas qu’on parle de télé-réalité… Splash, du divertissement pur et dur alors, mais qui sait mêler différents codes sans les rendre trop visibles, mais sans les nier complètement non plus.
Sur la forme, TF1 réussit encore un tour de maître, effet de buzz bien orchestré avant et pendant l’émission qui contribue à son succès, à le déclencher même. Un peu comme ça avait été le cas pour The Voice : le nuage formé par les critiques, les détracteurs, tout cela joue en faveur de la chaîne. Commentaires sur commentaires, critiques, débats, rumeurs : tant qu’on en parle on s’assure le succès. Si on voulait vraiment faire disparaître un programme on ne pourrait qu’opter pour l’abstention et l’ignorance, la meilleure des armes. Et c’est ce qui finira irrémédiablement par arriver, les téléspectateurs ne se laissent pas berner indéfiniment.
Le divertissement certes, et sur TF1 d’accord, mais avec une telle recette qui assure à la chaîne succès et rentabilité, tout devient possible. « Le concours des meilleurs tailleurs de haies ? », « Qui veut tondre ma pelouse ? », « Conduite avec les stars, les stars repassent leur permis ? »… La télévision, publique comme privée, n’a-t-elle pas aujourd’hui plus que jamais une responsabilité ? Si le divertissement doit rester rentable et libre dans sa composition, le média lui-même ne devrait pas faire le sourd quant à sa responsabilité sociale. On a su mettre un point d’honneur à ce que les entreprises assument leur responsabilité sociale et environnementale, ici elle prend peut-être un sens un peu différent, mais la télévision ne pourra pas continuer de passer à côté pendant longtemps.

Margot Franquet
Sources :
François Jost, « « Splash » sur TF1 : sous son apparente vacuité, une émission calibrée pour le succès », Le Plus Nouvel Obs
Nathalie Nadaud-Albertini, « « Splash » sur TF1 : pourquoi c’est un bon concept », Le Plus Nouvel Obs
L’express.fr
My TF1 Replay, Splash le grand plongeon