4L Trophy
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Com’ des aventuriers

 
Voilà une semaine que s’est achevée la 17ème édition du 4L Trophy, mythique course d’orientation dans le désert marocain. Un raid humanitaire étudiant qui prend chaque année de plus en plus d’ampleur et qui fait l’objet d’une campagne de communication bien rodée, concoctée par les élèves de l’école de commerce de Rennes.
Leur crédo ? Jouer la double carte de l’action solidaire et de l’événement festif afin de donner au raid une image séduisante tant pour les participants, à qui on promet du fun et des rencontres, que pour les sponsors qui aident à financer un projet philanthropique.
En découle la construction d’un imaginaire basé sur l’idée d’aventure et de dépassement de soi…. De plus en plus décrédibilisé par la multiplication du nombre de participants, qui certes gonflent l’envergure des dons, mais qui s’entassent dans le désert rendant caduque toute ambition de péripéties autonomes.
Le cap à suivre n’est alors plus celui indiqué sur le roadbook, mais celui que dessine la poussière soulevée par les 4L qui nous précèdent… Une réalité habilement éclipsée dans le teaser qui ne fait bien sûr pas mention des longues files d’attentes s’étirant chaque jour devant bivouacs et check points.
N’est-il pas en outre paradoxal d’organiser un « éco challenge » en partenariat avec Deloitte lorsqu’on envahit le Maroc avec 1300 voitures plutôt gourmandes en essence ?
Hypocrisie diront certains, opération de com diront d’autres !
 
Elsa Becquart

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Panem et circenses pour le Superbowl

 
Il est presque impossible d’être passé à côté d’un article, d’une publicité, d’un tweet sur le Superbowl ce mois de février, même en France. Le Superbowl est le rendez-vous national le plus populaire de l’année aux Etats-Unis mais n’en reste pas moins un événement mondial. Pour la 47e édition, il a rassemblé 108,41 millions de téléspectateurs (si les chiffres ne vous parlent pas, celui-ci équivaut à un peu moins du double de la population française). Créé en 1967 et officiellement appelé NFL-AFL World Championship Game, le championnat commence en fait dès septembre avec une saison régulière qui dure 16 matchs. Pourtant, les fans et les médias n’en retiennent principalement que la finale et lui préfèrent le nom de Superbowl. Et les médias deviennent finalement les organisateurs de ces jeux, où l’on entend plus parler d’audience que du sport le plus apprécié dans le pays.
La métaphore du football comme religion prend tout son sens dans un événement comme celui-ci. « Le football est devenu une religion, une obsession collective qui fait vibrer la nation », dit Rick Telander, chroniqueur sportif du Chicago Sun Times. On parle de ce rendez-vous comme de la « grand-messe », où fans et téléspectateurs « communient » autour du petit écran. Allen St. John, auteur de « One Billion Dollar event » dit à ce propos que « Le Superbowl est presque plus populaire que Noël, ce n’est pas formel, les familles et les amis se réunissent, boivent de la bière, bouffent de la « junk food » et regardent le spectacle ! » Cet événement rejoint le scénario de « Télévision cérémonielle » que D. Dayan et E. Katz appellent « la confrontation », événement qui est organisée autour de la question « Qui va gagner ?» On y retrouve bien des caractéristiques telles qu’un public préparé par de multiples annonces qui précèdent le « grand moment », une forte mobilisation de symboles, une quasi-obligation d’être témoin, un rendez-vous en rupture avec le quotidien, et une participation à des chiffres d’audience qui dépassent l’imagination. Le Superbowl est donc plus une expérience nationale et collective qu’une simple diffusion médiatique.
Cependant, il est à noter que les organisateurs de cette finale ont tout de même quelques tours dans leur sac pour en faire un bon filon économique et financier…
Suivant le modèle de l’élargissement des contenus pour multiplier les publics, le Superbowl se transforme en véritable show national. Le peuple veut du pain et des jeux, quand Rick Telander dit encore : « Les footballeurs américains sont nos gladiateurs, et nous sommes comme les Romains, ivres de ce jeu magnifié par la télévision, qui avec ses ralentis, devient un ballet brutal et splendide. » Mais ce n’est plus tant à propos du sport, que du « fun » ; on parle alors de « sportainment ». Et c’est Michelle Obama qui nous le prouve, quand son billet a été retwitté plus de 4 500 fois durant la finale, non pas à propos du jeu, mais de la performance de Beyoncé : «  Watching the #superbowl with family & friends. @Beyonce was phenomenal! I am so proud of her!”

Les annonceurs se mettent au diapason et concourent pour créer la publicité la plus fun : « Chaque pub est en soi un spectacle, les compagnies font surenchère d’inventivité pour le Superbowl, et il y a un concours de la meilleure réclame » dit St John. Le caractère éphémère de ces créations place pour quelques jours la publicité en dehors de son champ originel et l’élève sur un piédestal, puisqu’une fois diffusées, les publicités rentreront ensuite au placard. Mais pour parfaire le plaisir pris durant ce spectacle, encore faut-il avoir le ventre plein, comme les Romains l’avaient si bien compris. Et les chiffres records continuent pour cette journée, avec une grande délicatesse de la part des organisateurs qui avaient prévu cette année près d’1,23 milliard d’ailes de poulet, une consommation de 3,4 millions de pizzas durant le jeu, et environ 325,5 millions de gallons de bière (1 gallon = 4,5litres environ) Et enfin, comme la soirée doit être inoubliable, les chaînes qui diffusent cette finale (alternativement CBS, Fox et NBC depuis 2007) ne s’arrêtent pas après la victoire. Le traditionnel Superbowl lead-out program, comprendre l’épisode post Superbowl, est diffusé juste après le match. Il s’agit d’un épisode unique et spécial, décalé de sa case horaire habituelle (le Superbowl a toujours lieu le dimanche) d’une série télévisée, souvent tourné spécialement pour l’occasion. Cette année, CBS a choisi la série Elementary qui a pu bénéficier de l’exposition exceptionnelle offerte par le Superbowl, avec 20.8 millions de téléspectateurs. Il ne bat cependant pas l’épisode le plus regardé de l’histoire des post-Superbowls, record détenu par Friends en 1996 avec plus de 53 millions d’audience.
Et puisqu’on parle de chiffres et de records, rentrons dans le vif du sujet, qui alimente tant de discours chaque année à cette période. CBS, Fox, et NBC se partagent d’une année à l’autre la diffusion de l’événement. Commence alors la chasse à l’espace publicitaire par les annonceurs. Le prix de 30 secondes de temps d’antenne est passé de 2,7 millions en 2008 à près de 4 millions de dollars aujourd’hui (et CBS attendait près de 225 millions de dollars de revenus publicitaires cette année). Les subtilités s’ajoutent au fil du temps dans ce commerce, puisque l’année dernière, NBC Sports Group avait décidé de rendre obligatoire l’acquisition d’espaces publicitaires supplémentaires sur la chaîne, en plus de celui du Superbowl. Petit bénéfice personnel quand on sait que les espaces de la finale se vendent sans difficulté aucune. Pour la première fois de son histoire aussi, NBC avait retransmis en direct, l’année dernière, l’événement sur son site Internet et via l’application mobile officielle de la NFL. Enfin, autre nouveauté, cette année les marques ont décidé de ne plus jouer tant sur la surprise lors du grand soir, que sur l’alimentation des conversations sur les réseaux sociaux, en diffusant leur spot publicitaire unique pour certains quinze jours avant le jour J. Et cela fonctionne. Selon certaines études, 57% des Américains affirment porter attention aux publicités du Superbowl avant le match et un Américain sur 5 les cherche avant même la rencontre. Les publicités font donc bien partie du plaisir et du décor attendu de cette expérience unique.
Les chiffres du côté des réseaux sociaux sont montés eux aussi en flèche cette année, et ont permis une collecte de data très estimable pour les annonceurs. On se rend compte que l’enjeu ici pour la publicité est d’être mémorable, que ce soit en bons termes ou non. Ainsi c’est la publicité PerfectMatch de GoDaddy qui a été la plus mentionnée (255 121 tweets), mais particulièrement négativement, contrairement à la publicité Taco Bell (213 125 tweets) qui a d’ailleurs gagné le fameux concours. 26 des 52 marques ont profité cette année de leur spot pour proposer leur Hashtags, augmentation de 300% par rapport à l’année dernière, et ont également profité de cet évènement pour encourager les téléspectateurs à devenir fans de leur page Facebook. Quelques exemples en nombre brut : en une soirée Blackberry a gagné 431 094 fans suivi par Coca-Cola (+379 133) et Oreo (+114 049). Tous ces chiffres sont assez parlants, et d’autres tout autant étonnants sont disponibles dans cette étude.
Concerts, épisodes inédits, concours de réclame, défilés de star dans les spots, tout est fait pour satisfaire un public élargi, et même à la maison, puisque (encore un record) 24,1 millions de tweets ont été publiés durant le jeu. Les villes entrent en campagne pour accueillir l’évènement, l’objet sportif devient tour à tour un objet culturel, médiatique et financier qui définit aussi l’identité de ce pays.
Et le jeu, les équipes, les joueurs, adulés dans tout le pays, sont absents des analyses médiatiques, du moins à l’étranger. Pour trouver quelques infos sur les matchs, mieux vaut fouiller sur les sites spécialisés. On y trouve d’ailleurs quelques informations peu relayées. Les ex-gladiateurs se livrent en ce moment à un procès, étouffé par la NFL, contre les injonctions à la violence qu’ils ont subi par le coaching et notamment pendant ces fameuses finales, et les conséquences de cette violence sur leur santé. Ils se retrouvent presque tous aujourd’hui retraités et infirmes… Les parallèles entre les Jeux romains et le Superbowl se multiplient, esclaves au service du spectacle servi par la violence et l’opulence, est-ce le peuple qui veut du pain et des jeux, ou César ?

 
Marie-Hortense Vincent
Sources :
Les images proviennent de l’infographie de WhisprGroup, sur  SportsMarketing.fr
Alter Journalisme – Courrier International
La Voix du Nord
Le Figaro
Socialsport

Culture

La déprime à l’affiche

Faites le test : parlez de la 1ère Nuit de la déprime à quelqu’un et vérifiez qu’il répond bien : «ah oui, j’ai vu ça dans le métro, mais c’est quoi en fait ? ». Alors c’est quoi en fait cette Nuit de la déprime ?
Si nous sommes nombreux à avoir remarqué ces affiches c’est 1. Parce qu’il y en a dans presque toutes les stations de métro parisiennes, 2. Parce qu’elle n’est pas comme les autres publicités qu’on a l’habitude de voir.
Un dessin, voire un gribouillis, des couleurs gris-noir, trop de texte étalé partout: cette affiche ressemble à s’y méprendre au dessin d’un enfant. Mention spéciale au canapé et au chat, dont les traits grossiers auraient pu être réalisés lors d’une partie de Pictionnary. Et pourtant, c’est bien cette médiocrité assumée qui attire l’œil et l’attention. Dans un univers publicitaire où règne la perfection, le souci du détail et l’esthétique, une telle affiche ne peut que se démarquer. Elle n’est pas sans rappeler les pubs cinéma des assureurs militants Maïf qui, en représentant monsieur et madame tout le monde en bonhomme bâtons, souhaitent s’adresser au plus grand nombre. C’est le message que fait passer l’affiche : on a tous le droit de déprimer, hommes ou femmes, petits et grands. C’est mieux d’être triste à plusieurs, rassemblés autour d’un même évènement.
Et si on assumait de déprimer ?
Si on ne comprend pas tout de suite de quoi il s’agit, c’est 1. Parce que la profusion de textes noirs sur l’affiche rend l’information moins visible, 2. Parce qu’un tel évènement est peu courant,
« A quoi sert de courir après le bonheur alors que la déprime est à portée de main ? ». Drôle de paraphe encore une fois pour promouvoir un évènement  Proposée par Raphaël Mezrahi, cette soirée aux Folies Bergères a pour but de servir de « pieds-de-nez à la morosité ambiante », comme il l’explique lui-même. Contrairement aux nombreux magazines féminins ou à Lorie, l’humoriste ne nous propose pas d’adopter la « positive attitude », mais bien de se complaire dans un état de déprime et de partager ce moment. Et si c’était le moment de philosopher sur cette « morosité ambiante » ? La question est de savoir si nous subissons bien la société individualiste dans laquelle nous évoluons, et la perte de sens qui s’en suit, à laquelle croient nombre de philosophes, notamment Jean Baudrillard. Maintenant il faut choisir : être triste et déprimé du monde dans lequel nous vivons, ou rire (même jaune) de la situation et ne pas se prendre au sérieux, comme le propose Raphaël Mezrahi.
Au-delà de la question sociétale (oui rien que ça !) que soulève cette affiche, on ne peut que saluer un coup de com’ évènementiel bien maîtrisé. Associer à l’évènement des marques notoires, telles que Kleenex et Nutella, ou Ben&Jerry’s pour le côté Bridget Jones, est un pari réussi et surprenant. Ces marques ont accepté d’être les symboles des moments de déprime. Plutôt que de subir une réputation construite dans les films, elles assument leur rôle de remontants et se montrent présentes dans les moments difficiles de notre vie. Elles sont de plus bien mises en valeur, en couleurs sur une affiche à dominante noir et blanc. Bref, c’est le combo gagnant ! Et ce qui est vrai pour les marques l’est aussi pour les artistes participants à l’évènement, parmi lesquels Véronique Sanson, Catherine Lara, Thomas Dutronc, Alain Chamfort et Enrico Macias. En effet, c’est la crème de la chanson française qui sera présente pour nous chanter leurs chansons tristes. Car les musiques déprimantes font un peu partie de notre patrimoine national. Si Barbara et Brassens pouvaient interpréter « Dis, quand reviendras-tu » ou « Il n’y a pas d’amours heureux », la fête battrait son plein !
Alors rendez-vous le 18 Février pour une triste soirée !
 
Agathe Laurent
Sources :
Les Folies Bergères
Sortir à Paris