Société

L’association Promouvoir – entre protection et censure, il n’y a qu’un pas.

On a fini 2016 avec un article sur la polémique autour de la sortie de Sausage Party (film retraçant le périple initiatique d’une saucisse entre deux ou trois connotations pornographiques). On commence donc 2017 en s’intéressant à André Bonnet, figure de proue de l’association « Promouvoir », déboutée le 14 décembre dans sa charge judiciaire contre le film controversé. Ou comment un seul homme fait trembler tout le cinéma français actuel.

sébastien thiery fastncurious molières
Culture

Cachez ce sexe que je ne saurais voir !

Qu’on se le dise, Fleur Pellerin en a pris pour son grade ce 27 avril 2015 lors de la 27ème Cérémonie des Molières. Et pour cause, rappelons nous du sujet qui fait débat, qui enrage le milieu culturel et dérange la sphère politique : la question du statut des intermittents du spectacle. Pour faire simple, le chômage des intermittents du spectacle, qui leur garantit une rémunération (précaire) pendant les périodes d’accalmie, est menacé de suppression. Rien de tel pour remettre les points sur les « i » que de profiter des Molières pour passer un savon à la digne représentante étatique de la culture.
Le nu : le nouveau pouvoir contestataire et la coqueluche des médias ?
L’apparition sur scène de l’auteur dramatique et comédien Sébastien Thiery dans le plus simple appareil a fait son effet. L’impudique monsieur s’est littéralement trimballé fesses et roubignolles à l’air dans le but d’interpeller du haut de son podium le pouvoir politique et lui demander des comptes. Sébastien Thiery fait un putsch, certes préparé, mais un putsch quand même dans la mesure où il met le public et la ministre face à une nudité qui n’était ni prévisible, ni souhaitée par l’auditoire. Le comédien prend la parole « au nom de la « fédération CGT du spectacle ».

Tous les médias ont parlé de cette fameuse séquence dans les heures et les jours qui ont suivi l’événement, provoquant ainsi un véritable buzz médiatique. La séquence a d’ailleurs été immédiatement commentée et relayée sur les réseaux sociaux divisant la twittosphère.

 
 
 
 

On s’attendait à un discours quelconque, ponctué de petites blagues, et on se retrouve soudain, involontairement, témoin d’un véritable règlement de compte. On assiste à une leçon de morale. Bon et après ? Ça reste une paire de fesses, et des paires de fesses, on en voit bien souvent au théâtre. C’est pratiquement monnaie courante. Pour clamer leur mécontentement (justifié !), des intermittents du spectacle avaient déjà joué la carte de la nudité devant Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la Culture.

Le corps, un instrument contestataire comme un autre ?
Le fait est que le corps, une fois débarrassé de ses oripeaux, devient un instrument contestataire au service de l’action politique. Le corps nu est en soi une petite révolution en ce qu’il casse les codes sociaux. Rien de plus percutent que de se dénuder pendant une cérémonie officielle et institutionnelle où les codes ne demandent qu’à être distordus. On peut ainsi penser aux Femen qui, pendant le discours de Marine Le Pen le 1er mai, brandissaient leurs deux banderoles « Heil Le Pen ! », le tout seins nus.

Pourquoi utiliser le nu pour communiquer son désaccord et comment le nu réussit-il à défier le pouvoir politique au point de provoquer gêne et même violence ? La théâtralité du corps nu, en cela qu’il est clairement mis en scène, dé-range le politique. Et pour cause, des corps nus, libres, en mouvement, s’opposent aux corps inertes, embourbés dans leurs tissus, regroupés en masse passive. Le corps théâtralisé, une fois nu, conteste de lui même. Il dit non à l’ordre imposé et représenté par le pouvoir politique, à savoir un ordre lissé, institutionnel et législateur. D’où la confusion que sèment les Femen, d’où la gêne que provoque Sébastien Thiery. La gêne et le rire. Mais le rire est parfois le plus sûr moyen d’expier sa gêne.
Le théâtre comme tribune
Lors de la soirée des Molières, il y a eu affrontement entre le théâtre et le politique. Le théâtre est cette déclaration de guerre que Brecht s’évertuait à organiser encore et encore et que, peut-être, Sébastien Thiery a perpétué. Théâtre et politique ont toujours eu quelques affaires ensemble. Le théâtre est cet art qui sait si bien mettre en jeu la question du commun et de la communauté ; question largement discutée et réfléchie par le politique.
Le théâtre est cet art qui fait avouer au politique sa défaillance, sa contradiction et son mutisme. Et pour preuve, une Fleur Pellerin gênée, qui ne sait ni où poser ses yeux, ni comment réagir face à ce qui s’impose la nudité crue du réel, autrement dit la paire de fesses de Sébastien Thiery. Et pourtant, dieu sait que nous en avons tous une de paire de fesses.
Jeanne Canus-Lacoste
Crédits photos :
Youtube
Twitter
Le Courrier Picard
Sources :
Le Figaro
Libération
francetvinfo.fr

Politique

Liberté, liberté chérie…

 
C’est un débat vieux comme Internet qui mobilise aujourd’hui la justice française : celui de la neutralité du Web.
Les dérives
Internet doit-il rester un espace vierge de toute contrainte ? A première vue, l’idée peut paraître séduisante. Après réflexion, cette idée l’est beaucoup moins. Particulièrement lorsque l’on voit apparaître sur Twitter des hashtags intitulés « #unbonjuif » « #sijetaisnazi » ou « #simonfilsestgay ».
En quelques heures, chacun de ces hashtags s’est imposé comme un trending topic, attirant aussitôt l’attention des médias qui ont massivement relayé l’affaire comme preuve des dérives xénophobes de la toile. Twitter -qui est on le rappelle deuxième plus grand réseau social mondial derrière Facebook- avait alors retiré les tweets à caractère racial mais s’était fermement opposé à communiquer les coordonnées personnelles des utilisateurs ayant posté ces messages. Ce choix a provoqué la colère de plusieurs associations antiracistes parmi lesquelles l’Union des Etudiants Juifs de France qui, quelques jours après l’affaire « #unbonjuif » a porté plainte en référé contre la plate-forme.
Les attentes
La requête de l’association est double. Dans un premier temps, elle demande au site de fournir à la Justice française les coordonnées des comptes mis en cause. Dans un second temps, elle souhaite que les démarches pour signaler les tweets à caractère raciste soient simplifiées.
 Les résultats de l’audience du 8 janvier qui faisait se rencontrer l’UEJF et Twitter n’ont pas été ceux espérés par l’association. Ainsi, la plate-forme dont le siège social se situe à San Francisco, s’abrite derrière la loi américaine pour protéger ses données. On peut voir dans ce geste une volonté du site de protéger le droit à la liberté d’expression sur internet. Mais il ne faut pas oublier que Twitter est avant tout une entreprise qui souhaite maximiser son chiffre d’affaire. En protégeant ses utilisateurs, le site s’assure de maximiser le nombre de personnes fréquentant son réseau et il devient alors plus facile d’augmenter les ventes des tweets sponsorisés.
Cette dimension commerciale est d’autant plus importante que Twitter vient d’ouvrir en décembre dernier des locaux à Paris. Face à l’indignation générale provoquée par les hashtags xénophobes, le gouvernement français a voulu faire preuve de fermeté. Ainsi, Fleur Pellerin,  Ministre en charge du numérique, Najat Vallaud Belkhacem, porte-parole du gouvernement ou encore Bertrand Delanoë se sont exprimés afin d’inviter la firme à prendre ses responsabilités. Entre les lignes, le message de ces personnalités politiques est clair : si Twitter souhaite s’installer durablement en France, ses dirigeants feraient mieux de reconsidérer leur politique de confidentialité des données.
Les affaires
Si le site ne change pas son mode opératoire pour des raisons éthiques ou morales, peut-être le fera-t-il pour des raisons commerciales. Hormis les incitations du gouvernement français qui ne pèsent probablement pas très lourd dans les prises de décision de l’entreprise, il se peut que l’oiseau bleu soit effrayé par ses partenaires commerciaux. Et s’il est nécessaire pour une marque d’être présent sur Internet, il y a fort à parier que nombre d’entreprises réfléchiront à deux fois avant d’associer leur image à un site dont les trending topics incitent à la haine raciale.
Tant qu’il existera des plateformes existant en marge du système, la libre expression perdurera sur Internet, avec ce que cela comporte de bonnes et de mauvaises surprises. Mais Twitter, Facebook et consorts ont souhaité donner un tournant commercial à leur activité. Et pour être considéré comme des interlocuteurs sérieux par les marques, il faut accepter de se comporter en adulte. Et cela commence par faire des choix.
 
Angélina Pineau
Sources :
Très bon article de Rue 89 résumant la complexité de la situation  actuelle
Recontextualisation du problème par Ecrans
Tribune de l’UEJF sur le site du Nouvel Obs

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