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Société

Super Bol

Dans la nuit de dimanche à lundi, il y avait ceux qui dormaient, puis les autres — masochistes sur les bords — qui enchainaient les canettes de Red Bull pour ne pas sombrer devant le Super Bowl. Depuis quelques saisons, W9 diffuse cette grande messe du football américain — sport totalement confidentiel de ce côté-ci de l’Atlantique — mais qui rassemble pas loin de 150 millions de téléspectateurs chez les Américains, véritable miracle étant donné le morcellement du paysage audiovisuel états-unien.
La NFL — petit nom donné au football US (National Football League) — est le sport numéro Uno au royaume d’Obama, et dont la finale est surtout l’occasion de se marrer entre amis autour d’ailes de poulet et devant le meilleur de la pub mondiale. Ce que l’on sait moins c’est que cette joyeuse petite sauterie qui opposait les Giants made in New-York et les Patriots de Boston — doux ennemis de la Côte Est — aurait pu ne jamais avoir lieu.
Flashback en mars 2011. Le 25 au matin la NFL cesse toute activité. Les propriétaires se mettent en grève pour cause d’un désaccord sur le CBA — en VO, Collective Bargaining Agreement, en VF, l’accord syndical qui lie joueurs et propriétaires sur les conditions salariales et contractuelles de la ligue. Pour faire simple, quand les propriétaires se mettent en grève la saison s’arrête puisqu’ils sont aussi détenteurs des stades et employeurs de tous les soldats qui font tourner la League.
En NBA — la National Basketball Association — on a aussi vécu le même problème pendant l’été 2011. Début juin, les Dallas Mavericks sont sacrés champions, mais quelques semaines plus tard l’ambiance retombe assez sèchement. Même problème que chez les cousins du foot US, les joueurs et proprios ne trouvent pas d’accord sur la répartition des revenus tirés de la ligue — répartition définie par le CBA.
Alors en NBA comme en NFL, le « lockout » est décrété. Littéralement, les joueurs se trouvent « enfermés dehors ». Les entrainements et matches ne peuvent avoir lieu puisque les salles restent closes tant qu’un accord ne sera pas trouvé sur les répartitions de la juteuse manne financière qui découle du basket et du foot US.
Côté NFL, aucun matche n’a été annulé puisqu’un accord a pu être trouvé avant le début de la saison. Mais pour les amoureux de la gonfle orange, l’attente fut bien plus longue et préoccupante.
David Stern — le NBA Commissioner, en gros le patron de la Ligue — annonce le 28 octobre que les deux premières semaines de la saison (censée commencer début novembre) sont annulées étant donnée l’absence d’accord et l’affolante apathie qui entoure les débats. Finalement ce seront près de  deux mois de compétition qui seront supprimés. Le 26 novembre, après des centaines d’heures de réunion, l’intervention d’un médiateur envoyé par Washington et des millions de dollars envolés, un nouveau CBA a pu être signé. La saison commencera le jour de Noël, histoire de faire oublier aux fans les mois de chamailleries.
De juillet à fin novembre, les LeBron James et autres Chris Paul se sont étripés avec les propriétaires sur la répartition des gains que rapporte la ligue. Jusqu’ici les joueurs récupéraient 57% du gâteau et les proprios se partageaient le reste. Cependant il apparaissait assez clairement qu’un tel accord ne pouvait plus durer puisque les propriétaires clamaient perdre énormément d’argent. Les joueurs eux faisaient la sourde oreille avec une ligne de défense unique : sans eux, pas de spectacle ni de ligue.
Alors pendant 5 longs mois, les fans ont vu des joueurs multi-millionnaires batailler pour quelques 5 ou 6 misérables pourcentages — donc une bouchée de pain rapporté à leurs revenus qui s’élèvent pour les plus talentueux à 20 millions de dollars par saison. Les principaux sites de basket reprenaient tous en coeur le même refrain « Qu’ils nous rendent notre sport favori, et qu’ils arrêtent de pinailler pour si peu ». Ainsi nombreux étaient ceux à se dire littéralement dégoutés par l’attitude de leurs idoles, les plus virulents n’hésitant pas à appeler à un boycott en cas de reprise de la saison. Ainsi d’importantes pertes en termes d’audience étaient à prévoir lorsque le basket daignera reprendre.
Le mois dernier les chiffres des premières audiences sont tombés. Résultats accablants pour les fans excédés il y a quelques semaines de ça : la NBA et la NFL sont encore plus populaires post-lockout. Dans le LA Times, Helene Eliott a pu observer que les salles NBA étaient plus pleines cette année que l’année passée et que les audiences télé avaient elles-aussi augmenté — sur la même période.
Le Super Bowl a réalisé dimanche dernier les meilleures audiences de son histoire. Que ce soit en NFL ou en NBA, les fans semblent donc touchés d’une amnésie profonde quand on repense aux réactions ulcérées qui tapissaient Twitter et la rubrique commentaires d’ESPN.
Apparemment les fans viennent de donner le feu vert aux responsables des deux ligues majeures — NBA et NFL — pour se comporter comme ils l’entendent, en tout cas dans l’irrespect total du public — public qui fait d’ailleurs vivre tout ce beau monde. Les fans avaient pourtant là l’occasion de montrer qu’ils étaient — eux et eux seuls — ceux qui faisaient tourner ce cercle vertueux, véritable machine à billets vert. Mais apparemment le spectacle offert par le basketball et le football américain fait oublier toutes les péripéties. Ainsi ces chiffres actent une amnésie certaine du fan de sport qui avait enfin le pouvoir de réclamer son dû pour sa passion — essence indispensable du moteur rugissant de l’industrie sportive.
 
PAL

Balle de football américain au sol représentative du Super Bowl Américain
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La publicité, grande gagnante du Super Bowl

Commençons avec une devinette : quel est le jour de l’année où les Américains consomment le plus de nourriture ? Okay, Thanksgiving, that was an easy one. Et le deuxième sur le podium ? Réponse : le Super Bowl Sunday. Le what ?
Le Super Bowl, c’est la finale du championnat national de football (américain, of course). Mais c’est aussi 1,25 milliards d’ailes de poulet, 4000 tonnes de guacamole, 14 500 tonnes de chips et surtout, environ 100 millions de téléspectateurs. Ce dimanche‑là est presque considéré comme un jour férié à part entière, le match est regardé en famille ou entre amis, et la consommation suit le mouvement, ainsi que les taux d’audience ! Le Super Bowl XLV (la 45ème édition du match depuis la toute première en 1966) est même à ce jour l’émission télévisée américaine la plus regardée de l’Histoire.
111 millions d’Américains rassemblés devant leurs téléviseurs par la seule beauté du sport ? Pas tout à fait. Chez l’oncle Sam, un match de football est toujours accompagné d’une fanfare, de cheerleaders, de l’hymne américain… Autant dire que lors du Super Bowl Sunday, le spectacle est à son comble ! Chaque année, le processus de sélection de la ville qui organisera la grande finale s’apparente aux sélections olympiques. Important aussi, le choix de l’artiste qui aura l’honneur de chanter l’hymne américain, et de celui qui animera la mi‑temps par un mini‑concert (mais avec un maxi‑public). Cette année pour le Super Bowl XLVI, qui aura lieu le 5 février, ce sont Indianapolis, Kelly Clarkson, et Madonna qui ont raflé la mise.
Mais pour les téléspectateurs, le spectacle ne se joue pas uniquement sur le terrain, il est aussi dans les coupures publicitaires. Eh oui, quand on s’appelle Coca Cola, Doritos ou Budweiser et qu’on s’adresse au tiers de la population américaine à travers un spot qui peut coûter jusqu’à 100 000 dollars la seconde, on s’arrange pour ne pas louper son coup. Résultat : les publicités diffusées lors du Super Bowl sont bien souvent des merveilles d’ingéniosité et de drôlerie, et sont une des raisons pour lesquelles tant d’Américains se regroupent devant leur télé ce soir-là. Dans une société dite de plus en plus publiphobe, quel drôle de phénomène que celui-là: la pub est appréciée, voire plébiscitée, elle est presque appréhendée comme une forme d’expression artistique, à la manière du cinéma ou de la photo. Alors que les pauses publicitaires sont traditionnellement pour les téléspectateurs un moment propice au zapping ou à la satisfaction des besoins les plus élémentaires de l’organisme, ici les annonceurs s’efforcent de contrer le phénomène et de retenir les Américains dans leur canapé à l’aide de talentueux exercices de style. D’une certaine façon, pendant le Super Bowl, la pause pipi c’est le moment où le match reprend ! Selon Stephen Master, le vice président de l’institut de recherche et de sondage Nielsen, près de 50% des téléspectateurs allument la télé pour regarder les publicités, plus que pour regarder le match*.
Néanmoins, on peut s’interroger. Les bijoux publicitaires dévoilés lors du Super Bowl Sunday valent-ils vraiment leurs 3,5 millions de dollars (pour un spot de trente secondes) ? Il semble pourtant que les marques trouvent leur compte dans cet investissement. En effet, l’audience atteinte par les publicités du Super Bowl ne se limite pas aux quelques 111 millions d’Américains qui auront passé le dimanche devant le match. Les publicités du Super Bowl sont un tel phénomène que désormais on voit fleurir sur Internet les listes récapitulatives et autres « tops des 20 meilleures pubs du Super Bowl ». Si par ailleurs, on tient compte de la dimension affective qui lie les consommateurs à ces perles attendues chaque année avec impatience, on imagine sans peine l’impact que peut avoir un spot au Super Bowl pour les marques. Faire partie des happy few qui communiquent lors du Super Bowl est déjà en soi une raison d’être au cœur de la conversation ! En témoigne l’attention que reçoivent dès aujourd’hui GoDaddy.com, Doritos, Skechers, Teleflora, Pepsi, ou encore Kia pour avoir annoncé qu’ils diffuseraient un spot lors de ce Super Bowl XLVI.
 
Esther Pamart
* Source: money.cnn.com
Crédits photo : ©Anderson Mancini Flickr

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