Société

Tu seras un homme, mon fils

« Nous traitons du malaise des mâles, des rites et des méthodes de séductions, des diverses manières de parvenir à se réaliser malgré une société féminisée, castratrice et généralement frustrante. »
Ainsi se présente un des nombreux sites florissants questionnant la masculinité, supposés apporter soutien et astuces quotidiennes à des hommes toujours plus opprimés par la matriarchie ambiante.

Culture

Princesse au chômage recherche célébrité précaire

Le marketing genré s’affiche comme la formule magique des marques pour doubler les ventes. Cependant, face aux nombreuses critiques, notamment concernant les Disney Princesses, les marques tentent d’adapter progressivement leurs stratégies publicitaires, à l’image de Vaiana, nouveau film d’animation de Disney, au succès impressionnant. Actuellement, le marketing genré est-il toujours justifié ?
L’empire Disney Princesses
Créée en 1999, Disney Princesses, franchise de Walt Disney Company, vend toutes sortes de produits dérivés à l’effigie des princesses Disney, allant du simple dentifrice à la robe de mariée. Les héroïnes de ce clan très select – Blanche-Neige, Cendrillon, Aurore, Ariel, Belle, Jasmine, Pocahontas, Mulan, Tiana, Raiponce, Mérida et enfin Elsa – sont l’une des principales sources de rentabilité pour Disney.
La Reine des Neiges, film d’animation au plus grand succès, fait la fortune de Disney avec une licence à prix d’or, la plus chère sur le marché du jeu du jouet français en 2015. Mais quelle est la formule magique qui se dissimule derrière ces contes de fées ?
Top 5 des licences en valeur sur le marché du jeu et du jouet français en 2015

Mais quelle est la formule magique qui se dissimule derrière ces contes de fées ? Le marketing genré, formule magique ?
Exploitant le désir des femmes de se faire belles et d’exposer leur identité sexuelle, Disney le transforme en addiction. En témoigne l’omniprésence du mot « princesse » dans l’univers des petites filles grâce des techniques de marketing genré.
Le marketing genré ou gender marketing consiste à adapter la politique marketing en fonction du caractère masculin ou féminin de la cible, selon Bertrand Bathelot, professeur agrégé de marketing.
Très employé pour cibler enfants et adolescents, il permet de doubler les ventes au sein d’une même famille. Par exemple, pour une famille comportant un garçon et une fille, les parents n’achèteront plus un seul vélo mais un vélo « pour fille » et un vélo « pour garçon » !
Afin de marquer des jouets désormais sexués, la couleur rose n°241, paillettes et princesses sont au rendez-vous. Bienvenue sur la planète rose !
La culture girly (1) a pour objectif de fidéliser le consommateur dès son plus jeune âge. Couplée aux techniques de marketing genré, Disney effectue un marketing par âge. La culture girly ne s’arrête donc pas à l’arrivée de l’adolescence avec des célébrités comme d’Hannah Montana, Violetta ou Soy Luna.
À chaque âge son personnage ! Ainsi, le parcours du consommateur type commence avec Winnie L’Ourson suivi de Mickey. Le marketing genré apparaît vers 3 ans chez les filles avec les poupées Animator’s, à 5 ans avec les Disney Princesses, puis c’est les W.I.T.C.H et les programmes télévisés au début de l’adolescence.
Cette poupée, ce cadeau empoisonné
Déjà évoqué par Roland Barthes dans ses Mythologies, le jouet ou jeu d’imitation (2) – la dinette – permet à l’enfant d’intégrer certains rôles sociaux et de renforcer les stéréotypes de sexe.
Même si chacun est libre de dicter à Cendrillon sa destinée dans la cour de récré, son rôle premier, celui qui est fixé à l’écran, reste cependant déterminant dans la construction de l’imaginaire. Dans la plupart des cas, la poupée se transforme en jouet d’imitation, d’où l’importance capitale des rôles donnés aux princesses et actuellement très controversés.
Coupez-lui la tête !
Le rôle réducteur des princesses est fortement remis en question.
Très souvent, le mariage avec le prince charmant apparaît comme seul moyen d’épanouissement. Leurs activités sont peu modernes voire sexistes : travail obsessif sur leur apparence, taches ménagères et attitude passive.
Les relations interféminines sont souvent stéréotypées, conflictuelles et manipulatrices. Les femmes de pouvoir sont les « méchantes » : qui ne se rappelle pas la reine de Blanche Neige et d’Ursula de la Petite Sirène ? Même Elsa, traitée de sorcière, renforce le stéréotype attaché au lien entre pouvoir et féminité.
Leur physique, qui leur permet d’être repérées par le prince charmant, est conçu selon des standards inatteignables (minceur extrême, grands yeux, petits pieds). Loryn Brantz, graphiste américaine montre l’écart entre leur physique et une allure plus « normale », accusant Disney de participer à la création de complexes chez les jeunes filles.

À ces critiques s’ajoutent celles concernant la couleur de peau, l’absence d’ handicap ou de membres de la communauté LGBT. En mai 2016, les internautes s’étaient d’ailleurs mobilisés, via le hashtag #GiveElsaaGirlfriend pour qu’Elsa devienne la première princesse lesbienne.
Un vent d’ouverture apaise les tensions
Depuis quelques années, de nombreuses marques ont entrepris des initiatives innovantes, plus adaptées et à l’écoute des changements sociaux.
Ainsi, Mattel a modifié cette année ses Barbies en proposant des morphologies plus diversifiées et réalistes. GoldieBlox, entreprise américaine de jouets, propose aujourd’hui des jeux de construction pour filles. Et l’année dernière, les Magasins U ont lancé un catalogue de jouets sans distinction de sexe, avec des petits garçons jouant à la poupée ou une petite fille bricolant.

Parallèlement, une vague pro-féminine s’est emparée de certaines marques. À l’instar de Dove, Pantene, ou Always, la tendance est à l’empowerment, comme la campagne communicationelle d’Always « #CommeUnefille ». Certes, il s’agit toujours d’un marketing genré pour des produits s’adressant exclusivement aux femmes.

S’agit-il alors d’une avancée, ou seulement d’une régression déguisée sous des airs de « girl power » ?
Bientôt une nouvelle collection Disney Aventures ?

Le dernier film d’animation produit par Disney, Vaiana, est d’un tout nouveau genre. Pas de prince charmant à l’horizon, Viana n’a qu’un seul amour, l’Océan. Elle s’agrippe à ses rêves, prenant de nombreux risques pour vivre sa passion. Au physique bien plus « normal », Vaiana est authentique, franche et assumée.

Dans la même veine, le film franco-canadien Ballerina confirme cette tendance en mettant en scène une petite fille qui rêve de devenir danseuse étoile.

L’ambition est enfin à l’écran et cela plaît. Seulement quelques jours après sa sortie, Vaiana atteint déjà les 15.9 millions de dollars de recettes, devançant les résultats de la Reine des Neiges.
Avec ce virement stratégique prometteur, à quand une nouvelle collection Disney, avec de véritables métiers, pour que les petites filles d’aujourd’hui puissent se rêver en aventurières, astronautes, journalistes, avocates ou médecins ? Affaire à suivre….
Flore DESVIGNES
LinkedIn

(1) Culture girly : mouvement de mode, apparu au début des années 2000 qui désigne une attitude que les jeunes filles aiment se donner, obsédée par leur apparence et ultra féminine. C’est la culture du rose et des couleurs vives, des strass, des paillettes, de la fausse fourrure2, des jupes etc. Le mouvement girly se retrouve dans les séries de télévision, le cinéma, le maquillage, la musique, la mode, les blogs avec par exemple Hello Kitty, Katy Perry, Lolita, Disney Princesses.

(2) Jeu d’imitation : selon le Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, le jeu d’imitation s’appuie sur la reproduction différée de scénarios de la vie courante.

Sources :

• DENJEAN, Cécile, “Princesses, pop stars & girl power”, Arte. Paru en 2012. Consulté le 29 décembre 2016.

• Princesses Disney, Wikipédia, Consulté le 29 décembre 2016

• L.D. “La Reine des Neiges ou : quand Disney avance d’un pas et recule de trois.”, Le cinéma est politique. Paru le 23 décembre 2013. Consulté le 29 décembre 2016.• SOTINEL, Thomas, “Chez Disney, la princesse a du mal à s’émanciper”, Le Monde. Paru le 19 novembre 2013. Consulté le 28 décembre 2016.

• LUCIANI, Noémie, “« Vaiana, la légende du bout du monde » : l’héroïne de Disney qui préfère la mer au prince charmant”, Le Monde. Paru le 25 novembre 2016. Consulté le 28 décembre 2016.
• HARRIS Aisha, “«Vaiana» ou la fin (tant attendue) des contes de fées chez Disney”, Slate. Paru le 30 novembre 2016. Consulté le 28 décembre 2016.

• LE BRETON, Marine, “Vaiana, la nouvelle héroïne Disney qui fait du bien aux petites filles”, Le Huffington Post. Paru le 27 novembre 2016. Consulté le 28 décembre 2016.

• CHARPENTIER, Aurélie, “Disney, le grand manitou du divertissement”, E-marketing. Paru le 1er avril 2007. Consulté le 28 décembre 2016.
• « Girly », Wikipédia. Dernière modification le 26 octobre 2016. Consulté le 7 janvier 2017.

Crédits:

• Alexsandro Palombo, Life is not a fairytale

• Top 5 des licences en valeur sur le marché du jeu et du jouet français en 2015, source panel Epsos, lsa-conso

• Loryn Brantz, graphiste et journaliste chez Buzzfeed

• Les Magasins U, Catalogue de Noël 2015

• GoldieBox

• Le Huffington Post, 27 novembre 2016

 

1
Christine and the Queens
Politique

"She wants to be a man, a man … She wants to be born again, again"

Ce n’est pas l’histoire d’une femme qui aurait aimé être un homme, comme le chante Christine and The Queens, mais celle d’un homme qui souhaite devenir une femme. Dans The Danish Girl sorti en janvier 2016, Tom Hooper retrace la vie de la pionnière du mouvement transsexuel, l’artiste danoise Lili Elbe. Et comment ne pas avoir eu vent de Bruce Jenner, le beau-père de Kim Kardashian devenu il y a peu Caitlyn Jenner ? Si les transsexuels et transgenres – oui, il y a une différence – sont remis à l’honneur et tentent de légitimer leur choix, leur style de vie, qu’en est-il dans la réalité ? En parlons-nous tant que cela et les connaissons-nous vraiment si bien ?
The Danish Girl ou l’ode à la transsexualité et à la féminité
Ce début d’année commence fort avec un film qui risque d’être l’un des plus marquants de 2016 : The Danish Girl. Le film raconte la vie de Einar Wegener, un artiste danois qui en se travestissant en femme pour servir de modèle à sa femme Gerda Wegener, devient Lili Elbe. Prenant goût aux costumes et à l’attitude féminine, Lili se sent prisonnière de son corps masculin et décide de changer de sexe. Nous sommes en 1930 et la première femme transsexuelle est née. 86 ans plus tard, ce film nous interroge sur notre connaissance et notre position face aux transsexuels : Tom Hooper met en exergue la difficulté pour un homme ou une femme d’oser assumer sa véritable identité sexuelle et force est de constater que le sujet a encore une résonance terriblement actuelle en 2016.

Sa sortie fait également écho au tapage médiatique qui n’a de cesse depuis l’été 2015 autour de Caitlyn Jenner et de la couverture de Vanity Fair. Résonance médiatique d’autant plus forte que Caitlyn, ancien athlète, fait partie du clan extrêmement médiatisé des Kardashian. Rappelons tout de même que même s’il lui a fallu de l’audace pour s’assumer aux yeux du monde, Caitlyn ne s’est pas reposée sur ses lauriers et a lancé sa propre émission : I am Cait… diffusé sur E ! News, qui, malgré une faible audience, aurait permis à Caitlyn de toucher plusieurs millions de dollars. Alors, volonté de démocratiser l’image des transsexuels ou promotion de soi à la Kardashian ?
Précisons d’ailleurs que, bien évidemment, Caitlyn possède des mensurations parfaites : alors que de nombreux sites de mode vantent la diversité des femmes et non l’existence d’un type idéal, un homme qui décide de changer de sexe prend soin de ressembler à « la femme parfaite ». Pourtant, la volonté des transsexuels est d’être en adéquation avec leur corps et leur identité, et pas nécessairement avec un stéréotype. Le débat est sans fin…

L’art et la musique : refuge de ces oiseaux de nuit ?
Bien que le cas de Caitlyn Jenner soit l’expression –très médiatique et controversée- d’une volonté de normaliser les transsexuel(le)s, il n’en demeure pas moins que les mentalités ont toujours semblé méfiantes quant aux transgenres, les associant bien souvent aux bas fonds des grandes villes.
Toutefois, remercions 1968 qui a permis la libéralisation des mœurs et quelques années plus tard le développement du mouvement punk à New York, Londres et Paris, où se mélangent à la fois artistes, jeunes, homosexuels et transsexuels. Les chansons se veulent antihomophobies et antitransphobies. Des artistes comme David Bowie jouent eux aussi sur le côté androgyne de leur personnage, ou sur le flou autour de leur sexualité : ni homme, ni femme, juste soi. Christine and The Queens reprend ces idéaux dans, par exemple, sa chanson « Paradis Perdus », qui raconte sa rencontre avec des drag queens à Londres.
D’autres au contraire, conscients du malaise qui gravite encore autour de la transsexualité, décident de se cacher : c’est le cas de Caroline Cossey qui en 1981 joue une James Bond Girl dans Rien que pour vos yeux. Un tabloïd américain dévoilera des années plus tard que Caroline était en réalité un garçon à la naissance. Après cette révélation, l’actrice reconnaît avoir envisagé le suicide.
 

Une transsexualité à la mode ?
Aujourd’hui encore, les transsexuels souffrent d’une image de marginaux et les témoignages douloureux sont nombreux. Néanmoins dans la mode, lieu de culte de la beauté et de la tendance, les créateurs tentent d’afficher une certaine ouverture d’esprit en prenant comme mannequins des femmes transsexuelles : c’est le cas d’Andreja Pejic qui pose pour le magazine féminin Vogue, ou encore de Léa T pour Givenchy. Mais encore une fois, on peut interroger la sincérité des créateurs et des magazines : s’agit-il vraiment d’affirmer son soutien à la cause des trans en les faisait défiler et en leur permettant de s’assumer dans leur nouveau corps et identité, ou bien s’agit-il de faire la promotion de sa marque en montrant au monde entier que l’on est ouvert à ces pratiques qui sont récusées par beaucoup ?

En toute honnêteté, ne voyons-nous pas des femmes qui défilent ? Pour la majorité, il est impossible de savoir qu’elles étaient des hommes à la naissance, et nous ne pouvons qu’admirer leur beauté.
Et si la mode joue de plus en plus sur le non-genre et l’aspect unisexe de ses collections et qu’on pourrait penser qu’elle serait un moyen pour les transsexuels de libérer leur image et ainsi de « normaliser » leur choix, ne soyons pas dupes. On s’aperçoit bien vite qu’en dehors des projecteurs, cette acceptation est moins évidente et que l’on a davantage tendance à admirer un mannequin transsexuel, parfait, que ceux que l’on croise dans la rue jugés fantasques.
Si l’art et la mode permettent aux transsexuels de trouver grâce aux yeux du public et de faire accepter une certaine différence, les taux de suicide élevés et le mal-être lié au rejet de ces personnes nous prouve qu’il ne suffit pas de quelques stars et coups d’éclats médiatiques pour faire accepter pleinement la transsexualité, et qu’un travail de fond doit être réalisé par la société sur ses préjugés.
Ludivine Xatart
Sources :
Vanity Fair : http://www.vanityfair.fr/timeline-transgenres-popculture#a1950 : « Une histoire des transgenres dans la pop culture ».

Télérama : http://www.telerama.fr/musique/christine-and-the-queens-j-adorerais-etre-une-icone-gay,111590.php
Konbini : http://www.konbini.com/fr/tendances-2/avenir-mode-non-genre/ : « L’avenir de la mode réside-t-il dans le non-genre ».
MetroNews: http://www.metronews.fr/info/suicide-depression-une-premiere-etude-sur-les-souffrances-des-transsexuels/mnks!NHjNLWE0wAAlM/
Crédits images :
The BRCW Reviex
Boston Globe
planettransgender.com
www.hapersbazaar.com

Vous avez dit cliché ?
Publicité et marketing

Magazines de jouets : quand consumérisme rime avec sexisme

Début novembre, nous apprenions que l’enseigne espagnole Toy Planet décidait cette année de passer outre les stéréotypes de genres dans ses catalogues de jouets. Initiative progressiste ou simple « coup de com’ » à l’approche des fêtes de fin d’année ? Dans tous les cas, cette décision nous interpelle et nous amène à réfléchir sur la place du marketing genré dans les catalogues de jouets.
Une représentation en décalage avec la réalité
 
 
Ce n’est une surprise pour personne, mais Noël est la période la plus démonstrative du monde binaire et stéréotypé dans lequel baignent les magasins de jouets. Il n’y a qu’à tourner les pages de n’importe quel catalogue, c’est chaque année la même rengaine : une rubrique rose avec des jouets « pour filles », une autre bleue pour ceux des garçons. Outre les objets proposés – maquillage, dinettes, poupées pour les filles, jeux d’aventures, de logique ou super-héros pour les garçons – la différence se remarque aussi par les mises en scènes, les postures, et les symboles évoqués. Dans la partie masculine, les petits garçons auront plus tendance à être représentés en action, alors que les petites filles seront, en toute logique, passives. Mona Zegaï, sociologue ayant travaillé sur cette question, explique lors d’une interview au site Womenology un exemple de différenciation symbolique : « Le mot ‘eau’ par exemple renvoie au combat chez les garçons (pistolets à eau) ou à des milieux à maîtriser (aller sur l’eau, sous l’eau…) alors qu’elle renvoie surtout au travail domestique chez les filles (lave-linge…) ».
Cette segmentation marketing paraît bien loin des pratiques professionnelles observées dans la société selon la sociologue : « la population active comprend aujourd’hui à peu près autant d’hommes que de femmes, et pourtant dans les jouets, les femmes sont presque toujours représentées au foyer, elles n’ont pas souvent une activité professionnelle. » Les mises en scènes et les rôles sociaux montrés aux enfants dans ces magazines n’évolueraient donc pas du tout, contrairement à la réalité observée. Selon une étude de l’Insee, en France, le taux d’activité des femmes âgées de 25 à 49 ans était de 60% en 1975 contre 85% en 2012. Même si les inégalités, ces progrès méritent d’être soulignés.
Les représentations du genre en question
Si le phénomène est dénoncé depuis les années 1970, c’est en 1990 qu’il s’amplifie vraiment. Dans son étude pour le programme « Enfance & Cultures », Mona Zegaï cite les propos d’un cadre du groupe Ludendo (La Grande Récré) : « La petite fille elle voit sa maman en train de faire à manger, ça lui plaît, et donc il y a des jeux qui lui permettent de faire la cuisine, donc elle va vouloir une cuisine, elle va vouloir faire comme maman ! Les activités ménagères c’est pareil. » Les magazines de jouets contribuent donc, au même titre que les autres médias, à inculquer des repères binaires aux enfants et à leurs parents. Pourquoi continuer à poser ce regard biaisé d’adulte sur des produits destinés aux enfants ? Cela contribue-t-il à pérenniser les stéréotypes?

Quelles conséquences sur la construction chez l’enfant de son identité de genre? Dès sa naissance, l’enfant est influencé par son environnement social. Pour la chercheuse en psychologie Isabelle D. Chernay, qui a publié dans la revue Enfance un article sur la sexualisation du jouet par l’enfant, « les jeunes enfants décident si un jouet est destiné aux garçons ou aux filles en fonction de leurs convictions préexistantes sur les jouets qui sont aimés par les garçons et les filles. » Elle nuance cependant son propos par cette remarque : « En ce qui concerne leurs propres choix de jouets, les enfants ont tendance à raisonner en se basant sur la fonction du jouet et leurs propres aversions. » L’enfant en bas âge intègre donc les stéréotypes de genres des jouets qu’on lui propose, mais ne tiendra pas compte de cette binarité si le jouet lui plaît. Qu’en est-il de l’influence des stéréotypes véhiculée par les jouets sur les parents ? Un rapport du Sénat sur l’importance des jouets dans la construction de l’égalité entre filles et garçons datant de 2014 cite les propos de Michel Moggio, directeur général de la Fédération française des industries du Jouet et de la Puériculture (FJP) : « le premier critère d’achat reste toutefois pour les parents de ‘faire plaisir à l’enfant’ ». On peut également lire plus loin que l’importance accordée à des jouets non-sexistes serait relative au capital culturel des foyers : « Faire plaisir à l’enfant semble plus important dans les familles à ‘capital culturel’ modeste ».
La riposte : quand les marques de jouets pour enfants s’affranchissent des stéréotypes
Les anti-marketing genré existent bel et bien ! Leur volonté : limiter voire annuler les injonctions normatives dans leurs catalogues de jouets. En 2012, Toys’R’Us lance un magazine qui délaisse les codes de genres. L’exemple a été suivi la même année en France par les magasins U, suivi par d’autres enseignes comme Toy Planet. Ce sont ces initiatives qui inspireront le rapport du Sénat en 2014, qui se saisira de la question. Nous sommes certes loin d’une révolution, mais il s’agit d’un premier pas pour renverser la tendance. Comme l’on pouvait s’en douter, de nombreuses associations anti-gender et autres groupuscules réactionnaires ont fustigé ces évolutions, accusant les chaînes de magasins de bafouer les valeurs traditionnelles et appelant même au boycott.

Les quelques initiatives progressistes des dernières années montrent bien que les marques de jouets, conscientes de leur poids idéologique sur les enfants et les parents, peuvent communiquer des valeurs plus égalitaires et ne pas céder à la catégorisation primaire et stéréotypée de la société. Néanmoins, selon Brigitte Grésy, inspectrice générale des affaires sociales qui intervient dans le rapport du Sénat, ces évolutions n’ont pas donné de suites significatrices sur la durée et leur influence sur l’industrie du jouet a été quasi-nulle. A quand des jouets pour faire des petits garçons de bons futurs papas ?
Mathilde Duperyon
Linkedin
Sources :
Mona Zegaï. « Les catalogues de jouets proposent un monde bien plus inégalitaire que la réalité » in Womenology, mis en ligne le 27/01/14 – Disponible sur : http://www.womenology.fr/reflexions/les-catalogues-de-jouets-proposent-un-monde-bien-plus-inegalitaire-que-la-realite/
Trezego. « Stéréotypes et jouets pour enfants : la situation dans les catalogues de Noël » – Disponible sur : http://api.rue89.nouvelobs.com/sites/news/files/assets/document/2013/12/trezego_etudecataloguesnoel2013.pdf
Yvelines Nicolas. « Jouets pour filles, jouets pour garçons, pourquoi ? » in Adequations, mis en ligne le 06/12/15 – Disponible sur : http://www.adequations.org/spip.php?article1911
Rapport d’information du Sénat n°183 (11/12/14) – Disponible sur : http://www.senat.fr/rap/r14-183/r14-1831.pdf
Pierres-Yves Cabannes. « Trois décennies d’évolution du marché » in INSEEC – Disponible sur : http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/HISTO14_f_D5_travail.pdf
Claire Levenson. « La suppression des distinctions fille-garçon dans les magasins Target relance le débat sur le genre » in Slate, mis en ligne le 18/08/15 – Disponible sur : http://www.slate.fr/story/105639/jouets-genre-distinctions-fille-garcon-magasins-target
Cherney Isabelle D., Harper Hilary J., Winter Jordan A., « Nouveaux jouets : ce que les enfants identifient comme “ jouets de garçons ” et “ jouets de filles ”. », Enfance 3/2006 (Vol. 58) , p. 266-282 – URL : www.cairn.info/revue-enfance-2006-3-page-266.htm.
Crédits images : 
– http://www.twenga.fr/
– Wikipédia
– Toy Planet

marketing genré
Publicité et marketing

Fillettes, devenez ingénieurs !

Qui offrirait un camion à une fillette de trois ans ? Personne sans doute …  Pourtant, l’air du temps et la teneur des discours pourraient nous faire espérer le contraire. A l’heure où les médias nous serinent avec la parité à coup d’articles tels que « Les femmes face aux discriminations salariales » Les Echos 24/03/2014, « Municipales : pourquoi la parité a échoué » le Monde 3/04/2014 ou encore « la femme est un homme comme les autres » Elle 17/10/2007, n’aspirons nous pas à une plus grande égalité entre les sexes ? Or, celle-ci devrait commencer dès le plus jeune âge. En effet, dans Hommes, femmes : construction de la différence, Françoise Héritier montre que la socialisation des enfants est déterminante dans la construction des rôles sociaux. Les différences d’éducation entre garçons et filles sont au fondement des inégalités. Ainsi, les filles intériorisent très rapidement le rôle que la société leur a attribué. Calme, soigneuse et presque maniaque, la fillette est incitée à faire des coloriages, à ranger ses affaires et reçoit en cadeau des aspirateurs en plastique. Alors que l’hyperactivité, l’insouciance voire l’indiscipline sont valorisées chez les garçons. Leurs mères sont plus permissives et moins exigeantes. Quant à leurs cadeaux, ils sont davantage liés à l’univers du jeu qu’à celui de l’utilité. Le jeu est ainsi un vecteur privilégié de cette socialisation genrée.

Alors, dans ce contexte, comment les marques de jouets envisagent-elles les choses ? Bien que le marketing genré soit adopté par la majorité des marques, certaines résistent. Toutefois, Lego a pu en faire les frais : colorier sa célèbre brique en rose n’a pas suffi. En 1994, le lancement de Lego Belville se solde par un cuisant échec plongeant l’entreprise dans quatre ans de recherches intensives. Des études qualitatives ont été menées durant cette période afin de mieux cerner la psychologie et le comportement des petites filles. Finalement, la conclusion est sans appel. Les petites filles aiment les jeux de construction et de rôles, comme les garçons. Une nouvelle gamme respectant l’ADN de la marque tout en s’adaptant aux attentes de cette nouvelle cible est lancée en 2012. Ainsi, plutôt que de proposer une figurine top model, Lego use du storytelling pour amorcer l’histoire de cinq copines qui vivent des aventures trépidantes et laisse la possibilité aux fillettes d’inventer la suite. Grâce à une communication 360, créant un univers cohérent entre tous les supports, cette gamme devient rapidement un pilier de la marque. Au rayon des jouets pour filles, elle se classe troisième des meilleures ventes après l’indétrônable Barbie et la star montante Monster high introduit en France en 2011. En 2013, la gamme Lego Friends représente 13% des ventes et a encore une belle perspective de croissance devant elle.

A contrario, la start-up américaine GoldieBlox rejette cette approche genrée. La marque a bien évidemment été créée par une femme, Debbie Sterling, en 2012. Son objectif à long terme est d’ouvrir le marché des jeux intellectuellement stimulants aux petites filles. Révélée à plus de cent millions de spectateurs à l’occasion du Super Bowl, la marque a choisi un positionnement on ne peut plus différenciant et inédit, en affirmant sa volonté de former la prochaine génération d’ingénieurs. Sa dernière campagne de publicité vise donc à susciter des vocations chez les fillettes. Elle n’a pas fini de faire parler d’elle puisque le premier spot avait généré plus de huit millions de vues en une semaine. (https://www.youtube.com/watch?v=ZVCC83cDch0)
Alors la prochaine fois que vous vous planterez devant le rayon jouet, réfléchissez !
Miléna Sintic
Crédits photos :
The Pink Project – Songmi & Gayoung and Their Pink Things>
Light jet Print, 2007. – <The Blue Project – Cole and His Blue Things>
Light jet Print, 2006
LEGO® Friends 2012 TVC 
 

Culture

ZOMBIES 2.0

 
Aujourd’hui, Elsa Couteiller, Léo Fauvel et Noémie Sanquer nous proposent une analyse de la stratégie média mise en place par Canal+. Si la chaîne cryptée a réussi à mettre en place une stratégie de bouche à oreille, il est dommage que Canal+ n’ait pas prolongé de manière plus efficace la série sur Internet. Ce modèle américain de communication n’a pas été mené jusqu’au bout, entraînant une certaine déception chez des téléspectateurs habitués.
 
Les Revenants, zombies qui font le buzz
Le fameux bouche à oreille aura bien fonctionné pour Les Revenants. Plus grand succès de toutes les créations originales de Canal+, les abonnés de la chaîne ont su faire partager leur engouement pour cette série et ses  zombies d’un nouveau genre.
Le coffret de la Saison 1 a donc dû être déposé sous de nombreux sapins ce Noël.  Les abonnés de Canal+ voulant faire découvrir aux non abonnés cet ovni télévisuel.
Le buzz a été fondé sur la qualité-même de la série. Considérons ici le buzz comme le fait de faire parler d’un produit avant même son lancement, en entretenant un bouche à oreille savamment orchestré et des actions ciblées auprès des leaders d’opinions (ici, les journalistes).
Ceux-ci, dès le 17 octobre, ont pu, pour les plus chanceux, visionner jusqu’à 6 épisodes en avant-première. En sont ressortis de nombreux articles élogieux qui ont mis l’eau à la bouche des téléspectateurs. La saison 1 des Revenants était annoncée comme l’événement télévisuel de l’automne.
Un site internet interactif () a également été mis en place en amont de la diffusion du premier épisode de la série. Il avait pour objectif  de faire découvrir les personnages et l’atmosphère si  particulière de la série.
En outre, Twitter a su se rendre vite indispensable aux personnes qui ont suivi Les Revenants, et ce, au travers du hashtag #LesRevenants.  Au-delà des live tweets qui ont été organisés lors de chaque diffusion d’un nouvel épisode, Twitter est devenu le rendez-vous incontournable pour les tweetos ayant adhéré à la série.
Ce n’est pas étonnant étant donné que Twitter privilégie l’émotion à travers le caractère instantané du mode de communication. En tout, ce sont presque 22.000 tweets qui ont été échangés pendant toute la première saison des Revenants.
La série laisse le téléspectateur à la fin de chaque épisode avec son lot de questions restées sans réponse. Les Revenants ont réussi, pour cette première saison, le coup de maître de faire revenir  les abonnés à la même heure chaque lundi soir. Au vu du succès, on oserait presque parler de « télévision cérémonielle »  en référence à l’analyse de Daniel Dayan et de Elihu Katz dans La télévision cérémonielle : Anthropologie et histoire en direct.
La cérémonie se prolongeait souvent sur Twitter et sur la fan page de Facebook de la série. Deux lieux où les téléspectateurs pouvaient exposer leurs différentes théories et s’aider mutuellement en tentant de dissiper le mystère.
La fan page enregistre le lundi 7 janvier 2013, plus de 28.000 « J’aime ». La série, depuis son lancement le 26 novembre 2012, n’a cessé d’accueillir les questionnements et les félicitations des téléspectateurs, enjoués après chaque épisode.
Canal+ tenait ainsi les téléspectateurs en suspense et cela jusqu’à la diffusion du dernier épisode de la série le 17 décembre dernier. Et là, changement de ton perceptible chez les fans. La déception pouvait se lire dans leurs messages, que cela soit sur Facebook ou sur Twitter. La frustration était trop forte.
Un retour de flamme pour Les Revenants qui pourrait avoir un impact sur le succès de la saison 2 actuellement en cours d’écriture.
 
Les Revenants – Aspect Transmédia
 

Trois semaines (et un certain nombre de festivités hivernales) après la diffusion de l’épisode 8, les critiques fusent encore sur la fin décevante de la première saison. Gageons cependant que cette note sombre ne sera pas particulièrement préjudiciable à l’accueil de la saison 2, tant l’engouement initial avait été impressionnant mais aussi constant – l’audience n’a pas quitté les alentours des 1,4 millions de téléspectateurs, un chiffre impressionnant sur l’ensemble des abonnés de Canal+.
Tout cela étant dit, il ne s’agit pas ici de prophétiser sur les succès futurs des Revenants, mais de soulever une question : la réaction des publics avait-elle été prise en compte dans l’accompagnement de la série ? La couverture transmédia était assez maigre, n’incluant que le site interactif et ses quelques indices, ainsi bien sûr que l’intense mise en valeur de ces derniers sur les réseaux sociaux.

Les indices, donc. Tous n’étaient visibles sur http://lesrevenants.canalplus.fr que durant le temps de diffusion d’un ou deux épisodes, afin bien sûr d’entretenir une certaine dynamique de la part des visiteurs. Leur contenu, pour sa part, était résolument ancré sur les personnages – et particulièrement les revenants. Seul le dernier indice, une coupure de journal associée à l’épisode 8, tendait à donner des informations sibyllines sur l’univers plus général de la série. Et c’est là un choix surprenant.
Canal+, tout comme le réalisateur et scénariste Fabrice Gobert (voir son interview ici) avaient évidemment prévu le risque de laisser le spectateur sur sa faim. D’un point de vue scénaristique, l’idée restait de développer l’univers à mesure que les personnages le découvraient, et sans donner trop de clés au spectateur. La comparaison qui vient immédiatement en tête est alors Lost, au genre également fantastique et championne des révélations qui n’en sont pas. Mais justement, l’accompagnement transmédia était dans ce cas résolument tourné vers la création d’un univers, et d’une mythologie très riche, sur l’île elle-même au moins autant (si ce n’est plus) que sur l’histoire des personnages. Résultat : 6 saisons de cliffhangers à répétition, et un succès qui en fait encore aujourd’hui un cas d’école.

L’erreur (si c’en est une) des Revenants a peut-être été de ne pas puiser dans ce type de méthode, et de garder une interactivité squelettique et trop fidèle à l’esprit de la série elle-même : c’est-à-dire une histoire cohérente et révélée par petits morceaux, là où Lost marchait à coups de rebondissements sans réel fil conducteur. Rappelons d’ailleurs que The Spiral, le très ambitieux projet transmédia d’Arte, avait été diffusé à peine deux mois auparavant, créant un précédent majeur en matière d’accompagnement de séries françaises (même si nous parlons ici d’un projet proprement européen).
Reste peut-être que contrairement à The Spiral, la série Les Revenants devait composer avec un genre fantastique qui n’est pas exactement commun parmi les productions Canal+, et françaises en général. Les publics habitués à The Walking Dead et autres Twin Peaks n’étaient pas forcément ouverts à cette initiative de suspense « à la française », qui servait de lourd argument de vente à la série mais devait définir un contrat de lecture d’un genre nouveau. L‘opportunité était sans doute trop belle pour ne pas créer quelque chose d’atypique, volontairement lent par opposition à la profusion de l’accompagnement des séries américaines.
Mais voilà : la série avait été perçue dès le premier épisode comme une sorte de Messie hexagonal, qui pouvait enfin rivaliser avec les productions étrangères et se libérer des clichés cent fois revus dans le PAF. Or, ces modèles américains ou anglais ont également établi celui d’un flot intense de paratextes, que Canal+ n’a pas fournis en quantité suffisante. Sans aller jusqu’à dire que la déception finale a uniquement été causée par ce manque de contenu transmédia, nous pouvons tout de même espérer que la chaîne retiendra la leçon pour la saison 2.
 
Les Revenants : Les morts aussi cultivent les RP…
Pour faire un buzz, il existe différentes recettes : de l’absence totale d’informations au déversement de teasings et de pseudo-spoilers, chacun choisit son orthodoxie. Canal+ l’a bien compris lorsqu’il s’est agi de faire la promotion des Revenants, et a fait le choix judicieux du juste milieu. Ni trop peu, ni pas assez, la campagne d’avant la diffusion du premier épisode était justement dosée, même en termes de relations presse.
En effet, Canal+ maîtrise l’exercice, au vu de toutes ses créations originales. Il est, de manière générale, extrêmement difficile de passer à côté de la sortie de l’une d’elle, qu’on soit abonné ou non à la célèbre chaîne privée. À travers les campagnes d’affichage, certes, mais aussi par le nombre d’articles publiés avant même la date de sortie de la série. Fidèle à sa politique habituelle, Canal+ a convié un certain nombre de journalistes à une diffusion en avant-première des épisodes des Revenants. Tous les épisodes ? Non, Canal+ n’a cédé que les six premiers, ce qui, me direz-vous, est déjà important dans une série conforme aux canons Canal+, c’est-à-dire de huit épisodes par saison. Mais si nous regardons en arrière, alors que nous avons vu tous les épisodes, c’est un choix qui reste polémique. On entend ici et là que les deux derniers épisodes ont été décevants, en tout cas pas à la hauteur du reste de la série. Les producteurs en étaient-ils conscients ? Ont-ils voulu cacher la faiblesse scénaristique supposée de cette fin de saison ?

Mais revenons à nos moutons, c’est-à-dire à nos journalistes, à qui on a accordé également moult interviews avant la diffusion des Revenants aux abonnés de Canal+. On entend surtout Fabrice Gobert, créateur et réalisateur de la série, mais aussi quelques-uns des acteurs comme Anne Consigny (Claire, mère de Camille) ou Frédéric Pierrot (Jérôme, le père), qui enrobent la série de mystère et surtout, la distinguent clairement du film dont elle est inspirée mais qui avait finalement fait un flop auprès du grand public. La politique de Canal+ a donc été, à l’image de la série elle-même, de peu en dire et de tout suggérer. La diffusion des premiers épisodes aux journalistes – ce lien créé avec la presse que Canal+ connaît et maîtrise bien – a conduit à l’encensement de la série par les journalistes avant même qu’elle ne soit connue du public, à qui Canal+ a accordé un amuse-gueule : les douze premières minutes du premier épisode de la série, où le ton est clairement donné. Musique au temps suspendu, rythme angoissant, gros plans haletants, nous n’avons pu attendre la sortie de la série qu’avec impatience. Mais il est très clair que si Canal+ n’avait pas fait de la série un événement à ne pas manquer, il en aurait été tout autrement. Pour cela, la chaîne ne se contente pas d’une campagne de communication et de publicité classique avec grandes affiches et petits teasings, le tout aux heures de grande affluence sur Canal+, mais exploite au maximum un lien privilégié avec les journalistes.
Mais faire parler de la série ne signifie pas se cantonner à discuter de ce qui s’y passe. Fabrice Gobert, l’homme sur-interviewé de la pré-diffusion des Revenants, a parfaitement conscience qu’avec sa série, il s’insère dans des débats d’actualité : la mort, le deuil, l’absence et tout le questionnement qui les entoure. Dès lors, le pari de Canal+ est d’inclure Les Revenants dans une réflexion sociale grâce à laquelle les téléspectateurs peuvent s’identifier aux personnages de la série. Des journalistes de tous horizons, du Monde à Paris Première, ont évoqué le débat, de telle sorte que Les Revenants, avant même sa diffusion, devenait une référence culturelle pour évoquer la question de la mort.
Le cocktail de complicité et de surprise, entre Canal+ et les journalistes, a permis l’effervescence actuelle autour de la série. En parlant de surprise, Fabrice Gobert cultive l’art du mystère : une saison 2 ? Pas sûr, mais pourquoi pas. Ne parlons même pas de la sortie extrêmement rapide, due sans doute au cryptage de Canal+ qui réduit considérablement le nombre de spectateurs rentables de la série, sortie qui n’avait pas été annoncée dans les délais classiques. Une surprise destinée à se retrouver au pied d’un sapin de Noël tardif ? Probable…
 
Elsa Couteiller (pour « Les Revenants, zombies qui font le buzz »)
Léo Fauvel (pour « Les Revenants, aspect transmédia »)
Noémie Sanquer (pour « Les Revenants : les morts aussi cultivent les RP »)
 
Sources « Les Revenants, zombies qui font le buzz » :
http://www.lexpress.fr/culture/tele/serie-tele-pourquoi-l-episode-final-des-revenants-a-decu-alors-qu-il-est-reussi_1203275.html
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/743489-les-revenants-sur-canal-une-serie-fantastique-pas-si-mortelle-que-ca.html
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1998_num_38_145_370446
Sources « Les Revenants, aspect transmédia »
http://mediacommons.futureofthebook.org/mcpress/complextelevision/transmedia-storytelling/
http://www.experience-transmedia.com/hebdomedia-transmedia-19-11-2012/
http://lesrevenants.canalplus.fr/
http://www.reviewer.fr/dossiers/television/18434/les-revenants-la-saison-2-la-fin-le-createur-de-la-serie-nous-dit-tout.html
http://www.liberation.fr/ecrans/2012/09/03/arte-dans-la-spiral-du-transmedia_843561
Sources  « Les Revenants : les morts aussi cultivent les RP »
http://series-tv.premiere.fr/News-video/Les-Revenants-l-equipe-nous-dit-tout-3575690

“Les Revenants” Création Originale Canal+ – Les premiers Teasers


http://www.huffingtonpost.fr/2012/11/26/les-revenants-canal-plus-serie-zombies-_n_2190426.html
http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20121124.FAP6421/les-revenants-sur-canal-decryptage-de-la-serie-la-plus-attendue-du-moment.html
http://www.spin-off.fr/actualite-2771-25112012-Le-createur-des-Revenants-repond-a-nos-questions.html