Société

L’Impossible.fr, une autre presse

 
En mars 2012, un nouveau venu s’installe dans nos kiosques à journaux. Il ressemble à ces anciens feuillets que l’on cachait sous le manteau. Son nom, L’Impossible, son fondateur, Michel Butel. Et déjà, tout est dit. Vingt ans jour pour jour après la disparition de L’Autre Journal, ce « mook » mensuel singulier reprend de son prédécesseur cette conviction que la presse peut être une œuvre d’art, c’est à dire un espace de liberté et de création. Ainsi, Michel Butel fait appel dans L’Impossible à des écrivains, des poètes, des photographes et des dessinateurs. Des amis et des passionnés, qui s’imposent non pas comme des journalistes, mais comme des artistes dont les idées et les combats s’illustrent par un ton en marge des formulations étriquées de la presse française.

Attaché au papier, seul véritable véhicule de l’émotion de la lecture, Michel Butel et sa rédaction revoient pourtant leur position et lancent le 23 novembre 2012 le site internet (nouvelle version) du journal. On y retrouve certains articles des précédents numéros, des textes de Michel Butel, et bien sûr, la possibilité de s’abonner ou de recevoir en pdf le journal, pour 3 euros. Dans ses billets, la rédaction n’hésite pas à dévoiler les logiques marchandes qui entourent la production du journal, à l’inverse de nombreuses publications qui préfèrent régler dans l’ombre leurs différents. Le combat de L’Impossible contre Presstalis est dévoilé au grand jour: David se dresse contre Goliath et réclame son gain. Et pour cause, le distributeur en crise n’a tout simplement pas distribué à la date prévue le premier numéro, engrangeant de fortes pertes pour un journal indépendant qui bénéficiait d’une forte médiatisation pour sa naissance. Pire, la première messagerie de presse française retient encore une partie du capital de la vente des premiers numéros, une prise en otage désespérée pour un réseau qui connaît en ce moment la fuite de nombreux éditeurs. Michel Butel évoque cette affaire dans son appel aux dons, justifiant par l’indépendance (face aux régies) du journal le recours au mécénat et à la vente de parts de son capital.
Contrairement à sa lecture papier, assez indigeste pour des yeux amateurs, le site de L’Impossible brille par sa clarté. Nouveau rendez-vous d’une communauté peut-être moins parisienne et plus diversifiée, L’Impossible se découvre aussi sur Facebook, dont la page témoigne fièrement de plus de 7000 fans à ce jour. Il se crée un sentiment particulier à la lecture de ce journal, un instant poétique. À la fois un acte subversif envers notre presse si homogène et protocolaire, et l’impression de renouer avec un modèle ancien, celui des écrivains-journalistes.
Une belle preuve que l’utopie peut parfois coïncider avec la réalité, qu’un projet éditorial peut se dresser comme un pont entre le monde littéraire et intellectuel de ses contributeurs, et la vie numérique et connectée d’une bonne partie de ses lecteurs.
Fort de son succès, L’Impossible annonce la création d’un hebdomadaire nommé Encore, plus proche de l’actualité, et qui verra le jour à la fin du mois de janvier.
 
Clémentine Malgras
Sources
Interview Michel Butel et Laeticia Bianchi pour Télérama : http://www.telerama.fr/medias/michel-butel-l-impossible-et-laetitia-bianchi-le-tigre-tant-que-le-desir-existe-nos-journaux-survivront,87363.php
Site du journal : http://www.limpossible.fr/
Pour suivre le fondateur sur Twitter : @michelbutel
Et le journal sur Facebook : https://www.facebook.com/limpossible.journal?fref=ts