Publicité et marketing

Aimez vos courbes… mais pas trop !

Le culte voué à la maigreur dans la mode ainsi que le manque de représentativité des mannequins font aujourd’hui débat dans notre société. Preuve d’une certaine prise de conscience en la matière, certaines marques montrent une volonté de progrès, comme Michael Kors qui a fait défiler Ashley Graham, mannequin aux courbes généreuses, lors de la Fashion Week prêt-à-porter à Paris fin février, ou encore H&M qui a offert une véritable ode à la diversité dans la publicité pour sa collection automne 2016. La nouvelle campagne Zara, accompagnée du tendancieux slogan « Love your curves », soit « Aimez vos courbes », semblait donc s’inscrire dans la même logique…
Retour sur l’échec d’une campagne, qui suscita aussi bien l’incompréhension que l’irritation ou le rire.
Dissonance
Récemment, le groupe de prêt-à-porter espagnol lançait une nouvelle campagne pour promouvoir sa ligne « Body Curves Jeans », des pantalons censés mettre en valeur les courbes de celles qui les portent. Sur l’une de ses affiches, Zara met en scène deux jeunes femmes de dos, avec un cadrage et des jeux de lumières travaillés pour attirer l’attention du consommateur sur les courbes sublimées par ces jeans. L’idée est d’expliciter le bénéfice produit : procédé tout à fait habituel dans la publicité.
Mais la marque ne s’arrête pas là, décidant de faire inscrire sur cette même affiche une catchline bien choisie, qui parle à toutes les femmes : « Love your curves ». À l’heure où les complexes féminins sont plus que jamais répandus et persistants, Zara décide de véhiculer l’image d’une marque s’affranchissant des standards de beauté, aimant les femmes telles qu’elles sont et leur donnant l’envie d’assumer leur corps.
Le bémol ? Les deux jeunes femmes sur l’affiche sont filiformes et portent au maximum du 36 (si ce n’est un 34). Aujourd’hui, la taille moyenne du jean des Françaises est un 40 et 50% d’entre elles font entre un 40 et un 44. La question de la représentativité se pose et l’ironie est frappante — les réseaux sociaux se déchaînent.

Les réseaux sociaux : un jugement sans appel
Interloqués. Choqués. Amusés. Quelques soient les réactions des différents consommateurs confrontés à cette publicité, elles ne se sont pas faites attendre. La première critique visant la campagne Zara est venue de Muireann O’Connell, présentatrice radio irlandaise qui a prise en photo l’affiche puis l’a partagé sur la toile.

En quelques heures, son post était retweeté plusieurs milliers de fois. Le bad buzz né à Dublin, n’a pas tardé à faire le tour du monde, comme en témoignent les différents détournements et reprises du print, tantôt parodié, tantôt ouvertement critiqué. Un seul constat pour la marque : la campagne est ratée.

 

L’effet papillon : quand un print entache l’image de marque

Cette campagne est incontestablement néfaste : Zara est très loin de véhiculer l’image souhaitée et la marque est même accusée de favoriser des standards de beauté reposant sur la maigreur, voire même, d’encourager l’anorexie chez la femme.
Les internautes parlent d’ironie, de cynisme, voire d’insensibilité de la part de Zara. Certains se questionnent sur l’énormité de cette affiche : comment est-il possible que personne ne se soit rendu compte d’une telle incohérence ? Et si la réponse à cette question était simplement que cela était voulu ? C’est du moins ce que supputent certains internautes, accusant Zara d’avoir volontairement créé ce bad buzz.

Aujourd’hui, les campagnes associées à des polémiques ou à des flops sont davantage médiatisées et les consommateurs ont bien plus de réactions à leur vue, ce qui favorise finalement et paradoxalement une mémorisation du produit et de la marque, comme ce fut le cas dernièrement pour les campagnes Yves Saint Laurent et SuperGurl pour le Black Friday. Pourtant, même si quantitativement, ce coup médiatique peut sembler intéressant, il ne l’est pas du tout qualitativement, puisqu’il nuit grandement à l’image de la marque.
Alors, véritable échec ou campagne marketing parfaitement calculée ? Sans nul doute, nous sommes face à un échec cuisant.
Lucille Gaudel
 
Crédits  :
• Logo Zara
• Captures d’écran recueillies sur Twitter
 
Sources :
• BERTHET Anne Caroline, 20 Minutes, « A quoi ressemble le Français moyen ? », 4/07/2010, consulté le 02/04/2017
• BOULT Adam, Telegraph, « Zara criticised for ‘love your curves’ campaign – featuring slim models », 1/03/2017, consulté le 30/03/2017
• DUSSERT Margaux, L’ADN, « “Love Your Curves” : quand Zara dérape », 1/03/2017, consulté le 30/03/2017
• LE GALL Elodie, Femmes Actuelles, « Quelles sont les mensurations des Françaises ? » , 7/07/2016, consulté le 01/04/2017
• TRICHOT Ludivine, Huffington Post, « Elles rappellent la définition de « courbes » à Zara qui semble l’avoir oubliée », 1/03/2017, consulté le 5/04/2017
 

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Mauvais point pour Vogue Mexique

 
On le sait tous, derrière le monde beau et merveilleux de la mode se cachent des réalités plus sombres, à commencer par celles concernant le mannequinat.
 Conscient de l’image peu saine que renvoient souvent les jeunes models, Jonathan Newhouse, président de Condé Nast International, avait lancé en juin 2012 The Health Initiative, un accord entre 19 éditions de Vogue pour s’engager à véhiculer une image de bien-être dans leurs numéros. Parmi les principaux points abordés dans cet accord, on peut citer l’établissement à 16 ans l’âge minimum des mannequins collaborant avec les magazines.
  Qu’en est-il aujourd’hui de ces bonnes résolutions ? Difficiles à tenir, semblerait-il. Vogue Mexique a récemment  marqué la troisième violation du Health Initiative parmi les éditions engagées (succédant aux éditions chinoise et italienne), en incluant dans son dernier numéro le mannequin Julie Borawska, 15 ans. Il a justifié son erreur en déclarant que l’agence « n’avait jamais mentionné que Julie Borawska était si jeune » et qu’elle avait « l’air d’avoir 18 ans ».
 Ainsi, si l’on peut saluer l’effort initial, ces quelques faux pas remettent en question la crédibilité même de ce Health Initiative. Vogue est en effet bien connu pour ces diktats sévères et, souvent, controversés. Peut-on y voir une véritable prise de responsabilité vis-à-vis de son lectorat, ou une simple volonté de véhiculer une nouvelle image du magazine, plus humaine ?
 
Charlene Vinh
Sources
Xaxor
Vogue
Fashionista