Politique

Le off : règle ou exception

« D’après une source proche du dossier » « D’après un habitué des couloirs de l’Assemblée » « D’après un intime d’Emmanuel Macron » …
La politique est une affaire de calculs. Comment donner son avis sur un sujet sensible sans se mouiller ? Nos politiciens ont depuis longtemps trouvé la solution : le off.

Hollande interviewé par des journalistes
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Vers la fin du off ?

Début d’année, reprise de la campagne présidentielle – qui s’était un peu arrêtée avec la magie des fêtes – et comme d’habitude, cela ne commence pas par le meilleur. Le Parisien publie des propos attribués à François Hollande où celui-ci se met dans la peau de Nicolas Sarkozy : «Je suis le Président de l’échec, je suis un sale mec, mais dans cette période difficile, je suis le seul capable, j’ai le courage…». Cette déclaration, tenue en off, avait elle vocation à se retrouver dans la presse ?
De plus en plus malmené par les nouvelles technologies et les nouvelles formes de journalisme, le « off » est il encore une réalité ?
Si le « off » a été créé, c’est qu’il servait des intérêts. Dans le principe, il est une protection pour les hommes politiques, qui peuvent de temps en temps s’exprimer librement (ce qui sous-entend bien que ce n’est pas toujours ce qu’ils font quand ils sont interviewés de manière classique). Ainsi que pour les journalistes qui obtiennent des informations -qui même si elles ne sont pas publiables – apportent un ton à l’article et une relation de confiance souvent utile.
Le « off » inciterait donc au journalisme connivent, non critique, facile. En ce sens, les journalistes sont les premiers à défendre la publication du off dans leurs articles. C’est le cas de Maurice Szafran, dans l’introduction de son livre « OFF : Ce que Nicolas Sarkozy n’aurait jamais dû nous dire », qui écrit « le journalisme neutre, faussement objectif, nous fait mourir ». La publication du « off » serait l’anecdote, la petite information qui apporterait la touche finale à un article peu dynamique. Cette vision du journalisme à l’anglo-saxonne prône la transparence totale : « un président ou un candidat à la présidence n’a pas de vie privée » avait dit Bob Woodward (il fût à l’origine du scandale du Watergate).
Dans cette manière de penser le « off », on comprend bien que celui-ci serait toujours involontaire de la part du politique. C’est une pensée naïve. Cependant, il est sûr qu’au fur et à mesure que le « off » disparaît, les hommes politiques s’adaptent. C’est donc un nouveau canal de communication, avec un contrat à part qui s’est institué : « je te raconte quelque chose que tu vas publier comme si tu n’avais pas le droit de le faire ». Là, ce n’est plus les politiques ni les journalistes qui sont bernés mais bien les lecteurs. F. Hollande voulait-il se donner une nouvelle image plus combative en traitant N. Sarkozy de « sale mec » ? Ou tentait-il juste un trait d’humour pour construire une connivence plus forte avec les journalistes présents ? Difficile à savoir…
En soi, la question du on/off est en passe d’être tranchée : la frontière entre les deux a disparu. C’est la conséquence logique d’une société où les petites phrases en politique font bien plus vendre que les grands projets de société.
 
Ludivine Preneron
 
Crédits photo :
©Sophie Levy

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