Opération de lancement du jeux video Résident Evil 6 à Londres en 2012
Publicité et marketing

Une communication saignante

 
Le jeu video Resident Evil 6 a lancé il y a quelques semaines sa dernière campagne de communication à Londres. Par quels moyens ? vous demanderez-vous. Affichage, articles, essais du jeu, fête de lancement ? Que nenni ! Resident Evil a choisi une façon plus…trash de présenter son nouvel opus !
C’est en effet une boucherie humaine éphémère qui a ouvert à Londres les 28 et 29 septembre derniers. Une grande quantité de viande fraîche y était proposée : pieds, mains, tripes, corps entiers…. Quel que soit le morceau désiré, le boucher se faisait un plaisir de le découper devant vous ! Vous l’aimez comment, votre communication ?
Les morceaux proposés étaient en réalité de la viande animale, une sorte de jambon pour être exacte, assemblée par l’artiste Sharon Baker dans une « véritable œuvre culinaire » (Docnews). Il est certain que face à de telles réalisations, certains chefs de grandes émissions télévisées pourraient se remettre en main l’usage du couteau !
Les fans du jeu seront ravis, les âmes sensibles…peut-être un peu moins…
Un fait reste indéniable : c’est une campagne qui ne passe pas inaperçue !
Alors, génial coup médiatique ou communication avariée ?
L’usage d’images horrifiques n’est bien sûr pas une exception en communication, mais elles atteignent ici un degré de réalité jamais imaginé. Sous des abords communs pour une boucherie, le lieu attire les passants qui découvrent ensuite le contenu incongru des bacs réfrigérés. Une affiche des différents morceaux de l’être humain est même présentée, tout comme celles que l’on peut voir sur le porc ou le bœuf.
Mais au-delà de la vaste farce organisée par l’inspiration débordante des communicants de Resident Evil, dans un monde enflammé et troublé, où le trafic (illégal) d’organes humains a cours dans nombre de pays, serait-il si invraisemblable d’imaginer l’inimaginable ? Pourrait-on un jour se retrouver tellement déshumanisés qu’il ne nous paraîtrait plus choquant d’acheter des morceaux de nos semblables ? La communication de Resident Evil 6 n’est-elle pas, au fond, un reflet du pessimisme actuel, de cette ambiance de désenchantement et d’impuissance qui gagne nos sociétés ? Sous le couvert d’un coup médiatique détonant, amusant, décalé, ne pose-t-on pas les bases d’un questionnement sur nous-mêmes, sur ce qui fait notre humanité, sur ce qui est encore acceptable ou non ?
Peut-être les dirigeants de Resident Evil, en créant cet évènement, n’ont-ils pas eu l’once d’une telle réflexion ; peut-être (sans doute) n’ont-ils pris cela qu’au premier degré. Cela signifie-t-il pour autant que nous ne devrions pas l’avoir ?
Car, de fait, si les boucheries humaines telles que nous les a présentées Resident Evil n’existent pas, il est une réalité de carnage que nos sociétés laissent exécuter sans bouger ; il est des hommes, des femmes, des enfants, qui dans plus d’un conflit sont laissés à la fureur de véritables bouchers faisant bien pire que ce que nous ne pourrions jamais envisager.
Quoi qu’il en soit, Resident Evil a décidé de poursuivre dans sa veine mordante, puisque les bénéfices des ventes seront reversés à l’Association Limbless, qui vient en aide aux personnes amputées.
Vous en reprendrez bien un petit morceau ?
 
Julie Escurignan
Sources et compléments d’informations :
Article Doc News sur le sujet
Article Webzeen sur le sujet