Société

Les nouvelles séries interactives: coup de com’ ou révolution?

Qui, raidi sur son canapé, n’a jamais hurlé au personnage d’un film d’horreur de ne pas ouvrir la porte, de ne pas emprunter le chemin de gauche ? C’est un instinct inné pour les cinéphiles et autres amateurs du dimanche de marathons Netflix. Un phénomène d’identification naturel, volontairement suscité par les réalisateurs pour nous rendre acteurs du contenu que nous regardons. Rassurez-vous, ce sentiment d’impuissance pourrait finir par disparaître grâce à une nouvelle génération de contenus interactifs qui donnent au spectateur une part de contrôle sur la narration. Le géant du streaming Netflix a annoncé début octobre la sortie d’un épisode de la série futuriste Black Mirror, inédit et surtout interactif qui laisse le choix au spectateur du déroulement de l’épisode.

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COUPE MENSTRUELLE
Publicité, Société

La cupérisation libère la femme … et la publicité !

Qui a vu la publicité de la marque Claricup en juillet dernier ? C’est la première publicité française concernant la coupe menstruelle. Mais elle n’est pas pour autant inscrite dans les contrats publicitaires télévisés qui persistent dans le mythe du progrès avec les serviettes et tampons dernières générations. Et si le discours médiatique emploie abusivement le terme de « révolution », sachez que la cupérisation est elle, une véritable nouvelle ère pour la femme… et la publicité !

 
La cup libère la femme …
La meilleure arme quand les anglais débarquent ? Retroussez vos culottes et armez-vous de votre cup ! La coupe menstruelle est invisible, inodore, indolore et fiable d’un point de vue médical et pragmatique. Elle se positionne plus bas qu’un tampon pour récupérer le flux menstruel mais s’insère de manière similaire à ce dernier. L’essayer, c’est vraiment l’adopter. Ses points forts ? Elle est …
– Hygiénique : en TPE médical, elle n’est constituée d’aucun produit chimique ou parfum qui risquerait de provoquer des allergies et d’assécher le vagin, d’autant plus qu’elle se stérilise en fin de cycle dans de l’eau bouillante afin de la préserver sur le long terme.
– Economique : au cours de sa vie, une femme utilise environ 15 000 serviettes et tampons alors que la cup va vous être fidèle pendant environ 5 ans voire plus si vous en prenez grand soin en la stérilisant à chaque fin de cycle.
– Ecologique : la cup est réutilisable, prônant une culture du durable face aux serviettes et tampons jetables. De plus, lorsque viendra le jour où vous la jetterez, elle sera recyclable.
– Respectueuse du corps : la cup est confortable, à tel point que vous ne la sentirez quasiment pas puisqu’elle épouse parfaitement votre corps alors que le tampon s’impose à ce dernier et s’effiloche au risque de l’infecter et les serviettes favorisent l’humidité – a fortiori les mycoses. C’est elle qui s’adapte à vous selon votre morphologie intérieure (femme ayant enfanté ou non), selon l’abondance de votre flux ou encore selon votre profil (sportive ou non), comme le fait la marque Meluna qui s’emploie à concevoir un type de cup adapté à chacune de vos spécificités.
… Et la publicité !

Les publicités pour les serviettes et tampons se cantonnaient dans un paradigme communicationnel qui représentait le sang en bleu et qui faisait rêver (ou pas) à travers l’image de femmes actives et heureuses sur des voiliers malgré ce mauvais moment à passer. Cependant, même si divers particuliers ont valorisé la cup sur le web, avant que ne le fasse officiellement la claricup, aucune publicité n’avait été commandée par une des marques de cup existantes, ni aucune pub n’avait remis en cause ce modèle. Or, avec cette publicité inauguratrice d’une nouvelle ère communicationnelle des flux menstruels, la marque espère vampiriser les spectateurs par l’humour et l’authenticité : le sang est représenté tel qu’il l’est, rougeâtre, la femme dépassée par la fastidieuse tâche et tache qu’engendrent les serviettes et tampons et le vampire, qui est le fil directeur de la vidéo, se montre compréhensif des réalités constitutives de ce moment particulier tout en les tournant en dérision. Le tabou est alors levé et le trait caricatural renforcé afin d’en faire un ressort de l’humour.

La dynamique du progrès et le concept de la révolution : une communication qui se construit en détruisant 
Tout d’abord, la publicité de claricup s’attache à détruire la doxa toxique en embellissant le moment des flux menstruels : cette « merveilleuse nouvelle » d’avoir ses règles – dont l’adjectif épithète reste incontestablement hyperbolique – annonce une autre manière d’aborder ce « mauvais moment ». En effet, la cup « change la vie » comme l’attestent bon nombre de commentaires sur les réseaux sociaux, certains défilant à la fin de la vidéo.
De plus, ce spot publicitaire est révélateur d’une stratégie communicationnelle qui se construit en détruisant puisqu’il s’impose en ébranlant l’horizon d’attente des spectateurs. Dès la partie liminaire, le tampon et la serviette sont dénoncés comme des « instruments archaïques », précédant une liste de défauts, et sont représentés comme une ère « révolue » avant de faire apparaître la claricup comme la solution à tous les défauts de ses prédécesseurs. Sur le modèle d’un avant/après avec écrans juxtaposés, on constate la différence entre les conséquences de ces anciens « instruments archaïques » et celles de la cup qui est bien plus facile à vivre au quotidien et dont rien que le nom fait de suite bien plus fun.
Avec beaucoup d’humour, le clip Tampon VS Mooncup : rap battle de la Mooncup en 2013 avait déjà amorcé ce nouveau « règne » …

Les youtubeuses : une armée dans l’ombre qui résiste aux monopoles

C’est une défloration du tabou : de multiples vidéos postées par des particuliers font depuis des mois la publicité pour les différentes marques qu’ils utilisent comme le fait Sophie-Pierre sur le site Mademoizelle. Ce feedback est un moteur évident de cette croissance dans l’ombre et de cette légitimation qui se consolide avec les nouvelles générations plus aptes à s’ouvrir à cette révolution.
Ce changement progressif de mentalité annoncerait peut-être un essoufflement des monopoles dans les années à venir car des tampons et serviettes, la coupe est pleine. Cette nouvelle ère qu’incarne la cup est-elle une mise à mort des ces « instruments archaïques » plébiscités par ces youtubeuses ?
Et qu’en est-il des hommes ? Lors des premières évocations de la cup à la télévision on constate leur air dubitatif et leur ironie concernant cette nouvelle alternative qui devient référence comme le souligne le site lesanglaisontdebarque.com. Mais cette évolution peut-elle les intégrer dans une réflexion qu’ils moquent avec distance depuis tant d’années ?
Allison Leroux
Linkedin 
Sources :
Les particularités de la cup Meluna – Site Meluna.fr 
Emissions « Allo docteur » – évolution des mentalités et cupérisation – Vidéo Youtube 
Interview d’une gynécologue à propos de la cup – Vidéo Youtube
Pub Claricup – Sauvez un vampire ! – Video Youtube 
Critique de la publicité pour les serviettes et tampons hygiéniques – Site Mademoizelle 
21 raisons pour lesquelles vous devriez passer à la cup – Site Lesanglaisontdébarqué 
Pourquoi passer à la cup ? – Site Mademoizelle
Relations sexuelles et coupe menstruelle – Site Lesanglaisontdébarqué 
 
Crédits images :
Le Vilain
Mademoizelle
Lesanglaisontdebarques
Ladicup
MenstrualCup

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3D zoom sur fnc
Société

Quand la science-fiction devient réalité !

 
Envoyer un outil par mail dans l’espace c’est possible ? Et bien oui.
Ce mois-ci, la NASA a envoyé les plans d’une manivelle par mail à la station spatiale internationale. Les équipes ont ainsi pu imprimer l’outil manquant grâce à une imprimante 3D. Cette innovation majeure met en exergue la rapidité de production, l’accessibilité croissante aux objets ainsi que de nombreuses possibilités que les marques semblent saisir de plus en plus.
Zoom sur les évolutions communicationnelles qui découlent de cette révolution technologique en marche vers toujours plus de personnalisation.
Barilla et TBWA intègrent la 3D
En effet, les marques ont saisi l’importance d’intégrer la 3D dans leur communication et redoublent d’efforts pour nous épater, nous satisfaire grâce au sur-mesure que propose cette technologie.
Barilla travaille donc sur un projet de pâtes personnalisables que l’on imprimera grâce à une cartouche contenant la mixture. Le client aura donc la possibilité d’exprimer sa créativité en choisissant les formes de celles-ci. Mais avons-nous tous ce désir de créativité ? Ne préférons-nous pas justement que l’on nous dicte ce qui est beau, nous facilitant ainsi la vie ?
Le philosophe Jean-Paul Sartre affirmait : « l’homme est condamné à être libre » ; ne serions-nous pas aujourd’hui condamnés à créer ?
Autre exemple : le « Toy Lab » proposé par l’agence de publicité TBWA Toronto. Ce Noël, l’agence canadienne a demandé à des enfants de dessiner leur jouet rêvé, puis a fait appel à des spécialistes qui ont reconfiguré ces dessins afin de les imprimer en 3 dimensions. Enfin, une vidéo émouvante a permis à l’agence de présenter les jouets et leurs créateurs qui affichaient un sourire jusqu’aux oreilles. Une opération innovante et réussie puisqu’elle montre étape par étape comment cette agence a su s’insérer dans ce tournant technologique et mettre à profit la 3D pour faire sa propre promotion.

 
Le mouvement Maker
Par ailleurs, la naissance de l’imprimante 3D va de paire avec un nouveau mouvement appelé « maker movement » qui peut être qualifié de « DIY (do it yourself) digital ». Il s’agit de créer des objets tangibles grâce aux nouvelles technologies ; une sorte de bricoleur 2.0.
Cette tendance s’allie à la mise en réseau des compétences, rendue possible notamment par internet. Elle permet ainsi aux « makers » de mettre en commun leur savoir-faire, par exemple grâce au système de tutorat. Il est donc plus facile de créer et de produire pour tout à chacun ce qui renverse l’ordre établi- ce rôle étant initialement attribué aux entreprises et autres structures de production.
Les « FabLab » (fabrication laboratories) illustrent également ce phénomène. Ces structures ouvertes à tous permettent à qui veut d’utiliser des machines (telles que des imprimantes 3D) et de profiter des compétences des autres visiteurs, dans le but de concevoir des objets. Preuve que ce concept se propage et surtout se démocratise : le Fablab « Maker/Seine » a cette année ouvert ses portes à Saint Paul, en plein cœur de Paris.

Un challenge pour les marques
Si les marques ont compris l’importance de la 3D, toutes n’ont pas encore intégré cette technologie dans leur communication.
Cependant, certains annonceurs commencent à l’utiliser, à l’instar de Coca-Cola qui a matérialisé ses clients en figurines à leur effigie. Une proposition créative et en totale adéquation avec leur campagne « enjoy a Coca-cola with a friend » entièrement tournée vers la personnalisation et l’individu, puisque les noms des consommateurs sont inscrits sur leurs fameuses canettes rouges et blanches.

De plus, une imprimante 3D coûte aujourd’hui entre 700 et 4000 euros. Ces machines deviennent donc de plus en plus accessibles aux « makers » mais aussi à un nombre croissant de personnes, comme par exemple les membres de la « génération y », qui intégreront cette technologie très aisément dans leurs pratiques futures.
Les marques devront donc relever ce défi technologique et créatif pour rester légitimes et essentielles dans la vie des consommateurs, signe que nous vivons désormais dans une société de plus en plus spectaculaire !
Clara Duval
Sources :
Influencia.net
Lemonde.fr
L’adn.fr
Wikipédia.fr
Crédits photos :
ladn.eu
Google.fr

Com & Société

Quand la Turquie voit rouge

 
On la surnomme désormais la « femme en rouge ». Il n’a fallu que quelques jours pour que sa photo fasse le tour du monde. Le 28 mai, place Taksim à Istanbul, dans les premiers jours des manifestations contre le gouvernement, une femme vêtue d’une robe rouge est aspergée de gaz lacrymogène par un policier. Le photographe Osman Orsal de l’agence Reuters immortalise la scène par une série de 4 clichés, dont l’un particulièrement retiendra l’attention du monde entier.

Les raisons de l’engouement
La contestation turque n’a pas de leader, mais elle a trouvé son icône. Ceyna Sungur, chargée de cours à l’Université technique d’Istanbul, incarne la jeunesse turque libre, éduquée et moderne, qui refuse la radicalisation de la société d’Erdogan. Elle symbolise la contestation liée à la crainte d’une dérive islamiste de la société. Nombre de manifestants dénoncent en effet les attaques du premier ministre Recep Tayyip Erdogan à l’encontre du droit des femmes (injonction à faire au moins trois enfants, restrictions imposées en matière d’avortement, port du voile). Max Fisher, journaliste au Washington Post, propose une analyse intéressante de la photo, dont voici un extrait : « La dynamique entre la femme en rouge et le policier sur la photo est fascinant, comme un microcosme qui montre la relation entre les Turcs révoltés et leur gouvernement, qu’ils perçoivent comme de plus en plus autoritaire. » Alors que les anti-Erdogan dénoncent depuis le début du mouvement la force de la répression menée à leur encontre, le cliché est devenu le symbole de cette brutalité.
C’est donc à cette posture de résistance tranquille, de détermination cool, que des milliers de manifestants ont choisi d’identifier leur mouvement.
Le cliché a inspiré beaucoup de commentaires et de reprises sur les réseaux sociaux. Dans les rues de Turquie, des déclinaisons de ce cliché placardent les murs. L’image est devenue un graffiti, un poster, une banderole, souvent accompagnée du slogan « Plus vous nous gazez, plus nous devenons forts. »

Une égérie de plus dans l’histoire des contestations
L’Histoire nous enseigne qu’il n’y a pas de contestation sans icônes. Certaines images, prises presque par hasard, font subitement le tour du monde tant leur symbolisme est puissant. Après la femme à la fleur durant la guerre du Vietnam, l’homme face aux chars de Tiananmen, Neda en Iran, la femme en rouge s’ajoute à la liste des icônes des grandes contestations de ce monde.
L’intérêt et la limite de ces clichés-icônes
Qu’apportent-ils ? L’apparition systématique d’icônes dans les contestations répond à ce besoin de rassemblement autour d’une figure héroïque. Les héros réaffirment la motivation, le courage, redonne du sens à ce que nous voulons accomplir. Tout comme l’homme se dressant devant les chars de Tian’anmen, semblant affronter à lui seul toute l’armée chinoise, la femme en rouge affronte avec détermination la violence policière souvent dénoncée.

Mais l’icône pour garder toute sa force doit conserver son caractère exceptionnel et hors du commun ; la symbolique qui s’en dégage en dépend. Pourtant, il suffit de jeter un œil à la presse pour constater la prolifération du terme « icône » dans les médias, au risque d’en arriver à le dénaturer et le dé-symboliser, par sa multiplication et son éphémérité.
Les nouvelles icônes de Taskim
A ce titre, la femme en rouge n’est plus la seule icône de la contestation en Turquie. Le 17 juin, « les hommes debout », comme ils se nomment eux-mêmes, se sont rassemblés, statues figées et contestataires, sur la place Taksim. Lancé par Erdem Gündüz, aussitôt suivi par d’autres, ce mouvement a suscité un engouement déjà extrêmement fort sur Twitter. Nombre de médias commencent déjà à parler des « nouvelles icônes de Taskim ». Actions symboliques, oui. Mais l’utilisation systématique des termes « icônes » et « égéries » est problématique. La femme en rouge, ne serait-elle finalement qu’une icône parmi tant d’autres ?
 
Bénédicte Mano
Sources :
Libération
France Info
Rue89
Europe 1
Slate
The Washington Post