Flops

Quand la mode descend dans la rue

 
Germanophone et féru-e de mode, peut-être avez-vous eu la chance de feuilleter l’édition allemande de Vogue du mois dernier. Si oui, vous avez sûrement remarqué certaines photographies d’un goût douteux. Si non, ce qui est parfaitement compréhensible, voici de quoi vous mettre à la page.

On retrouve donc dans cette édition d’octobre 2012 une série de photographies prises dans les rues de New York par Sebastian Kim. Sur le papier glacé, les mannequins posent de manière volontairement négligée devant les enseignes les plus luxueuses. Les magasins Prada et Céline servent alors d’arrière-plan à une mise en scène de la précarité de sans domiciles fixes. Fort heureusement pour la sensibilité des lecteurs, elles restent très bien habillées. Une mannequin fait la manche en lançant un regard glamour et mystérieux. Une autre exhibe ses sacs haute-couture en s’appuyant sur un caddie rempli de canettes de Coca Cola recyclées. Pauvres, mais élégantes d’abord !
L’extrême pauvreté est un sujet tabou. Et la mêler au luxe, ça fait parler. La campagne est de mauvais goût, certes. Mais la démarche artistique aurait pu être intéressante, si elle avait servi à dénoncer la précarité… Mais non. Il semble que Vogue, et le luxe en général, préfèrent jouer la carte de la légèreté et profiter du buzz créé par la mode version SDF.
Les magazines français n’échappent pas à cette tendance. Prenons le magazine de mode Antidote qui, l’an dernier, publiait une série de photos du même genre. Seulement, dans ce cas, le cadre se veut beaucoup plus réaliste.

Cheveux crêpés, cartons en guise de lit, tous les éléments de la caricature sont là. La ligne du politiquement correct est allègrement franchie ; il faut savoir choquer et  faire parler de soi. Peu importe que les critiques soient positives ou non, l’essentiel est de faire du bruit.
Au delà du simple shooting photo, la précarité inspire aussi les créateurs. En2009, l’allemand Patrick Mohr faisait défiler des sans domiciles fixes aux côtés des mannequins professionnels. Un an plus tard, Vivienne Westwood dévoilait la collection « Homeless chic ». Voyez par vous mêmes :

La mode sait être drôle, elle sait aussi être vulgaire et choquante. Peut-être devrait-elle apprendre à trouver le juste milieu entre créativité et respect de l’autre.
 
Khady So
Sources :
Le site du Spiegel
Buzzfeed.com