Publicité et marketing

Le marketing immersif: plongez dans vos séries préférées !

La série TV est un phénomène qui a explosé au XXIème siècle, le support ne cesse d’évoluer et chaque année plusieurs centaines de nouvelles séries font leur apparition dans le champ médiatique. Pour le lancement de séries TV inédites ou de nouvelles saisons, les sociétés de production (HBO, Netflix, AMC, Showtime,… pour ne citer qu’elles rivalisent d’ingéniosité en offrant des campagnes de communication toujours plus insolites. L’engouement sans cesse démultiplié et renouvelé pour les séries TV, leurs succès – le cosplay, les COMI-CON (conventions de pop culture) et autres festivals en témoignent — suscitent d’intenses attentes au sein du public. Et les campagnes de communication jouent fortement sur les attentes des fans en proposant de rendre réel l’univers fictif de leur série préférée, ceci grâce à la publicité. Chaque série à succès a un univers très marqué, les équipes de production travaillent à ce que tous les détails fassent sens et renvoient à une entité fictive, un univers créé de toutes pièces, que les spectateurs peuvent s’approprier. La série ne se limite donc pas seulement à son contenu scénarisé, elle renvoie également à un ensemble de signes distinctifs qui l’identifient clairement. Grâce à son univers, elle devient une marque. La figure de Walter White (bouc, chapeau, lunettes), érigée en égérie de la très appréciée Breaking Bad, est révélatrice d’une sémiotique nouvelle de la série, où la construction des personnages et de l’espace fictif conduit à produire une identité forte. Les vêtements colorés, décalés et dépareillés des nerds de The Big Bang Theory  (notamment les boucles de ceinture d’Howard Wolowitz !) créent un visuel caractéristique de la série et facilement identifiable.

Street et Beach marketing: le marketing immersif sort la tête de l’eau
Cette logique de marque a poussé les productions à mystifier l’identité de leurs séries en lançant de grandes opérations de street marketing, où la fiction devient réelle le temps d’un happening ou d’une campagne de pub. L’univers de la série est parachuté dans l’espace public, impliquant une immersion jouissive et inattendue du fan.
Ainsi, en se baladant sur les plages anglaises du Dorset, les promeneurs pouvaient, à l’occasion de la sortie de la troisième saison de Game of Thrones, se retrouver nez à nez avec un crâne de dragon de trois mètres de haut.  

D’autres campagnes sont d’autant plus surprenantes qu’elles intègrent le spectateur à leur mise en scène, elles exposent un contenu, mais font aussi participer l’audience. Netflix, pour le lancement de la série Sense8 où tous les personnages sont psychiquement connectés, a par exemple collecté les données cérébrales de huit volontaires et les a converties en ondes musicales, créant une toute nouvelle symphonie.
Ces multiples campagnes reproduisent en temps réel les attentes qu’un fan peut avoir derrière son écran, deux exemples sont ici significatifs :
– Envie d’une frayeur sans danger ? En partenariat avec l’agence Relevent, AMC avait, pour le retour de la saison 4 de The Walking Dead, imaginé un stunt (un outil publicitaire créatif qui interpelle le consommateur quand il ne s’y attend pas) horrifique où les New Yorkais se faisaient surprendre de bon matin par des bras de zombies jaillissant d’une bouche de métro. Cette campagne accompagne l’effervescence autour de la Zombie Mania, sur laquelle surfe  The Walking Dead. Le phénomène urbain, véritable happening artistique, des Zombie Walks où des individus se retrouvent, maquillés et déguisés en zombies, pour marcher dans la rue, illustre le déplacement fantasmé de la fiction jusqu’à l’espace public et réel, et il est ici utilisé de façon inattendue par des annonceurs.

– Qui n’a jamais rêvé de se retrouver dans le passé ? Véritable machine à remonter le temps, HBO avait imaginé en 2010 pour la promotion de la saison 1 de Boardwalk Empire  (produite par Mark Wahlberg et dirigée par Martin Scorcese) une campagne aux allures rétro, en s’associant à une marque de whisky, et un hôtel-casino décoré pour l’occasion. La série se déroule pendant la Prohibition, à Atlantic City aux Etats-Unis : gangsters, dollars, et alcool sont donc au rendez-vous. Pour la saison 2, c’est avec la ville de New York qu’HBO s’était associée en remplaçant les actuels wagons de métro par des vieux modèles tout droit sortis des années 1920, à l’intérieur confortable et désuet.

Ces campagnes imaginatives invitent à plonger dans l’atmosphère d’une série. Loin de votre lit ou de votre canapé, l’univers de la série envahit votre rue et se confond avec la réalité. Déplacé du point de vente, le marketing immersif propose une expérience de vie qui mêle la fiction au quotidien du spectateur. L’espace public est alors gagné par la fiction, et renouvelle l’intérêt des fans. Le désir romantique de se voir totalement absorbé dans une fiction, voire confondu avec, est ici pleinement réalisé, jouant avec le plaisir de l’immersion.
Les limites du marketing immersif: la noyade d’Amazon
Cependant, cette immersion fantasmée semble avoir des limites éthiques. L’échec de la récente campagne de communication menée par Amazon pour sa série The Man in the High Castle, révèle que le désir d’immersion n’est pas toujours approprié…

Cette nouvelle série, adaptation du roman choral de Philip K. Dick Le Maître du haut château, est une Uchronie où les forces de l’Axe (Allemagne nazie, Japon) ont gagné la deuxième guerre mondiale et se sont partagés les Etats-Unis. Elle malmène l’Histoire en mettant en scène le quotidien de cette autre Amérique, totalitaire, où les systèmes de pensée et de valeurs occidentaux ont été totalement renversés.
La série invite à questionner, à travers la logique du “et si…?”, les définitions de liberté, d’Etat et d’obéissance dans un monde de terreur où tout est à repenser. Pour le scénariste Frank Spotnitz, l’enjeu de la série se résume à « Comment rester humain face à l’inhumain ? ».
Dans une démarche promotionnelle, et avec l’accord de la Metropolitan Transportation Authority (responsable du réseau new yorkais), Amazon a donc recouvert du drapeau impérial japonais et d’un drapeau américain fictif, où figurent l’aigle nazi et la croix de fer, les sièges d’une ligne de métro. Cette campagne s’inscrit dans la continuité de la publicité immersive en invitant les usagers à se projeter dans cet univers parallèle. Seulement, en essayant de maximiser l’effet de surprise, et en décontextualisant cette mise en scène, cette campagne s’est retournée contre son créateur. Amazon s’est vu interpellé à de nombreuses reprises sur les réseaux sociaux. Les usagers se sont indignés face à cette esthétique nazie qui leur était imposée, sans qu’il leur soit demandé leur avis. Certaines associations juives ont également appelé au boycott de la campagne, notamment la célèbre « Anti-Defamation League », association juive luttant contre l’antisémitisme mais contestée pour son lobbying pro-sioniste (elle a, par exemple, été condamnée dans les années 1990 pour espionnage, et a été reconnue coupable d’avoir collecté des informations sur les opposants au mouvement sioniste ?). Amazon a finalement demandé à la MTA de retirer sa campagne seulement quelques jours après l’avoir lancée. Pourtant, si le lynchage médiatique et effectif de cette campagne de communication paraît unanime et évident (le maire de New York Bill de Blasio lui-même a accordé son soutien aux opposants de la campagne), il révèle aussi l’ambiguïté du marketing immersif, qui peut faire du tort à l’image de marque. Certains brandissent l’argument selon lequel Amazon a, grâce au scandale, fait parler de sa série, à juste titre. Cependant, plusieurs internautes ont également exprimé leur dégoût à l’égard de la production, la considérant comme immorale, déplorant une utilisation commerciale du célèbre roman de Philip K. Dick et appelant au boycott de la série.  

 

La série, qui a par ailleurs reçue de bonnes critiques, se voit donc prise à son propre piège, celui d’une fiction dans laquelle l’immersion ne saurait se faire qu’à travers un écran. La population refuse de revivre une sombre période de l’Histoire du XXème siècle, qui, bien que savamment détournée, ne paraît pas  encore assez lointaine. On sait, par exemple, que New York, même si elle n’a jamais vécu d’occupation nazie, accueille une forte diaspora juive (Israël y recense deux millions de juifs). Elle questionne, au fond, le désir d’oubli des traumatismes de l’Histoire ; celui là en particulier. La série, et surtout sa campagne de communication, se retrouve prise dans une logique entre nécessité de mémoire et désir d’oubli. Ainsi la fiction doit rester fiction, et elle ne saurait pénétrer l’espace réel : devenir trop réelle. L’immersion marketing obéit donc aux lois, parfois sévères, du politiquement correct, et bien que voulant éthiquement questionner la place que nous aurions pu occuper dans cette alternative historique (qui ne s’est jamais demandé s’il aurait été résistant ?), cette campagne produit des effets trop forts.
L’immersion interroge également le pouvoir du symbole, car si la campagne est dérangeante, c’est bien plus en raison de l’aigle impérial et de la croix de fer, icônes nazies, que du drapeau japonais. Un pouvoir du symbole qui suppose une responsabilité éthique dans l’espace public. L’immersion est mise en échec par une réalité qui, même absolument détournée par la fiction, doit rester le choix de chacun de voir ou de ne pas voir.
Dans une Amérique qui imagine des campagnes de plus en plus insolites, poussant à une immersion absolue de l’audience, et où le premier amendement de la constitution autorise quiconque à porter la croix gammée, il est tout de même des sujets avec lequel on ne peut pas jouer. Si la campagne se voulait dérangeante et décalée, elle n’en échappe pas moins à ses créateurs en étant donnée à un public qui veut choisir d’y être ou de ne pas y être, de l’investir ou non. Le marketing immersif révèle ainsi, par ses audaces et ses limites, que la publicité est de plus en plus faite par et pour le consommateur, dont on ne saurait négliger le pouvoir de décision.
Emma Brierre
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Sources:
Deadline, Amazon has no regrets as « the Man on the High Castle » Ad campaign pulled from NYC subway, 24 novembre 2015
Ina global, l’expérience immersive du deep media, 12 août 2015
Télérama, La série « The Man in the High Castle » sonde les valeurs occidentales, 1 décembre 2015
Journal du geek, Amazon retire les pubs de « The Man in the High Castle » du métro de New York, 26 novembre 2015
Gothamist, Should the MTA allow these Nazi insignias on subway cars ?, 23 novembre 2015
Crédits photos: 
Infographie Agence Louis 
Blindbox via AP Images 
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Culture

ZOMBIES 2.0

 
Aujourd’hui, Elsa Couteiller, Léo Fauvel et Noémie Sanquer nous proposent une analyse de la stratégie média mise en place par Canal+. Si la chaîne cryptée a réussi à mettre en place une stratégie de bouche à oreille, il est dommage que Canal+ n’ait pas prolongé de manière plus efficace la série sur Internet. Ce modèle américain de communication n’a pas été mené jusqu’au bout, entraînant une certaine déception chez des téléspectateurs habitués.
 
Les Revenants, zombies qui font le buzz
Le fameux bouche à oreille aura bien fonctionné pour Les Revenants. Plus grand succès de toutes les créations originales de Canal+, les abonnés de la chaîne ont su faire partager leur engouement pour cette série et ses  zombies d’un nouveau genre.
Le coffret de la Saison 1 a donc dû être déposé sous de nombreux sapins ce Noël.  Les abonnés de Canal+ voulant faire découvrir aux non abonnés cet ovni télévisuel.
Le buzz a été fondé sur la qualité-même de la série. Considérons ici le buzz comme le fait de faire parler d’un produit avant même son lancement, en entretenant un bouche à oreille savamment orchestré et des actions ciblées auprès des leaders d’opinions (ici, les journalistes).
Ceux-ci, dès le 17 octobre, ont pu, pour les plus chanceux, visionner jusqu’à 6 épisodes en avant-première. En sont ressortis de nombreux articles élogieux qui ont mis l’eau à la bouche des téléspectateurs. La saison 1 des Revenants était annoncée comme l’événement télévisuel de l’automne.
Un site internet interactif () a également été mis en place en amont de la diffusion du premier épisode de la série. Il avait pour objectif  de faire découvrir les personnages et l’atmosphère si  particulière de la série.
En outre, Twitter a su se rendre vite indispensable aux personnes qui ont suivi Les Revenants, et ce, au travers du hashtag #LesRevenants.  Au-delà des live tweets qui ont été organisés lors de chaque diffusion d’un nouvel épisode, Twitter est devenu le rendez-vous incontournable pour les tweetos ayant adhéré à la série.
Ce n’est pas étonnant étant donné que Twitter privilégie l’émotion à travers le caractère instantané du mode de communication. En tout, ce sont presque 22.000 tweets qui ont été échangés pendant toute la première saison des Revenants.
La série laisse le téléspectateur à la fin de chaque épisode avec son lot de questions restées sans réponse. Les Revenants ont réussi, pour cette première saison, le coup de maître de faire revenir  les abonnés à la même heure chaque lundi soir. Au vu du succès, on oserait presque parler de « télévision cérémonielle »  en référence à l’analyse de Daniel Dayan et de Elihu Katz dans La télévision cérémonielle : Anthropologie et histoire en direct.
La cérémonie se prolongeait souvent sur Twitter et sur la fan page de Facebook de la série. Deux lieux où les téléspectateurs pouvaient exposer leurs différentes théories et s’aider mutuellement en tentant de dissiper le mystère.
La fan page enregistre le lundi 7 janvier 2013, plus de 28.000 « J’aime ». La série, depuis son lancement le 26 novembre 2012, n’a cessé d’accueillir les questionnements et les félicitations des téléspectateurs, enjoués après chaque épisode.
Canal+ tenait ainsi les téléspectateurs en suspense et cela jusqu’à la diffusion du dernier épisode de la série le 17 décembre dernier. Et là, changement de ton perceptible chez les fans. La déception pouvait se lire dans leurs messages, que cela soit sur Facebook ou sur Twitter. La frustration était trop forte.
Un retour de flamme pour Les Revenants qui pourrait avoir un impact sur le succès de la saison 2 actuellement en cours d’écriture.
 
Les Revenants – Aspect Transmédia
 

Trois semaines (et un certain nombre de festivités hivernales) après la diffusion de l’épisode 8, les critiques fusent encore sur la fin décevante de la première saison. Gageons cependant que cette note sombre ne sera pas particulièrement préjudiciable à l’accueil de la saison 2, tant l’engouement initial avait été impressionnant mais aussi constant – l’audience n’a pas quitté les alentours des 1,4 millions de téléspectateurs, un chiffre impressionnant sur l’ensemble des abonnés de Canal+.
Tout cela étant dit, il ne s’agit pas ici de prophétiser sur les succès futurs des Revenants, mais de soulever une question : la réaction des publics avait-elle été prise en compte dans l’accompagnement de la série ? La couverture transmédia était assez maigre, n’incluant que le site interactif et ses quelques indices, ainsi bien sûr que l’intense mise en valeur de ces derniers sur les réseaux sociaux.

Les indices, donc. Tous n’étaient visibles sur http://lesrevenants.canalplus.fr que durant le temps de diffusion d’un ou deux épisodes, afin bien sûr d’entretenir une certaine dynamique de la part des visiteurs. Leur contenu, pour sa part, était résolument ancré sur les personnages – et particulièrement les revenants. Seul le dernier indice, une coupure de journal associée à l’épisode 8, tendait à donner des informations sibyllines sur l’univers plus général de la série. Et c’est là un choix surprenant.
Canal+, tout comme le réalisateur et scénariste Fabrice Gobert (voir son interview ici) avaient évidemment prévu le risque de laisser le spectateur sur sa faim. D’un point de vue scénaristique, l’idée restait de développer l’univers à mesure que les personnages le découvraient, et sans donner trop de clés au spectateur. La comparaison qui vient immédiatement en tête est alors Lost, au genre également fantastique et championne des révélations qui n’en sont pas. Mais justement, l’accompagnement transmédia était dans ce cas résolument tourné vers la création d’un univers, et d’une mythologie très riche, sur l’île elle-même au moins autant (si ce n’est plus) que sur l’histoire des personnages. Résultat : 6 saisons de cliffhangers à répétition, et un succès qui en fait encore aujourd’hui un cas d’école.

L’erreur (si c’en est une) des Revenants a peut-être été de ne pas puiser dans ce type de méthode, et de garder une interactivité squelettique et trop fidèle à l’esprit de la série elle-même : c’est-à-dire une histoire cohérente et révélée par petits morceaux, là où Lost marchait à coups de rebondissements sans réel fil conducteur. Rappelons d’ailleurs que The Spiral, le très ambitieux projet transmédia d’Arte, avait été diffusé à peine deux mois auparavant, créant un précédent majeur en matière d’accompagnement de séries françaises (même si nous parlons ici d’un projet proprement européen).
Reste peut-être que contrairement à The Spiral, la série Les Revenants devait composer avec un genre fantastique qui n’est pas exactement commun parmi les productions Canal+, et françaises en général. Les publics habitués à The Walking Dead et autres Twin Peaks n’étaient pas forcément ouverts à cette initiative de suspense « à la française », qui servait de lourd argument de vente à la série mais devait définir un contrat de lecture d’un genre nouveau. L‘opportunité était sans doute trop belle pour ne pas créer quelque chose d’atypique, volontairement lent par opposition à la profusion de l’accompagnement des séries américaines.
Mais voilà : la série avait été perçue dès le premier épisode comme une sorte de Messie hexagonal, qui pouvait enfin rivaliser avec les productions étrangères et se libérer des clichés cent fois revus dans le PAF. Or, ces modèles américains ou anglais ont également établi celui d’un flot intense de paratextes, que Canal+ n’a pas fournis en quantité suffisante. Sans aller jusqu’à dire que la déception finale a uniquement été causée par ce manque de contenu transmédia, nous pouvons tout de même espérer que la chaîne retiendra la leçon pour la saison 2.
 
Les Revenants : Les morts aussi cultivent les RP…
Pour faire un buzz, il existe différentes recettes : de l’absence totale d’informations au déversement de teasings et de pseudo-spoilers, chacun choisit son orthodoxie. Canal+ l’a bien compris lorsqu’il s’est agi de faire la promotion des Revenants, et a fait le choix judicieux du juste milieu. Ni trop peu, ni pas assez, la campagne d’avant la diffusion du premier épisode était justement dosée, même en termes de relations presse.
En effet, Canal+ maîtrise l’exercice, au vu de toutes ses créations originales. Il est, de manière générale, extrêmement difficile de passer à côté de la sortie de l’une d’elle, qu’on soit abonné ou non à la célèbre chaîne privée. À travers les campagnes d’affichage, certes, mais aussi par le nombre d’articles publiés avant même la date de sortie de la série. Fidèle à sa politique habituelle, Canal+ a convié un certain nombre de journalistes à une diffusion en avant-première des épisodes des Revenants. Tous les épisodes ? Non, Canal+ n’a cédé que les six premiers, ce qui, me direz-vous, est déjà important dans une série conforme aux canons Canal+, c’est-à-dire de huit épisodes par saison. Mais si nous regardons en arrière, alors que nous avons vu tous les épisodes, c’est un choix qui reste polémique. On entend ici et là que les deux derniers épisodes ont été décevants, en tout cas pas à la hauteur du reste de la série. Les producteurs en étaient-ils conscients ? Ont-ils voulu cacher la faiblesse scénaristique supposée de cette fin de saison ?

Mais revenons à nos moutons, c’est-à-dire à nos journalistes, à qui on a accordé également moult interviews avant la diffusion des Revenants aux abonnés de Canal+. On entend surtout Fabrice Gobert, créateur et réalisateur de la série, mais aussi quelques-uns des acteurs comme Anne Consigny (Claire, mère de Camille) ou Frédéric Pierrot (Jérôme, le père), qui enrobent la série de mystère et surtout, la distinguent clairement du film dont elle est inspirée mais qui avait finalement fait un flop auprès du grand public. La politique de Canal+ a donc été, à l’image de la série elle-même, de peu en dire et de tout suggérer. La diffusion des premiers épisodes aux journalistes – ce lien créé avec la presse que Canal+ connaît et maîtrise bien – a conduit à l’encensement de la série par les journalistes avant même qu’elle ne soit connue du public, à qui Canal+ a accordé un amuse-gueule : les douze premières minutes du premier épisode de la série, où le ton est clairement donné. Musique au temps suspendu, rythme angoissant, gros plans haletants, nous n’avons pu attendre la sortie de la série qu’avec impatience. Mais il est très clair que si Canal+ n’avait pas fait de la série un événement à ne pas manquer, il en aurait été tout autrement. Pour cela, la chaîne ne se contente pas d’une campagne de communication et de publicité classique avec grandes affiches et petits teasings, le tout aux heures de grande affluence sur Canal+, mais exploite au maximum un lien privilégié avec les journalistes.
Mais faire parler de la série ne signifie pas se cantonner à discuter de ce qui s’y passe. Fabrice Gobert, l’homme sur-interviewé de la pré-diffusion des Revenants, a parfaitement conscience qu’avec sa série, il s’insère dans des débats d’actualité : la mort, le deuil, l’absence et tout le questionnement qui les entoure. Dès lors, le pari de Canal+ est d’inclure Les Revenants dans une réflexion sociale grâce à laquelle les téléspectateurs peuvent s’identifier aux personnages de la série. Des journalistes de tous horizons, du Monde à Paris Première, ont évoqué le débat, de telle sorte que Les Revenants, avant même sa diffusion, devenait une référence culturelle pour évoquer la question de la mort.
Le cocktail de complicité et de surprise, entre Canal+ et les journalistes, a permis l’effervescence actuelle autour de la série. En parlant de surprise, Fabrice Gobert cultive l’art du mystère : une saison 2 ? Pas sûr, mais pourquoi pas. Ne parlons même pas de la sortie extrêmement rapide, due sans doute au cryptage de Canal+ qui réduit considérablement le nombre de spectateurs rentables de la série, sortie qui n’avait pas été annoncée dans les délais classiques. Une surprise destinée à se retrouver au pied d’un sapin de Noël tardif ? Probable…
 
Elsa Couteiller (pour « Les Revenants, zombies qui font le buzz »)
Léo Fauvel (pour « Les Revenants, aspect transmédia »)
Noémie Sanquer (pour « Les Revenants : les morts aussi cultivent les RP »)
 
Sources « Les Revenants, zombies qui font le buzz » :
http://www.lexpress.fr/culture/tele/serie-tele-pourquoi-l-episode-final-des-revenants-a-decu-alors-qu-il-est-reussi_1203275.html
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/743489-les-revenants-sur-canal-une-serie-fantastique-pas-si-mortelle-que-ca.html
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1998_num_38_145_370446
Sources « Les Revenants, aspect transmédia »
http://mediacommons.futureofthebook.org/mcpress/complextelevision/transmedia-storytelling/
http://www.experience-transmedia.com/hebdomedia-transmedia-19-11-2012/
http://lesrevenants.canalplus.fr/
http://www.reviewer.fr/dossiers/television/18434/les-revenants-la-saison-2-la-fin-le-createur-de-la-serie-nous-dit-tout.html
http://www.liberation.fr/ecrans/2012/09/03/arte-dans-la-spiral-du-transmedia_843561
Sources  « Les Revenants : les morts aussi cultivent les RP »
http://series-tv.premiere.fr/News-video/Les-Revenants-l-equipe-nous-dit-tout-3575690

“Les Revenants” Création Originale Canal+ – Les premiers Teasers


http://www.huffingtonpost.fr/2012/11/26/les-revenants-canal-plus-serie-zombies-_n_2190426.html
http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20121124.FAP6421/les-revenants-sur-canal-decryptage-de-la-serie-la-plus-attendue-du-moment.html
http://www.spin-off.fr/actualite-2771-25112012-Le-createur-des-Revenants-repond-a-nos-questions.html