Société

Bullshit Jobs : Pourquoi se tuer au travail quand on peut vivre (tout court) ?

Quand bosser ne fait plus rêver : le casse du siècle sur la notion de travail Le travail est central dans nos sociétés. Quand on rencontre quelqu’un, la deuxième question posée après avoir demandé son prénom, est de lui demander ce qu’il fait dans la vie. Les enfants ne sont pas épargnés. On leur demande dès le plus jeune âge ce qu’ils voudraient faire quand ils seront grands. Ainsi, le travail est valorisé, et ceux qui n’ont pas de travail sont étiquetés comme fainéants. Le travail est si important qu’aujourd’hui, presque tout le monde veut occuper un emploi à tout prix, quitte à en oublier d’y donner un sens. Les « Bullshit jobs » ou faire semblant de travailler… Vous vous êtes peut-être demandé un jour si votre (futur) métier était utile. C’est vrai, on ne voit pas bien ce qu’un consultant en Ressource Humaine, une avocate d’affaires, ou bien un coordinateur en communication apporte de positif aux communs des mortels. Il est plus facile d’admettre que des métiers comme mécanicien, agent d’entretien ou boulanger sont utiles. Les bullshits jobs: c’est le terme employé par l’anthropologue états-unien David Graeber, pour désigner un emploi rémunéré qui est si inutile, superflu, voire néfaste que même le salarié ne parvient pas à justifier son existence, bien qu’il se sente obligé, pour honorer les termes de son contrats, de faire croire qu’il n’en est rien.…Pour le dire plus simplement : ce sont des jobs auxquels on donne un certain prestige, des cols blancs qui travaillent dans des bureaux, mais qui eux-mêmes ne justifient pas l’existence de leur job. Souvent contraints à une flopée de paperasses, réunions et validations hiérarchiques, les bullshits jobs se caractérisent le plus souvent par des procédures inutiles, histoire de faire “semblant “ de travailler… Avec l’essor du secteur des services et la volonté de redistribuer le profit à des haut placés, on a créé des jobs de cadres et de services à tire-larigot , pas toujours nécessaires…Il ne faut pas confondre les bullshits jobs avec les “shit jobs” qui sont quant à eux peu valorisés et ont des mauvaises conditions de travail, mais qui sont pour autant très utiles.  Des personnes se rendent compte de l’arnaque des bullshits jobs et témoignent mais parfois, il est difficile d’admettre que son job ne sert à rien,  surtout si le job paye bien et est prestigieux. Les gens diraient “mais t’es déjà chanceux d’avoir ce job”. Sur les réseaux sociaux certains s’amusent de ces jobs à la cons… Source : @galansire Travailler a-t-il un sens? La définition du travail est aujourd’hui troublée par de multiples situations ambiguës. De plus en plus de gens s’interrogent sur le sens du travail, et plus spécifiquement sur l’utilité de leur travail, comme vu précédemment avec les bullshits jobs. Nous avons tellement l’habitude de travailler, d’étudier, que nous ne savons plus si c’est vraiment utile. On peut même considérer qu’un travail est utile, à partir du moment où il permet de gagner de l’argent et donc de subvenir à ses besoins. Mais qu’en est t-il de l’éthique? Un travail doit-il être forcément en vue du bien?  Comme dit précédemment, il existe des tas d’emplois qui sont inutiles, voire néfastes. Des étudiants d’AgroParistech (école d’ingénieur du Ministère de l’Agriculture) l’avaient proclamé avec amertume lors de leur remise de diplômes. Contrairement aux métiers écocidaires auxquels on les formait ;  ils appelaient à des métiers véritablement sensés pour la santé de notre planète.  Mais après tout, un job peut être utile pour un tel et néfaste pour un autre, non ? Par exemple, forrer pour le pétrole détruit les coraux mais nous fournit en énergie. Ainsi, ce  sens recherché à tout prix dans le travail est soumis aux intérêts des uns et des autres. Pas facile alors de donner un sens au travail. Travailler moins pour mieux vivre : une solution ? Mais alors une question sulfureuse apparaît : doit-on travailler moins ? Il est difficile d’imaginer qu’on puisse travailler moins, alors qu’encore beaucoup occupent des emplois précaires. Le plein emploi reste le saint Graal. On apprend aux jeunes à choisir un métier lucratif, un logement , une voiture, un CDI… (d’où l’émergence des business schools qui garantissent un certain train de vie) ; et une fois entré dans ce schéma, il est difficile de faire retour en arrière.  Toutefois, une conception plus frugale de la société est envisagée par certains penseurs pour que tout le monde puisse travailler, mais moins et mieux. Selon la philosophe Céline Marty dans son essai Travailler moins pour vivre mieux : Guide pour une philosophie antiproductiviste, nous mettons la “valeur travail” sur un piédestal, ce qui nous empêche d’envisager une vie avec moins de travail. Il vous est peut-être arrivé de vous surprendre à vouloir rentabiliser tout votre temps pour être productif : se dire que regarder Netflix en anglais vous aidera à avoir des meilleures notes, penser qu’une expérience de bénévolat ferait bien sur le CV, ou encore considérer nos proches comme un bon réseau. Pour Marty, cette logique productiviste omniprésente est dangereuse. Il serait possible de réorganiser la société sous un autre prisme que celui du travail. Au-delà de la réduction du temps de travail pour éviter les bullshits jobs qui a déjà été discutée, on pourrait supprimer les emplois polluants et inutiles. Par exemple, faire la publicité de la marque Louis Vuitton ne serait pas un besoin essentiel, et est en plus non-écologique, On pourrait alors dire adieu à ce métier.…en bref : produire moins et mieux. Il faudrait revenir à une définition plus utilitaire du travail: simplement une activité de satisfaction des  besoins, d’autant plus à l’aune d’une crise climatique. Une fois que les besoins sont satisfaits, plus besoin de travailler. Doit-on avoir peur pour nos futurs métiers ?  Le mythe du « travailler plus pour réussir » à l’épreuve des générations. Par ailleurs, on voit un mouvement chez la jeune génération qui rejettent cette vieille vision du travail. La Gen Z refuse le badge de ‘workaholic’ et l’assume ! Pour caricaturer, la jeune génération ne reste plus au bureau des heures et des heures pour prouver son engagement à son manager et ne néglige plus sa santé mentale ; il change d’entreprise tout le temps, et sa pire phobie : le CDI ! Au lieu de rêver carrière, il rêve de voyages et de projets personnels. En bref, ce spécimen choque la génération qui ne jurait que par un emploi établi et prospère. Source : Instagram @alexandra.glow_ Source : TikTok @zenifonline En tant que Celsien.ne.s, ces réflexions sont  plus pertinentes que jamais. La  réorganisation d’une société plus frugale paraît encore bien loin à l’heure du capitalisme. Toutefois, des petites vagues à l’horizon commencent à faire chavirer la valeur travail comme le montre l’actualité: semaine de 4 jours, Grande démission, la ras le bol de la GenZ…autant de petits signes qui montrent peut-être le début de la fin de la tyrannie travail.  Pour aller plus loin : John Meynard Keynes, Perspectives économiques pour nos petits enfants  (travaux économiques pour une semaine de 15 jours) Témoignage documentée par des experts un bullshits jobs par Arte Radio https://www.youtube.com/watch?v=5PNKqsL8VS8 Reportage d’HugoDécrypte sur le livre de David Greaber : Entretien avec Marie-Anne Dujarier sur le sens du travail aujourd’hui par Arte dans le format Les idées larges : Sources :  Remise de diplômes Agroparistech : https://www.youtube.com/watch?v=SUOVOC2Kd50 Marie-Anne Dujarier, Troubles dans le travail David Geaber , Bullshits Jobs Céline Marty, Travailler moins pour vivre mieux. Guide pour une philosophie antiproductiviste Ariane Marin-Curtoud
Société

Le coworking: les bienfaits de la communication

Notre époque voit se développer massivement l’entrepreneuriat : de plus en plus de personnes créent leur propre entreprise. Elles échappent ainsi au rebutant statut de salarié, jouissent d’une liberté totale puisqu’elles sont leur propre patron, et surtout, peuvent laisser parler leur créativité, leur imagination, et leur soif de créer. Mais face à la multiplication des entrepreneurs, un problème auparavant marginal s’est transformé en problème sociétal : l’isolement professionnel.
Travailler pour soi-même comporte de nombreux avantages, comme une disparition de la pression patronale ou une liberté totale dans la constitution de son emploi du temps. Mais on relève également un inconvénient majeur : l’absence de collègues de travail, qui entraîne une large diminution des relations sociales. Cette restriction du cercle social empêche toute constitution d’un réseau professionnel, mais elle rend également impossible tout échange de point de vue, et donc tout recul sur son projet. Et, plus précisément, l’isolement conduit à un état dépressif qui entraîne procrastination ou encore panne d’inspiration. N’oublions pas que l’être humain est un être de communication…
Pour contrer cet effet dévastateur, les entrepreneurs fuient leur canapé pour aller se réfugier dans des cybercafés ou des bibliothèques. Le but : être stimulé par un bain de foule. Mais si ces lieux sont effectivement bondés, ils n’y trouvent pas l’émulation recherchée : ils travaillent, certes, mais ils ne discutent pas et ne partagent donc pas leur travail avec les autres. C’est suivant ce constat que les espaces de coworking se sont largement développés ces dernières années.
Qu’est-ce qu’un espace de coworking ? C’est un lieu dans lequel des entrepreneurs de tous horizons viennent travailler, mais aussi échanger, apprendre, discuter et même s’associer. Travailler à son compte oui, travailler seul non ! Les entrepreneurs louent un poste dans un espace de coworking, en général au mois, afin de travailler dans un lieu simulant, aux côtés d’autres entrepreneurs. Antoine Amiel, fondateur de Learn Assembly, une startup qui accompagne des entreprises dans leur transformation digitale via des formations de type MOOC (Massive Open Online Course) ou encore blended learning (formation qui mixe présentiel et distanciel), explique que « le coworking, c’est le reflet d’un nouveau mode de travail. Un espace de coworking, bien plus qu’un lieu de travail, est un lieu de vie ».
Cependant attention, il est bon de rappeler que si le concept de coworking s’est démocratisé récemment, il n’a pas été inventé suite à la montée de l’entrepreneuriat ! Au 19e siècle déjà, les ateliers d’artistes étaient des collocations d’espace de travail : nous pouvons par exemple citer La Ruche, fondée par Alfred Boucher en 1902.
Aujourd’hui, où sont ces espaces de coworking et comment se sont-ils développés ? Il en existe des dizaines à Paris, qui ont chacun leur particularité. La Manufacture, par exemple,  est destiné aux auteurs (scénaristes, écrivains, journalistes…), tandis que La Cantine s’adresse davantage aux codeurs (développeurs, bloggeurs…). L’intérêt de différencier les espaces de coworking selon le milieu professionnel est de maximiser les échanges fructueux, c’est-à-dire les échanges aboutissant à des associations, ou tout simplement à un perfectionnement des projets grâce à l’avis des congénères. Mais outre ces différenciations, tous les espaces ont la même vocation – que le slogan de l’un d’eux, La Mutinerie, résume bien : « Libres ensemble » – et proposent les mêmes services : locations de salles, conférences, ou même cours.
Le coworking, c’est donc travailler dans un espace commun pour y partager ses idées et ses projets, et rencontrer des personnes avec qui s’associer. En somme, c’est transformer ses “concurrents” en alliés grâce à la communication !
Camille Pili
LinkedIn
Sources :
Antoine Amiel, fondateur de Learn Assembly

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Mutinerie Coworking Paris


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Premier espace de Coworking métropolitain