Flops, Politique

La récupération politique

S’il y a un domaine où le recyclage n’a pas la côte, c’est bien en politique. Pour preuve le tollé médiatique, à la suite des attentats de Bruxelles, des tweets de Robert Ménard ou encore Bruno Le Roux. Ce dernier s’est empressé de poster un tweet fustigeant l’attitude de la droite sénatoriale dans le débat sur la déchéance de la nationalité, et ont vu l’ensemble de la twittosphère lui tomber dessus malgré des tentatives détournées de faire oublier son tweet.
Mais en quoi consiste vraiment la récupération politique ? Il s’agit d’un procédé qui consiste à se servir d’un événement survenu dans l’actualité pour servir son parti, sa campagne ou ses idées politiques, tout en se parant du voile des bonnes intentions, et en se mettant dans une posture moralisatrice presque prophétique sur le mode du « je vous avais prévenu ».!

Déplacer un événement de la sphère publique pour l’arrimer à la sphère politique ?
La première question qui se pose face aux régulières vagues d’indignation que suscitent les interventions de tel ou tel personnage politique est de distinguer, dans une perspective presque harendtienne, ce qui relève du politique de ce qui n’en relève pas. Cela nous renvoie à la notion d’espace public développée par Habermas. Si l’espace public relève de la souveraineté populaire, en bannit-il pour autant le politique ? Philippe Chanial, dans son analyse L’éthique de la communication : une politique des droits démocratiques ? résume la pensée d’Habermas par le fait que « si la réalisation de la démocratie exige une extension toujours inachevée et toujours menacée de la discussion publique à un réseau sans cesse plus large de relations sociales, ce projet, parce qu’il doit faire face à la réalité des rapports de pouvoir, à la dynamique de répressions systématiques des intérêts universalistes, doit bénéficier de garanties institutionnelles ».
Réguler l’intervention du politique dans l’espace public
Mais qu’est-il reproché au politique ? Intervenir en tant que citoyen pour exprimer ses émotions, ou utiliser l’événement pour soutenir son propos ? La faute serait-elle de faire de la politique du fait divers, de se servir d’un événement particulier pour en faire une généralité ? Alors que dans le même temps les médias incitent les citoyens à interpeller personnalités politiques (bien que ces interpellations soient parfois refusées, à la manière de Christiane Taubira, qui dans l’émission « Des paroles et des actes » dit faire silence face aux victimes (DPDA, jeudi 5 septembre 2013). Pourquoi alors les politiques font-ils part de leurs états d’âme quand ils savent pertinemment que cela va se retourner contre eux ? Les mêmes politiques qui, entre eux, « récupèrent la récupération », la considérant comme une arme facile pour décrédibiliser un adversaire.
La phénoménologie du politique
Louis Queré voit l’espace public comme un espace tampon entre état et société civile. Il essaie d’aller au-delà des analyses d’Habermas en faisant appel à la perspective phénoménologique d’Harendt. Il insiste en effet sur la scénarité de l’espace public et du jugement que peuvent en porter les individus.
Vollrath, qui analyse la pensée harendtienne, en déduit que « le mode de pensée politique de Hannah Harendt considère les thèmes du champ politique non pas comme des objets mais comme des phénomènes et des apparitions. Ils sont ce qui se manifeste soi-même, ce qui apparaît aux yeux et aux sens. Les phénomènes incluent ceux à qui ils apparaissent, de même que l’espace dans lequel ils adviennent, qui détermine la relation qu’il y a entre les phénomènes et ceux qui les perçoivent ». « l’espace dans lequel surviennent les phénomènes politiques est créé par les phénomènes eux-mêmes » Ou, pour le dire plus précisément, il est créé par les personnes dont les actes constituent les événements politiques.
Ainsi, la récupération politique ne serait donc qu’une sorte d’invention journalistique pour justifier les interventions de telle ou telle personnalité sur un événement qui n’a pas forcément de lien direct avec elle(comme Jacques Chirac et la coupe du monde de football 1998). Il semble cependant que le phénomène de récupération soit encore plus malvenu lorsqu’il concerne des situations dramatiques.
Serions nous-arrivés dans ce que Pierre Le Coz appelle « le gouvernement de l’émotion » ?
L’émotivité de l’espace public
Les politiques doivent faire face à un espace médiatique schizophrène qui, d’un côté les dissuade d’intervenir, et de l’autre organise à la télévision ou encore à la radio, des lieux propices à l’échange où se mêle intérêt particulier et général. C’est ainsi que dans les matinales de radio les questions des auditeurs ont pour but d’apporter à un cas personnel une réponse globale. De même à la télévision, lorsqu’un citoyen interpelle un politique, il y a bien confusion entre ce qui est privé et ce qui ne l’est pas. Faire entrer le privé dans la sphère publique n’est en fait permis que lorsque cela est fait par la personne concernée, une sorte de « récupération citoyenne » en somme. Les médias sont en quête de sensationnel, et ont bien compris le caractère hyper-sensible de la société lorsque le politique s’en mêle.
Jérémy Figlia
Sources : 
http://www.francetvinfo.fr/sports/foot/coupe-du-monde/les-politiques-francais-champions-de-la-1 recuperation-du-foot_463304.html 
https://www.youtube.com/watch?v=_Q1_VcxweHE2
http://www.scienceshumaines.com/le-gouvernement-des-emotions_fr_33546.html3
http://www.persee.fr/doc/quad_0987-1381_1992_num_18_1_972
https://basepub.dauphine.fr/bitstream/handle/123456789/8767/Ethique%20de%20la%20communication.PDF?sequence=1

Agora, Com & Société

#RIPTWITTER: quel avenir pour l'oiseau bleu ?

Twitter est considéré comme un géant des réseaux sociaux. Bien moins important, certes, que le roi Facebook, le réseau à l’oiseau a tout de même une place de choix dans le coeur de ses utilisateurs. Mais justement, son problème semble être aujourd’hui de  réussir à conquérir de nouveaux publics, de convaincre qu’il vaut la peine qu’on s’intéresse à lui.
Un nombre d’utilisateurs qui ne s’envole pas
Début février, Twitter annonçait que son nombre d’utilisateurs, s’élevant à 320 millions, avait stagné par rapport au trimestre précédent. Le groupe n’a jamais réellement dégagé de bénéfice: son modèle économique est encore peu rentable. Il est surtout basé sur la publicité qui représente 63% des revenus (tweets, trending topics et comptes sponsorisés) mais, comme l’expliquait Cédric Deniaud, co-responsable du site mediassociaux.fr, au journal LaCroix, « Sans audience, il est difficile de trouver une stratégie pour cibler les internautes autant que les annonceurs ». Les données publiées dans les tweets sont également jugées moins personnelles que sur Facebook par les annonceurs et donc les tweets sont moins attractifs. Twitter a perdu plus de 500 millions de dollars sur l’année 2015 indique un rapport de l’AFP. Ces problèmes financiers ajoutent donc une pression supplémentaire à Twitter: les investisseurs commencent à perdre patience et leurs inquiétudes quant à la croissance du réseau social ne font, elles, qu’augmenter. Parallèlement, l’action ne cesse de chuter depuis le début de l’année. Elle a perdu 80 % de sa valeur depuis ses sommets en décembre 2013, juste après son introduction en Bourse.
Le pourquoi du comment
Pourquoi Twitter n’attire plus ? Ce réseau social a été un réel succès à sa création: il a rapidement rassemblé un million d’utilisateurs et en deux ans, on comptait déjà deux milliards de tweets. Et même si Stromae chante que « l’amour est comme l’oiseau de Twitter, on est bleu de lui seulement pour quarante-huit heures », le site de microblogging ne semble pas si facile à utiliser pour tout le monde. En effet, Twitter est perçu comme un réseau social trop compliqué à appréhender. Les twittos eux-mêmes le reconnaissent, comme le montre ce tweet :

Twitter a en effet des codes bien ancrés: les RT, #LT, #NP, w/, #FF et autres #TBT peuvent décourager des utilisateurs novices pour lesquels on ne prend pas la peine de préciser ces spécificités. Et fil d’actualité instantané, qui plait beaucoup aux initiés, peut constituer un réel obstacle car sa rapidité et son instantanéité le rende parfois difficile à suivre par rapport à celui de Facebook par exemple.
En outre, l’utilité de Twitter n’est pas non plus une évidence pour les internautes. Pour beaucoup, Twitter est souvent associé avec le fait de raconter sa vie aux yeux du monde entier, or soit ils n’en ont pas envie ou ne considèrent pas avoir une vie assez intéressante pour le faire. En outre, certains ne voient pas pourquoi rajouter un réseau social à leur vie numérique déjà bien remplie, il semble que Facebook suffise à un grand nombre d’internautes. Ainsi, Twitter semblerait trop complexe à utiliser et pas assez utile pour que l’on mérite de s’y intéresser.
Il est intéressant de remarquer un phénomène étonnant, actuellement en pleine croissance, sur Facebook : des pages comme Urban Hit ou Les FDP du Net, pour ne citer qu’elles, rencontrent un réel succès en publiant majoritairement des captures d’écrans… de tweets ! Cette tendance montre bien l’intérêt qu’ont les utilisateurs de Facebook pour l’univers, souvent drôle et décalé, de Twitter. Ces publications peuvent avoir plusieurs effets pour le réseau à l’oiseau: elles peuvent permettre d’attirer du public en le médiatisant ainsi ou bien, au contraire, conforter les internautes dans l’idée qu’ils n’ont pas besoin de s’y inscrire puisqu’ils ont accès aux tweets via Facebook. Ce phénomène permet donc de  constater que les utilisateurs de Facebook pourraient être un terreau fertile pour Twitter qui doit donc réfléchir à la façon de leur donner envie de s’inscrire sur la plateforme.

Le changement n’est pas chose aisée
Si Twitter a besoin de changer pour attirer de nouveaux utilisateurs, il faut réussir à le faire sans mécontenter les utilisateurs actuels. En effet, si Twitter peine à attirer de nouvelles recrues, celles qu’il a déjà enrôlé sont totalement convaincues par le fonctionnement du réseau, à tel point que le moindre changement évoqué fait toujours l’effet d’une bombe. Ainsi plus tôt cette année, l’annonce du passage de 140 caractères à 10 000 avait fait débat sur le réseau, tout comme le passage du « favori » au « like » ou encore récemment le changement du fonctionnement du fil d’actualité qui a déclenché le hashtag #RIPTwitter tant il révolte certains utilisateurs. Ces changements tendent, en effet, à rapprocher Twitter de Facebook. Or bon nombre des aficionados de Twitter, sont fermement accrochés à la différence de Twitter par rapport au réseau de Mark Zuckerberg, les twittos n’hésitant d’ailleurs pas à railler Facebook dès qu’ils le peuvent.  Ces changements apparaissent donc comme une violation du contrat de lecture que proposait Twitter à sa création et permettent ainsi de voir à quel point il peut-être difficile de le modifier, l’importance qu’il peut avoir aux yeux des utilisateurs.

En plus de ces changements qui touchent au fonctionnement même de la plateforme, Twitter essaye aussi de proposer de nouvelles fonctionnalités. Ainsi, l’onglet « Momens » a été lancé aux Etats-Unis dans une version test. Le principe est le suivant: les tweets sont regroupés par thème afin de faciliter le suivi de l’actualité, un peu à la manière d’une story sur Snapchat. Cette vidéo permet de mieux comprendre le concept de Moment. Twitter a donc choisi de tabler sur un de ses points forts : l’actualité. En effet, nombre d’utilisateurs sont sur ce réseau afin de pouvoir suivre ce qui se passe en temps réel (les informations sont très souvent diffusées sur Twitter avant n’importe quel média traditionnel), tout en essayant de simplifier le suivi de cette actualité sans pour autant heurter le fonctionnement actuel, puisqu’il s’agit d’une fonctionnalité qui vient s’ajouter aux autres.

Face à l’enjeu déterminant de réunir une plus grande communauté d’utilisateurs, Twitter doit réussir à allier innovation, simplicité et communication. Comme nous le montre la création de Moments, il semble que Twitter ait réalisé qu’il était maintenant en concurrence avec des réseaux sociaux largement basés sur l’image comme Instagram, Snapchat ou encore Vine qui réussissent, eux, à attirer des cibles plus jeunes. Néanmoins, cette fonctionnalité n’étant pas basée sur l’ego comme le sont en grande majorité les réseaux de l’image, nous pouvons douter de son succès auprès d’un public plus jeune.  En investissant dans Periscope, Twitter avait pourtant marqué un bon point dans cette stratégie de l’image et de la vidéo. Malgré cette mauvaise passe entendra-t-on encore longtemps gazouiller l’oiseau bleu ? #lavenirnousledira
Clémence de Lampugnani
@Clemydelamp
Sources:
Constance Léon, La Croix « Twitter cherche encore son #modèle économique »  
Le Monde.fr avec AFP pour lemonde.fr « Le nombre d’utilisateurs de Twitter a stagné à 320 millions au 4e trimestre »
GB avec AFP RelaxNews pour clubic.com « Pour éviter de stagner, Twitter veut se transformer »
Thomas Coëffé  pour le blogdumodérateur « Nouveauté: Twitter moments, pour découvrir les principaux événements et actualités du moment »
Crédits photos: 
Twitter
Urban Hit / Facebook 
http://thewrap.com 
 

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tweet seats fnc
Com & Société

Mesdames et Messieurs, je vous prie de bien vouloir tweeter pendant la représentation

Les premiers tweet seats sont apparus aux Etats-Unis dans les années 2011-2012, dans les théâtres et dans les opéras une rangée de sièges au fond des salles devient exclusivement dédiée aux utilisateurs de Twitter. Ces spectateurs qui ne sont pas comme vous et moi, capables de multitasking pendant la représentation, y sont libres de tweeter à condition d’utiliser le hashtag officiel du spectacle. Une publicité apparemment efficace. Auparavant bannis, voilà que les smartphones sont les bienvenus dans les temples de la culture. La pratique s’est logiquement assez répandue, du Shakespeare Festival à St. Louis aux nombreux théâtres de Boston en passant par les orchestres symphoniques d’Indianapolis et de Cincinnati, et même au Public Theater de New York. Et elle est bientôt devenue un sujet de querelle passionnée pour les journalistes et les professionnels qui ont pour les uns loué cette adaptation aux outils modernes de communication ou bien se sont indignés, critiquant l’immixtion de pratiques marketing dans le temps sacré de la représentation.

Cela fait pourtant longtemps qu’au théâtre la représentation traditionnelle est en crise. La coupure sémiotique, selon Daniel Bougnoux, qui permet l’accès au symbolique et se matérialise dans le quatrième mur – la limite entre la scène et la salle – est fréquemment attaquée dans l’art contemporain. De Platon à Brecht, on a en effet cherché à dissimuler la présence réelle de l’acteur, aujourd’hui on la dévoile complètement, les coulisses, les dessous de la pièce font partie intégrante de la représentation. Les acteurs changent de costume sur scène, interprètent plusieurs personnages, changent les décors plateau allumé, les metteurs en scène deviennent eux-mêmes acteurs, feignant d’être simplement au milieu d’une répétition. C’est à présent la technologie qui participe de cette déconstruction des conventions théâtrales. La pratique du live tweet a même gagné la scène, comme au théâtre de Providence dans le Rhode Island où les acteurs tweetent et postent des photos depuis les coulisses pendant la représentation. Depuis le plateau également on semble apprécier ces retours instantanés, créant une nouvelle interaction avec le spectateur.
Les tweet seats pourraient en ce sens être un des éléments d’une réinvention des relations du spectateur au spectacle et ses artisans. Le théâtre, qui peine à renouveler son public, pourrait conquérir de nouveaux auditoires grâce au dépassement de la simple représentation. Toutefois, ces sièges ne sont pas tellement un outil publicitaire qui permet de toucher, au-delà des spectateurs habituels, des gens étrangers au théâtre. Une twittos interviewée par USA Today semble persuadée de pouvoir détourner les gens de l’horrible télé-réalité pour les faire aller au théâtre, pourtant ses followers sont des personnes éduquées à l’art qui ne se contentent pas de la télévision, c’est un public déjà conquis. L’initiative s’inclut tout de même dans ce mouvement qui entend repenser le rôle du spectateur, où il n’est plus question du théâtre comme un lieu quasi-religieux où l’on absorbe de manière passive : au Hutington Theater à Boston par exemple, un membre de la production répondra aux questions twitter, qui seront par ailleurs diffusées sur des écrans dans le hall du théâtre. Il est en fait question d’une interaction qui s’émancipe des codes traditionnels liés au lieu théâtral. Ce n’est cependant pas un renouveau si nouveau que ça. Le public antique n’était pas immobile et silencieux comme l’est notre public depuis un siècle : il mangeait, parlait, réagissait à haute voix, apostrophait les acteurs. Le théâtre devrait en définitive redevenir, grâce aux innovations communicationnelles numériques, un spectacle vivant des deux côtés et cesser d’être un art vertical.
Marc Blanchi
Sources
usatoday.com
Rue89.nouvelobs.com
npr.org
arstechnica.com
La crise de la représentation, Daniel Bougnoux
Crédits images
1.standaardcdn.be

Com & Société

L'Etat islamique, des fusils et des tweets

 
C’est la première fois dans l’histoire du djihadisme que la communication devient une véritable arme, non-létale, mais à l’impact aussi grand que les opérations militaires.
Le djihadisme est apparu il y a une trentaine d’années, avec Al-Qaïda, qui à l’époque envoyait des vidéos de propagande aux chaînes de télévision comme Al Jazeera. Aujourd’hui c’est l’organisation du calife Abou Bakr al Baghdadi qui domine la scène. Elle est née en 2014 et grâce à Internet et au Web 2.0 les djihadistes deviennent leur propre média : ils mettent en ligne des vidéos de leurs combats et de leurs mises à mort sur Youtube, des reportages audios sur Soundcloud, des photos sur Instagram, des graphiques et des vidéos sur WhatsApp, des résumés des combats sur Just.Past, ils sont présents sur Ask.me et sur Twitter.
Toute cette communication, pour quoi faire ? La question se pose d’autant plus quand on sait que l’organisation Daesh utilise les instruments de communication de la société occidentale, dont elle prône la destruction.
L’auto-promotion
Al-Qaïda n’a jamais revendiqué les attentats du 11 septembre, alors que Daesh se revendique de toutes ses actions, voire les met en scène. Ils ont une communication très élaborée, allant de l’attaché de presse, Abu Mosa dans le reportage de ViceNews, à un média à part entière, Alhayat Media Center, qui produit des vidéos en reprenant les codes hollywoodiens des films d’action : Flames of War, Haya Alal Jihad.

Il y a véritablement une appropriation des codes de la communication occidentale, dont on peut encore voir des exemples dans ces vidéos stylisées, dont l’apparence laisse tout à penser qu’il s’agit d’une vidéo de présentation d’une entreprise ou une publicité. Sur Twitter, on peut retrouver les djihadistes sous les comptes @ISTimes2, @DawlaPhotos1, @DAWLAPHOTOS, @one_ummaah, @AtTurky… Et ce dernier conduit à une autre appropriation des codes occidentaux : les photos de chats. Du lolcat aux vidéos, les chats sont devenu un véritable mème de la culture numérique. Daesh l’a bien compris et leur a même dédié un compte Twitter : @ISILCats.

En se prenant en photo en train de caresser ou de nourrir ces petites boules de poils, Daesh entend jouer sur le pathos, comme lorsqu’elle publie des photos de camaraderie entre les combattants, d’entraide avec les pauvres, les personnes âgées ou les enfants. Ils cherchent à humaniser leur image.
Le recrutement
Al-Qaïda présélectionnait ses combattants, ayant créé une véritable élite pour le 11 septembre, alors que Daesh est prêt à accueillir tout le monde, même dans la société occidentale. Il y a une logique d’endoctrinement massif qui n’existait pas chez Al-Qaïda et qu’Internet permet de réaliser : les nouveaux djihadistes n’ont pas été convertis à la mosquée ou en prison, mais en ligne. L’exemple le plus récent est le témoignage que Léa, adolescente de 15 ans, a donné au Nouvel Observateur sur la manière dont elle a été endoctrinée sur Facebook. Toujours pour le groupe LeNouvelObs, Rue89 a publié récemment un article à la mise en page innovante, où un journaliste cherche à tester l’ampleur du recrutement djihadiste sur le réseau social. Sur son nouveau compte, il commence à consulter des profils de personnes qui affichent leur foi musulmane, des pages sur le djihadisme… Et peu à peu voit son fil d’actualités se modifier, ne lui présentant plus que des suggestions d’amis et des posts relevant de l’Islam radical ou du djihadisme. « J’ai passé à peine deux jours sur Facebook avec mon faux compte, et j’ai l’impression que mes repères s’estompent. Comme si Facebook m’avait transporté dans un univers différent. » Confie-t-il. Tout devient relatif au djihadisme et il commence même à s’habituer aux images des ennemis décapités, crucifiés, et des soldats morts en martyrs. C’est la logique même des algorithmes de recommandation qui font le succès de Facebook : créer une communauté d’intérêts. Ainsi, pour Daesh mais aussi pour toute autre organisation, nos réseaux sociaux et leur logique sont les meilleurs outils de propagande. Ce sont donc nos technologies occidentales qui rendent tout cela possible et Daesh se contente d’utiliser des plateformes que nous avons déjà légitimées.
L’édification du califat
Enfin, Daesh maîtrise la fonction performatrice du langage. En dehors de la maîtrise des outils de communication modernes, l’auto-proclamation de l’État islamique est un parangon des stratégies de communication, au sens le plus linguistique du terme. Elle répond parfaitement à la théorie de la fonction performatrice du langage, développée par Austin dans son ouvrage Quand Dire c’est faire (How To Do Things With Words, 1970). Daesh a su manier le langage comme jamais aucune organisation terroriste n’avait été capable de le faire auparavant. Pour reprendre la mise en perspective avec Al-Qaïda, ces deux organisations djihadistes ont parlé toutes deux de ré-établir le califat, mais une seule l’a fait : Daesh. Oussama ben Laden s’est contenté d’en parler, il n’a jamais dit qu’il l’avait fait. C’est tout l’inverse avec Daesh : on pense qu’ils ont rétabli le califat, mais finalement ils ont juste dit qu’ils l’avaient fait, ils l’ont proclamé. Il y a quelque-chose de symbolique dans leur prise de parole, de fondamentalement convaincant : l’énonciation du rétablissement du califat fait le rétablissement du califat. S’ils se revendiquent c’est pour une raison, c’est que la chose n’est pas évidente en soi, elle a besoin d’être prouvée, d’être légitimée, et c’est ce qu’ils font avec le pouvoir des mots, couplé avec la tyrannie des armes.
Marie MOUGIN
Sources
Conférence France Culture « L’Année vue par … le Numérique » (04/10/2014)
iTélé – Le Grand Décryptage – Propagande de l’EI : ce qui se cache derrière l’écran
The Atlantic – How ISIS Games Twitter
The New-York Times – ISIS Displaying a Deft Command of Varied Media
Al Jazeera America – In search of a digital caliphate
Le Figaro – La surprenante communication de l’État islamique sur les réseaux sociaux
Crédits photos:
Islamic State News (@DAWLAPHOTOS)
Islamic State of Cat (@ISILCats)
Le Figaro – La surprenante communication de l’État islamique sur les réseaux sociaux
 

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Les Fast

Justin Bieber : comm' un doute

 
Si Miley Cyrus a décidé d’opter pour les boules de démolition et les clips sans dessus dessous les draps , Justin Bieber a choisi les annonces d’une retraite prématurée pour attirer l’attention des médias.
Pour certains d’entre nous, Papa Noël avait déposé un joli cadeau au pied du sapin cette année : trois messages postés sur le compte officiel de la star en herbe annonçant la fin de sa carrière.

Ces derniers temps, il est de plus en plus difficile de savoir où en est le chéri des beliebers : maisons closes, insultes envers ses fans, provocations diverses et variées… Le 17 décembre, le jeune canadien avait même annoncé, lors d’une émission de radio, qu’il prendrait sa retraite une fois son tout dernier album dans les bacs. Son manager s’était alors empressé de mettre les choses au clair en assurant que seule une pause bien méritée était actuellement envisagée par l’adolescent. Alors, grosse fatigue ou stratégie de communication ?
C’est bien connu, les déboires des célébrités n’en finissent plus d’attirer l’attention des médias, et il n’est pas difficile d’imaginer les magazines people se pourlécher les babines à l’annonce de la dernière démonstration de twerk de Miley Cyrus ou de la pénultième rupture de Taylor Swift. Et puisqu’en définitive il semblerait que la retraite ne soit pas à l’ordre du jour pour le Biebs, il y a fort à parier qu’il se soit consciemment servi de cet attrait pour le commérage afin de promouvoir un album et un film qui, ô coïncidence, sortait tout juste en salle.
Ces tweets ont précédé la publication des chiffres concernant le second film consacré à la star qui se trouvent être plutôt mauvais. Appâter les médias en annonçant sa retraite pour blaguer est peut être préférable à la méthode de la perpétuelle provoc’, mais à force d’en angoisser certaines et d’en enchanter d’autres, l’enfant terrible ne risque-t-il pas d’y perdre ce qui reste de sa crédibilité ?
 
Annabelle Fain
Sources
VanityFair
ParisMatch
HuffingtonPost

Com & Société

« Twitter pour les nuls », les leçons de Mario Monti

 
Avec Twitter, une barrière est tombée : le politique parait accessible. Nombre de responsables politiques ont désormais investi le terrain. On estime ainsi à 200 le nombre de comptes Twitter utilisés par des politiques.
Quand Twitter devient l’incontournable d’une campagne politique
Mario Monti a récemment décidé d’entrer dans le cercle de ces politiques « in ». En pleine campagne pour les législatives, télévisions, radios, réseaux sociaux, rien n’échappe à sa nouvelle stratégie de communication.
L’homme qui déclarait détester l’exercice des meetings politiques a trouvé l’alternative, en créant un compte sur Twitter (@senatoreMonti), actif depuis le mois de décembre, et qui a franchi la barre des 16 000 abonnés en seulement quatre jours.
Deux motivations principales sont apparues clairement :
Taxé d’homme sévère et austère, Monti a estimé que son apparition sur Twitter lui permettrait de troquer cette image contre celle d’un homme « cool », moderne, et par là, conquérir le vote des jeunes Italiens.
Deuxième motivation, l’envie irrépressible de se distinguer de son prédécesseur Berlusconi, réputé pour son mépris des nouveaux médias – et par la même occasion, s’émanciper de ces dits médias sur lesquels la main mise de Berlusconi n’est plus à démontrer.
Plus largement, les avantages perçus par les politiciens sont multiples :
– se faire connaître : la plupart des politiques sur Twitter sont des élus locaux, souvent absents des grands médias, à qui le réseau social permet une visibilité.
– la désintermédiation : s’adresser directement au peuple, sans passer par le filtre des médias. La prise de parole y est différente. Sur Twitter, on est à l’opposé du formatage du discours.
– Profiter de la vitesse de propagation de l’information et de l’instantanéité, par la diffusion en temps réel de son agenda, ses réflexions ou ses humeurs.
Monti a le tweet facile. Le jour de Noël, un premier message a salué sa propre action : «Ensemble nous avons sauvé l’Italie du désastre. A présent, on va rénover la politique. Se lamenter ne sert à rien, s’impliquer est utile. Relevons la politique ».
Dans cette dernière phrase, Monti a osé un jeu de mot, puisqu’en italien, « Saliamo » signifie autant « nous montons » que « nous salons ». Il veut donc à la fois relever le débat politique et mettre du sel dans ce dernier. La formule a plu, si bien qu’il l’a reprise dans un autre tweet « Ensemble, relevons la politique », et que ce terme lui est depuis largement attribué.

Le 5 janvier, il a même animé un « live » en direct intitulé « #Montilive » pour répondre aux questions des internautes.
N’est pas Twittos qui veut …
Quel a été l’impact de ce revirement ? Finalement, les effets escomptés n’ont pas eu lieu.
L’explication est d’abord numérique. Twitter reste globalement peu utilisé en Italie, notamment en politique ; on estime à seulement 6% le nombre d’utilisateurs italiens.
Par ailleurs, on lui a reproché d’avoir sélectionné les interlocuteurs de son « live » et d’avoir privilégié des journalistes ou des personnes influentes au détriment des citoyens, ce qui est contraire à l’esprit du réseau social.
Enfin, Monti s’est révélé être un piètre utilisateur du réseau social, renforçant l’image dont il avait voulu se débarrasser. En effet, après l’utilisation excessive de smileys et de ponctuation exacerbée (notamment un « WOW » très critiqué), cette surenchère d’émotion, trop décalée, lui a valu plus de moqueries que de reconnaissance. Un mauvais calcul d’image donc.
Un exemple qui relance les critiques concernant Twitter et les politiques
S’adresser directement aux citoyens peut être un atout, mais n’est pas toujours synonyme de meilleure communication politique.
Quelque soit l’utilisation de Twitter, pour que le message soit entendu, il faut qu’il soit repris. Si l’une de ses vertus est de jouer sur la désintermédiation, la parole n’y est pas complètement libérée des médias traditionnels. Les politiques n’y ont pas encore suffisamment d’autorité pour que leurs gazouillis se suffisent à eux-mêmes.
Pour Arnaud Mercier, professeur en sciences de l’information et de la communication, « Une partie des politiques inscrits sur Twitter le sont par mimétisme. Il faut en être parce que ça fait moderne mais certains ne savent pas eux-même pourquoi ils y vont » (Médias et Opinions Publique). C’est en effet l’une des règles d’or du tweet politique, règle à laquelle Monti, aux vues du décalage entre son image « Twitterienne » et celle que l’Italie connaît, semble avoir dérogé.
Enfin, l’instantanéité de Twitter a ses limites, et Monti les a testées récemment. Ainsi, vendredi 18 janvier, il s’est vu enterré en un rien de temps par un tweet funèbre « Mario Monti vient de nous quitter. RIP. ». La rumeur a immédiatement enflammé la Toile, appuyée par un nouveau tweet une heure plus tard : « Décès de Mario Monti, les proches de l’économiste confirment ». L’intox est reprise par quelques radios italiennes puis par des médias du monde entier. Ce n’est que tard dans la soirée de vendredi que le porte-parole de Monti a démenti.
Mario Monti l’aura compris, Twitter est une arme … qui peut se retourner contre son utilisateur.
 
Bénédicte Mano
Sources :
La Tribune
Technorati.com
Lalibre.be
Journalismes.info
Courrier International

Société

MSN allons voir si la rose…

 
MSN est mort, vive Twitter : petit panorama de l’évolution de la communication sur Internet
 
Que vous puissiez « aimer » (ou pas) cet article à la fin de la lecture n’a rien d’anodin. La décision de Microsoft de mettre fin à son célèbre service de messagerie en ligne, MSN, service qui a bercé notre tendre adolescence non plus. Qui ne se souvient pas, avec une pointe de nostalgie (et d’embarras ?), des « pseudos », « wizz », et conversations plus phatiques qu’autre chose, où l’on se retrouvait sans mot après un fascinant échange de « coucou, ça va ? » ? Et pourtant, qui d’entre nous n’a jamais pensé revenir sur ce programme, qui nous paraît maintenant (alors que nous l’utilisions il n’y a que 5 ans), un dinosaure de l’Internet aussi obsolète que la télévision en noir et blanc ? L’on serait tenté d’objecter que cette pratique de la discussion instantanée a tout simplement été déplacée, sur Facebook majoritairement. Certes, mais elle est loin d’être le noyau de Facebook, qui fonctionnait bien avant l’introduction du « chat », et peu de monde je crois, l’utilise de la même façon qu’il utilisait MSN : dans le seul but de parler. C’est aussi qu’à l’époque de MSN, la parole était le seul moyen d’exister, tandis que l’évolution de l’Internet s’est fait de telle manière que les moyens se sont bien diversifiés depuis.
C’est à ces transformations que j’aimerais m’intéresser aujourd’hui, pour essayer de comprendre comment l’on a pu passer, en quelques années, de MSN aux « réseaux sociaux », et quelles en sont les conséquences.
 
Au commencement était le Verbe (et la connexion à 56ko/s)
Dans les débuts de l’Internet, tels qu’on peut encore se les rappeler, l’image était tout sauf une priorité dans la mise en page. À cause de la technique, certes, qui ne permettait pas de les charger assez rapidement, mais peut-être n’est-ce pas la seule raison. La série populaire Buffy contre les vampires, diffusée entre 1997 et 2003, cristallise deux mythologies très en vogue autour d’Internet à une époque décisive, en confrontant les points de vue de deux personnages principaux : Giles, un bibliothécaire, et Willow, une étudiante. Le premier oscille entre l’idée qu’Internet ne sert à rien ou tuera le livre, et l’autre fait preuve d’un enthousiasme exacerbé à son égard,le considérant comme un outil presque intelligent en soi qui aurait réponse à tout.
L’avènement de l’Internet, pour une importante partie du public adulte, était loin de paraître nécessaire. Aussi cela peut-il expliquer le manque d’images et la mise en page des premiers sites : la publicité s’en désintéressait totalement. Il faut aussi noter qu’il y a deux textes sur l’Internet : celui que tout le monde voit, et un autre, bien plus voilé, et pourtant sur quoi tout repose… le code. Aux débuts d’Internet, impossible de produire du contenu sans une petite connaissance du html au moins. C’était alors un monde de l’écrit.

 
La formidable révolution du Web 2.0
Lorsque la fabuleuse, voire magique expression de « Web 2.0 » a commencé d’apparaître, l’Internet s’est refait une beauté aux yeux du grand public. Ce terme, relevant d’abord du marketing, fut employé à tort et à travers pour refléter un changement qui, s’il ne relève pas exactement d’une « révolution », est tout de même réel : l’Internet s’est « socialisé ». Il est désormais question d’engager des « interactions », d’abord manifestées par des entreprises de mise en commun des connaissances ou travail collaboratif (avec les wiki par exemples), puis, par des blogs favorisant la discussion grâce aux commentaires. En parallèle, les chats prennent de l’importance, comme IRC et MSN, pour citer les principaux. Toutes ces interactions étant facilitées par un « domptage » du code tel qu’il est désormais possible d’avoir son blog, de s’exprimer sur la toile sans en avoir aucune connaissance. Mais ce modèle n’est toujours pas assez rentable financièrement. Et c’est la qu’intervient un tournant clef de l’Internet et de l’idée que nous nous en faisons : sa structure, et donc, la manière dont nous communiquons, va être modifiée par la publicité.
 
De MSN à Twitter : la disparition élocutoire du destinataire
Lorsque nous parlions sur MSN, nous nous adressions à une personne en particulier, et attendions une réponse pour rebondir. Il en était de même pour les forums, même si le destinataire était moins identifié, l’on s’adressait à une certaine communauté, avec l’idée d’instaurer un échange. Comment, dès lors, un message publicitaire pouvait-il éviter de tomber dans la conversation comme un cheveu sur la soupe ? S’imagine-t-on, lorsque que l’on parle à un ami de vive voix, être coupé par un slogan entre deux phrases ? Il fallait alors qu’une autre façon de communiquer émerge.
Prenons maintenant l’exemple de Twitter. Qu’est-ce que « tweeter » ? C’est envoyer un message de 140 caractères à un public qu’on ne connaît ni ne maitrise, la plupart du temps. Pour que ce message ait une bonne visibilité, et soit repartagé, il doit être drôle, spirituel, ou provocateur ; bref, il faut qu’il soit suffisamment marquant pour interpeler le lecteur. Or, qu’est-ce qu’un slogan publicitaire, si ce n’est un message court et percutant ?

 
Que devient alors la communication sur Internet ? Il est rare d’attendre une réponse à un tweet, la conversation étant rendue difficile par la limite des 140 caractères. Facebook n’est pas en reste : ce sont les « likes » qui dominent, c’est-à-dire une petite image sur laquelle on clique pour signaler qu’on a vaguement ressenti quelque chose en voyant ce post, mais on commente bien moins souvent, et d’ailleurs, nos commentaires étant visibles par tous, il est moins question d’engager une réelle discussion que d’obtenir des « likes » à son tour pour flatter son image.
Tout, dans ces pratiques, rappelle la publicité. La frontière entre celle-ci et les messages personnels devient de plus en plus floue (cf les questions des « influenceurs » et du « personnal-branding »).
La publicité avait donc tout intérêt à favoriser ce changement de paradigme, qui lui permettait de s’intégrer plus naturellement et sans choquer. Bien sur, il existe des exceptions, et la pratique du « chat » ne s’est pas totalement éteinte. De même, je ne tente pas d’imputer ces changements à la seule volonté de la publicité d’investir la toile, changements que je ne juge d’ailleurs pas. Néanmoins, force est de remarquer que notre usage quotidien d’Internet a été profondément modifié, et qu’aujourd’hui, la fermeture de MSN ne trouble ni notre navigation ni notre esprit, ce qui n’aurait surement pas été le cas s’il avait été question de Facebook.
 
Virginie Béjot
 
Sources :
La fermeture de MSN :
Comportements liés aux réseaux sociaux : http://www.guardian.co.uk/technology/2012/mar/17/facebook-dark-side-study-aggressive-narcissism
http://www.internetactu.net/2012/03/29/pourquoi-avons-nous-peur-des-medias-sociaux/
La bibliothèque dans Buffy contre les Vampires : http://cm.revues.org/84

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