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Culture

Pour une sociopolitique du twerk

Nicki Minaj, Taylor Swift, Miley Cyrus. Le twerk n’appartient ni au rap, ni à la pop, ni à un quelconque genre artistique : il appartient aux twerkeur(se)s. Loin du spectre misogyne qui tourmente les références pop, et notamment l’industrie de la musique, le twerk peut également être considéré comme un outil de revendication identitaire pour les femmes et certains groupes sociaux comme les noir(e)s et les queers (les minorités de genre ou de sexe), ou simplement pour ceux qui se réapproprient leur corps. Le bootyshake peut ainsi être potentiellement considéré comme permettant à l’individu bootyshakant de rompre symboliquement avec toute appartenance, voire toute acceptation, du carcan hétéronormatif.
Geste féministe
Le twerk, l’expression vulgaire et indécente d’une sexualité débridée, d’une dépravation générale du siècle ? L’éclat d’une œuvre (ou sa médiocrité) ne réside que dans l’œil des spectateurs. Le twerk représente alors un symbole d’hypersexualisation seulement si on le considère à travers le prisme patriarcal, celui qui sexualise et culpabilise systématiquement le corps féminin.
A l’inverse, twerker pourrait être aussi une façon pour l’individu social de devenir l’agent actif de son propre corps en utilisant son postérieur selon ses envies propres et individuelles. Fannie Sosa, twerkeuse et étudiante en socio, affirme ainsi que : « le twerk est le kiff de (se) bouger le cul consciemment ». L’éthique du twerk a donc pour visée de considérer le twerk de l’agent actif dans le cadre de sa propre satisfaction. De par son revival récent dans les milieux queers, plus qu’un vecteur féministe, il deviendrait un outil de revendication identitaire de genre plus étendu, qui a pour absolu l’affranchissement du rapport hommes/femmes.

Depuis ses origines diasporiques africaines des populations émigrées dans les banlieues ghettoïsées, le jeu entre dominants et dominés est omniprésent. A partir de ce fait, les fesses deviennent alors un véritable medium pour les revendications.
Appropriation culturelle ?
Plus spécifiquement née au sein des groupes sociaux en marge de la société comme dans la culture hip hop et queer, l’appropriation culturelle par les pop stars blanches des années 2010 constitue une problématique culturelle actuellement débattue. Ces pop stars reprendraient des éléments de revendications identitaires de la culture afro-américaine à des fins d’entertainment. S’approprier l’esthétique d’un mouvement sans en considérer tout le poids idéologique et culturel, c’est l’histoire du glissement des subcultures vers le mainstream, à savoir le « courant dominant », la diversité standardisée.
Ainsi, les tweetclash fusent dans l’industrie de la musique, blancs contre noirs. Earl Sweatshirt, membre noir du collectif subversif Odd Future, accuse Taylor Swift de stigmatiser les noirs : elle cacherait ses préjugés en proclamant son amour de la culture afro-américaine. A côté, la rappeuse Azealia Banks critique Iggy Azalea pour son appropriation des codes culturels noirs (dont le bootyshake) et de son absence de prise de position suite aux événements de Ferguson : « La culture noire est cool, mais les problèmes des noirs le sont moins, hein ? […] »
Outre les tweetclash, le média américain féministe Jezebel a aussi déclaré que Miley pillait la culture afro-américaine sans revendiquer son combat pour l’égalité sociale : « Twerking, popping the ass, bending at the waist and shaking her rump in the air. Fun. But basically, she, as a rich white woman, is « playing » at being a minority specifically from a lower socio-economic level. » (Twerker […]. Amusant. Mais fondamentalement, elle, en tant que femme blanche et  riche, « joue » à être une minorité, spécialement issue de la classe socio-économique inférieure)

Faire du soi avec de l’autre
Cette entrée rampante dans le mainstream poserait donc problème. L’appropriation du twerk par les pop stars blanches est critiquée puisqu’elles utilisent des codes culturels comme sources artistiques et financières, mais n’en diffuseraient pas les racines, c’est-à-dire les discriminations sociales et économiques de ces communautés (raciales ou sexuelles) dominées.
De plus, paradoxalement, elles ne l’utiliseraient non plus comme geste féministe, mais comme outil d’érotisation de leurs corps (personne ne veut être Hannah Montana toute sa vie), créant ainsi dans l’inconscient collectif un lien entre la culture afro-américaine et l’hypersexualisation.
« Plus que jamais à l’époque contemporaine, marquée par une forte valorisation de l’hybridité, du métissage et du sampling, faire du soi avec de l’autre tient d’un principe créatif. Une culture n’est pas un isolat étanche et mobile mais un ensemble ouvert qui ne cesse de se construire par l’importation d’influences et d’éléments étrangers », affirme Monique Jeudy-Ballini, spécialiste des questions d’appropriation culturelle au CNRS. Le twerk connait alors un basculement : initialement objet de revendication identitaire de genre et de race, il s’ancre dans la culture mainstream et se trouverait ôté de son sens premier.
Thanh-Nhan Ly Cam
@ThanhLcm
Sources :
retard-magazine.com
slate.fr
www.lesinrocks.com
Crédits photos :
Terry Richardson
Matthew Kirby
Disney Channel

Miley Cyrus
Culture

Miley is back

 
On l’attendait.
… Ou pas.
Le nouveau clip de Miley Cyrus a été dévoilé il y a cinq jours et a provoqué, comme prévu, une vague de réactions sur la toile.
Habituée à faire le buzz de manière plutôt équivoque et pas toujours -voire jamais- très honorable, la chanteuse américaine de 21 ans repousse un peu plus encore les frontières de l’acceptable avec le clip lascif de sa chanson « Adore You ».
Après le twerk avec un ours en peluche rose géant accroché dans son dos et la boule de démolition où elle se prélassait dans le plus simple appareil avec un naturel déconcertant, Miley se lance désormais dans le plus ou moins suggestif. Pendant quatre minutes trente, la chanteuse est  filmée sous la couette, où elle mime des gestes évoquant la masturbation sur fond de « musique » lancinante aux paroles un peu niaises. Il n’empêche que malgré toutes les critiques qui lui sont faites, la technique provocante de Miley Cyrus fonctionne, puisque la vidéo frôle les trente millions de vues sur Youtube depuis moins d’une semaine.
Décidément, il semblerait qu’espérer de bonnes résolutions de sa part pour la nouvelle année soit illusoire.
Néanmoins, nous pouvons nous réjouir d’une chose: pour un clip de Miley publié, attendons nous à une bonne dizaine de parodies toutes plus savoureuses les unes que les autres…
Camille Gross
Crédit photo :
hollywoodpq.com