Politique

« Et pour quelques tweets de plus » ou la passion de Trump pour Twitter

Ce n’est un secret pour personne : Trump utilise de manière privilégiée les réseaux sociaux — et en particulier Twitter — pour communiquer sur des sujets très variés : politique intérieure comme extérieure, actualité internationale, et même pour commenter les actions de certaines célébrités. Au risque de se montrer impertinent à l’égard de la fonction qui est la sienne, voire de déclencher des polémiques et des tensions diplomatiques. Mais quels sont les véritables ressorts de cette communication trumpienne presque intempestive sur Twitter ? En quoi celle-ci lui est parfois plus nuisible que bénéfique ? FastNCurious a mené l’enquête !

Société

Netflix : une communication "made in USA"

Lancé le 15 septembre 2014 en France, Netflix débarquait dans le paysage de la VOD (vidéo à la demande) avec pour ambition de chambouler le paysage vidéoludique français. Deux ans et demi plus tard et de nombreuses campagnes promotionnelles déployées, Netflix a-t-il réussi son pari d’américaniser la consommation de SVOD en France?

Politique

Médias et Maison Blanche : fin d’un paradigme ou fin de la liberté de la presse ?

Voilà près d’un mois et demi que Donald Trump a accédé au poste de président du monde libre. Cependant, cette appellation, « monde libre », née durant la Seconde Guerre mondiale et popularisée pendant la Guerre Froide, apparaît aujourd’hui plus désuète que jamais. L’admiration que porte le nouveau président américain pour Vladimir Poutine rend obsolète l’opposition entre monde libre, mené par les États-Unis, et le bloc soviétique. De plus, la liberté que les États-Unis ont toujours prônée et voulu exporter dans un souci d’universalisme, ne semble plus vraiment d’actualité.
Contre-vérités et fake news, mots clés de la vie politique américaine
Tout a commencé le samedi 21 janvier, lors de la première conférence de presse du nouveau porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer. Les médias sont qualifiés par le hautfonctionnaire de « malhonnêtes ». Il les accuse d’avoir relayé des informations fausses à propos du nombre de personnes qui étaient présentes à la cérémonie d’inauguration du président Trump la veille, et décide de ne répondre à aucune question des journalistes. Le 11 janvier, le président-élu avait déjà refusé de prendre une question du journaliste de CNN Jim Acosta, en affirmant qu’il relayait des « fake news », c’est-à-dire des informations fallacieuses.

Ces premières conférences de presse ont scellé la relation déjà complexe entre Donald Trump et les médias américains. En effet, durant sa campagne, celui qui était alors candidat à la présidence entretenait un rapport particulier avec les médias. Il n’a cessé d’affirmer des contre-vérités, dédaignant ainsi les nombreuses tentatives de correction des médias, et dénigrant par là même, leur mission démocratique traditionnelle. En retour, les médias, et notamment la télévision, ont été son meilleur allié, puisqu’à force de couvrir les multiples dérapages de Trump, ils lui ont offert des centaines d’heures de diffusion gratuites.
Un climat de plus en plus tendu entre Trump et les journalistes
Désormais chef de l’exécutif, Trump n’a pas lésiné sur les critiques envers les médias, et se permet d’aller encore plus loin. En effet, ce début de mandat a été secoué par plusieurs scandales déjà, plus ou moins fondés. À chaque fois qu’une affaire sortait dans la presse, Trump s’empressait de la qualifier de « fake news » — comme il l’avait notamment fait pour l’affaire de collaboration et de chantage entre la Russie et l’équipe Trump pendant la campagne.
Plus extrême encore, pour parler des grands médias, la chaîne historique d’informations en continu CNN, le journal New York Times ou encore la chaîne NBC News, le président américain utilise désormais l’expression « failing », soit en déclin, en échec, et les qualifie systématiquement de « fake news media ». Il s’exprime principalement à travers ses tweets, contournant ainsi les canaux traditionnels.

C’est bien là que la présidence de Trump devient dangereuse, et constitue une menace pour la liberté de la presse, et la liberté d’expression en général. En faisant des médias le monstre duquel il faut se détourner, Donald Trump peut obtenir le monopole de la vérité. Il fait de sa parole, la parole d’Evangile. Traditionnellement, dans une démocratie, les médias jouent un rôle de gendarme, ils existent pour rendre public. Kant définit même la démocratie par le principe de « Öffentlichkeit », soit publicité. Ils contrôlent les informations émises par le pouvoir, ou fournissent au public les informations qui pourraient être cachées par le pouvoir. Ils sont les garants de la vérité vérifiée et surtout des libertés d’opinion et d’expression. Dans l’Amérique de Trump, le rôle des médias est nié et même méprisé, dégradé.
Il y a quelques semaines à peine, à l’occasion d’une conférence de presse hebdomadaire à la Maison Blanche, l’administration Trump a interdit l’accès à la salle de presse à certains journalistes, notamment ceux du New York Times, de CNN et du Huffington Post, qui tous ont tendance à vivement critiquer le président américain. La voix qui porte l’opposition a donc été étouffée par le pouvoir exécutif.
La fin d’une époque ?
Le philosophe Achille Mbembe théorise notre temps en affirmant que l’âge de l’humanisme touche à sa fin, pour laisser place au nihilisme, et à l’autoritarisme populiste. Sa vision consiste donc à considérer que l’histoire socio-politique de l’humanité peut être envisagée comme un enchaînement de différents paradigmes. Seulement, cette analyse est-elle satisfaisante ? Peut-on simplement voir les choses en termes de grandes aires, et grandes ères ? Peut-on analyser l’histoire comme un mouvement inexorable qui balance l’humanité entre des époques plus ou moins libertaires ? La fin du paradigme humaniste est-elle une fatalité ?
L’affaiblissement du pouvoir médiatique causé par Trump est une tragédie moderne, mais on ne doit ni ne peut se résigner. Le New York Times a diffusé pour la première fois, durant la pause publicitaire de la cérémonie des Oscars du 26 février 2017, une réclame promouvant le travail journalistique et le fact-checking, qui consiste à s’assurer de la véracité des faits et des informations. De la même manière, le Washington Post prouve sa résistance et sa résilience en adoptant le sous-titre « Democracy Dies in Darkness », soit la démocratie meurt dans l’ombre. Le journal fait ainsi référence à la nécessité du journalisme en tant que garant d’une certaine transparence du pouvoir. Encore plus encourageant, de nombreuses associations de soutien au journalisme se développent, comme le Committee to Protect Journalists qui, après avoir été citée par Meryl Streep lors de son fameux discours des Golden Globes, a connu une forte augmentation de dons.
L’argument de la sortie d’un paradigme peut être destructeur, car il confère une dimension fataliste aux changements que nous sommes en train de vivre. Pourtant, la presse a survécu à bien d’autres crises démocratiques au cours de son histoire. Faible corps médiatique correspond nécessairement à une démocratie faible. C’est à nous de prendre les bonnes mesures et d’adopter les bons réflexes.
Mina Ramos
Sources :
– CILIZZA Chris, Sean Spicer held a press conference. He didn’t take questions. Or tell the whole truth, The Washington Post, publié le 21 janvier 2017, consulté le 1er mars 2017. https://www.washingtonpost.com/news/the-fix/wp/2017/01/21/sean-spicer-held-a-pressconference-he-didnt-take-questions-or-tell-the-wholetruth/?utm_term=.5aea6a1a7ca5
– SILLITO David, How the media created the president, BBC.com, publié le 14 novembre 2016, consulté le 1er mars 2017. http://www.bbc.com/news/entertainment-arts-37952249
– LAVENDER Paige, Donald Trump Refuses to Take A Question From CNN Reporter, Calls Network ‘Fake News’, The Huffington Post, publié le 11 janvier 2017, consulté le 1er mars 2017. http://www.huffingtonpost.com/entry/donald-trump-cnn_us_58765783e4b05b7a465ccc0b
– CALDERONE Michael, Trump White House Bars News Organizations From Press Briefing , The Huffington Post, publié le 24 février 2017, consulté le 1er mars 2017. http://www.huffingtonpost.com/entry/white-house-bars-newsorganizations_us_58b08a76e4b0a8a9b78213ae
– La Documentation française, « Médias et démocratie, La fonction des médias dans la démocratie », http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/libris/3303330403389/3303330403389_EX.pdf
Crédits images :
– Image de Une : Spencer Platt / Getty
– Image 1 : compte Twitter @realDonaldTrump
– Image 2 : compte Twitter @realDonaldTrump

Politique

Y a-t-il un comique pour sauver l'élection ?

En 1995, les humoristes de l’émission satirique Les Guignols de l’info ont grandement participé à la victoire de Jacques Chirac aux élections présidentielles. En effet, il était présenté comme un homme bon vivant, au comportement supposé proche de celui du Français moyen, ce qui lui assurait un important capital de sympathie. Cette intrusion de la sphère comique dans les élections se retrouve également aux Etats-Unis, et prend des formes à la fois plus hybrides et plus prononcées.
Dès lors, de quelle manière les hommes et les femmes politiques tentent-ils de contrôler l’incontrôlable représentation humoristique dont ils sont l’objet ? Et joue-t-elle en faveur du candidat sur les plans politique et médiatique ?
« Dans l’autre, on trouve toujours un peu de soi »

Aux Etats-Unis, certaines émissions humoristiques se veulent être le reflet de la société dans son ensemble. Dans le cadre des élections présidentielles, ce rôle miroir prend encore plus d’importance, comme on a pu le voir avec Saturday Night Live par exemple. Cette émission, créée en 1975 par le producteur Lorne Michaels et diffusée sur NBC, est devenue célèbre pour ses nombreuses imitations satiriques, notamment celles de personnalités politiques. La ressemblance avec les humoristes témoigne de la qualité de l’émission : il aura fallu plusieurs mois pour trouver Tina Fey, l’humoriste incarnant Sarah Palin.

Saturday Night Live accueille chaque semaine une célébrité qui prend le rôle du présentateur et c’est sur ce point précis qu’elle a fait parler d’elle il y a peu. Le 7 novembre 2015, c’est Donald Trump qui a été choisi pour présenter l’émission. Il ne s’agissait pas de tourner au ridicule le comportement ou le caractère du personnage, mais de lui offrir ce que certains ont pu analyser comme une sorte de tribune lui permettant d’accroître sa popularité. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce type d’exposition peut être contrôlé par l’équipe de campagne : il y aurait une sorte d’« exception humoristique » qui pourrait placer le candidat en position de force par rapport aux satiristes.
« Comme un cheveu sur la soupe de l’élection »
C’est Donald Trump qui cristallise les tensions dans cette campagne 2016 et qui s’est retrouvé au cœur d’une autre polémique en septembre dernier. Il a été reçu par Jimmy Fallon pour une interview dans son émission Tonight Show with Jimmy Fallon. Il ne s’agissait pas de l’interroger sur son programme politique mais de donner l’impression d’une discussion conviviale : l’image la plus commentée sur Internet a été celle de Jimmy Fallon ébouriffant les cheveux de Donald Trump. Les accusations se sont multipliées : certains se sont demandés quelle était la légitimité de l’humoriste pour interroger un candidat à la présidentielle, surtout si cela ne visait pas à soulever des points intéressants de son programme.

On s’éloigne par conséquent de l’infotainment que l’on connaît en France, et dont Yann Barthès est le chef de file. Jimmy Fallon et David Letterman qui le précéda, sont des humoristes, ils n’ont jamais prétendu être des intervieweurs politiques ou même des animateurs, mais ce n’est pas pour autant que leurs émissions n’ont pas une incidence sur les téléspectateurs et sur leurs votes. Ainsi en 2008, John McCain avait annulé à la dernière minute son passage au Late Show with David Letterman, lui préférant une émission politique reconnue, celle de Katie Couric. Vexé, David Letterman avait alors déclaré que le chemin vers la Maison Blanche passait obligatoirement par son plateau, et que John McCain s’en mordrait les doigts pour l’avoir manqué. La défaite du candidat républicain quelques mois plus tard a semblé confirmer ses propos.
« Il faut cultiver notre jardin »
Dès lors, il faudrait considérer l’humour (mis en scène, et non pas seulement glissé dans un discours) comme une stratégie de la communication, visant à toucher un public plus large et peut-être même plus jeune. La première tentative avait été faite par Barack Obama, alors qu’il avait déjà été élu Président mais qu’il souhaitait faire la promotion d’Obamacare : il avait été reçu par l’humoriste Zach Galifianakis dans une parodie de Late show, intitulée Between Two Ferns with Zach Galifianakis et diffusée uniquement sur Internet, sur la plate-forme Funny or Die qui a depuis ouvertement affiché son soutien au Parti Démocrate.
Ainsi le 22 septembre 2016, le même programme a reçu Hillary Clinton et ce, à la demande de l’équipe de campagne de la candidate, en la soumettant à des questions pour le moins ironiques et dérisoires telles que « Avez-vous déjà pensé à être plus raciste ? ». L’objectif était de donner une image plus sympathique et détendue de la candidate, car c’est sur ce point que se concentrent beaucoup les critiques du Parti Républicain.

Finalement, cet investissement n’a qu’un seul but : séduire l’électeur par le ludique s’éloignant ainsi du purement politique. La personnalité du candidat ne s’exprime plus uniquement à travers les points forts de son programme, mais se découvre également à travers les émissions humoristiques auxquelles il participe. Ces interventions restent contrôlées par les équipes de campagne, ce qui fait que le comique reste au service de la communication du candidat sans réellement pouvoir changer la perception que l’on a de la campagne, et ce même si elles peuvent apparaître comme des prises de risques et parfois même comme des actes subversifs.
Justine Ferry
Sources :
– Fey, Tina. Bossypants. Little, Brown and Company, 2011. 0-316-05686-3
– wikipedia; Saturday Night Live (consulté le 30/10/16)
– Carter, Bill (mis en ligne le 24/09/08 / consulté le 30/10/16)
– Hughes, William (mis en ligne le 29/10/16 / consulté le 29/10/16)
– Memoli, Michael A. (mis en ligne le 22/09/16 / consulté le 29/10/16)
– Saraiya, Sonia (mis en ligne le 16/09/16 / consulté le 30/10/16)

Société

Sensibiliser les Américains au gaspillage ? Un défi pour « monsieur poubelle ! »

Vous êtes-vous déjà demandés combien pèseraient vos déchets ménagers mis bout à bout ? Eh bien Rob Greenfield, un militant écologiste en a fait l’expérience pour vous ! Pour sensibiliser les Américains au problème du gaspillage alimentaire aux États-Unis, cet environnementaliste décide de porter sur lui les ordures mensuelles d’un Américain moyen.
Son expérience étonnante s’ancre dans un contexte de prévention internationale, car le 16 octobre dernier avait lieu la Journée mondiale de l’alimentation : un timing parfait pour montrer à tous que le gaspillage est un problème majeur dans la société.
« Trash me » ou comment lutter contre le problème de surconsommation américain
En effet, la quantité d’ordures jetées aux États-Unis est incroyable : deux kilos par jour et par personne en moyenne, c’est-à-dire deux fois plus que les Français. Le calcul est vite fait : ce n’est pas moins de soixante kilos de détritus produits en un mois pour une seule personne ! Ce constat affolant ne semble pourtant pas être au centre des préoccupations des Américains, peut-être davantage obnubilés par la course à la présidentielle 2016. Aujourd’hui, les États-Unis sont « le premier producteur mondial de déchets, que ce soit les déchets ménagers, industriels ou toxiques » explique Dominique Lorrain, Directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), dans son livre Le Secteur des déchets aux États-Unis, I.
C’est pour cette raison que l’écologiste engagé a lancé son projet « Trash me ». Son objectif est clair : déclencher une prise de conscience. Affublé d’un costume contenant chacun de ses déchets, Rob Greenfield se promène dans les rues de New-York et joue sur une communication visuelle et insolite. Il remplit sa tenue d’emballages divers et variés (excepté les déchets organiques, on vous laisse deviner pourquoi), ce qui le fait gonfler de semaine en semaine altérant ainsi sa capacité à se déplacer. Au terme de son expérience, il aura tout de même accumulé environ quarante-cinq kilos de détritus
Pour Rob Greenfield, la meilleure façon de comprendre le mode de vie d’une majorité, c’est de l’adopter et d’en exposer les conséquences néfastes au grand jour.
Une action originale et décalée
Rob Greenfield utilise les lieux publics pour une visibilité optimale et cherche à renvoyer une image d’un Américain « comme les autres ». Pour cela, son opération s’appuie sur les réseaux sociaux et fait appel à une logique d’identification : il est le miroir qui reflète le fléau de la société moderne, à savoir la surconsommation.
Et si le décalé pouvait être recalé ?
Exhiber ce qu’on refuse de voir c’est aussi prendre le risque d’être perçu comme marginal et incompris par la société dans laquelle l’incitation à la consommation est omniprésente. En vérité, nous n’avons que très peu conscience de l’impact qu’ont tous les emballages accumulés au quotidien, sur notre environnement. C’est donc à la fois une cause difficile à défendre, ainsi qu’une réalité difficile à assumer.
Cependant, Rob Greenfield n’est pas le seul à tenter d’alerter l’opinion publique en jouant sur un visuel percutant. Le « Pétrole Mob » de Greenpeace où les militants français s’engluaient de pétrole pour dénoncer le phénomène de marée noire peu de temps après celle du golfe du Mexique en 2010, avait lui aussi marqué les esprits.

L’homme aux six millions de vues
A trente ans seulement, le défenseur de la planète convainc et suscite l’engouement des médias à chaque opération décalée. En 2015, on l’appelle le « Forest Gump de l’écologie » pour avoir parcouru des centaines de kilomètres à vélo le long de la côte californienne dans le but de prendre soin des paysages locaux ; et l’année suivante, il anime TEDxTeen intitulé « How to end the food waste fiasco. ». Toutes ses expériences et ses astuces pour tendre vers une consommation meilleure sont sur son blog : robgreenfield.tv.
A quelques jours de la Semaine Européenne de la Réduction des Déchets (SERD) qui aura lieu du 19 au 27 novembre 2016, l’expérience de Rob Greenfield s’est achevée à point nommé et soulève la question de l’accumulation des déchets ménagers dans le monde entier.
Vous l’aurez compris, Rob Greenfield ne passe pas inaperçu dans toutes ses entreprises plus folles les unes que les autres : à la fois proche de son public-cible mais aussi présent dans les médias, il semble se placer comme le défenseur moderne et avant-gardiste de la cause environnementale.
 
Steffi Noël
@Steffi Noël sur Twitter
 
Sources :
LORRAIN Dominique, « Le secteur des déchets aux Etats-Unis (1) », Flux, 43, (Rubrique « Entreprises de Réseaux »), janvier-mars 2001, p. 73-84.
« Rob Greenfield, l’homme-ordures de New York », Paris Match. Publié le 05/10/2016. Consulté le 15/10/2016.
« Rob Greenfield, le « forest gump » de l’écologie », Monsieur Mondialisation. Publié le 27 octobre 2015. Consulté le 14/10/2016.
– GENTILLE Denis « Trash me : la folle idée de Rob Greenfield pour lutter contre le gaspillage », Positivr.fr. Publié le 12 septembre 2016. Consulté le 14/10/2016.
RUIZ-GROSSMAN Sarah « This Guy Is Wearing Every Piece Of Garbage He Generates For A Month », The Huffington Post. Publié le 26/09/2016. Consulté le 16/10/2016.
Le site de Rob Greenfield
 
Crédits photos :
Bryan R. Smith, photographe pour ParisMatch

Société

Le datajournalisme va-t-il sauver les médias d'information ?

Perte d’audience, concurrence accrue, baisse de confiance… Les médias d’information payants sont aujourd’hui confrontés à une crise. Depuis quelques années émerge une pratique journalistique qui semblerait pouvoir leur redonner leur dimension d’antan : le datajournalisme.
Le « journalisme de données » est une technique qui consiste à analyser un vaste ensemble de données complexes (des data) pour en extraire des informations pertinentes et les rendre intelligibles au grand public. Les sources sont fiables, les informations à la fois attrayantes et intéressantes. L’intérêt du datajournalisme pour les médias d’information est d’autant plus visible lorsqu’il permet de faire des gros coups, qui boostent l’audience – les « Panama Papers » en sont un exemple criant. Mais lorsqu’il a prétention à devenir hégémonique, à être seul détenteur du Vrai, le datajournalisme dévoile ses failles. Nate Silver, star du datajournalisme aux Etats-Unis, en a récemment fait les frais en prédisant un score de 2% pour Donald Trump aux primaires républicaines.
La « crise » des médias d’information payants
Si l’on parle d’ordinaire de « crise » des médias d’information, c’est pour désigner la presse quotidienne française dont les ventes ne cessent de diminuer. Il faut pourtant nuancer cette affirmation, le déclin de 8,6% des ventes papier en 2015 étant assez bien compensé par les abonnements sur format digital, qui ramènent la baisse générale à 1,4%. Cependant plusieurs facteurs montrent que les médias d’information – pas uniquement la presse – connaissent actuellement des difficultés.
Un secteur très concurrentiel
Les quotidiens d’informations font face à la concurrence des médias gratuits. La plupart d’entre eux est aujourd’hui passée au bimédia, avec une version du journal disponible en ligne. Mais face au rythme auquel court l’information sur Internet, les quotidiens donnent accès à une grande partie de leurs contenus gratuitement en comptant sur les revenus publicitaires de leurs sites. C’était sans compter sur les « bloqueurs de pub » – AdBlock en tête – qui ont permis aux internautes de ne plus subir l’omniprésence d’annonces autour de leurs articles. Face à cela, plusieurs quotidiens ont mené une « opération contre les bloqueurs de publicité » en mars dernier.
A la télévision et à la radio, la concurrence est surtout à l’oeuvre entre les médias eux-mêmes. On comptera bientôt pas moins de quatre chaînes d’information sur la TNT : BFM TV, ITélé, LCI (arrivée le 5 avril), et la chaîne info du service public à partir de la rentrée prochaine. De même, la case la plus importante en radio est la matinale, dont la mission principale est d’informer.
Une perte de confiance
La confiance des Français dans les médias ne cesse de s’effriter. C’est du moins ce que dénote le « Baromètre 2016 de confiance des Français dans les médias » réalisé par TNS Sofres sur un échantillon de 1061 personnes. On y découvre que le degré de crédibilité des médias est en chute libre : sur Internet, il s’élève à 31% (huit de moins que l’année passée), 50% pour la télévision (-7%), 51% pour la presse (-7%) et 55% pour la radio (-8%). De même, 64% des interrogés considèrent que les journalistes ne sont pas indépendants du pouvoir politique, et 58% des pressions de l’argent.
Le constat est sans appel : les médias d’information pâtissent d’un déficit commercial et de confiance. C’est là que le datajournalisme entre en scène. Il va permettre à plusieurs médias d’informations de réaliser un coup d’ampleur mondiale, qui va alimenter leurs Unes pendant plusieurs jours.
Les « Panama Papers », la plus belle réussite du datajournalisme
Leur nom est un symbole à lui tout seul. Les « Panama Papers », en hommage aux « Pentagon Papers » du New York Times de 1971, sont une version 2.0 du journalisme d’investigation : un datajournalisme porté à une échelle mondiale. Ce sont en effet 370 journalistes issus de 109 médias internationaux qui ont épluché les quelques 11,5 millions de documents (2,6 téraoctets de données) de Mossack Fonseca, spécialiste de la création de sociétés écrans basé au Panama. Les rédactions, coordonnées par le Consortium International des Journalistes d’Investigation (ICIJ), ont démontré que les data alliées à un travail collaboratif permettent aux médias de faire des gros coups.
 

 
Les médias d’information participants ont redoré leur blason. Associées à la rigueur journalistique, les data ont une utilité citoyenne. Elles permettent de dévoiler les abus des puissants au monde entier. Avec les « Panama Papers », les médias d’information sont du côté du peuple. Et ce dernier le leur rend bien. Pour preuve le bond des ventes papier du Monde, seul journal français ayant pris part à l’opération : +109% le premier jour de la publication des révélations, +56% le deuxième. Le trafic web n’était pas en reste, avec 6,4 millions de visites cette semaine-là dont un tiers sont passées par un contenu « Panama Papers ». L’émission Cash Investigation (sur France 2), affichait quant à elle 17,1% de part d’audience pour son numéro consacré au scandale. On pourrait croire que le datajournalisme est tellement efficace qu’il finira par tout remplacer.
Le cas Nate Silver, ou quand le datajournalisme se brûle les ailes
Nate Silver est une star du datajournalisme aux Etats-Unis. Il doit cette popularité à deux coups d’éclat. Son site spécialisé dans le journalisme de données, FiveThirtyEight, a prédit les résultats dans 49 des 50 Etats durant les élections présidentielles de 2008 et a réalisé un sans-faute en 2012. Auréolé de ces succès, le datajournaliste affirmait en juin 2015 que Donald Trump n’avait que 2% de chances de s’imposer aux primaires de son parti. Bien que sa méthode (basée sur l’analyse des sondages et de l’histoire du pays) semble sans failles, Nate Silver s’est vu contraint de réévaluer cette estimation à 13% en janvier 2016 et a été ensuite dépassé par les événements.
N’a-t-il pas droit à l’erreur ? C’est sans doute ce qu’il aurait pu plaider s’il n’avait pas tenu des propos visant à décrédibiliser le rôle des éditorialistes politiques. Quelle importance pourraient avoir leurs opinions, leurs ressentis face à l’exactitude mathématique du datajournalisme ? Aucune, si l’on en croit son article publié le 23 novembre 2015 sur FiveThirtyEight. Intitulé « Dear media, stop freaking out about Donal Trump’s polls », il y réfute les critiques de ceux qui « couvrent la politique pour vivre ».
Depuis les abandons de Ted Cruz et John Kasich, les adversaires de Nate Silver ne cessent de faire remarquer ses erreurs d’estimation, souvent avec mauvaise foi. Ils mettent le doigt sur les erreurs, passant sous silence les nombreux succès. Le datajournaliste a par ailleurs reconnu avoir utilisé une méthode moins rigoureuse qu’à son habitude pour effectuer ses analyses dans le cas de Donald Trump et a révisé sa copie.
Que retenir de tout cela ? Le datajournalisme est une évolution profitable au secteur de l’information, en quête de renouvellement et de regain d’attrait. Mais lorsqu’il traite de politique, il a une limite. Certes il permet d’analyser la part sociologique de l’Homme : les statistiques illustrent ou dévoilent un fait social qui, en tant que norme, peut servir à prédire quelques comportements. Mais il ne peut percevoir le pouls d’une nation, son caractère ambivalent et imprévisible, aux traductions fortes (l’émotion collective, le débat…). Jusqu’à preuve du contraire, l’âme d’un peuple ne transparaît pas dans des données informatiques, ni dans les sondages.
Clément Mellouet 
Sources: 
La Dépêche, Presse: les quotidiens se battent pour compenser le déclin du papier, 03/02/2016
Le Figaro, Opération contre les bloqueurs de publicité, 21/03/2016
TNS Sofres, Baromètre 2016 de confiance des français dans les médias
NationalArchives.com, Pentagon Papers
Five Thirty Eight
Five Thirty Eight, Dear Media, Stop Freaking Out About Donal Trump Polls, 23/10/2015
Crédits photos: 
Observatoire du Web Journalisme
Youtube 
 

Société

Etats-Unis : la fabrique à show

 
L’un cache des billets à San Francisco en tweetant des indices permettant de retrouver le sésame, tandis que l’autre dénonce les rappeurs américains qui arborent de fausses montres sur Instagram.Rien ne semble rapprocher ces deux phénomènes 2.0, que l’on retrouve respectivement sous le compte de #HiddenCash sur Twitter et de #FakeWatchBusta sur Instagram.
Et pourtant. Le premier à avoir fait le buzz à la fin du mois de mai,  est Jason Buzi, un investisseur américain, qui, après avoir gagné énormément d’argent, a décidé d’en faire bénéficier les habitants de San Francisco. Pour se faire, il a donc opté pour un procédé simple et ingénieux : à chaque somme d’argent dissimulée, le bienfaiteur tweete un indice sur son emplacement, depuis son ordinateur. Une fois découvert, l’heureux élu est invité à tweeter une photo du butin. Ce Robin des Bois qui agit, dit-il, « par plaisir », a fait savoir qu’il espère étendre son projet à d’autres grandes villes comme New York ou Los Angeles et pense pouvoir continuer à vivre à l’abri tout en donnant jusqu’à 1000 dollars par jour. Il s’est décidé à faire don de sa fortune dans la ville californienne car celle-ci détient le plus grand écart de richesse du pays. Depuis qu’il a été démasqué le 10 juin dernier,
#HiddenCash a déclaré vouloir cacher des billets dans les villes de Londres,
Madrid et Paris durant la première semaine de juillet. Un événement
certainement très attendu des européens.
Et c’est d’Europe que vient le deuxième justicier, un trentenaire connu sous le nom de #FakeWatchBusta sur Instagram et qui se dénomme lui-même The Dark Night of Watches. Ce passionné d’horlogerie et de mécanique et collectionneur de montres, s’amuse à divulguer les tricheries des grands noms du rap comme Soulja Boy (rappeur, producteur et acteur américain) ou même des stars internationales comme Garrett Wolff de la NFL (football américain) qui s’affichent fièrement sur leur propre compte avec de fausses montres de luxe – que certains ne savent même pas contrefaites. L’humiliation peut être sévère lorsque la dénonciation se retrouve placardée publiquement sur Instagram, à l’aide d’un « FAKE » rouge sur la photo du détenteur de la fausse montre. Ce qui peut s’apparenter à une chasse plus « fun » que sérieuse, comporte tout de même des risques pour le traqueur qui fuit les menaces de procès.
Finalement, entre ces deux « phénomènes du web », on retrouve cette même volonté de procéder de façon anonyme. Figures modernes des héros de notre enfance, ils se placent dans la lignée des bienfaiteurs masqués qui avancent dans l’ombre – l’ordinateur étant le gadget par excellence du héros moderne -, risquant beaucoup pour maintenir une certaine forme de justice, voire un équilibre entre le bien et le mal. Même si porter une fausse Rollex n’a jamais tué personne, nos redresseurs de tort défendent des valeurs qui sont celle d’une justice sociale contemporaine. Une redistribution des richesses et une dénonciation du « bling-bling » américain n’ont certes pas le même objectif mais l’auto-justice est dans les deux cas symptomatique. Encore appelée « vigilantisme », ce comportement consiste à faire exercer la loi de manière individuelle et en dehors de toutes considérations juridiques légales. Batman ou Spiderman témoignent du succès des justiciers aux Etats-Unis, terre d’origine des héros à capes et des vengeurs inconnus. Pas étonnant que les internautes (nouvelles figures des citoyens) trépignent devant de telles opérations. Une tendance somme toute, pas si moderne…

Un autre point commun réunit #HiddenCash et #FakeWatchBusta : le goût de la mise en scène, voire de la spectacularisation. Le premier s’en sert pour faire preuve de générosité quand l’autre l’accuse. En effet, si Jason Buzi, le riche investisseur, a fait le bonheur de dizaines de citoyens américains en faisant acte de charité, il a surtout choisi de recourir à une communication virale et à une réalisation inédite, en grandeur nature. En France, quand un gagnant au loto décide de reverser une partie de son du à des associations, la discrétion est souvent préférée à l’exubérance et c’est à peine si quelques médias relatent la nouvelle.
Personne ne semble dépasser les américains au jeu de la « surproduction » quasi hollywoodienne. En témoigne l’événement organisé en novembre 2013 par la fondation « Make-a-wish »qui réalise les rêves d’enfants atteints de maladies graves: le petit Miles Scott, souffrant d’une leucémie et fan des supers-héros, a pu vivre son rêve et lui aussi s’armer de sa cape de « BatKid ». Toute la ville de San Francisco – la police, le maire, l’équipe de football, les médias locaux et 7000 volontaires – ont collaboré pour faire de la ville, un Gotham City plus vrai que nature. Le mini-héro a ainsi pu débarrasser la ville de ses méchants, exploit que n’a pas manqué de saluer Barack Obama et la Première Dame.

Le faste de ce genre de mise en scène, l’Europe n’est pas encore prête à l’adopter : ne serait-ce pas d’ailleurs ce que dit en partie #FakeWatchBusta en dénonçant la contrefaçon ostentatoire ?
Laura Pironnet

Sources
HuffingtonPost
HuffingtonPost
LesInrocks
LeFigaro

Publicité et marketing

Du pain, du vin, du doliprane

 
 
Savez-vous qu’aux Etats-Unis vous pouvez demander à votre médecin exactement la marque d’antidépresseurs que vous désirez prendre ? Et si les antidépresseurs ne sont pas suffisants, vous pouvez également demander d’autres médicaments sur ordonnance par marque, pour traiter l’insomnie, l’hypertension artérielle, le diabète et les conditions cardiaques, il y a même des médicaments pour faire grandir vos cils (Latisse ©). Tous ces médicaments sont des substances règlementées, mais outre-Atlantique la publicité de médicaments sur ordonnance qui s’adresse directement aux consommateurs est autorisée et subventionnée par l’industrie pharmaceutique.
Le début de la publicité pour les médicaments sur ordonnance
Dans les années 1980, la publicité de médicaments sur ordonnance s’adressait exclusivement aux médecins parce que les compagnies pharmaceutiques considéraient qu’ils avaient la plus grande influence sur le choix de médicament du consommateur. Medicus est l’agence de publicité médicale qui a changé ce modèle. Joe Davis, publicitaire américain, et William Castagnoli, PDG de Medicus, ont introduit en 1992 des publicités qui contournaient les strictes règles de l’organisme chargé de protéger le droit du consommateur, la Federal Trade Commission (FTC).  Après une hausse des ventes de Seldane, le médicament que lequel Davis et Castagnol ont travaillé, la législation concernant les déclarations dans ce genre de publicité à changé, notamment sur deux aspects : elle a permis aux médicaments d’être mentionnés par le nom de la marque dans les publicités et a réduit les obligations de déclarations des effets secondaires. Les Etats-Unis et la Nouvelle Zelande sont les deux seuls pays au monde où la publicité des médicaments réglementée peut s’adresser aux consommateur. Il y a trois raisons pour lesquelles la loi permet ce genre de publicité, ces trois mêmes raisons expliquent aussi pourquoi elle continue à créer des revenus : la place de l’Etat et ce qu’il contrôle dans l’imaginaire américain, l’idéologie de « l’individualisme américain », et la stratégie de marque pour les médicaments.
La place de l’Etat dans l’imaginaire Américain, ce qu’il réglemente
De droite ou de gauche, pour un Américain la place de l’Etat et ce qu’il peut réglementer est bien plus réduite que pour d’autres. La rhétorique politique américaine a toujours condamné un Etat à la ‘Big Brother’, notamment avec la phrase « big government ». Tous les collégiens et lycéens américains lisent 1984, le roman de George Orwell, tout en apprenant qu’il faut se méfier d’un gouvernement qui contrôle le contenu diffusé à son peuple. Par ailleurs, la place du capitalisme dans l’imaginaire américain est très importante pour l’économie et le rêve américain. Tous ces facteurs débouchent sur une législation qui favorise la déréglementation de la publicité car il s’agit d’un outil primordial pour le capitalisme et la compétitivité sur les marchés. L’industrie pharmaceutique a profité de ces particularités sociales et politiques, mais surtout du lobbying, institution américaine datant de la création de l’Amérique et s’inscrivant dans les valeurs fédéralistes. Ainsi, les compagnies ont réussi à faire changer la législation. En témoigne cette publicité pour un médicament.
« L’individualisme américain »
Tout consommateur aime faire ses propres choix, savoir qu’il forme son opinion et ses préférences en filtrant les messages publicitaires qu’il reçoit.  L’individualisme américain va au-delà et exige que le gouvernement ne filtre pas les messages qu’il peut recevoir, même si les produits annoncés pourraient être nuisibles le consommateur veut recevoir les messages publicitaires pour faire son choix. Cet individualisme est intégral à l’identité américaine, le dit « self-made man », une des personnifications du rêve américain. Cette volonté de faire son propre choix pérennise la publicité des médicaments sur ordonnance. Même avec des publicités d’une minute (publicité pour Boniva © dans cet article), dont la moitié est dédiée à compter les nombreux effets secondaires, le consommateur américain veut faire son propre choix de médicament et surtout de marque.

La marque de médicaments
En annonçant un produit comme étant « de marque » plutôt que générique, il y a un certain besoin de validation par rapport à soi-même que l’annonceur crée chez le consommateur. C’est pour ceci que le même pull peut coûter 20€ ou 100€ en fonction de la marque, et pourquoi le consommateur est prêt à payer un prix plus élevé pour rationaliser son achat.  Or, ce concept peut très bien être appliqué aux médicaments et c’est pour cela que ceux qui ont fait l’objet d’une publicité directement auprès du consommateur sont plus chers que les médicaments génériques. Vicodin ©, Prozac ©, Adderall ©, Lunesta ©, Lipitor ©, Abilify © et tant d’autres sont des noms commerciaux pharmaceutiques bien connus aux Etats-Unis. Pourtant ce sont des médicaments assez forts : de l’hydrocodone, des amphétamines et d’autres substances qui se vendraient moins si elles étaient annoncées comme telles. C’est donc le positionnement qui fait le succès de ces marques ; souvent, les publicités font des déclarations telles que « n’est pas disponible en générique » (publicité Lipitor ©dans cet article) pour établir leur supériorité par rapport aux médicaments qui ont dépassé leur brevet et sont donc moins cher mais ont le même effet.
C’est donc un particulier mélange d’idéologies politiques, sociales et d’identité qui permet aux compagnies pharmaceutiques d’annoncer leurs médicaments avec tant de succès. C’est un phénomène isolé dans le monde développé, mais très lucratif. Le secteur de la publicité des substances réglementées était estimé à 4,3 milliards de dollars en 2009. Cette même année l’américain consommait en moyenne 5 médicaments d’ordonnance en plus qu’en 1992. Depuis, il y a eu des initiatives pour réduire ces publicités, et aujourd’hui elles sont diffusées surtout pendant les horaires nocturnes. Néanmoins, elles sont très présentes et une grande source de revenus pour l’industrie de la publicité et des produits pharmaceutiques.
 
Miguel Rayos
Sources
USAToday
FDA
FDA
NPR

Société

Va-t-on bientôt pouvoir tweeter son décollage?

 
Grande nouvelle pour les Américains : la FAA (Federal Aviation Administration) a rendu hier son verdict quant à une question qui se posait depuis quelques temps déjà. En effet, il sera désormais possible pour les passagers empruntant les compagnies aériennes américaines de pouvoir utiliser leur smartphone ou autres appareils électroniques (ordinateurs portables exclus) pendant le décollage et l’atterrissage de l’appareil.
Alors, pure magnanimité ou concession face à la pression de certains ? Pour beaucoup de consommateurs mais surtout pour les chefs de file du lobbying des fabricants d’électronique américains comme le géant Amazon, c’est une véritable avancée qui présente de nombreux avantages après tant d’années passées à tester la dangerosité de la chose en faisant, par exemple, « décoller des avions remplis de Kindle ». Finie, en effet, la frustration ressentie par les passagers ne pouvant pas utiliser ces appareils pendant le vol qui peut s’avérer long et ennuyeux.
Le fait qu’une telle contrainte soit à présent levée à des moments si anxiogènes représente un événement marquant qui présente toutefois quelques limites. S’il sera progressivement possible d’envoyer des fichiers par Bluetooth ou encore de jouer à des jeux, difficile cependant d’imaginer pouvoir utiliser Internet. De plus, il s’agira tout de même pour les passagers de se cantonner au mode avion, et de devoir accepter le fait que leur batterie se vide à une vitesse record.
Il n’est donc pas venu le temps des profils Facebook mis à jour en direct de la piste d’atterrissage.
La question reste à savoir pour combien de temps encore ?
 
Camille Gross

Publicité et marketing

Consommation, publicité et NBA : passage au Verizon Center de Washington

 
L’Amérique est la terre du marketing tout-puissant. Lors de la rencontre entre les Washington Wizards et les Chicago Bulls, nous avons été impressionnés par l’enrobage publicitaire du match de basketball. Tout l’espace, spatial et temporel est occupé par la publicité et rien n’est laissé au hasard. Chaque seconde est calculée, chaque portion de terrain et de gradin possède un potentiel marketing à exploiter tout au long du match.
 
Lancés francs et sandwichs au poulet
Le complexe sportif est étudié pour faire du moindre espace un mini-évènement marketing. Une fois passées les portes du Verizon Center, nous devons traverser une boutique aux couleurs des Wizards avec tout l’attirail habituel : casquettes, maillots de l’équipe, drapeaux, calendriers, gants ; tous les articles possibles et imaginables, à condition de contenir le symbole de l’équipe – l’aigle – ainsi que le logo et les couleurs de l’équipe qui joue à domicile. Avant d’arriver à nos sièges, nous croisons au moins une quinzaine de mini-stands vendant d’énormes bretzels, des sandwiches, des frites, des sodas, et puis à nouveau des bretzels, et des frites et des sodas. En abondance. Le parcours du spectateur est criblé/jonché d’obstacles marketing qui l’incitent à mettre la main à la poche. Pour assister au match, le spectateur a donc le choix entre un ticket et un « all you can eat ticket » qui comprend de la nourriture à volonté pendant toute la rencontre. Quand bien même le spectateur ne serait pas conquis par toutes ces douceurs, il se fait bombarder de burritos Chipotle à la mi-temps ! Un match de basket, c’est bien, un match de basket avec nourriture et drapeaux, c’est mieux. Tout est fait pour nous le rappeler. Partout.

Nous sommes enfin à l’intérieur, assis à nos places. L’occupation de l’espace est impressionnante. Il y a bien évidemment le terrain au centre mais au-dessus, c’est l’avalanche de couleurs, un raz-de-marée d’animations en tout genre. Quatre énormes écrans publicitaires surplombent le terrain de manière à être visuellement accessibles depuis n’importe quel siège. Le contenu des programmes mêle publicité et contenu sportif. Avant le match, les écrans diffusent des pubs pour les produits proposés à l’intérieur de l’enceinte. Pendant la rencontre, chaque panier déclenche un court spot pré-enregistré du joueur qui vient de marquer en même temps que le speaker crie son nom, ils encouragent les supporters à crier (« Make some noise ! »). Et soudain, la magie : le speaker annonce au public que si un joueur de l’équipe adverse manque trois lancés francs d’affilée, c’est sandwich au poulet pour tout le monde ! Ainsi, plus aucune séparation entre jeu et consommation, le déroulement du match influant directement sur la consommation du public. Résultat des courses : le joueur des Bulls a manqué trois lancées et tout le monde s’est rué sur les stands après le coup de sifflet final. Société de consommation et consommation en société.
 
Temps morts et pom-pom girls !
Au basketball, chaque entraineur peut demander plusieurs « temps morts » lors de la rencontre pour recadrer ses troupes, casser la dynamique de l’équipe adverse ou simplement par stratégie. Ces temps morts sont utilisés à merveille pour communiquer sur l’équipe à domicile et en montrer une image positive : au programme, des spots mettant en scène les joueurs (« Les Wizards à la Maison Blanche », « les Wizards au ski », « les Wizards à la plage », etc), des animations (pom-pom girls, mascottes, challenges plus débiles que les autres : « amuse-toi à manger un Oréo sans t’aider des mains ». L’animation la plus utilisée est la « Cam » qui consiste à filmer des personnes dans le public et leur demander un bisou, une danse ou une grimace).

 
Evidemment, une équipe de basketball n’est rien sans ses pom-pom girls qui se tiennent au bord du terrain en effectuant des chorégraphies qui rythment les célèbres sons d’orgue destinés à déstabiliser l’adversaire ou à encourager son équipe. Chaque minute possède une finalité marketing, il n’y a justement jamais de « temps morts ». Une rencontre de NBA est un exemple parfait de « sportainment » à destination d’un public familial : on vient au Verizon Center pour voir un show qui dépasse le sport. Tout est mis en place pour détourner le spectateur du jeu, tant et si bien que la marketisation du basketball tend à casser ce que le sport nous offre de mieux : l’imprévu.
 
Steven Clerima