Pour mes doigts. Pour mes 30 ans. Pour l’exemple. Pour lui.
De grands rectangles colorés qui se superposent, des messages accrocheurs en lettres blanches sans cohérence apparente.
Puis, en plus petit, cette conclusion : « On a tous une bonne raison d’arrêter de fumer. »
Dans le métro, cette campagne de l’INPES ne vous aura pas échappé.
A contrepied des campagnes traditionnelles qui mettent l’accent sur la santé, les problèmes cardio-vasculaires ou les déformations atroces dues au tabac, l’INPES change d’angle et mise sur une stratégie plus ludique. La campagne repose en effet sur l’auto-analyse et surtout la motivation du fumeur. Pour une fois, l’arrêt du tabac est proposé de manière positive ; l’accent est mis sur la carotte plutôt que sur le bâton. Chaque fumeur est invité à trouver « sa bonne raison » d’arrêter.
Dans son communiqué de presse, l’INPES explique : « Le point de départ et non le moindre est la motivation (…). Si les risques du tabac sont bien identifiés par chacun, la motivation aurait besoin d’être encouragée. »
La version vidéo de la campagne propose une approche empathique. On y voit des scènes de la vie quotidienne susceptibles de trouver un écho en chaque fumeur. A chacun sa motivation, qu’il s’agisse de la santé, de l’entourage et de ses proches, de raisons financières ou encore esthétiques.
Voilà ce qu’en dit Yvan Attal, le réalisateur du film « Les raisons » : « Penser les choses « à l’envers », c’est-à-dire penser à tout ce qui permet de mieux profiter de la vie sans cigarette, est un bien meilleur point de départ pour donner envie d’arrêter à celui qui fume. C’est la dimension humaine, esthétique, et émouvante de ces scènes qui donnera peut-être envie à certains de décrocher ».
Tabac et publicité
Petit focus sur le lien entre tabac et campagnes de communication.
Pour lutter contre le tabac, on peut lister trois tendances générales : l’incitation à modifier son comportement, la réglementation et enfin les mobilisations collectives. Les stratégies des campagnes évoluent et s’adaptent aux comportements. Le site de l’INPES répertorie les différentes stratégies des campagnes depuis 1976 (date de promulgation de la loi Veil) :
1976 : première pierre de l’édifice
De 1993 à 1996 : une communication positive
De 1997 à 2001 : « Vous pouvez vous faire aider ! »
Depuis 2001 : « Ne supportez plus la fumée des autres ! »
2001-2003 : informer sur la toxicité de la cigarette
Depuis 2004 : « Fumer, c’est dépassé »
En 2010, renouveler les messages
En 2011 et 2012, l’Inpes mise sur la motivation
Retrouvez ici toutes les campagnes de communication de l’INPES :
http://www.inpes.sante.fr/10000/themes/tabac/campagnes.asp
Mais qu’en pense le public ?
Alors, des campagnes efficaces ? L’INPES a mené l’enquête.
D’après eux, le public est demandeur de campagnes « dures » pour dénoncer les méfaits du tabac, comme c’est le cas dans la campagne anti-tabac « Révélation » de 2002 :
Mais pas seulement.
La nocivité de la cigarette est connue de tous, c’est pourquoi il y a une demande concernant la difficulté d’arrêter. Avec cette nouvelle campagne, on insiste sur la dédramatisation du sevrage.
Pour ceux qui préfèrent arrêt plus en douceur, il y a toujours les cigarettes électroniques. Des couleurs, des parfums, des tailles différentes. Il y en a pour tous les goûts. Avec près d’un million d’utilisateurs occasionnels et 500 000 vapoteurs réguliers, on ne présente plus l’e-cigarette, véritable phénomène de mode.
Le succès d’une campagne anti-tabac repose sur certains principes : communiquer sur la santé publique requiert quelques précautions. Il s’agit de ne pas stigmatiser ou inquiéter, ne pas imposer de normes sociales, ne pas décrire les risques sans proposer des solutions, etc. Comme le souligne l’INPES, « cette communication est d’autant plus délicate qu’elle peut paraître intrusive, normative et aller contre la liberté des individus. »
Un exercice délicat, donc, auquel l’INPES se prête avec plus ou moins de succès. « On a tous une bonne raison d’arrêter », c’est déjà un changement d’angle par rapport aux campagnes précédentes.
En bref, une campagne qui a le mérite de communiquer d’une manière différente.
Clara de Sorbay
Sources :
L’INPES, ici et là.
Minutebuzz
Le Figaro