Société

Les stéréotypes nationaux : une stratégie payante ?

 

Un article chauvin… Mais pas trop

Pour toucher le public d’un pays donné, une publicité doit s’appuyer sur des références communes, d’où la tendance à tomber dans les clichés et les stéréotypes culturels. L’exemple le plus récent en date est celui de IDealing :

Le pudding de trop

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Peut-être avez-vous remarqué dans le métro parisien cette affiche qui incite d’abord au dégoût : un « meat pudding » traînant sur une sauce trouble virant à l’orange sur fond sombre et assorti du slogan « Quitte à prendre quelque chose aux Anglais, autant prendre leur expertise boursière ». Passée cette réaction épidermique, on se demande : quelle marque a accepté de dénigrer autant l’Angleterre pour se faire valoir ? Il s’agit d’IDealing, courtier en bourse britannique, qui se targue d’afficher les prix les plus bas sur le marché français depuis 2012. Drôle de stratégie que celle qui crache sur une partie de la culture de son pays pour en vanter les mérites dans un autre domaine ! La négation de ses racines n’a sans doute d’autre but que de s’accorder aux clichés français sur les Anglais pour mieux s’implanter sur ce nouveau marché. Comme le Français est très fier de sa propre gastronomie, pourquoi ne pas tenter le coup en dénigrant la cuisine anglaise !

Ceci est un flop : une stratégie agressive pour tenter de s’imposer sur un marché français difficile d’accès, d’autant plus qu’il s’agit d’un groupe britannique peu connu même dans son pays d’origine. Choix risqué et peu payant : la publicité, à l’esthétique peu soignée, est insultante et a peu marqué les esprits.

La bourse ou la bière

Cette marque de bière allemande lance en 1997 (!) une campagne publicitaire qui joue sur le cliché français. La voix off, féminine, se démarque par son fort accent français. Ces sonorités à la française jouent sur des clichés des Français comme romantiques, charmeurs et férus de french kiss, clichés profondément ancrés à l’étranger.

Ceci n’est pas un flop : La pub est restée dans les annales grâce à son ton léger, à la qualité de ses images et au sujet abordé : c’est bien connu, la bière est un sujet plus plaisant que l’expertise boursière, et sans doute moins sensible au crash.

Fast and Cliché

Le secteur automobile n’est pas en reste. Pour s’exporter, les constructeurs font souvent appel à des clichés nationaux, également pour rappeler leur identité. La preuve par Renault : c’est ce qu’illustrent plusieurs campagnes publicitaires (Allemagne, Royaume-Uni par exemple) dont on retiendra celle qui s’adresse à un public allemand. Elle met en scène des collisions entre deux personnes où chaque duo représente un pays: Japon, Suède, Allemagne et France. Mais seule la collision entre les Français se concrétise par un baiser plutôt qu’un choc violent. Argument publicitaire : « en cas d’accident, la meilleure protection est française ».

Flop ou pas flop ? : La publicité est bien pensée, le montage soigné mais utiliser les clichés de personnes entrant en collision peut choquer les pays représentés. De plus, la publicité ne remplira pas forcément sa mission, les marques allemandes ayant toujours meilleure réputation dans leur propre pays.

La vidéo a reçu des critiques bien différentes à sa sortie : « chauvin ! » ont crié certains, « cliché ! » ont argué d’autres. Il est intéressant de noter cependant que cette publicité n’a pas été créée par une agence française, mais une agence allemande, basée à Hambourg. Verdict : flop ou pas flop ?

Currys, un humour épicé

Veni, vidi, vici peuvent affirmer fièrement les Irlandais après avoir battu les Bleus. Mais l’esprit victorieux ne s’est pas arrêté à ce match et s’est importé dans certaines publicités irlandaises. Prenons comme exemple celle de Currys, magasin d’électroménager : leur nouvel aspirateur est capable d’emporter Thierry Henry avant qu’il ne finisse de débiter, avec un accent français à couper au couteau, des grossièretés méprisantes à l’égard de ses adversaires, tout en prenant généreusement le ballon de sa main. « The French loose, The Irish win », même dans l’électroménager!

Ceci est un demi-flop : Pour les Irlandais la publicité fait référence à un moment de réussite sportive et la marque a su surfer sur cette vague de fierté nationale. Donc la tactique fonctionne at home, sweet home. Par contre, flop assuré à l’étranger ! La campagne ne pourrait absolument pas s’exporter car elle part d’un événement sportif ponctuel mais surtout parce qu’elle assimile cette rencontre entre deux sportifs à une confrontation entre deux peuples. L’humiliation française se poursuit dans la publicité irlandaise. Le sport reste l’un des derniers bastions du fair-play moderne, pas la publicité !
En bref : les publicités fondées sur des clichés nationaux, flops ou pas flops ? Sujet sensible, le cliché national peut être un atout lorsqu’il s’adresse à un public ciblé qui l’apprécie et sait le comprendre. L’utiliser dans l’auto-dérision est souvent un bon moyen pour que la publicité plaise et attire l’attention des publics visés. Attention tout de même à ne pas forcer le trait en transformant un gentil cliché en insulte manifeste et parfois virulente à l’égard d’une zone culturelle. Domaine stéréotypé par excellence, la publicité peine parfois à renouveler ses sujets. Et en matière de cliché, c’est toujours la même rengaine : ça passe ou ça casse.

 
Sophie Pottier et Pauline St Macary
Sources :
The Advertising Times
Café Babel
Langue De Pub

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