Flops

La pilule pour homme: c'est pour aujourd'hui ou pour demain ?

Décembre 1967, les femmes opprimées, mais les femmes libérées… par la loi Neuwirth. Celle- ci abroge les articles du code de la santé qui réprimaient la propagande anticonceptionnelle et autorise l’importation et la fabrication des contraceptifs. Depuis, the star, c’est elle : la pilule, ou contraception hormonale orale féminine.
En 2010, selon une étude de l’INPES (Institut National de Prévention et d’Education pour la santé), 71% des femmes de moins de 35 ans prennent la pilule pour éviter la grossesse. Et du
côté des hommes ? Eh bien toujours ce bon vieux condom, et pour cause ! Les recherches en
matière de contraception hormonale masculine menées depuis les années 70’, sont un véritable
échec, sans parler du terrible manque de communication en la matière. Mais alors pourquoi,
frein scientifique, sociologique ? En tout cas, cela ne semble encore être qu’un doux rêve.

Issu du site madame.lefigaro.fr
la question de la pilule, vue par/sur madame.lefigaro.fr

Vade retro spermato !

Bien que les scientifiques et les chercheurs ne se soient pas dorés la pilule ces dernières
décennies, les résultats des recherches pour la contraception masculine pourraient être plus
féconds. Après tout, nous sommes au XXIème siècle et il est grand temps que la contraception
soit l’affaire de tous. « Les hommes devraient s’impliquer, c’est aussi à nous d’assumer le non-
désir d’enfant » préconise Pierre Colin, cofondateur d’ARDECOM, association créée en 1978
pour la recherche et le développement de la contraception masculine. En 2009, l’INPES tapait
dans le mille avec sa campagne pour sensibiliser tous les citoyens à la contraception. Un
discours qui envoie promener les attentes des téléspectateurs avec une campagne publicitaire inversant les rôles : et si les hommes tombaient « enceinte » à cause d’un oubli de pilule ?
Si pour des raisons évidentes, les hommes ne sont pas sujets d’une grossesse, ils pourraient bien
être les seuls responsables directs de la contraception dans le couple : depuis les années 70’,
plusieurs techniques ont été inventées. À ce jour, il existe trois méthodes principales de
contraception pour homme :
–    La contraception hormonale, reconnue par l’OMS (Organisation Mondiale de la
Santé) et testée sur plus de 1500 hommes ces quarante dernières années.
–    La contraception masculine thermique, mise au point au CHU (Centre Hospitalier
Universitaire) de Toulouse et qui consiste à remonter les testicules vers le haut du
corps dans le but d’augmenter leur température, qui passe alors de 34°c à 37°c,
permettant ainsi de diminuer significativement, voire supprimer, les
spermatozoïdes.
–    Et enfin, la vasectomie, une méthode marginale et brutale, car définitive.

Un intérêt grandissant donc… Mais toujours rien de probant !

Soyons clairs : scientifiquement parlant, la pilule pour homme existe déjà. Elle est testée en
France depuis les années 70’, notamment par le Docteur Soufir, médecin à l’hôpital Cochin à
Paris. Pourtant, sa commercialisation n’est pas pour demain, et le meilleur moyen de s’en rendre
compte est d’analyser le sujet du point de vue de la communication et de la médiatisation.
L’année 1982 est importante dans l’histoire de la contraception puisque c’est à cette date que
l’interdiction de toute publicité pour les contraceptifs est supprimée. Cependant, jusqu’à ce jour
la communication à ce sujet est un échec retentissant : mis à part la pile d’articles qui rappellent
que tout cela est bien joli mais pas encore tout à fait réalité, les informations sur le sujet sont
rares. Sur Internet, il est presque impossible de trouver des résultats concrets pour la
contraception masculine. Par exemple, le youtubeur Pitoum explique dans l’une de ses vidéos
que l’association française pour la contraception a produit une web-série pour présenter les
différentes méthodes de contraception. Belle initiative ! Mais voilà, sur les six épisodes en
ligne, un et seulement un, nous avertit de l’existence d’un contraceptif masculin : le préservatif.
Alors à quoi tient l’origine de ce flop communicationnel, ou plutôt cette absence de
communication ?

Une pilule qui a du mâle à passer

Cause de ce silence quasi parfait ? Très probablement la dimension sociologique du sujet, la
pilule étant le symbole historique de la libération des femmes. Dans un article du magazine
Society, le docteur en sociologie Cyril Desjeux explique que « La contraception masculine […]
peut être perçue comme un retour à une forme ancestrale de domination masculine vis-à-vis des
femmes qui se sont battues pour maîtriser leur corps : la pilule, c’est un droit qu’elles ont gagné ;
la pilule masculine, ce serait comme leur retirer ce droit. »
Mais cela n’empêche en rien une évolution des mentalités. Le 27 mars 2015, l’émission Les
maternelles lance une étude auprès de ses « maternautes ». Résultat : 60 % des femmes se
disaient prêtes à confier la responsabilité de la contraception à leurs hommes. Cela ne veut évidemment pas dire que ces messieurs se sentent parés pour une telle expérience, loin de là.
Beaucoup d’hommes disent ne pas être prêts à assumer la responsabilité de la contraception au
sein du couple ou considèrent encore la prise de la pilule comme une atteinte à leur virilité.
Par ailleurs, l’un des principaux arguments rédhibitoires seraient les potentiels effets
secondaires liés à la contraception masculine (acné, comportement dépressif, augmentation
significative de la libido chez les hommes), ce contre quoi certains acteurs s’insurgent. En effet,
les mêmes effets secondaires existent en ce qui concerne la pilule, hormis la libido qui a plutôt
tendance à baisser. Au début du mois de novembre, une vidéo sur Facebook mettait en scène
une jeune femme se moquant avec ironie des hommes ayant abandonné les tests de
contraception masculine parce qu’ils ne pouvaient supporter les effets secondaires. « Pauvres
garçons ! » blague-t-elle, « toutes les femmes les ont subis». C’est aussi l’idée qu’a voulu
transmettre Courrier International cette semaine, « il est temps de s’y mettre, les mecs ! ».
La pilule pour les hommes n’est donc pas prête à voir le jour pour le moment. En fait, la
meilleure méthode contraceptive pour ces messieurs reste encore de bonnes vieilles chaussettes dans les sandales !

Camille Laine

Sources:

Crédits:

  • Magazine Society,  illustrations de Pierre La Police, photo à la Une
  • madame.lefigaro.fr
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