Campagne ADMD pour l'euthanasie avec Sarkozy mars 2012
Société

Une campagne qui fait mourir les candidats à la présidentielle

 
L’euthanasie : voilà un mot qui fait peur, une idée qui fait frémir, un droit contesté. L’euthanasie, c’est le droit de mourir dignement quand il n’y a plus d’autre espoir que la souffrance et l’agonie. L’euthanasie est autorisée légalement en Belgique pour les patients en phase terminale mais elle est tolérée de manière plus ou moins explicite dans de nombreux pays européens tels que le Luxembourg, les Pays-Bas ou encore la Suisse. En France en revanche, l’euthanasie est considérée comme un assassinat, un empoisonnement prémédité passible de la peine de prison à perpétuité ; des textes législatifs élargissent néanmoins les possibilités de cessation de l’acharnement thérapeutique.
Selon un sondage réalisé en 2000, 70% du corps médical français se déclare favorable ou très favorable à l’exception d’euthanasie. Le 24 novembre 2009, les députés français ont cependant rejeté une proposition de loi présentée par le député socialiste Manuel Valls visant à légaliser l’euthanasie dans certaines conditions.
Si la majorité de l’ordre des médecins est prête à tolérer l’euthanasie pour les patients en phase terminale, il semble que les politiciens soient plus difficiles à convaincre. L’euthanasie est un sujet polémique ; l’idée d’autoriser la mort assistée d’un patient est souvent considérée comme amorale et assimilée à la violation de la loi sacrée de la vie humaine. Cependant quand il n’y a plus d’espoir, quand l’agonie se fait longue et douloureuse et que la mort n’est plus qu’une question de temps, le droit de mourir dignement est alors compréhensible.
C’était d’ailleurs le sujet de la dernière émission Sept à Huit au cours de laquelle les journalistes de TF1 recevaient le mari de Marie Deroubaix laquelle, atteinte de plusieurs tumeurs au cerveau, avait pris la décision de se faire euthanasier en Belgique pour éviter de souffrir et de faire souffrir son entourage. Quelques jours avant de s’éteindre, elle avait accordé une interview aux journalistes de TF1 pour expliquer les raisons de son choix : elle voulait ainsi montrer aux gens, et plus particulièrement aux hommes politiques français, les raisons de son choix pour permettre aux gens dans sa situation de bénéficier du droit de mourir dans les meilleures conditions possibles, dans la dignité et avec le soutien de ses proches.
C’est donc un acte militant que Marie Deroubaix a accompli peu avant sa mort. Comme elle, de nombreuses associations militent en faveur de l’euthanasie comme l’ADMD en France ou Dignitas en Suisse.
En période de campagne pour les présidentielles, ces associations tentent le tout pour le tout pour convaincre les hommes politiques de s’intéresser à la question de l’euthanasie et faire des propositions précises. L’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité organise d’ailleurs un rassemblement le 24 mars prochain sur la place de la République et encourage les malades à réclamer leur droit à la fin de vie dans la dignité. Comme on peut le lire sur leur site internet « l’ADMD entend obtenir qu’une loi légalisant l’aide active à mourir (euthanasie et auto-délivrance assistée) soit votée par le Parlement, comme le réclament 94 % des Français interrogés par l’institut de sondage Ifop en août 2011 ».
Il y a moins d’une semaine, l’ADMD lançait une campagne publicitaire choc interpelant le président de la République et certains candidats à la présidence de la République (tels que François Bayrou, candidat centriste du Modem et Marine Le Pen, candidate pour le Front National) en les représentant sur leur lit de mort.
« M. le candidat, doit-on vous mettre dans une telle position pour faire évoluer la vôtre sur la question de l’euthanasie ? » demande le message d’accompagnement des affiches publicitaires parues cette semaine dans Les Inrockuptibles.
La campagne choc de l’association cherche avant tout à susciter une réaction de la part des politiques qui délaissent littéralement cette question depuis l’échec de la proposition de loi de 2009. « Même si la population est largement en faveur de nos demandes, ces politiciens continuent de ne pas écouter » affirme Jean-Luc Romero, le président de l’ADMD. La campagne pour la présidentielle apparaît donc comme une opportunité à saisir pour parler de l’euthanasie et tenter de la replacer au cœur des débats.
Cette campagne a été beaucoup critiquée ces derniers jours ; les images ont été qualifiées « d’indignes » par Jean Leonetti, ministre des Affaires européennes et auteur de la loi actuellement en vigueur. De plus, l’absence de François Hollande sur les affiches suscite l’incompréhension et la suspicion d’un favoritisme envers le candidat socialiste.
Suite au lancement de la campagne, le président de l’ADMD convoque les candidats à la présidentielle à une rencontre publique à la fin du mois pour débattre de l’euthanasie. Si François Hollande a récemment affirmé qu’il était favorable à une révision de la loi pour les patients en phase terminale d’une maladie incurable, Nicolas Sarkozy reste quant à lui très ferme sur ces positions.
Quoiqu’il en soit, s’il est incontestable que cette question continue de faire des émules, il paraît peu probable de voir un réel changement dans les mentalités des politiques.
 
 Charlotte Moronval

2
Des-paroles-et-des-actes-les-politiques-s-y-bousculent_image_article_paysage_new
Société

Débats télévisés et présidentielle : quelle incidence du format sur le discours des candidats ?

 
Qui dit campagne présidentielle dit émissions de campagne : « Paroles de Candidat » sur TF1 et « Des paroles et des actes » sur France 2 reçoivent les principaux candidats à la présidentielle. Emissions de prime time, audiences fortes, commentées en live sur Twitter par des milliers de personnes (hashtags : #pdf #dpda). Elles sont des occasions uniques pour les candidats de faire entendre leur « parole » au plus grand nombre.
« Paroles de français » sur TF1, renommée « Paroles de candidat » pour la campagne présidentielle, est une émission où se confrontent des participants soigneusement choisis et un présidentiable. Ce dispositif est l’occasion pour le candidat de rebondir sur de nombreux sujets : agriculture, sécurité, enseignement, etc. Ainsi ce n’est pas Laurence Ferrari qui interviewe réellement le candidat, mais des Français, réduits à une simplicité facilitante pour l’émission : un homme, un problème, un sujet, une solution présentée par le candidat. Des journalistes sont aussi présents pour titiller les présidentiables sur des sujets plus complexes comme l’économie. L’image d’un dialogue simple entre le candidat et les personnes présentes donne à penser au spectateur que celui-ci est proche des problèmes des Français. Il ramène pourtant à une vision un peu populiste de la politique, à savoir que chaque problème personnel est forcément lié à un problème important de la société.
« Des paroles et des actes » sur France 2, présentée par David Pujadas, est une émission « pot-pourri », à la fois entre le talkshow à l’américaine, l’émission d’économie pure et le débat incisif entre journaliste et candidat ou candidat contre candidat. En ce sens, elle semble être un résumé rapide de toutes les épreuves que les candidats ont à passer dans cette campagne. L’aspect talkshow est donné par l’interview du début par la journaliste Nathalie Saint-Cricq : on attaque François Hollande sur son poids, Nicolas Sarkozy sur son « casse-toi pauvre con ». Cela est suivi par le questionnaire économique pointu de François Lenglet, puis par une interview plus institutionnelle avec Fabien Namias. Le présidentiable se retrouve ensuite à débattre avec un contradicteur, avant de reprendre l’émission point par point avec Franz-Olivier Giesbert et Hélène Jouan. En ce sens, c’est un bilan complet pour le candidat : image médiatique, économie, idées sur la politique et les institutions, capacité à débattre. Ce format semble pourtant diviser la politique en strates, rendant parfois difficile la vision d’un projet de société complet de la part des candidats.
Ces émissions très regardées semblent être un passage obligé ou du moins voulu par tous les candidats : c’est le cas d’Eva Joly, dont le porte-parole Sergio Coronado dénonce « la logique sondagière » de France 2 qui n’a pas encore invité la candidate. On peut conclure par le fait qu’il est étonnant de remarquer qu’à l’heure du digital, la télévision semble encore être le principal média de la campagne présidentielle. Il est d’ailleurs le seul à être soumis à des temps de paroles (cf Les images et la spontanéité forcée, Thomas Millard, Asymétrie, December, 5th 2011).
 
Ludivine Preneron
Crédits photo : ©Ladmedia.fr

2
chantal-jouanno-johanna-leguerre-afp
Archives

Jacques a dit tous aux champs !

 
Le XXIe siècle est définitivement une ère « verte ». Le biologique sous toutes ses formes est des plus tendance, les documentaires pleuvent à propos des agriculteurs qui ont la vie de plus en plus dure, mais surtout, envers et contre tout, le Salon de l’Agriculture fait toujours autant parler de lui après des siècles d’existence. Il faut savoir en effet que ce salon est issu d’un Concours Général Agricole, dont le premier a été lancé en 1870 à Paris. Dédié aux concours d’animaux, il a progressivement évolué en une présentation des animaux et produits du terroir, à l’image de ce qu’on connaît aujourd’hui (même si la tradition du concours demeure). C’est aujourd’hui la plus grande manifestation agricole française, qui a accueilli en 2011 pas loin de 680 000 visiteurs.
Et pourtant, ce n’est pas la nature qui attire visiteurs et journalistes à sillonner les allées au milieu du foin, des vaches et des producteurs vendeurs, mais bien plutôt l’aspect très politique de cet évènement. Si Mitterrand avait l’habitude de faire tous les ans un pèlerinage à la Roche de Solutré, Jacques Chirac a lui instauré une sorte de norme pour les politiques, celle d’apparaître au salon de l’agriculture. L’ancien Président y est en effet apparu chaque année durant toute sa carrière politique, où les médias ont notamment pu remarquer son amour des pommes. En 2008, Nicolas Sarkozy avait souhaité reprendre ce rituel en s’y rendant à son tour peu de temps après son élection, au début de son quinquennat. Avait alors eu lieu le dérapage hyper médiatisé que l’on sait du fameux « casse-toi pauvre con » lancé par le Président, dont il allait entendre parler pendant des années.  Suite à cet épisode, le salon de l’agriculture fut plus médiatisé que jamais, dans la logique désormais de dénicher le « buzz ». Et cette année, année électorale oblige, les politiques étaient plus présents que jamais à la porte de Versailles. Mais on peut du coup se demander qui a influencé l’autre : les politiques, sachant l’ampleur communicationnelle de cet évènement, se sont-ils sentis obligés d’y apparaître ? Ou bien, voyant le nombre de candidats prêts à visiter le salon, les médias se sont-ils mobilisés en masse afin d’être sûrs de ne pas louper l’évènement important qui aurait pu avoir lieu ?
En tous les cas cette année, le salon de l’agriculture s’incruste partout sur internet. Depuis l’inauguration Samedi 25 Février par Nicolas Sarkozy, les agriculteurs ont pu accueillir François Bayrou le Dimanche 26, François Hollande le Mardi 28, Jean-Luc Mélenchon le Mercredi 29, Eva Joly le Jeudi 1er Mars ou encore Marine Le Pen le Vendredi 2. Mais on a pu aussi y voir François Fillon, Ségolène Royal, Dominique de Villepin… Lorsque le rituel croise la période électorale, l’évènementiel devient une arme que personne ne veut laisser au hasard. Pourtant ce n’est pas toujours à leur avantage, comme le prouve l’exemple de Marine Le Pen qui a eu un accueil très chaleureux de ses sympathisants mais a également dû affronter une discussion musclée avec les responsables de la filière viande, suite à ses déclarations au sujet de la viande distribuée en Ile de France qui serait, selon la candidate, exclusivement hallal à l’insu des citoyens. De quoi relancer la polémique sur l’abattage des animaux et mécontenter les agriculteurs dépendants de cette activité.
Le salon de l’agriculture semble donc une étape communicationnelle et médiatique obligée, particulièrement en cette année 2012, bien qu’il ne soit pas forcément un bienfait pour le candidat politiquement parlant. Ce qui montre bien que si le lien entre politique et communication est nécessaire, leur adéquation n’est pas si aisée.
 
Héloïse Hamard
Crédits photo :
©AFP

Image du film de la sécurité routière sorti début 2012 par Publicis Consultants sur les dangers de la route
Les Fast

Un conducteur choqué en vaut deux

Voici le troisième volet d’une campagne en 3 temps menée par la Sécurité Routière, toujours bien décidée à nous rendre plus responsables ! En effet, même si le nombre de tués baisse d’années en années en France, elle n’en reste pas moins un des pays les plus concernés par les accidents de la route (encore 3 970 accidentés en 2011). C’est pour cette raison que la Sécurité Routière continue son travail et investie aujourd’hui dans des campagnes toujours plus transmédia. Il est donc possible de voir un nouveau film à la télévision depuis janvier, au cinéma depuis le 1er février, ainsi que sur facebook, sur msn et sur youtube (sans parler des relais média gratuits).
Après « Insoutenable » et ses 3 millions de vue sur Youtube en 2011 :

Et le film « électrochoc » décembre dernier :

Voici donc le premier film de Publicis Consultants pour l’organisme : 45 secondes pour « réveiller les consciences » et rappeler les principales causes des accidents de la route. Ce film fait partie d’une nouvelle campagne de sensibilisation demandant à chacun d’être acteur de la sécurité routière avec ce message « Tant qu’il y aura des morts…il nous faudra agir pour une route plus sûre ». Découvrez, en noir et blanc, 45 secondes d’images réelles mêlées à des images de fictions plus poignantes les unes que les autres :

Pour soutenir le film, l’agence a également prévu un espace de dialogue sur ce site. Le tout formant une campagne numérique conséquente.
 
Marion Mons
Sources :
©Le Parisien – ©Stratégies – ©Sécurité Routière – ©Publicis Consultants – Communiqué

2
Capture d'écran du site bayrou.fr pour les présidentielles 2012
Archives

Jacques a dit qu’il fallait que la campagne soit “participative”

Ce n’est pas Jacques qui l’a dit, mais François – François Bayrou. Zoom sur son site de campagne plutôt… Etonnant.
A première vue, l’interface graphique ne semble pas des plus ergonomiques : si les cinq grandes rubriques apparaissent assez clairement en haut à droite de notre écran – « Actu », « Portrait », « Projet », « Méthode » et « Participez » –, on ne comprend pas très bien comment s’articule l’ensemble des éléments présents sur la page d’accueil du site.  Difficile d’un coup d’œil rapide de déceler la logique globale d’organisation, tant lesdits éléments sont nombreux et de nature diverse…
Le haut de l’espace est monopolisé par une bannière aux dimensions pour le moins imposantes : y défilent les photos des temps forts de l’actualité de campagne du candidat – ses dernières « initiatives »…
Vient ensuite un espace proprement dédié à l’actualité, dont on peut suivre « le fil », ou que l’on peut trier en fonction de thèmes. En termes de contenus, il s’agit à la fois de vidéos et d’articles plus classiques.
Si l’on continue à scroller, on arrive sur un espace nous proposant de « participer à changer la France » – rien que ça ! – en devenant « volontaire de campagne » – Quésako ? Les champs lexicaux de l’action et de l’interaction y sont abondamment développés – « prendre la parole et agir » ! –, et l’internaute est directement interpellé, comme le suggèrent les nombreuses apostrophes verbales – « Menez », « Proposez », « Devenez » ! Quand l’invitation se fait invective… Mais nous y reviendrons. Notons également à droite la présence d’une plateforme permettant de poster des messages de soutien. Si ce genre de dispositif apparaît de plus en plus courant sur internet, sa valeur symbolique est d’autant plus forte qu’il s’agit ici d’un site à caractère politique : François Bayrou laisse la possibilité au peuple de s’exprimer…
Il faut remarquer la manière étrange dont fait rupture l’espace qui suit – « Portrait ». Déjà, la couleur de fond change : du noir, nous passons au blanc. Si l’internaute ne perçoit pas nécessairement le changement de manière claire et consciente, il le ressent forcement : l’ambiance semble d’un coup plus solennelle. L’espace apparait comme une sorte d’îlot rassurant au milieu d’autres plus dynamiques, vantant l’action. D’ailleurs, le lexique employé est radicalement différent : « ses racines » et « ses combats » attirent immédiatement le regard et on retrouve des termes forts véhiculant des valeurs d’équilibre et de stabilité – « Les racines de François Bayrou sont pyrénéennes, terriennes et culturelles. L’éducation qu’il a reçue et les rencontres qui ont émaillé sa jeunesse ont forgé sa personnalité ». Ou l’art d’élever un mythe…
Les deux derniers espaces sont dédiés à « son projet » et à « l’agenda ». Ici, le discours et les dispositifs apparaissent plus classiques. On retrouve notamment les trois grands axes du projet du candidat, ainsi que ses positions concernant les thèmes « clés » de la campagne.
On comprend donc lorsqu’on arrive enfin en bas (parce que, point négatif, il faut beaucoup scroller) que la page d’accueil décline les cinq grandes rubriques présentées en haut à gauche. De manière habile, soit dit en passant : la diversité des éléments et des contenus, leur forme et leur lexique, tout cela participe à véhiculer une image dynamique autour des valeurs de l’action, de la coopération et de la prise d’initiative. Le tout tempéré par la rubrique « portrait », qui donne un ancrage au candidat.
Le paroxysme de ce parti pris « participatif » est cependant poussé très loin. La rubrique « Participez » (qui ressort en orange) porte un concept particulièrement innovant : le site propose aux internautes de se porter « volontaires » pour tout un tas d’actions allant de l’impression/diffusion des propositions de Bayrou sur l’Ecole au téléchargement de l’application iPhone Bayrou 2012, en passant par le partage de vidéos de campagne sur Youtube ou l’adhésion à sa page Facebook… Et pour chaque action accomplie, pour chaque prise d’initiative, l’internaute – qui est devenu un « volontaire » – gagne des badges ainsi que des points, ou « décibels , qui lui permettent d’ « augmenter la puissance de sa voix »… Tout un programme.
Que penser d’une telle manière d’aborder l’engagement politique ? Que gagne François Bayrou à en faire une sorte de jeu ? Présenter les choses de façon ludique appelle certes à la mobilisation et rend la politique plus abordable ; et à travers une telle stratégie de gamification, l’équipe Communication de Bayrou lui donne les moyens de toucher un public plus jeune, friand de jeux en tout genre, et surtout d’interactivité. Quand engagement se confond avec participation…
 
Élodie Dureu
Source et crédits photo : bayrou.fr

1
Miss Dior Cherie
Edito

Mais où est donc passé le Chérie ?

 
En ces derniers jours de soldes, alors que les Français se ruent dans les magasins les poches vides mais l’espoir bien vivant, une certaine curieuse s’aventure au rayon Dior Parfums. Quelle ne fut pas sa surprise quand elle s’aperçut que le « chérie »  du « Miss Dior Chérie » était introuvable. Interloquée et agitée, elle se mit à chercher sur chaque étiquette, chaque flacon, chaque emballage. Pas un seul n’y a échappé, le « chérie » semble s’être fait la malle. Curieuse qu’elle est, la voilà qui interroge la représentante désireuse de venir en aide à sa cliente transformée en Sherlock Holmes (mais en un peu plus féminin quand même).
A coup de questions, elle apprend qu’en effet la marque Dior opère une fusion de ses deux marques et parfums « Miss Dior » et « Miss Dior Chérie ». La Chérie a grandit, elle est plus toute jeune maintenant et de fait elle ne s’adresse plus à la même cliente. Il semblerait que la cadette attirait une cible plus âgée que celle qu’elle visait avec ses arômes de bonbons et ses nœuds roses. Donc la marque Dior a choisi de réadapter son produit à cette cible en faisant disparaître à la fois les notes sucrées et le « Chérie » jugée trop gamin. Le parfum se fait plus riche en jasmin pour gagner en sensualité et en maturité alors que la gamme se recentre sur une ligne directrice empreinte de patchouli.
Prise de risque ou pas ? Il y a de quoi se poser la question. Tout d’abord, il est intéressant de souligner que la marque s’exprime très peu à ce sujet. L’eau de parfum fut la première à vivre un changement, courant 2011, qui aura déçu plus d’une admiratrice des ses essences édulcorées, et pourtant l’information fut peu relayée voire complètement tue. D’ici aout 2012, le « Chérie » aura totalement disparu et encore une fois personne n’en parle comme si la marque Dior tenait à ce que cela passe inaperçu. Y aurait-il là le désir de pouvoir faire marche arrière, ni vu ni connu, en cas de fausse route ? Enfin ceci est hypothétique, mais ce qui pose vraiment question c’est la pertinence de ce repositionnement délicat d’une gamme bien implantée. Si l’on en croit les études sur la projection de soi, les plus jeunes ont tendance à se voir plus vieux mais passé un certain âge on procède à une inversion. Ainsi une femme ayant la trentaine aura tendance à se voir environ dix ans plus jeune, et par la suite verra le phénomène augmenter avec les années. Sachant cela, est-il véritablement pertinent de vieillir le produit pour l’adapter à sa cible acheteuse ? Surtout si ce que celle-ci en aime est l’image de la jeune fille aux nœuds pastel qui danse sur la voix de Brigitte Bardot (« Moi je joue »).
Autre paradoxe, celui d’un repositionnement vers l’aînée quand tout le monde cherche à toucher des cibles plus jeunes et souvent sans succès. Dans le cas du luxe, il faut reconnaître que l’acheteur se doit d’avoir un portefeuille capable de suivre l’offre mais ne dit-on pas aussi que les jeunes filles jouent parfois un grand rôle de prescripteurs auprès de leurs mères ? Et si les mamans veulent jouer à l’adolescente inconsciente, ne faut-il pas justement garder ce filon là, si peu exploité ailleurs. Tant de questions, si peu de réponses.
Une petite dernière quand même pour la route : si « Miss Dior Chérie » devient « Miss Dior », que devient le « Miss Dior » actuel avec son look – il faut le dire – assez démodé ?

 
Marion Mons

12
Signe de ralliement du PS pour les présidentielles 2012 fait par Jack Lang
Flops

Des ninjas au PS

La communication tient aujourd’hui un rôle majeur en politique, peut-être souvent, et malheureusement, le rôle le plus important. Nous sommes, depuis maintenant un certain temps, les spectateurs béats du combat pour la terre, non pas du Milieu, mais de l’Elysée. De ce fait, faire campagne revient aujourd’hui à prendre les armes, à entrer en guerre contre différents adversaires pour conquérir différents publics. Mais aujourd’hui comme tout le monde le sait, l’homme politicien se bat en grande majorité via les médias, de toutes les formes possibles. Il tire la lance face aux micros, croise le fer avec les caméras, luttant corps et âme pour répondre aux questions, aux réactions et aux attaques des opposants et des commentateurs. Plus rien n’est laissé au hasard. Pas le moindre geste, la moindre réflexion, le moindre lapsus.
Cette année 2012 va donc voir s’affronter jusqu’au mois d’avril les principaux prétendants à la présidence et leurs armées respectives sur le grand champs de bataille médiatique, semé d’embûches.
Ceci est l’histoire de l’échec d’un cri de guerre raté qui pourrait s’avérer dérangeant  dans ce contexte politique sanglant.
En tête des sondages, le candidat socialiste à la présidentielle, François Hollande, est clairement rentré en campagne ces dernières semaines. Et quelle entrée ! S’il n’y a rien à redire quant à la communication « personnelle » de l’homme qui peu à peu se métamorphose, passant de simple candidat à personne sérieusement présidentiable, le problème vient du slogan et surtout de l’illustration médiatique de ce dernier, véritable fiasco sur le net que je vous invite (peut être une fois de plus) à regarder.

Cette vidéo, circulant partout sur la toile depuis bientôt deux semaines, est l’objet de nombre de critiques, attaques et moqueries. Il faut en effet admettre en toute objectivité qu’il ne s’agit pas d’une grande réussite visuelle et symbolique. Le slogan en lui-même peut laisser certains d’entre nous dubitatifs. Confectionné à la perfection sous contrôle de l’équipe de communication du candidat dirigée par Manuel Valls, cet octosyllabe scindé en deux hémistiches également rythmés (1 pied, 3 pieds) véhicule tout l’enthousiasme, l’envie et peut-être la naïveté présente dans le projet socialiste. Loin de l’éternelle « Force tranquille » de Tonton, il rallie à la fois la part d’utopie présente dans le « rêve français » – notion chère au candidat (cf interview dans le Cabinet des curiosités) –  ainsi qu’une impression déjà très critiquée de déjà vu, du fait de sa ressemblance chiraquienne (« Ensemble maintenant ») et de son héritage mitterrandien (« Ici et maintenant »).
Las Ketchup revival
L’idée d’ajouter au slogan une dimension symbolique en lui assignant un geste, était donc risquée. Elle s’est avérée désastreuse.
Yann Barthès a reçu dans son Petit Journal du mercredi 25 Janvier, Vincent Feltesse responsable de la campagne numérique du candidat socialiste. Ce dernier a défendu l’idée de « blague au sein de l’équipe numérique » en mettant en avant toute « l’autodérision » du projet. Sauf que voilà l’autodérision est très vite capable de se transformer  en énorme flop. Si l’on regarde d’un peu plus près la vidéo, on voit que le geste de double coupure n’est pas réalisé de la même manière par tous les candidats. Il y a ceux qui le fond de l’extérieur vers l’intérieur (Jack Lang, Manuel Valls) symbolisant l’idée de coupure radicale dans le rassemblement, ceux qui partent de l’intérieur et décalent leurs mains vers l’extérieur pour faire table rase du passé (Pierre Moscovici). Et, c’est bien là le plus drôle, ceux qui font des vas-et-viens entre les deux positions, peut-être pour montrer que c’est quand même assez dur de couper le cordon. Nous rentrons alors là dans la catastrophe visuelle, surtout quand on voit deux personnes sur le même plan faire deux gestes complètement différents. Comment ne pas penser à Las Ketchup et leur chorégraphie qui fit danser un temps, la France entière, ou encore pour les puristes à la position des Power Rangers avant de se battre ? Une nouvelle image ninja pour le parti socialiste ?
Si le ridicule ne tue pas, il peut décrédibiliser. Quand on sait que l’UMP a racheté le nom de domaine du site relié au slogan de François Hollande pour y publier un faux programme critiquant le projet socialiste, on se dit que le candidat du changement aurait sans doute autre chose à faire que d’essuyer les facéties et maladresses de son équipe de communication.
Ne pas encore se tirer une balle dans le pied : tel est sans doute l’objectif premier des socialistes dans cette campagne bien assez violente.
 
Ambroise

Affichette du front de gauche Janvier 2012
Société

2012 : Année du papier

Campagne des réseaux sociaux ! Génération Y à conquérir ! Election 3.0 ! Nadine Morano accro à Twitter ! Quelle mouche a donc piqué Jean-Luc Mélenchon pour qu’il décide de faire publier son programme aux éditions Librio ?
Oui, vous avez bien lu, le programme du Front de Gauche est disponible en librairie, imprimé sur de vraies feuilles, par de vraies imprimantes industrielles avec en prime une mignonne couverture en papier glacé toute pleine de rouge. Une erreur sûrement ! Même pas. Il s’en est déjà vendu 320 000 exemplaires. De quoi faire au moins sourciller le plus convaincu des technologistes, qui doit d’ailleurs commencer à voir apparaître quelques rides sur son front. L’engouement pour l’Indignez-vous de Stéphane Hessel, ses multiples traductions, son influence sur les manifestants de la Puerta del Sol ou de la City avaient dû en effet lui faire passer déjà quelques nuits difficiles.
Simple nostalgie révolutionnaire se rassure-t-il peut-être. L’imprimé a été le médium privilégié du socialisme du dix-neuvième siècle, une des conditions nécessaires à son développement. Ainsi, à ses arrières petits-enfants qui de nouveau se lèvent, le papier fournirait le sentiment d’une légitimité innée et un peu de l’aura des glorieux anciens. Il y a probablement de cela mais, cette explication suffit-elle ?
Probablement pas. Ce qui se joue ici, c’est sûrement autre chose aussi. Afin de l’apercevoir, intéressons-nous un peu à l’écrit d’écran, c’est-à-dire à la forme sous laquelle apparaît l’écrit en tant que signes et textes sur les écrans de nos ordinateurs. Sur ces supports nouveaux, l’écriture, si elle ne perd son intemporel aspect d’image, la retrouve sur un mode intangible. Elle n’est plus à portée de main mais à portée de clic, insaisissable et disparue une fois la lecture terminée. Ainsi du programme du Parti Socialiste, où dans sa rubrique du site internet les thématiques se chassent sans cesse et successivement l’une l’autre dans un bandeau vertical.
Mais, qu’importe peut-être tant que le récepteur-électeur a reçu tous les messages qu’on voulait lui destiner ? C’est un peu court. C’est surtout oublier l’importance de la matérialité du texte, de sa géographie notamment, atomisée et fugace ici. Si l’écrit doit donner à voir le monde, cela passe par sa forme. Si cette forme s’échappe à tout instant alors c’est la représentation d’un réel saisissable qui nous échappe tout bonnement. Le contraire du livre en somme.
De poche ou de collection, il est en effet cet objet qui renferme en lui une représentation tangible et inamovible de ce réel, une représentation stable et rassurante et donc une représentation d’où faire démarrer une action, un engagement. On ne mène pas de bataille sans carte, l’idée semble conserver quelque actualité.
 
Romain Pédron
Source : Emmanuël Souchier, « L’écrit d’écran, pratiques d’écriture et informatique », Communications et langages n° 107 [ www.persee.fr ]

Caricature par Chrib pour le Nouvel Obs - Les Cantonales 2012
Edito

J-97

Puisqu’il semble que les chiffres soient souvent plus frappants que les mots, ou parce qu’il est en tout cas devenu pratique courante d’entamer un article par un chiffre choc, destiné à accrocher le lecteur pour l’inciter à poursuivre, je vous propose de finir la semaine sur celui-ci : 97.
Vendredi, nous sommes effectivement passés en dessous de la barre des 100 jours avant le premier tour de l’élection présidentielle. L’espace et le temps médiatiques apparaissent saturés par la campagne, à tel point que l’on occulterait presque le reste de l’actualité, notamment internationale – vous avez certainement dû le ressentir, non sans agacement. Si l’on prend en compte le processus des Primaires Socialistes, dont les journalistes et autres analystes ont commencé à traiter en avril dernier, nous pouvons considérer que la campagne aura duré un an – un an ! Un cinquième du temps quinquennal dévolu à la préparation du prochain mandat…
Ce n’est pas tout : les candidatures se multiplient, certaines plus surprenantes que d’autres – vous comprendrez je crois sans peine à qui je fais allusion.
Eric Cantona s’est déclaré officiellement candidat mardi dernier ; Libération a consacré sa Une à l’événement, affichant en première page une photo de l’ancien footballer en chemise-cravate, loin de la raideur que peut conférer le costume traditionnel, arboré par la plupart des autres présidentiables. Nous pourrions presque faire un parallèle entre sa tenue et sa posture au sein du processus électoral : si Cantona se démarque des autres candidats par ses objectifs – c’est le côté chemise décontractée –sa candidature n’en reste pas moins très sérieuse – là, le côté cravate reprend le dessus.
L’ancien footballer n’a certes pas l’ambition d’accéder à la tête de l’Etat pour gouverner, mais il souhaite cependant obtenir les 500 signatures réglementaires. Il faut ici insister sur l’emploi du terme « signature », car signature n’est pas « parrainage », comme lui-même le souligne. La différence est radicale : Cantona n’appelle pas les maires à soutenir un projet politique d’ensemble, son projet politique d’ensemble ; il les invite très sérieusement à prendre en compte de manière tout aussi sérieuse le problème posé par le logement en France. S’il s’engage dans la campagne sous le nom de Cantona, c’est au nom de l’Abbé Pierre et de sa cause.
Sa candidature est donc bien loin d’être une farce. L’ancien footballer veut tirer profit de la focalisation médiatique pour remettre au cœur du débat la question du logement. Si les autres présidentiables réfléchissent à une stratégie de communication pour l’emporter et obtenir le rôle de chef de l’Etat, le fait d’être candidat représente pour Eric Cantona une stratégie communicationnelle en soi ; elle est en outre au service d’un but distinct du leur.
Peut être que sa démarche vous rappelle la candidature de Coluche pour les élections de 1981. « J’appelle les fainéants, les crasseux, les drogués, les alcooliques [mais aussi] les pédés, les femmes, les parasites, les jeunes, les vieux, les artistes, les tolards, les gouines, les apprentis, les Noirs, les piétons, les Arabes (…) à tous ceux qui ne comptent pas pour les hommes politiques à voter pour moi, à s’inscrire dans leur mairie et à colporter la nouvelle. » S’il semblait plutôt avoir choisi d’adopter une position de protestation voire de rébellion, sans cause ni projet bien précis, il n’évoquait pas moins en pointillés des problèmes tels que le chômage des jeunes, les difficultés à retrouver un emploi à l’approche de la retraite, la discrimination liée au genre, à la sexualité, à la couleur ou à la religion, ou encore l’abstention et la désillusion politique. Eric Cantona n’est donc pas le premier à avoir eu l’idée de saisir l’opportunité que représente la campagne présidentielle pour obtenir de sa cause qu’elle soit médiatisée. Ni le premier, ni le seul…
Vous n’en avez peut être pas entendu parler, à moins que vous ne vous en souveniez plus, le personnage étant moins connu et médiatique, mais le cancérologue Victor Izraël a lui aussi décidé de se porter candidat aux élections de 2012 ! Il milite quant à lui pour combattre le cancer, armé de slogans tels que « Pour sauver la planète, commençons par ses habitants » (référence aux Ecologistes en compétition…), ou encore « Pourquoi réformer la retraite si on ne peut pas la prendre ? » – slogans qu’il a diffusés via des teasers et des vidéos postés au compte-gouttes sur Youtube, pour alimenter le suspense et faire le buzz.
Quels torts ces « nouvelles démarches citoyennes » font-elles au processus démocratique ? Communiquer l’urgence d’une cause légitime-t-elle ce genre de vraies fausses candidatures ? Constituent-elles une nouvelle tendance de la communication engagée ? …
 
Elodie Dureu
 
Sources :
Mobilisation Logement 2012
Paperblog – Affiche de Coluche pour l’élection de 1981
Youtube – teaser
Crédits photo : ©Chrib
Caricature pour le Nouvel Obs – Les Cantonales 2012

1
Al-Jazi Foot
Flops

Al-Jazi quoi ?

Le 6 décembre 2011, Al-Jazeera (ou Jazira pour les intimes) rentre dans la danse de l’attribution des droits télé de la Ligue des Champions, jusqu’à présent détenus par TF1 et Canal+. Pour les passionnés de curling ou ceux qui ne jurent que par « les valeurs de l’ovalie » — le rugby quoi —, la Champions League en VO c’est le top of the top du football européen. Pendant huit mois, les trente-deux meilleures équipes européennes se livrent une lutte sans merci pour régner sur le vieux continent. Outre la gloire — pour un footeux, remporter la CL, c’est aussi beau qu’une coupe du monde — une telle compétition c’est aussi l’occasion de remplir les caisses des clubs grâce aux juteux droits télé que l’UEFA (l’instance dirigeante du football européen) distribue en fonction de leurs performances dans la compétition. À titre informatif, l’UEFA balance plus de 750 millions d’euros chaque année aux Real Madrid, Manchester United et autres Milan AC ; le vainqueur de la coupe aux grandes oreilles — comme Mickey ouais c’est marrant — pouvant récolter à lui seul plus de 30 millions d’euros.
Tous les quatre ans les droits sont renégociés entre l’UEFA et les chaines de télé intéressées. Des appels d’offre sont lancés, et les plus généreux raflent la mise. Problème, cette année un petit nouveau coiffé de son keffieh est venu bouleverser le game : les Qataris d’Al-Jazira Sport. Jusqu’ici TF1 et Canal+ se partageaient les lots mis en jeu: TF1 récupérait les 13 premiers choix dont la finale, pendant que Canal+ raflait le reste (133 matchs, plus des émissions spéciales).
Côté qatarien on n’a pas pour habitude de s’embarrasser avec des histoires d’argent. Alors si Canal+ proposait 31 millions pour ses 4 lots habituels, les Qataris ont posé 60 millions sur la table. Le double, en toute décontraction. Bertrand Méheut — PDG de la télé du Plus — essayait de camoufler l’échec avec des « oh mais vous savez le foot n’est qu’un élément parmi d’autres de notre offre ». Ouais, pas à nous Bertrand. Humiliation suprême, Charles Biétry, ex-directeur des Sports chez Canal viré comme un malpropre en 1998, prenait la tête d’Al-Jazeera Sports France. Belle quenelle glissée à son ex-employeur. Pour sauver la face, et éviter de virer la ribambelle de consultants sportifs qui officient sur Canal — sachant que chaque ex-entraineur de Ligue 1, ou pseudo international français aussi mauvais soient-ils avec un sifflet, un ballon ou un micro peuvent postuler à un poste chez Canal, ça fait un sacré nombre — Méheut a ramassé les miettes en piquant le lot historique de TF1.
Résultats des courses, les soirées Champions League vont coûter un peu plus cher que la Domino’s pizza à 7€99 du mardi soir. Il faudra s’abonner soit à Al-Jazira soit à Canal+ pour se régaler devant les exploits de Benzema et ses copains.
Cette information faisait en fait écho à une précédente brève qui est passée un peu plus inaperçue. La même Al-Jazira s’était offert un petit lot de matchs de Ligue 1 — le championnat français qui nous offre parfois des petits bijoux comme un succulent Dijon – Valenciennes au stade Gaston-Gérard —, et ce pour 90 millions d’euros. Les emplettes des Qatariens font en réalité partie d’un dessein bien plus grand.
Petit rappel : si vous étiez sur une autre planète l’été dernier, le PSG — club de la capitale, éternel prétendant à devenir un « grand d’Europe »  — a été racheté par les mêmes Qatariens via Qatar Sport Investment. L’objectif est donc simple: promouvoir le club et le football français en France mais aussi dans tout le Moyen-Orient par le biais du championnat de France et la Ligue des Champions à laquelle le PSG participera l’année prochaine, sauf cataclysme. Effectivement, le Qatar accueillera sous 45 degrés le Mondial 2022, donc il est urgent de s’y mettre pour essayer d’insuffler la passion du football dans une région pas particulièrement portée sur le ballon, mais prometteuse puisque 65% de la population a moins de 25 ans.
Cependant Al-Jazira ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Plus ambitieux, Al-Jazira Sport pourrait jeter son dévolu sur la retransmission des Euro 2012 (Polo-Ukraine) et 2016 (France) diffusés en règle générale sur TF1 et M6.
Petit à petit, Al-Jazira vient grignoter le peu de sport retransmis gratuitement qui survivait sur les chaines gratuites. La question n’est pas tant de savoir si l’action d’Al-Jazira est légitime étant donné que de tels rachats profitent au football français dans son ensemble, et qu’il est normal que le plus offrant récolte son dû. En effet, le résultat est le même avec Canal+ qu’Al-Jazira : le foot quitte la sphère du gratuit. Que les matches de Ligue des Champions se retrouvent sur les chaines payantes est somme toute la conséquence attendue d’une compétition qui se place dans une logique purement économique ; certains clubs — comme l’Olympique Lyonnais — frisant la banqueroute en cas de non-qualification. Mais que des compétitions comme l’Euro mettant aux prises les équipes nationales du continent échappent peu à peu aux chaines gratuites semble être un dévoiement non souhaitable. Effectivement, le football et le sport en général ne peut se résumer à une affaire de gros sous. La télévision reste aujourd’hui le seul moyen de vivre ensemble — pour un pays — un moment de communion que seul le sport peut nous offrir. Il serait dommage que certains soient privés de ce spectacle parce que certaines chaines auraient failli à leur mission.
 
PAL