Publicité et marketing

Un dispositif décoiffant pour parler du cancer chez l'enfant

 
Figurant parmi les principales causes de mortalité dans le monde¹, le cancer est devenu depuis quelques années un enjeu majeur de santé publique à l’échelle planétaire. Les cancers infantiles font largement partie de ces préoccupations, puisque chaque année en France environ 1700 enfants de moins de quinze ans sont atteints par ces pathologies cancéreuses², constituant ainsi la principale cause de décès de l’enfant après les causes accidentelles. Face à ce constat, la Swedish Childhood Cancer Foundation – une organisation suédoise luttant contre le cancer infantile – a récemment fait parler d’elle en sensibilisant la population au sujet du cancer infantile avec une vidéo poignante d’un peu plus d’une minute diffusée dès le 5 octobre dernier dans le métro de Stockholm.
Une vidéo percutante
L’histoire commence en février dernier lorsque la marque de shampoing Apotek Hjärtat réalise une opération marketing en utilisant un panneau publicitaire digital sur le quai d’une station de métro de Stockholm. Cette campagne met en scène une jeune femme aux cheveux longs, face caméra. Jusque-là, rien d’exceptionnel. Toute l’originalité du dispositif prend sens alors que le métro démarre, lorsque les cheveux de la jeune femme se mettent à voler dans tous les sens, comme emportés par l’appel d’air créé par le passage de la rame.
Ce dispositif interactif a été réutilisé par la Swedish Childhood Cancer Foundation dans l’objectif de créer leur propre version. Si le principe est le même, ce n’est cette fois-ci pas une jeune femme aux cheveux plein de vitalité qui apparaît, mais Linn, 14 ans, tout juste remise d’une chimiothérapie. Si ses cheveux se mettent ainsi à voler dans un premier temps, ceux-ci finissent par s’envoler et disparaître de l’écran, comme soufflés par le passage des wagons. Ce qui distingue le spot vidéo de la Swedish Childhood Cancer Foundation de celui de la marque de shampoing, c’est la conclusion que le spectateur en tire : la jeune fille mise en scène cheveux au vent n’est pas là pour faire vendre un produit, mais bien pour sensibiliser. Le message est clair et percutant : « Chaque jour, un cancer est diagnostiqué chez un enfant ».

Intégrer le cancer au quotidien : le rôle de l’émotion
Face à un sujet aussi sensible que le cancer chez l’enfant, comment s’y prendre pour sensibiliser sans choquer ? Recourir à l’émotion est une des solutions utilisées par les fondations pour parvenir à cet objectif. Les images, la musique, le cadre occupent ainsi une place de choix dans la vidéo, où rien n’est laissé au hasard.
Dès le début, le spot met en scène des passants dans le métro, lieu du quotidien et de l’ordinaire par excellence. Le cancer, thème du clip vidéo, est quant à lui loin d’être considéré comme quelque chose de quotidien et d’ordinaire par la plupart des individus. Le parallèle est ici assez intéressant, puisqu’en mettant le focus sur des individus ordinaires dans un lieu ordinaire qu’est le métro, on peut penser que la Swedish Childhood Cancer Foundation tente d’intégrer le cancer dans la vie quotidienne afin de donner une meilleure visibilité au quotidien de Linn, et à travers elle des autres enfants atteints de cancer.
Le déroulement de la vidéo se poursuit en nous présentant en image la mise en place du dispositif publicitaire interactif, avec moult fils, boîtiers et branchages de câbles qui ne sont pas sans nous rappeler le matériel médical nécessaire au traitement du cancer.

Concentrons-nous maintenant davantage sur l’aspect sonore du spot. A partir de 20 secondes, des tic-tac se font entendre. Lorsque ces tic-tac débutent, nous pouvons lire « Nous avons utilisé la même technique et créé notre propre version pour montrer la réalité à laquelle nous faisons face chaque jour », nous rappelant que dans cette réalité qui est celle des enfants atteints de cancer, le temps est précieux et souvent compté. Les tic-tac s’arrêtent ensuite pendant le temps d’interrogation lié à la disparition de la chevelure de l’enfant, avant de reprendre sur la phrase « Chaque jour, un cancer est diagnostiqué chez un enfant », une façon de nous rappeler encore que le temps presse.
La vidéo se termine sur le visage de la jeune Linn, 14 ans, atteinte du cancer. L’accent est ainsi mis sur le côté humain, en mettant un nom et un âge sur le visage de l’adolescente que l’on observe tout au long de l’animation. La personnalisation n’est ici pas laissée au hasard, appuyant le côté émotionnel, puisque cette jeune fille pourrait très bien être votre fille ou votre sœur, votre cousine ou votre amie. De plus, ce visage neutre, résigné voire presque triste qui nous fixe après le message nous invitant à faire un don nous laisse subtilement entendre que Linn compte sur nous, ainsi que tous les autres enfants atteint de cancer.

Un dispositif original
Le dispositif utilisé pour cette campagne de sensibilisation se distingue des habituels supports auxquels ont recours les agences de publicité. En effet, si en temps normal la publicité s’impose à son public, ici, on remarque que les individus viennent volontairement s’exposer au message en faisant délibérément le choix de porter attention à la jeune fille. Cette marque d’attention est visible dans la vidéo, où les voyageurs apparaissent concentrés et attentifs suite à la disparition de la chevelure de Linn.
Ainsi face au réalisme du dispositif, la plupart des voyageurs sourient. Mais lorsque la perruque de Linn s’envole soudainement en nous dévoilant son crâne chauve, les visages se figent. De cette façon, en regardant d’un peu plus près les réactions filmées en caméra cachée, on constate que rires et sourires laissent ensuite place à l’étonnement et à la surprise. Une chose est sûre : la campagne ne laisse pas indifférent.
¹ : 14 millions de nouveaux cas et 8,2 millions de décès liés à la maladie en 2012 selon les données de novembre 2014 de l’OMS.
² : En France, le nombre de nouveaux cas de cancers chez l’enfant de moins de 15 ans est estimé à 1 700 par an, et 700 chez les adolescents entre 15 et 19 ans selon les données de l’Institut National du Cancer au 1er décembre 2014.
Pauline Flamant
@_magnetique
Sources:
e-cancer.fr
who.int
huffingtonpost.fr
Crédits images:
Barncancerfonden
Crédits vidéo:
Barncancerfonden

movember
Société

No Shave November: une tendance au poil!

 
Si le mois d’octobre est rose le mois de novembre, lui, sera poilu !
En effet, depuis quelques années, le trend du mois de novembre, c’est le #NoShaveNovember. Si l’expression parle d’elle-même, un petit rappel s’impose: il s’agit d’inciter les hommes à se laisser pousser la barbe durant tout le mois de novembre, pour la bonne cause. Enfin si cette tendance ne change pas uniquement le physique de ces messieurs, elle aspire surtout à sensibiliser les publics aux cancers masculins dont on parle trop peu souvent.
La moustache et le financement participatif
A l’origine de cette tendance, il y a l’organisation Movember, née au début des années 2000. Sur la simple initiative d’un groupe d’amis qui se laissent pousser la barbe pendant un mois, le mouvement Movember devient rapidement une façon de se mobiliser pour la lutte contre les cancers masculins, notamment le cancer de la prostate. Le mouvement rencontre alors un franc succès et devient un organisme à part entière, la « Movember Foundation Charity ».
Dès lors, d’autres organisations voient le jour, notamment la No Shave November, soutenue par l’American Cancer Society. Cette organisation résulte d’un double objectif : sensibiliser à la « santé masculine » tout en prenant plaisir à le faire, comme le dit Rebecca Hill, l’une des fondatrices de No Shave November.
Par le biais de dons ou en participant à de nombreux événements; à l’université, au travail, ou encore sur les réseaux sociaux, toutes les formes d’implications sont bonnes pour devenir un Mo Bro ou une Mo Sista et ainsi lever des fonds destinés à la recherche sur les maladies qui touchent exclusivement les hommes. Jusque-là, Movember a levé plus de 409 millions de dollars aux Etats-Unis et près de 322 000 (dollars) en France et continue de mobiliser les différents publics autour de cette cause. On notera cependant que la France reste le « plus mauvais élève » alors qu’elle enregistre le taux le plus élevé de cancers masculins au monde (835 hommes sur 100 000).
Fortes de ce succès, ces organisations sont soutenues par des figures médiatiques et sportives, à l’image de Fabien Chivot (chef du restaurant Moustache) ou encore du Top 14. Une belle initiative qui mêle sensibilisation, humour et virilité !

Les Racingmen mobilisés pour Movember par racingmetro92

Une tendance qui dépasse l’enjeu caritatif

Si la barbe et la moustache font agir pour la bonne cause, elles servent aussi les stratégies des marques et inspirent de nouveaux concepts.
La moustache revient donc à la mode après être longtemps tombée dans l’oubli et associée à l’archétype du « ringard ». Désormais déclinée sur tous les supports, les objets publicitaires, la décoration, le prêt-à-porter, la moustache est perçue comme « le petit plus » branché qui donne leur côté « preppy » aux pseudo-hipsters. Rien à voir avec la moustache de Salvador Dali ou celle d’Hulk Hogan! Aujourd’hui, la moustache est incontestablement « in »: des noms d’agences, aux restaurants en passant par le retour en force des barber shops, elle est désormais devenue incontournable. Peut-être même trop. Des « giftbox » dédiées à l’art du rasage aux conseils mode de la rubrique Style Académie du dernier GQ, la moustache est bichonnée, soignée et surtout bien taillée.
Même le digital se l’approprie: on pense, entre autres, à Lumia qui a tout récemment, lancé une campagne de « Selfie Stach » sous forme de concours, qui consiste à poster des photos de soi, paré de sa plus belle moustache.
Pour mieux comprendre le phénomène, l’infographie ci-contre fait la lumière sur cet attribut typiquement masculin ! (donc Messieurs, aucune d’excuse pour ne pas vous mettre aussi au Movember!)
Une mobilisation éphémère ?
Le seul obstacle au succès que rencontre Movember pourrait être le caractère éphémère de ce genre de phénomènes ; on pense alors au « Ice Bucket Challenge », à la campagne « Kony 2012 » ou encore au récent «#WakeUpCall » qui ont vite lassé les internautes. Cependant, Movember reste, par définition, une mobilisation relativement ponctuelle et s’inscrit alors dans une dynamique récurrente sans pour autant être omniprésente.
Si cette tendance de l’homme à la pilosité faciale abondante et/ou maîtrisée au millimètre près est aujourd’hui un phénomène en plein essor, elle est aussi un moyen de faire passer un message fort et fédérateur autour d’une cause très peu souvent
médiatisée qu’est la santé masculine. Barbant ou dans le vent? A vous de trancher !
Alors Messieurs, à vos barbes, prêts, rasez!

 
Alizé Grasset
@: Alizé Grasset
 
Sources :
Lhommetendance.fr
No-shave.org
Neo-sapiens.fr
ca.november.com
Lerugbynistere.fr
Journalmetro.fr
Menlook.fr
Goodmorningcrowdfunding.com
Crédits images:
blog.briteskies.com
cdn.movember.com
Menlook.fr
Journalmetro.fr
9buz.com

Publicité et marketing

Derrière ce beau ruban rose se cache un cancer

 
Pour la 21ème année consécutive en France, Octobre s’était à nouveau paré de rose pour vaincre le cancer du sein. Pour donner espoir aux femmes et favoriser la recherche, entreprises et personnalités s’engagent financièrement et symboliquement. Ba&Sh, Clinique, Bobbi Brown et Les Dieux du Stade entre autres s’impliquent auprès d’Estée Lauder, l’initiatrice du mouvement.

Les entreprises qui s’engagent à faire don d’une partie de leurs bénéfices à une association fondent leurs campagnes sur le soutien de personnalités comme Nathalie Rykiel, Estelle Lefebure, Pauline Delpech et Kate Moss qui sont les égéries et les porte-paroles éphémères de cette cause.
Mais au-delà de la visibilité apportée à la maladie, quelles sont les conséquences de ce « celebrity endorsement », qui bien qu’il soit devenu une sorte de rituel, n’en reste pas moins une action temporaire.

Kate Moss pour la Fondation Linda McCartney, 2014
L’imposture du ruban, le pinkwashing
Malgré cette mobilisation, comment expliquer ces propos formulés sur le blog du Nouvel Obs par l’une de ces femmes frappées par le cancer : « J’ai le cancer du sein, votre marketing me rend malade ! J’ai le sentiment d’avoir été instrumentalisée. Aujourd’hui, j’ai envie de dire : « Laissez mon cancer du sein tranquille! »
Au-delà de l’image lisse qu’Octobre rose s’est construite, les campagnes mises en œuvre sont de plus en plus souvent dénoncées comme un marché marketing dont la médiatisation à grande échelle aurait pour objectif principal d’offrir aux entreprises partenaires une revalorisation de leur image. Parmi ces critiques, on trouve le manque d’informations sur la mammographie, l’excès d’objectifs commerciaux, les éléments cancérigènes contenus dans les produits vendus et la transformation du cancer en un véritable combat.
Ainsi, l’association UFC Que-choisir dénonce l’injonction à la mammographie comme solution de dépistage unique. Elle met en valeur l’utilisation d’arguments émotionnels parmi lesquels la culpabilité et l’absence d’explications concernant d’éventuels effets indésirables pour la patiente. Elle critique également le manque de statistiques liées au phénomène de surdiagnostic qui entrainerait la détection puis le traitement de tumeurs non dangereuses.
De plus, l’argument de vente « cancer du sein » est un levier important dans l’acte d’achat. Une étude du cabinet Cone Communication démontre que ces engagements orientent les choix de 79% des consommateurs.
En effet, le ruban rose attire de nouvelles cibles et augmente les profits tout en valorisant l’image d’une marque présentée comme « responsable ». En comparaison, les impacts sur la recherche sont moindres : les fonds récoltés sont donc peu communiqués, souvent limités par un montant maximal. La visibilité porte donc plus sur l’engagement de la marque plutôt que sur les actions de recherches ou de soins soutenues, lesquelles demeurent obscures pour les consommateurs.
Par conséquent, l’argument « cancer du sein » s’en trouve surexploité et certains produits vendus sous l’égide du ruban rose sont dénoncés comme cancérigènes (lait, essence, et produits cosmétiques notamment).
En réponse à ce phénomène et pour avertir les consommateurs, le groupe américain Breast Cancer Action, a lancé en 2013 la campagne « Think before you pink » dans le but de dénoncer « l’industrie du cancer du sein ».

« Stop the Distraction. It’s Breast Cancer Industry Month and the pink floodgates have opened. And again we ask: what have all these pink ribbon products and promotions done for women living with and at risk of breast cancer? »
« Arrêtez de faire diversion. C’est le Mois de l’Industrie du Cancer du sein et les robinets roses se sont ouverts. Et, encore une fois nous demandons : que font tous ces produits roses et ces campagnes promotionnelles pour les femmes qui vivent avec un cancer du sein ou risquent d’en avoir un un jour? »
Les conséquences de ce détournement sont nombreuses, à commencer par un changement dans les représentations véhiculées autour du cancer du sein. A l’image du slogan de l’association Le cancer du sein, parlons en : Ensemble, portons le Ruban rose et gagnons ce combat ! Ensemble, nous vaincrons !, le cancer est présenté comme un véritable combat plus que comme une maladie. Selon Léa Pool, réalisatrice du documentaire L’industrie du ruban rose, « tout est pensé au niveau marketing : on parle du cancer mais il faut que cela soit joli, élégant, féminin, que le discours dominant véhicule l’énergie et l’optimisme (…). Dans le cas du cancer du sein, c’est la féminité, la maternité. On enrobe le cancer dans quelque chose qui dilue le drame, on vend l’espoir. Ça ne se vend pas le désespoir, la laideur». Cet objectif se retrouve dans les visuels des campagnes qui présentent des bustes de femmes bien portantes sur un fond rose, des visages rieurs et en bonne santé. En réponse à ce détournement, Léa Pool dénonce les entreprises engagées dans la lutte contre la maladie et menant en parallèle des actions favorisant son augmentation. Ce pinkwashing (terme dérivé du greenwashing) fait du cancer un produit de consommation et permet aux entreprises de se bâtir une image bienveillante.
Des solutions différentes : écoute et soins

Reprise du tableau intitulé Gabrielle d’Estrées et une de ses sœurs pour la revue Rose Magazine (Projet Du cancer à l’œuvre)
Quel est l’objectif de ces critiques ? Elles appellent surtout à la mise en place de soins dans les hôpitaux et d’accompagnement quotidien des malades dans le processus de reconstruction. On pense par exemple à la revue Rose Magazine ou à la Fondation Mimi, dont la campagne (Leo Brunett France) a été récompensée de neuf Lions au dernier festival international de la créativité de Cannes. La fondation Mimi propose des lieux où des coiffeurs, psychologues, masseurs, esthéticiennes peuvent s’occuper des malades. Et leur campagne immortalise la joie de femmes devant leur visage métamorphosé par le maquillage et la coiffure.

In fine, Octobre rose s’impose donc comme un moment éphémère mais crucial pour des entreprises avides de revaloriser leur image. Que reste-t-il à la fin du mois ? Sans doute des femmes en mal de soutien et d’actions concrètes.
Clarisse de Petiville
Sources
Lemonde.fr
Slate.fr
Blog.mediapart.fr
Cancerdusein.org
Rosemagazine.fr
Youtube.com
Bcaction.org
Thinkbeforeyoupink.com
Crédits Photos:
Katy vue par la fondation Mimi, Campagne Fondation Mimi par Leo Brunett
Cancerdusein.org
Stellamcmaccartney.com
Thinkbeforeyoupink.org
Reprise du tableau intitulé Gabrielle d’Estrées et une de ses sœurs pour la revue Rose Magazine (Projet Du cancer à l’œuvre)

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Play to Cure cancer
Société

Si jouer pouvait guérir

 
On nous annonçait il y a encore quelques jours que les jeux vidéos n’avaient pas d’impact négatif sur « les performances scolaires et cognitives » de ses joueurs. Aujourd’hui, le Cancer Research UK (institut de recherche mais aussi association caritative) fait mieux, en vous proposant de les aider à vaincre la maladie en installant un jeu intergalactique sur votre Smartphone.
Play to Cure – Genes in Space : un moyen de mettre à contribution le moins scientifique d’entre nous dans le traitement de données utiles à l’analyse des gènes responsables des dysfonctionnements cellulaires à l’origine du cancer.
Le message du Cancer Research UK est simple : nous pouvons tous contribuer à faire avancer la recherche sur le cancer – avec ou sans blouse -, et plus étonnamment, avec ou sans don*.
L’occasion de donner bonne conscience aux plus réticents à apporter leur contribution financière à la recherche, ou réelle campagne de sensibilisation ?

« The more players we have, the quicker we get the results, bring forward the day, when all cancers are cured »
 
Eléonore Péan
Sources :
CancerResearchUK.org
LaReclame.fr
* une application gratuite, disponible uniquement en anglais à l’heure actuelle

Société

La Ligue des Justiciers à la rescousse des enfants qui luttent contre le cancer !

 
La maladie chez les enfants reste un sujet encore sensible aujourd’hui, un sujet sur lequel on tente de communiquer, mais dont on ne parle finalement pas tellement. Et pourtant, ces enfants atteints du cancer auraient besoin que l’on sache, besoin d’être accompagnés, que l’on se sente concernés. Et ça, les Brésiliens semblent l’avoir compris…
C’est en effet, dans cette optique que l’hôpital de A.C.Camarguo de São Paulo a fait appel à l’agence JWT Brazil pour créer un discours sensible et sensibilisant, destiné aux enfants, pour les aider à se battre pour guérir et vivre. De cette alliance entre JWT, A.C.Camarguo et Warner Bros., est donc née une volonté de changer la perception de la dureté de la chimiothérapie en la transformant en « Superformule » pour super-héros.
La première étape dans la lutte contre le cancer, c’est de croire en son traitement et en sa guérison. Cependant, commencer une chimiothérapie peut être effrayant, autant pour la famille que pour l’enfant. En partant de ce constat, l’idée qui a fait naître ce projet est ici plutôt simple à présenter, mais très riche en termes symboliques : combiner le monde des super-héros et les soins, afin de pouvoir expliquer aux enfants la difficulté du processus de traitement avec des mots qui leur parlent. Ainsi, en mai 2013, l’hôpital A.C.Camargo, qui s’occupe donc de patients touchés par le cancer, et notamment des enfants atteints de leucémie, a lancé ce projet de « Superformule » pour aider ces derniers à trouver de la force et du courage pour surmonter leur maladie et le traitement long et pénible.
Avant tout, ce sont des boîtes. Des boîtes pour dissimuler les poches de traitement par intraveineuse. Le thème ? Les vedettes de la Ligue des Justiciers afin de créer pour la première fois, une vision douce et adaptée aux enfants. Superman, Batman ou encore Green Lantern volent donc au secours de ces enfants malades en stimulant leur imaginaire, la meilleure arme qui soit. De plus, ces boîtes ont été inventées et fabriquées en partenariat avec des médecins : elles sont donc faciles à stériliser et à manipuler et répondent à toutes les normes d’hygiène de l’hôpital.
Mais le discours ne s’arrête pas là. JWT est allé plus loin dans la construction d’une nouvelle identité du traitement contre le cancer, voire de la maladie elle-même : ils ont produit une série spéciale de dessins animés et de bandes dessinées dans lesquelles les super-héros traversent des épreuves similaires à celles des enfants atteints du cancer. Dans ces petites histoires, les héros de l’enfance parviennent à retrouver leurs forces grâce à la « Superformule » et se présentent donc comme un miroir de ces bouilles désormais pleines d’espoir de l’hôpital brésilien. L’expérience transcende ainsi les simples boîtes posées sur les perfusions pour devenir un monde presque réel : la salle de jeu des enfants de l’hôpital a été transformée en « Hall of Justice »*, les couloirs et les portes ont été décorés dans le même thème et une entrée spéciale pour ces nouveaux « petits héros » fut créée.
Pour voir en image la présentation de ce merveilleux projet, c’est par ici :

L’idée est donc bien d’aider les enfants dans leur lutte contre l’un des plus grands méchants du monde réel : le cancer. Si l’imaginaire est alors stimulé de manière forte, il ne s’agit en aucun cas d’enfermer l’enfant dans un monde parallèle qui lui ferait fermer les yeux sur la dure réalité des choses. Il s’agit bien d’utiliser la métaphore des Justiciers pour mieux faire comprendre les tenants et les aboutissants du traitement et l’implication nécessaire de l’enfant et de sa famille dans le processus. Tout est basé sur l’idée de « victoire », avec laquelle s’accorde l’identité des super-héros mais aussi les enjeux de toute maladie : il s’agit de vaincre la douleur, de surmonter les problèmes, de dépasser les épreuves et de continuer à se battre pour guérir. Le discours d’accompagnement de JWT est donc tout aussi touchant que le projet lui-même : l’identification de l’enfant malade au super-héros qu’il a toujours admiré serait une aide efficace et stimulante dans cette tragédie qu’est le cancer. Le gentil doit tout faire pour triompher sur la méchante maladie à laquelle le psychique, tout comme le physique, doit faire face. Car à la fin de ces histoires, qu’il s’agisse de Batman ou Wonder Woman, tout le monde sait qui gagne…
 
Laura Lalvée
Sources :
La Réclame
JWT.com

Société

« L'oxygène est un vieux souvenir, Mes poumons, touche si tu oses ! »*

 
Dans la lutte anti-tabac, les pays ne manquent pas d’originalité et les campagnes de santé publique se multiplient et tentent de se surpasser les unes et les autres. Cependant, ces dernières années, un nouvel élément a créé le changement. En première ligne, il y a le traitement du « choc », désormais acteur principal de la communication autour de la méchante cigarette. Si les publicités en faveur du tabagisme sont censurées sur tous les médias depuis les années 90, tous les efforts se concentrent aujourd’hui sur des campagnes contre la cigarette, l’ennemi public n°1.
A travers le monde, la recherche de créativité et d’innovation des messages anti-tabac se fait de plus en plus vive, et toujours sur cette même tendance : choquer pour mieux régner.
Rendre le packaging le moins glamour possible… Check !
L’une des premières mesures marquantes semble être le concours du gore sur les paquets de cigarettes eux-mêmes. La photo choquante est donc de mise, de la Thaïlande au Brésil, en passant par Singapour ou même les États-Unis.
L’objectif ? Rendre le paquet repoussant, voire honteux, face à une industrie du tabac qui semble utiliser le paquet lui-même comme un outil promotionnel et glamour pour séduire le public, et le plus jeune possible.
Les conséquences ? Il semblerait que ces images soient relativement efficaces par rapport aux anciens messages purement textuels. Elles attirent l’attention et montrent de manière plus immédiate les conséquences physiques du tabagisme. Voir ce à quoi l’on a échappé en arrêtant de fumer serait donc l’une des solutions. Cette idée réside dans le discours même des professionnels de la lutte contre le tabagisme ; on y observe un rejet du terme « choc » pour présenter ces images comme « informations sur les complications pour la santé liées à la consommation de tabac ». Vraiment ? Parce que lorsque l’on regarde réellement ces photos, le choc est bien là et donne légèrement envie de laisser le paquet dans son sac…
Le jeu sur l’émotion… C’est en Thaïlande !
Face au gore, nous avons une toute autre ligne de conduite : l’émotion. Le traitement du choc s’insère donc aussi dans une logique quasi manipulatrice qui exploite l’émotivité de nos chers fumeurs pour les amadouer et les faire arrêter.
Le meilleur outil ? Les enfants ! Quoi de mieux qu’une bouille enfantine pour crier au malheur de la cigarette et participer à la prise de conscience des effets nocifs ? La vérité sort toujours de la bouche des enfants, ne l’oublions pas !
Une vidéo thaïlandaise illustre tout à fait ce propos en mettant en scène deux éléments plutôt efficaces dans l’impact du message : ces fameux enfants plus responsables qu’on ne le croit et l’aspect caméra cachée pour saisir les réactions au naturel. La fondation Ogilvy Thailand est à l’origine de cet émouvant spot publicitaire et c’est un véritable succès sur la toile :

La Palme du politiquement incorrect… La censored French touch !
Si nous continuons notre petit tour du monde, c’est en France qu’il faut s’arrêter ! En effet, en matière de flirt avec les limites du message communicationnel, il semble falloir mentionner la campagne française « Fumer, c’est être l’esclave du tabac » et sa fumeuse association.

Ici, l’addiction à la cigarette est comparée à une soumission sexuelle dans un message confus, voire abusif. Cette campagne de la DNF (l’association Droit des Non-Fumeurs) réalisée par BBDP & Fils choque pour toucher les adolescents, de plus en plus nombreux à commencer à fumer. Hautement critiquée, cette affiche soulève de nombreux débats. Les associations de victimes de sévices sexuels crient au scandale et ces images seront quasiment censurées. Cependant, cette fois-ci, on l’assume : « Les adolescents sont soumis à près de 2000 messages publicitaires par jour et les visuels « chocs » sont les seuls moyens de capter leur attention. » déclare la DNF, fière de son traitement du borderline.
« Sexe, clope et pub : le mauvais ménage à trois » chez Marianne 2 ; « Pub anti-clope : ça taille sévère » chez Libération ou encore « La nouvelle campagne contre la clope casse sa pipe » sur France Info… Les médias s’en sont donnés à cœur joie sur ce politiquement incorrect français.
Néanmoins, il faut aussi féliciter la French Touch pour le spot publicitaire qui accompagne ces affiches et qui fait preuve d’une intelligence et d’un message de qualité. Je vous laisse apprécier :

Et la palme d’or du gore revient aux… British !
Les Anglais sont bel et bien les rois du choc efficace ! Depuis quelques années, ils se sont réellement penchés sur cette question du tabagisme comme fléau social de notre siècle et ont tenté d’œuvrer pour une réduction massive du nombre de fumeurs dans leur pays.
En 2005 notamment, trois institutions se sont rassemblées pour créer une nouvelle campagne : la British Heart Foundation, Cancer Research UK et National Health Service. Ils se sont alors posés une question juste et pertinente : « comment délivrer de manière efficace un message dans un monde où le choquant ne choque finalement plus ? »
En jouant sur les témoignages et le visuel, les campagnes qui ont découlé de cet effort ont réussi sur plusieurs points intéressants. Les malades ont été présentés comme les miroirs des fumeurs, comme le reflet de ce qu’ils pourraient être. Un lien a été créé entre l’image de la maladie et la cigarette elle-même. Enfin, en assumant totalement l’exploitation des ressources de l’émotion, les enfants ont été montrés comme la cible principale du tabagisme passif. Néanmoins, il faut tout de même souligner que ce fut un véritable succès : pendant la campagne, près de 225 000 fumeurs ont demandé de l’aide pour arrêter.
Parmi la grande série de spots publicitaires qui sont nés de cette première initiative, en voici les deux plus marquantes : attention, âmes sensibles s’abstenir !
La graisse dans les artères, ou « the fatty cigarette » :

Les caillots dans le sang, ou la campagne « Under my skin » :

En 2012, les Anglais reviennent en force avec leur nouveau spot qui montre de manière explicite les mutations qui se produisent toutes les 15 cigarettes et susceptible d’engendrer un cancer. Le gore est en première ligne et semble presque jurer avec la pudeur anglaise tant réputée.

De nombreux éléments sont donc exploités à travers ces campagnes : le gore, le choc, l’émotion, le côté réel du témoignage, les effets sur les enfants et le flirt avec le politiquement incorrect… Tout ! Les Anglais semblent prêts à tout pour lutter contre le Mal du siècle, la cigarette.
Et si vous avez envie de voir encore plus d’exemples, je vous invite à aller lire l’article d’un collègue du Celsa sur son site Advertising Times.
* M, Je suis une cigarette
 
Laura Lalvée
Sources :
Rue89
Atlantico
Publigeekaire.com
The Advertising Times