Débat des candidats républicains aux présidentielles à Las Vegas en 2011
Politique

En janvier : l'Odyssée républicaine débute…

Aux États-Unis, la campagne pour les présidentielles de 2012 est lancée et on  voit poindre les challengers potentiellement éligibles au milieu d’une pléthore de prétendants.
Si Barack Obama ne s’est pas encore prononcé quant à une probable candidature pour briguer sa propre succession, c’est le branle-bas de combat du côté des Républicains puisque les primaires vont commencer le mardi 3 janvier.
Au gré des affaires, les candidats tombent et laissent place à de nouveaux favoris : si Herman Cain, mis hors course pour cause de scandales sexuels était en bonne place dans les sondages, son éviction a redonné de l’espoir aux candidats aspirants à l’investiture de leur parti. À l’heure où nous écrivons, ils sont sept, sept à pouvoir prétendre affronter le candidat démocrate, et parmi eux, trois fringants sexagénaires, sinon septuagénaires, prêts à se lancer dans la bataille des primaires qui ne consacrera qu’un unique vainqueur.
Newt Gingrich, 69 ans, Mitt Romney, 64 ans et enfin le doyen Ron Paul âgé de 76 ans ont pour point commun d’être les candidats les plus âgés de la campagne. Si ce point pourrait paraître anecdotique, on peut toutefois s’interroger sur ce phénomène et son incidence sur la future campagne électorale. En effet, depuis 2008 et la campagne victorieuse d’Obama, les codes ont changé. Ces seniors sont-ils capables de s’adapter ? Quelles stratégies seront mises en place pour l’emporter ?
 
Une campagne gagnée sur la toile
 
Si l’élection d’Obama en 2008 porte aux nues tant un candidat que des valeurs qu’il incarne telles que le dynamisme, la nouveauté ou la jeunesse, elle pose aussi de nouvelles questions en termes de communication. La campagne d’Obama est en effet sans précédent, donnant au marketing politique de nouveaux codes qui font souffler un vent de fraîcheur sur la campagne, l’affluence aux urnes témoignant de cette ferveur citoyenne. Cette campagne a su toucher les jeunes (66% des 18-25 ans ont offert leur vote à Obama) et les minorités, qui avaient le sentiment d’être délaissés, en parvenant à entrer dans leur quotidien et à les atteindre par le biais de la toile.
Vraie révolution politique qui s’est massivement fondée sur les nouvelles techniques de communication, Obama est parvenu à faire entrer sa campagne dans l’Histoire. Mû par un formidable plan de bataille, Obama a conquis la toile où la résistance de son ennemi était dérisoire. Les réseaux sociaux furent son premier porte-voix : les désormais traditionnels Twitter et Facebook associés à des dizaines de sites communautaires se firent l’écho de cette campagne et lui apportèrent un grand soutien. Avec son propre réseau social MyBarackObama.com, le candidat impulse un militantisme virtuel et efficace qui se retrouve sur une plate-forme gérant les réunions, l’organisation des meetings, le partage des informations entre ses soutiens et à travers le pays : grâce à « MyBo » les actions sur le terrain et sur le net se multiplient. Énième ressort ; son site officiel ObamaBidensite.com, extrêmement actif ET interactif. En un mot : le concept d’échange au carré.
Notons la réactivation de ce site pour la prochaine campagne (on ne change pas une équipe qui gagne !). L’« e-publicity », les plates-formes dédiées aux vidéos de soutien du candidat, la diffusion massive d’informations par SMS sont d’autres vecteurs utilisés par l’équipe d’Obama en 2008.
Ce phénomène nouveau dit du « grassroots » (littéralement les « racines »), exprime le mouvement du « bottom up » au cœur de la stratégie de communication politique d’Obama : l’émulation doit venir des citoyens et être portée par eux.
 
Des seniors prêts à s’y mettre ?
 
La question semble rhétorique : par la force des choses, chaque candidat se doit d’être présent sur ce nouveau terrain, au risque d’être tout simplement mis hors course avant même le coup d’envoi de la campagne. Si les démocrates bénéficient d’une bonne avance dans leurs infrastructures en ligne, les républicains ne sont pas en reste et ont habilement rattrapé leur retard, reconnaissant la maîtrise d’internet comme le nerf de la guerre.
Une présence quasi-formelle est nécessaire sur Twitter ou Facebook, un site officiel s’impose, et ça, les républicains l’ont compris.
Un candidat aussi vieux soit-il n’est en aucun cas un senior lambda qui rechigne à se mettre à la technologie, il est avant tout une bête politique prêt à tout pour gagner. Gageons donc que l’équipe de jeunes communicants dont le futur candidat investi sera bardé se chargera de pallier ses carences si, d’aventure, il en présentait.
 
Des politiques trop conservateurs ?
 
On pourrait donc s’inquiéter pour l’ensemble du parti plus que pour ces trois candidats.  Les conservateurs ont accusé un sérieux retard et cette image de parti courant après le train, acquise en 2008, risque de leur coller à la peau.
Ce qui pourrait faire la différence entre les candidats serait leur manière d’investir ces outils. Les termes « voter », « réseaux sociaux », « Obama » formaient le même paradigme en 2008 ; voter s’était fait avec le même naturel qu’utiliser Twitter pour une bonne partie des citoyens et Obama fut le candidat de ces « virtual citizen ». Le défi de 2012 pour Obama : réitérer l’exploit. Celui des républicains : pouvoir y prétendre.
Pourtant se mettre à jour est-il suffisant pour remporter l’élection ? En effet pendant que les républicains se démènent pour se mettre à niveau, il est certain qu’Obama et ses équipes continuent de perfectionner leur plan de bataille et réservent des surprises (à l’image du site MyBo, devenu une référence en la matière) en terme de communication politique  pour 2012.
La bataille sera rude et épique, mais il est certain que tel Ulysse dans l’Odyssée, le prétendant qui voudra éliminer tous ses concurrents devra user de ruse et de finesse pour gagner le cœur de l’Amérique.
 
Marie Latirre
 
Crédits photos :
©Ethan Miller/Getty Images North America
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©Shannon Stapleton, Reuters
 

Société

Facebook : un colosse sous la mitraille

 
Rappelez-vous le 5 novembre dernier. Nombre d’entre-nous frissonnions, mi-incrédules, mi-fascinés, devant nos écrans dans l’attente d’une hypothétique apocalypse numérique. Un type portant un masque de Guy Fawkes avait annoncé la mort de Facebook pour ce jour.
Rien ne se passa et l’on parle beaucoup désormais de franc-tireur ou d’extrémiste isolé. L’homme avait été rapidement démenti, il est vrai, par d’autres membres du collectif Anonymous. Néanmoins, certaines de ses critiques, comme « tout ce que vous faîtes sur Facebook reste sur Facebook, indépendamment de vos paramètres de vos confidentialité », ne peuvent être ignorées et sont d’ailleurs reprises par des activistes bien plus sérieux.
Max Schrems, par exemple, l’étudiant devenu célèbre pour avoir déposé 22 plaintes contre Facebook, les a faites siennes. Il a lancé avec des amis le site Europe-v-Facebook.org, où sont exprimés ses griefs. Il y reproche notamment à l’entreprise de Marc Zuckerberg son manque de transparence quant à l’utilisation des données des utilisateurs, et l’impossibilité pour eux de vraiment choisir ce qui est divulgué les concernant.
Le monde politique s’intéresse également à la question. Facebook devrait être prochainement attaqué en justice par les autorités allemandes à cause de sa fonction de reconnaissance faciale, et la Commission Européenne vient d’être saisie sur la conformité du réseau au droit européen.
Aux Etats-Unis, on est en avance. Un accord devrait être conclu dans les prochaines semaines avec la Federal Trade Commission, rendant impossible pour Facebook de changer le degré de publicité des données sans l’accord des utilisateurs. Il devra également se soumettre à des audits réguliers sur la vie privée pendant 20 ans.
Ce pas en arrière n’est en vérité pas le premier. En 2007 déjà, Zuckerberg avait dû revoir à la baisse ses ambitions pour Beacon, un système rendant publique la consommation de chacun sur le web. Sous la pression de milliers d’internautes, Beacon était passé de l’opt-in à l’opt-out. Autrement dit, l’accord préalable de l’utilisateur était devenu obligatoire.
L’intérêt d’un tel dispositif est immense, Zuckerberg l’explique bien : « La référence de quelqu’un en qui ils ont confiance influence plus les gens que le meilleur message télévisé. C’est le Saint Graal de la publicité. » Beacon était un calice, que Facebook a craint de boire jusqu’à la lie.
En effet, le site de social networking existe et génère du profit en donnant à voir à des entreprises les échanges des utilisateurs dans le cadre de communication qu’elle fournit, et en accordant à ces entreprises des espaces, dans ce même cadre, pour proposer des publicités aux membres qui les intéressent. Si les utilisateurs se défient du réseau, ils le fréquenteront moins, y produiront moins de contenu, donneront moins d’informations sur eux et y seront donc moins exposés à la publicité et moins bien. La reculade se comprend aisément.
Derrière elle, moins visible, est la contradiction, ou asymétrie, inhérente à Facebook, entre la nécessité de bonnes relations avec les usagers et la tentation omniprésente d’aller contre leur besoin de vie privée, défendue désormais par les institutions politiques.
Ainsi, au-delà des risques terroristes ou judiciaires, toujours plus ou moins maîtrisables, est celui majeur de la fuite des utilisateurs. L’ambitieux Google + ou l’alternatif Diaspora ne demandent qu’à accueillir des masses de migrants numériques indignés. Impensable diront certains. Il fut un temps où Myspace dépassait Facebook de quelques têtes leur répondra-t-on.
 
Romain Pédron

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