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Le snobisme publicitaire

La marque de design haut de gamme AMPM a dévoilé en ce bon mois de mars sa nouvelle campagne print. Et c’est entre autres dans le métro parisien qu’on est resté perplexe face à ces visuels un tantinet élitistes : zoom sur le snobisme publicitaire.
Le but premier de la publicité : capter l’attention pour faire passer un message
La publicité ne cesse de se réinventer afin de capter notre regard fuyant les milliers de sollicitations quotidiennes. D’ailleurs, marques et agences sont conscientes du phénomène de publiphobie qui sévit dans nos sociétés contemporaines et tentent d’y remédier à coup de brand content et autres innovations.
De plus, une certaine logique de « campagne sur-mesure » privilégiant la stratégie de core targeting, c’est à dire centrée sur le cœur de cible, pousse les enseignes à cibler toujours plus leurs campagnes. Cette cible étant de préférence une population à fort pouvoir d’achat puisque les produits de design ne sont, entendons-nous bien, pas des plus abordables.
Cependant, si le message de cette campagne intrigue, il n’est pas des plus aisés à décoder. En effet, c’est un sentiment d’incompréhension qui envahit le récepteur durant la lecture de ce message. Ainsi, on saisit rapidement que cette campagne est destinée à une élite intellectuelle qui, apriori, ne constitue pas un segment de grande envergure.
Faut-il être « intello » pour acheter de l’ameublement design ?
Benjamin Marchal, directeur de création de l’agence Fred et Farid indiquait récemment dans une interview que cette campagne avait pour but de « montrer que la beauté et la modernité de la nouvelle collection se passent d’explications et sont donc accessibles au plus grand nombre » – ce qui se résumerait en somme à un exercice de démocratisation auprès de la fameuse catégorie des CSP+ constituée de cadres et personnes ayant une profession intellectuelle supérieure ou intermédiaire.
Pourtant, plus qu’un désir de populariser une marque telle qu’AMPM, c’est la recherche d’un certain entre soi qui saute aux yeux de prime abord. Le badaud est alors exclu au profit d’une micro communauté capable de saisir le clin d’œil lourdement appuyé par la marque. Car l’on peut aisément avoir un sens artistique et un portefeuille bien rempli sans pour autant savoir que l’académisme post-Bauhaus, évoqué sur l’affiche, fait référence à un mouvement artistique allemand. Ni que le Bauhaus est la référence en termes de modernité architecturale et de design.

 
Métamorphose de la figure féminine
AMPM tente donc de regrouper son cœur de cible en une communauté d’intellos stéréotypés. Mais ce n’est pas tout : elle file également la métaphore du meuble contemporain acteur d’une performance, en proposant une métamorphose de la femme en objet (voire de la femme en étagère). Et cette fois ci, on s’accorde sur le fait qu’il ne faut pas avoir un bac+5 pour comprendre cette délicate image. C’est effectivement dans une ambiance austère, qu’une femme se courbe sous le poids d’une planche de bois; le tout pour 399 euros ?
Finalement, cette campagne met également en lumière un autre enjeu : la façon dont les marques peuvent créer un dialogue privilégié avec leurs clients, et cela en proposant un contrat de communication sur le mode conversationnel. Patrick Charaudeau, grand théoricien des sciences de l’information et de la communication, énonçait que toute communication était comparable à un contrat mais régi par des règles implicites que les agents signaient inconsciemment. Aujourd’hui, les entreprises doivent de plus en plus intégrer les clients dans leurs contenus, prendre en compte leurs avis et opinions à l’instar des chaines de TV qui mettent en avant les commentaires Twitter de leurs émissions par exemple.
Cependant, l’exclusion et la proposition d’étagères humaines ne semblent pas être des options efficaces puisqu’en plus d’utiliser le mythe de l’intellectuel français du type « monsieur je sais tout », elles obligent le voyageur à sortir son smartphone de bon matin, les yeux encore mi-clos et pour lancer sur Google la recherche suivante : qu’est-ce que le dogme galiléen ?
Clara Duval
Sources :
lsa-conso.fr
arretsurimages.net
ladn.eu
cbnews.fr
Crédits photos :
ladn.eu
arretsurimages.net
 
 

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Quand Aoste prend les végétariens pour des jambons

Aoste, célèbre marque de jambon, a pris cette année la résolution de revenir sur les écrans pour nous faire part de sa nouvelle publicité. Mauvaise idée. Mettant en scène une famille végétarienne très stéréotypée pour vendre son jambon grandes tranches, la marque s’est totalement décrédibilisée en janvier dernier. Largement contesté sur le web, ce spot publicitaire permet à Aoste de décrocher le flop du mois.

Comme vous l’avez remarqué dans ce spot s’apparentant à une campagne des années 1950, les végétariens sont donc des hippies sales qui cultivent du quinoa pour pouvoir acheter leurs vêtements chez Desigual. Bah oui, évidemment.
Quand les végétariens 2.0 s’indignent
Au-delà des nombreuses réactions que l’on a pu voir fleurir sur les réseaux sociaux, un article publié sur TerraEco a tiré son épingle du jeu, ne comptant pas moins de 9400 likes sur Facebook et 224 partages sur Twitter. Titré « Dis Aoste, tu voudrais pas foutre la paix aux végétariens ? », le coup de gueule de Claire Baudiffier, rédactrice du site web, a été relayé dans beaucoup d’articles, notamment sur le site Rue89 où il comptabilise à ce jour 267 commentaires. En voici un extrait :
« Et non, Aoste, je ne suis pas hippie, je ne suis pas malade, je ne suis pas carencée, je ne suis pas triste, je ne suis pas chiante, je ne suis pas en manque. Et surtout, Aoste, ingurgiter le moindre bout de ton jambon ne me ferait pas pleurer. Pas de joie en tout cas.
Et pourtant, Aoste, c’est à cause de toi, à cause de publicités d’un autre âge comme la tienne, que je dois tous les jours m’expliquer, me justifier, et raconter le pourquoi du comment. A midi, le soir, au restaurant, quand je rencontre de nouvelles personnes. Et j’en ai un peu marre, figure-toi. » Deux pétitions ont également été lancées dans le but de stopper la diffusion de cette publicité, rassemblant à elles deux plus de 4200 signatures.
Pourquoi tant d’indignation ?
Parce que nombreux sont ceux qui trouvent cette publicité caricaturale et réductrice. Dans le spot, le fils ainé déclare « en avoir marre de manger toujours la même chose : salade verte-céleri, céleri-salade verte… ». La stigmatisation et le concentré de clichés mis en scène par Aoste n’ont pas plu aux végétariens, qui représentent aujourd’hui 2 à 3% de la population française. Cela peut ne pas vous paraître énorme, et pourtant quand les végétariens sont indignés, ils réussissent à se faire entendre. Ce que les végétariens ont le moins apprécié, c’est le fait qu’Aoste sous entende que la privation de viande est une décision imposée aux enfants par leurs parents, et que cela va presque jusqu’à les rendre malades, tant la variété de ce qui compose leur menu laisse à désirer. Or, comme nous pouvons le lire dans un article du Citizen Post, pour les végétariens « cela relève d’un choix personnel, autant que pourrait l’être le choix d’un style vestimentaire, d’une destination touristique ou même d’une idéologie politique ou d’une pratique religieuse ». A vous de vous faire votre propre avis.
Une marque qui dérange
Quoi qu’il en soit, ce qui dérange le plus ceux qui se sont révoltés contre ce spot publicitaire, c’est qu’Aoste se moque non seulement des végétariens, mais passe sous silence un bon nombre de détails concernant son propre cas. En 2011, le mensuel Politis dévoile en effet dans son article « Arnaque au « Made in France » agricole et gastronomique », que le jambon Aoste « n’est que le sous produit d’une multinationale américaine. Ses filiales ramassent des carcasses de porcs dans tous les pays du monde (et en Bretagne) mais le résultat n’a rien à voir avec la charcuterie de la ville italienne d’Aoste dont elle n’a plus le droit de se réclamer après de nombreux procès et surtout l’intervention (en 2008) de la Commission européenne qui a mis fin à cette tromperie organisée par Cochonou et Justin Bridou ». Dans le même article, on apprend que la marque « a sauvé son appellation trompeuse en installant ses usines dans la commune d’Aoste qui se trouve en Isère ; et vend ses produits sous le nom de « Jambon Aoste ».» Vous l’aurez bien compris, Aoste – qui semble avoir pas mal de choses à se reprocher – se moque des végétariens pour véhiculer des informations erronées sur un mode de consommation alternatif qui se veut plus respectueux des animaux et de l’environnement. Ironie du sort. Le problème, c’est que la marque, en réalisant cette publicité, a du se dire qu’il n’était pas grave de choquer une communauté qui ne consomme pas ses produits. Ce qu’Aoste ignorait surement à ce moment là, c’est que ce petit bad buzz aurait pu réveiller quelques uns de ses consommateurs éclairés. Il est un peu trop tôt pour voir l’impact de ce flop communicationnel sur les ventes de la marque de jambon, mais en ce qui me concerne j’ai jeté la tranche qu’il restait dans mon frigo après avoir lu ces horreurs, et je ne dois surement pas être la seule.
Quoi qu’il en soit, la marque s’est finalement sentie obligée de réagir et de bafouiller quelques excuses banales sur Twitter, sous le poids de ces nombreuses plaintes.

Et la liberté d’expression dans tout ça ?
Cette indignation du « web végétarien » vous semble peut-être un peu abusée. D’accord, le spot est réducteur et provocant, mais ça reste de l’humour après tout. Et pour une publicité sortie au mois de janvier, on est vite amenés à faire le parallèle avec les manifestations « Charlie Hebdo », et à se demander où sont passés les millions de personnes qui défendaient ce jour là le droit de rire de tout : des musulmans, des chrétiens, des juifs, des vieux, des ados, des gros et des maigres, mangeurs de viande ou non. Le site du magazine féminin Biba a publié un article à propos de ce bad buzz, et l’a adouci en rappelant « qu’exagérer la réalité, c’est un peu le principe de l’humour ». En effet, les végétariens rouspètent lorsque l’on se moque d’eux, mais il est rare d’entendre des geeks, des Jean-Eudes ou des gothiques s’offusquer parce que l’on joue sur des clichés les concernant. Comme le rappelle le même article, « Quand dans une pub il y a un nerd, il a des lunettes moches, les cheveux gras et mange des pizzas. Alors qu’il existe des nerds beaux qui se font opérer de la myopie et qui s’alimentent parfaitement, parce qu’ils sont végétariens ». Blague à part, il est intéressant de nuancer l’indignation des végétariens face à cet humour, bien qu’il puisse paraître assez cynique de la part d’une marque qui se moque de personnes qui ne lui ont rien demandé, sachant qu’elle a de lourdes choses à se reprocher. D’ailleurs, ce n’est pas la première fois qu’Aoste fait une publicité de mauvais goût. En effet, la marque avait fait, en 2013, le lien entre l’occupation française et la charcuterie, ce qui avait déjà indigné pas mal de français :

La diffusion du spot tv étant terminée, cette affaire va surement finir par s’apaiser. Mettons la faute sur un publicitaire en mal d’inspiration, qui aurait mieux fait d’imiter Fleury Michon et sa méthode de transparence sur la production de son jambon. A croire qu’Aoste souhaite encore jouer sur la confusion de son nom… Mais ne perdons pas espoir, cette petite crise sera peut-être l’occasion pour la marque de ré-aligner son positionnement et son discours, pour répondre aux attentes de ses consommateurs et arrêter d’agacer ceux qui ne sont pas concernés.
Voila une histoire qui fait surement sourire Cabu de là-haut, qui luttait à coup de crayons pour défendre le végétarisme, l’écologie et le respect des animaux.

Louise Bédouet
@: Louise Bédouet
Sources :
mrmondialisation.org
communication-agroalimentaire.com
bibamagazine.fr
rue89.nouvelobs.com
leplus.nouvelobs.com
citizenpost.fr
vegactu.com
www.politis.fr
Crédits photos :
pbs.twimg.com
img.over-blog-kiwi.com
mrmondialisation.org

la vérité sur les filles fastncurious
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Twingo et la vérité sur les filles : un féminisme raté

Le 11 février dernier, Renault, via l’agence Marcel (qui nous avait déjà fait aimer les fruits et légumes moches l’année passée), a lancé son opération « La vérité sur les filles » pour promouvoir sa nouvelle Twingo. Au programme : tweets et selfies contre sweat-shirts et totebags.
En effet, la campagne se présente comme une véritable chasse aux clichés et est caractérisée par un refus de la « femme parfaite ». Très interactive, l’initiative repose sur plusieurs piliers : tout d’abord trois spots diffusés à la télévision et sur internet et portés notamment par Bérengère Krief (comédienne et humoriste que vous avez connu dans Bref) et Nora Hamzawi (humoriste, chroniqueuse du Grand Journal sur Canal + et d’On va tous y passer sur France Inter). Intitulées « les bonnes résolutions », « le texto » et « les contes de fées », ces vidéos veulent revendiquer avec humour le droit des femmes à l’imperfection.
 

 
L’opération est aussi portée par d’influentes bloggeuses mode parmi lesquelles Kenza (larevuedekenza.fr), Deedee (Deedeeparis.fr) et Coline (etpourquoipascoline.fr) qui ont, à l’instar de Bérengère Krief et Nora Hamzawi, chacune créé un slogan chargé de véhiculer une idée forte sur les femmes ; parmi ces propositions humoristiques, on trouve des formules telles que: « Je mange du gluten », « Je crois au prince charmant et aux licornes », « Je ne suis pas chiante, je suis cérébrale », « J’adore les enfants (quand ils dorment) », « Je suis un cordon bleu du surgelé », ou encore « Femme jusqu’au bout de mes sneakers ».

Ces slogans seront ensuite déclinés sur différents supports, en sweat-shirts, T-shirts et totebags qui seront échangés gratuitement contre des selfies dans une boutique éphémère entre le 27 février et le 8 mars à Paris, puis dans toute la France à partir du 20 mars grâce à un « roadshow ». Les internautes peuvent aussi tenter de gagner leur sweat personnalisé en tweetant leurs propres vérités et en utilisant le hashtag #lavéritésurlesfilles.

Une campagne féministe… ou un flop total ?
Le problème, c’est que malgré cette volonté de faire une campagne drôle, interactive et dénonçant les préjugés sur les femmes, on se retrouve rapidement avec un sentiment de gêne… Finalement, les filles représentées dans cette campagne ne s’inquiètent toujours que de leurs régimes, de leur « horloge biologique », de leurs amours ou de leurs vêtements. Au lieu de se défaire de ces clichés, elles se positionnent en négatif par rapport à eux, alors qu’elles pourraient montrer ce qu’elles sont vraiment (fortes, drôles, travailleuses, sympa, fêtardes…). Individuellement, les spots et les goodies sont assez bien ficelés, mais la campagne dans l’ensemble dérive rapidement vers un sexisme latent dénoncé par de nombreux internautes…
D’autant plus que Renault n’en est pas à son coup d’essai dans le thème « campagne sexiste ». En juillet 2014, la marque avait dévoilé sur son compte Belgo-luxembourgeois une vidéo d’assez mauvais goût en proposant aux femmes l’option « Désolée-de-m’être-garée-là » pour avoir l’air « d’une fille sympa même quand vous êtes mal garée » :

Le fait est que cette nouvelle campagne attire un certain nombre de commentaires plus ou moins acceptables via le hashtag #lavéritésurlesfilles : du ridicule à la misogynie, les propositions des twittos rendent plus perplexes qu’elles ne font rire.
On fait des caca papillons #LaVeriteSurLesFilles
— Clara (@Clara_Kck) 19 Février 2015
 

#laveritesurlesfilles c’est que qu’il vaut mieux ne pas chercher à comprendre le plus souvent — Megaconnard (@megaconnard) 12 Février 2015

Mais surtout, c’est une campagne qui veut donner LA vérité sur les femmes… Comme si elle était unique et universellement acceptable. Renault véhicule ainsi l’idée qu’il suffit d’avoir un manuel, une sorte de guide type pour comprendre toutes les femmes, sans distinction de personnalité, de caractère ou de sensibilité… Et que toutes les femmes entrent dans une seule et même catégorie. D’où de nombreuses protestations sur Twitter qui dénoncent purement et simplement cette campagne, ou qui l’utilisent pour pointer du doigt de véritables inégalités homme-femme en changeant totalement la portée du hashtag :
Genre les filles sont un sous groupe homogène du genre humain. Super, quoi. #LaVeriteSurLesFilles #Sexisme
— VeniVidiVoyage (@VeniVidiVoyage) 12 Février 2015

“@Larmurerie: #LaVeriteSurLesFilles c’est qu’en France 121 femmes ont été tuées sous les coups de leur conjoint en 2013” 1 femme / 3 jours — MarieShani Pinkfear (@MarieShani) 12 Février 2015

En somme, une campagne ambitieuse qui aurait pu être très innovante et originale (les goodies, le pop-up store, l’interactivité et la lutte contre les clichés) mais qui tombe dans les travers qu’elle était censée dénoncer… Dommage.
Léa Lecocq
 
Sources:
laveritesurlesfilles.fr
larevuedekenza.fr
etpourquoipascoline.fr
deedeeparis.com
leplus.nouvelobs.com
marieclaire.fr
leplus.nouvelobs.com
madame.lefigaro.fr
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misszaza.com
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Marc Dorcel fastncurious
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#SansLesMains : la création publicitaire au coeur du porno

Tandis que le porno dans la publicité fait couler beaucoup d’encre et déclenche de nombreuses critiques, la publicité du porno se révèle de plus en plus créative. Dernièrement, la campagne #SansLesMains de Marc Dorcel a fait le tour du web en raison de son inventivité.
Les yeux doux d’Anna Polina

Dans la vidéo de présentation, Anna Polina présente le dispositif mis en place sur une semaine pour faire la promotion de Xillimité, le site de VOD du géant français de la production de films pornographiques. Le visage de l’égérie de Marc Dorcel est déjà connu auprès du grand public en raison de ses multiples interventions en tant qu’actrice dans des reportages diffusés sur de grandes chaînes comme D8 ou encore dans des articles divers (sur le Bonbon, le Plus du Nouvel Obs). Anna Polina est la porte-parole présentable du milieu du X, la fille que l’on pourrait ramener à un déjeuner en famille.
Avec #SansLesMains, Marc Dorcel honore une nouvelle ère : celle de la visibilité du porno dans la sphère publique. Imaginé par l’agence Marcel du groupe Publicis, le principe est aussi simple que bonjour : maintenir les touches A, S, P et L du clavier enfoncées pour avoir un accès illimité à tout le catalogue de la marque, constitué d’un millier de films HD.
On retrouve alors le mythe de la viralité d’Internet dans son plus beau costume : le trafic sur Xillimité est multiplié par 27 et le nombre d’abonnés est 50 fois supérieur à la moyenne. Le #SansLesMains reste durant 7 heures en trending topic sur la twittosphère française, le tout sans achat d’espace publicitaire. En étant un des hashtags les plus cités, la campagne fait alors développer aux internautes des stratégies de contournement plus ou moins farfelues : des astuces techniques, informatiques ou encore le visionnage à quatre mains avec son/sa partenaire. Cela participe donc à la création d’une véritable communauté, avec des consommateurs impliqués dans la marque. Cette belle visibilité sur les réseaux sociaux couplée à la valorisation des contenus marquent alors une opération réussie pour le producteur.

Une stratégie qui fait ses preuves
En capitalisant sur la frustration, #SansLesMains joue non seulement sur la connivence, mais aussi sur le terrain de l’hédonisme. Accompagnée du sulfureux regard d’Anna Polina, la stratégie en dit long : nous savons ce que vous faites de nos contenus, c’est pourquoi le marketing ne repose pas sur la valorisation de la qualité des produits mais sur l’usage qui en est fait. En opposition aux publicités racoleuses et à peine françaises que l’on trouve incessamment lors de nos promenades virtuelles (sait-on jamais si vous cherchez un plan avec votre voisine MILF imaginaire), la création publicitaire des plus grosses boîtes cherche à monter en qualitatif.

Pour cela, un des leaders mondiaux du milieu a même fait appel à ses consommateurs. Il y a un an, Pornhub lançait son concours ouvert à tous pour trouver un nouveau directeur artistique : il fallait un visuel publicitaire sans nudité ni contenu NSFW pour communiquer dans les grands médias. Autrement dit, une campagne Pornhub G-rated : au contenu approprié pour tout public, sans violence, drogues ni sexualité, etc. La culture porn étant truffée de références, de codes et de métalangage, qui mieux que le consommateur lui-même pouvait être son vecteur ? Cette campagne participative porta ses fruits puisque les nombreuses participations firent le tour d’Internet en raison de leur caractère cocasse.

 
Les publicités de l’industrie porno : vecteur ou conséquence de la mainstreamisation ?
 
Alors que les critiques fusent depuis des dizaines d’années sur l’hypersexualisation des publicités, notamment pour les marques de vêtements (American Apparel en figure de proue), les boîtes porno cherchent alors à prendre le contre-pied en allant vers une perspective de désexualisation de leur communication. Dans cette idée, Pornhub a même participé à la journée nationale de l’arbre aux Etats Unis en proposant de planter un arbre à chaque centaine de vidéos vue (15 000 arbres ont été ainsi plantés).
 
Traditionnellement, le porno est un sujet tabou alors qu’en réalité, plus de 35 millions d’individus atterrissent sur Pornhub quotidiennement. Sur l’IFOP, « La grande enquête Marc Dorcel / IFOP 2009 » intitulée Sexe, Média et Société, une étude riche sur les pratiques de la population française, montre statistiquement une démocratisation de la consommation des contenus pornographiques. En raison de la facilitation technique que procure le web, l’accès à des contenus pornographiques gratuits est de plus en plus ouvert, créant ainsi de nouvelles cibles. Ainsi, visionner du contenu pornographique est devenu une partie intégrante des activités digitales des individus en âge d’avoir une sexualité. Par conséquent, les marques essaient de se réapproprier la culture digitale mais sont souvent vues aux yeux des consommateurs comme étant invasives. Reposant sur l’invitation et la complicité, la campagne de Marc Dorcel en France et la communication de Pornhub firent beaucoup d’échos grâce aux relais spontanés des consommateurs.
 
Par conséquent, le film X n’est plus exclusivement masculin. De nouvelles niches de consommation apparaissent, dont les femmes. La création publicitaire doit alors s’adapter à ces nouveaux publics émergents. La frontière devient poreuse entre le porno obscur et caché comme l’imaginaire l’envisageait jusqu’ici, et la réalité de la consommation. La pornographie fait alors son coming out pour vivre au grand jour en tant que produit de « consommation courante ».
 
 

Thanh-Nhan Ly Cam
@ThanhLcm
Sources
Le brief pour le concours de Pornhub
Les visuels finalistes pour le concours Pornhub
L’enquête IFOP
Les chiffres sur les retombées de #SansLesMains
Sources photo
Marc Dorcel
Marc Dorcel – xillimite.com
pornhubcampaign.tumblr.com

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the take application
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The Take : nouveau visage du placement de produit ?

Les lunettes portées par Scarlett Johansson dans Lucy vous ont fait de l’œil ? Nul besoin d’écumer les boutiques de produits dérivés à la recherche d’imitations cheap qui vous coûteraient deux points de vision. L’application pour smartphone The Take permet de les scanner dans le film et de vous les procurer, changeant le produit culturel en la plus pointue des boutiques. De quoi souffler sur les braises du débat autour du placement de produit au cinéma et dans les séries.

The Take, pour s’habiller comme dans les films américains
Lancée il y a quelques mois, l’application The Take permet d’acquérir des vêtements, des accessoires ou même l’adresse d’un restaurant repérés dans un film (profil blockbuster américain uniquement). Le principe est simple : grâce à la reconnaissance sonore, l’appli identifie le film qu’est en train de regarder l’utilisateur avant de lui proposer une sélection de modèles portés par les acteurs dans les scènes principales. Avec un hyperlien direct, le spectateur-shoppeur est ensuite conduit vers une plateforme de vente où il trouvera le produit identique ou, lorsque l’appli n’a pas réussi à le trouver, un produit similaire qui fera parfaitement illusion. Une sorte de Shazam vestimentaire, en somme. Voilà de quoi réjouir les fans et désoler les puristes réticents au placement de produit.

De l’efficacité du placement de produit : du cinéma au ciné-marque
Le placement de produit est profondément lié à l’histoire du cinéma, puisqu’il est déjà utilisé par les frères Lumière, puis industrialisé après le formidable succès des bonbons Reese’s Pieces, à la suite de E.T. : The Extraterrestrial de Steven Spielberg. Aujourd’hui, le placement de produit est de plus en plus plébiscité par les marques. En effet, il afficherait un ROI (retour sur investissement) moyen quatre fois supérieur à un spot publicitaire, ce qui se traduit par un gain de notoriété et une envie de se renseigner sur le produit bien supérieure. Comment expliquer le succès de cette publicité clandestine ?
Notre époque est à la saturation publicitaire : la plupart des publicités se confrontent à l’hostilité des spectateurs. Pour beaucoup, la pub, c’est la pause, le moment d’aller se chercher un café ou de zapper, pour ne peut-être jamais revenir, au grand damne des annonceurs. C’est en partie la raison pour laquelle la frontière entre la publicité et le film ou la série – jingle, écran noir ou encore petit garçon de Médiavision surfant gaiment sur son ticket de cinéma – tend à s’amincir et à devenir poreuse. Même au sein de cette distinction initiale, les genres se brouillent, quand certains films ressemblent à de gigantesques publicités et que les marques n’hésitent plus à réaliser de véritables courts métrages artistiques, comme La légende de Shalimar – Le film de Guerlain. Ainsi, les différentes strates du programme audiovisuel s’homogénéisent.
C’est ce double phénomène qui est conceptualisé par Valérie Patrin-Leclère, Caroline Marti de Montety et Karine Berthelot-Guiet sous le nom de « publicitarisation » et « dépublicitarisation ».

Valérie Patrin-Leclère, définit la publicitarisation comme « l’adaptation de la forme des médias, de leurs contenus, et des pratiques professionnelles dont ils procèdent, à la nécessité d’accueillir la publicité. »

La notion de « dépublicitarisation », développée par Caroline De Montety renvoie quant à elle à l’action des marques qui développent des dispositifs médiatiques et culturels dans lesquels l’aspect promotionnel est relayé au second plan.
Alors que nous sommes agacés par l’intrusion de la publicité sur nos écrans, et donc sur notre défensive vis-à-vis des marques, nous adoptons une attitude tout à fait bienveillante devant notre programme. Autrement dit, c’est le moment idéal pour une marque de se soumettre à notre regard énamouré.
  Un des multiples placements de produit dans Plus belle la vie.
Et le spectateur est étonnement tolérant ! Une enquête menée par Publicis révèle par exemple que 96% des spectateurs estiment que le placement de produit ne nuit pas à la liberté de création ni à la qualité de l’œuvre et 85% reconnaissent qu’il facilite la mémorisation de la marque.
La relation complexe entre les marques et le cinéma
Le cinéma et les marques entretiennent une relation amour-haine due à leur dépendance réciproque. Le cinéma a bien souvent besoin d’un financement externe : la liberté de création est permise par un investissement des marques, qui influencent également le processus de commercialisation du film, c’est-à-dire sa promotion.
Evidemment, la réussite du placement de produit dépend de l’équilibre entre les intérêts divergents de l’annonceur et du réalisateur. L’annonceur recherche la centralité et la visibilité, tandis que l’auteur du film qui accepte le placement a généralement intérêt à ce que le produit se remarque le moins possible, au contraire, se fonde dans le décor pour ne pas dénaturer le projet artistique initial. Et pour le spectateur, rien n’est plus irritant que d’être ramené à la réalité par un gros plan sur la montre Omega de James Bond au beau milieu d’une scène d’action. Nous voilà embarqués dans une furieuse chasse aux marques pour le restant de la séance, comme s’il s’agissait de « trouver l’intrus ».
Le placement de produit le plus efficace est celui qui s’insère pertinemment dans la fiction, qu’il soit là par simple réalisme (une voiture au logo flouté retient d’avantage l’attention qu’autre chose) ou qu’il serve l’histoire. Une marque est souvent un signe à part entière dans la construction d’un personnage. Elle en dit long sur son origine sociale ou ses revenus, sur son attachement ou son rejet de la mode, facilite l’ancrage de l’action dans un cadre spatio-temporel précis et permet aux spectateurs de se reconnaître en ces personnages. Là, la marque devient désirable car elle ne détonne pas outrageusement. C’est le spectateur qui va entreprendre la démarche de se renseigner sur le produit. C’est là qu’intervient The Take, qui pourrait instaurer une forme de placement de produit alternative et moins indigeste.
L’achat par smartphone, un marché à saisir
Nombre de marques et de producteurs ont décelé le potentiel d’une telle application. Initialement annoncée pour début 2015, l’application Shazam Fashion propose ainsi d’indiquer la provenance des vêtements et accessoires que portent les présentateurs télé et d’accompagner l’achat du spectateur. Ce qui est intéressant, c’est que Shazam Fashion ne fonctionne pas par reconnaissance visuelle du vêtement mais grâce à un système de partenariats avec les producteurs de télévisions américains. Il y a plusieurs années déjà, Andrew Fisher, le PDG de Shazam déclarait dans les pages du Guardian avoir « engagé des partenariats avec plus de 160 émissions de télévision ».
Ce n’est évidemment pas l’amour du 7ème art ou quelque philanthropie qui incite à la création de ces applications mais le marché prometteur de l’achat depuis les smartphones, en nette hausse. Selon une étude, 70% des consommateurs américains ont ainsi effectué un achat depuis leur téléphone portable dans les six derniers mois, contre 59% en 2013. Si les chiffres sont moins impressionnants en France, la tendance est néanmoins identique. C’est ainsi qu’on observe des applis de mode « sourcing » se développer sous diverses formes.
Asap54, par exemple, propose à ses utilisateurs de retrouver l’origine d’un vêtement vu sur un passant à partir d’une simple photo. Une fois la correspondance trouvée, elle redirige l’utilisateur vers le site marchand en question. Et si son système de scan ne parvient pas à trouver de correspondance exacte, plusieurs équivalents proposés. On peut aussi penser à BrandsOnAir et son système de partenariats avec les marques, ou encore à WhereToGet et sa communauté de passionnés qui mènent l’enquête pour trouver la provenance des vêtements photographiés. Cette dernière entretient également un rapport étroit avec les marques, que rien n’empêche d’être des membres à part entière et donc d’encourager les internautes à acheter leurs produits à travers un tracking des recherches et un système de pistage du profil des internautes.

Ces applications de fashion sourcing font du monde une vaste boutique, de chaque passant un ambassadeur d’une marque et de tous les instants une occasion de consommer. C’est d’ailleurs sur cette tendance que Comptoir des cotonniers avait surfé lors de sa campagne Cette page est une boutique.
Louise Pfirsch
@: Louise Pfirsch
Sources :
www.e-marketing.fr
konbini.com
lemonde.fr
histoiredesmedias.com
Valérie Patrin-Leclère, Caroline Marti de Montety, Karine Berthelot-Guiet, La fin de la publicité ? Tours et contours de la dépublicitarisation
Crédits images :
lemonde.fr
e-marketing.fr
konbini.com

Perrier publicité
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À quand la fin des publicités vulgaires ?

Depuis quelques années, de nombreuses marques usent et abusent d’une tendance publicitaire traditionnelle mais pourtant toujours aussi délicate à manipuler : l’allusion à la sexualité. Alors que certaines agences font des publicités qui tombent dans le vulgaire sans passer par la case départ, d’autres produisent tout un univers en exploitant notamment les codes graphiques des sites à caractère pornographique, pour créer du contenu et faire le buzz. Or, rares sont les publicités qui sortent gagnantes de cette “stratégie”. Elles font beaucoup parler d’elles, sont très souvent critiquées car dérangeantes et peu pertinentes, lumière sur le flop général décerné aux publicités de mauvais goût.
Non non n’insistez pas, les jeux de mots ça ne marche plus
Au delà des nombreuses plaintes d’associations luttant contre le sexisme ou l’utilisation de la femme comme objet de marketing, il est intéressant de se pencher sur les publicités qui continuent de croire que faire allusion au sexe va nous faire acheter un billet d’avion ou une cannette de soda. Certes, les spots réussissent à capter notre attention pendant les 30 secondes de leur première diffusion, mais qu’en est-il de leur efficacité ?
J’aimerais commencer par parler du 4×3 qui attaque ma rétine chaque matin depuis un an sur le quai de la ligne 4, en d’autres termes la campagne pour le comparateur de vols en ligne Liligo. Incontestablement plus cheap que le vichy de mon cabas Tati, cette publicité donne envie de se jeter sur les rails du métro plutôt que de se rendre sur ce site.

Mettant en scène des personnes dont l’apparence laisse paraître leur sérieux, la marque tente de nous faire esquisser un sourire en s’appuyant sur le jeu de mot “s’envoyer en l’air”. Une idée brillante et originale en somme. Cessons l’ironie, et notons simplement la vulgarité et la lourdeur de cette annonce.
Vous en voulez encore ? Vous voilà servis ! Ouiz, une nouvelle marque d’aromatiseur d’eau, a dernièrement sorti un spot faisant lui aussi allusion au sexe, via un jeu de mot ne volant pas plus haut que celui de Liligo, soit l’utilisation ambiguë du mot “chatte”. Epoustouflant, n’est-ce-pas ?

Bien qu’il ait été créé à l’occasion de la semaine de l’égalité professionnelle, ce spot a suscité beaucoup de réactions négatives, notamment sur Twitter. Les internautes ont également dénoncé une réutilisation « sexiste » de la Tippexperience – que l’agence Buzzman avait créé 4 ans auparavant – au profit du site Ouiz.fr, sur lequel on peut trouver des solutions pour aider Charlotte à se faire entendre auprès de ses collègues masculins.

Regard sur les grandes marques  
Dans le même thème, on peut désormais parler des grandes marques, qui sont elles aussi friandes de ces allusions, mais qui en usent de manière plus qualitative et donc sensiblement plus subtile. Ces publicités font alors régulièrement objets de débats, notamment lors de séances de cinéma, ce qui en devient presque aussi agaçant que le bruit des pop corn de ma voisine pré pubère. Certains adorent ces campagnes, d’autres les trouvent vulgaires. Je pense par exemple à Schweppes, qui a misé en 2011 sur la beauté d’Uma Thurman pour jouer une scène de quiproquo autour du nom de la marque qui s’apparente facilement au mot « sexe ». Cette publicité a plutôt bien marché, bien que le relai ait été difficilement repris par Pénélope Cruz en 2014, qui a du mal à nous laisser croire qu’elle va embrasser une jeune fille dans un bar.
Autre marque de soda dont les publicités font polémique : Orangina. Le changement de positionnement de la marque, qui a personnifié des animaux pour les rendre pulpeux et sexy, a divisé les téléspectateurs.

D’un côté, la campagne a attiré les prescripteurs que sont les enfants, grâce à l’imaginaire évoqué par les couleurs et les animaux, ainsi que les adolescents pour sa touche de provocation. Mais d’un autre côté, l’aspect érotique des publicités a dérangé une grande part de téléspectateurs, notamment les parents qui sont en grande partie les acheteurs du produit. En Angleterre, le spot jugé trop sexy n’a d’ailleurs été diffusé qu’une seule fois, en 2008. On peut donc se questionner sur l’efficacité de ce repositionnement, après des années de publicités décalées, connues et reconnues.
Quid des faux sites coquins ?
Depuis quelques mois, de grandes marques ont choisi quant à elles d’utiliser les codes graphiques de sites à caractère pornographique, de façon à créer le buzz. C’est par exemple le cas de la SNCF, qui a dernièrement créé le site 28Max, consacré à des offres réservées aux moins de 28 ans. Mouais.
Plus drôle, et poussé jusqu’au moindre détail, le concept avait d’abord été développé par Oasis avec son site YouPomm, qui a beaucoup fait parler de lui l’année dernière. (On peut d’ailleurs y mater des fruit-tease ou des sextape de filf, sans se soucier de vider son historique par la suite, si c’est pas génial ça !).

La marque, voulant changer de cible et toucher les 18-25 ans, a plutôt réussi son coup grâce à l’agence Marcel, mais s’est tout de même fait critiquer par des internautes qui, l’ignorant, trouvaient cette parodie de site coquin choquante vis-à-vis des enfants.
Quoi qu’il en soit, il est important de noter que malgré le bruit médiatique qu’elles entraînent, les campagnes qui font allusion à l’érotisme n’en sont pas plus efficaces. En effet, l’étude d’Adrian Furnham et d’Ellie Parker, du département de psychologie du University College London, explique que la présence de trop de sexe dans la publicité perturbe la concentration et altère le processus de mémorisation de la marque. Et pourtant, dans Le Neuromarketing en action, Patrick Georges et Michel Badoc observent qu’un cinquième des publicités font encore allusion au sexe.
Bref, c’était mieux avant
Les marques et leurs agences devraient donc peut-être songer à changer de stratégie, car en plus d’être vulgaires et de nous énerver par la même occasion, ces publicités ne jouent pas en leur faveur. Du moins plus. Car à l’époque, Perrier avait relevé le défi de façon très explicite, mais sans une pointe de vulgarité à mon goût – bien que la publicité ait été censurée.

Mais c’était en 1976, et depuis le géant de l’eau gazeuse semble avoir du mal à rester drôle et fin. Leur campagne a effectivement animé les réseaux sociaux en avril dernier, faisant encore une fois usage d’un quiproquo autour de la nouvelle taille de leur cannette. Un changement de positionnement ne leur ferait peut-être pas de mal à eux aussi. La preuve : 592 dislikes pour seulement 438 likes sur la vidéo Youtube de leur dernier spot.
Vive Mad Men.

Louise Bédouet
@: Louise Bédouet
Sources :
lexpress.fr
e-marketing.fr
ladn.eu
Crédits images :
youpomm.fr
twitter.com
creads.fr 

Publicité et marketing

Grenoble : plus heureux sans pub ?

 
En janvier 2015, les Grenoblois pourront ajouter à leurs vœux de nouvelle année des adieux aux colonnes Morris, « sucettes » et 3×4 en tous genres. En effet, le 23 novembre dernier, la ville a annoncé ne pas vouloir renouveler son contrat à la fin de l’année 2014 avec le groupe d’affichage et de mobilier urbain JCDecaux, choisissant ainsi de mettre fin à la l’affichage publicitaire dans l’espace public.
Ainsi, le démontage des 326 panneaux – soit 2051m² d’affiches – présents dans la commune, aura lieu de janvier à mai 2015. A la place, la ville proposera trois nouveaux types d’affichages (municipal, culturel et réservé aux associations et à l’opinion) beaucoup plus discrets, notamment parce qu’ils seront à destination des piétons plutôt que des automobilistes. Elle a également prévu de planter une cinquantaine d’arbres à la place d’anciens panneaux publicitaires.
Si l’initiative séduit, elle soulève plusieurs interrogations, notamment au sujet des conséquences financières pour cette grande ville d’Europe, la première à prendre une telle décision. Et au-delà de ces questions, c’est bien l’enjeu communicationnel que cette nouvelle stratégie nous invite à analyser.

Un joli coup de com’
On ne peut, en premier lieu, que saluer l’incroyable coup de com’ réussi par l’équipe municipale : en une seule journée, après que le JDD et le Dauphiné Libéré ont publié l’information, l’ensemble du système médiatique s’est tourné vers la capitale des Alpes et a braqué ses projecteurs sur elle.
Or c’est au niveau national que la ville avait décidé d’ancrer sa stratégie de communication. Le cabinet du maire explique ainsi son choix : « sur des thématiques qui ont du sens au niveau national, comme la suppression de la pub dans l’espace public, on choisit d’ouvrir la focale à des médias nationaux. On s’est dit : quitte à faire ce choix politique-là, autant se permettre un gros barouf sur le sujet, ça va intéresser les médias et nous intéresser aussi, puisqu’on va parler de notre action municipale. ». En ce sens, ce projet participe de l’objectif que le maire EELV de la ville, Eric Piolle, s’était fixé dès la campagne des élections municipales, qui était de transformer l’image de Grenoble en une ville douce, créative et conviviale. L’enjeu étant de rompre avec le ton sécuritaire du « discours de Grenoble » de Nicolas Sarkozy en 2010 et avec l’image de la ville qui en avait découlé.
Avec cette annonce, la municipalité EELV ferait donc d’une pierre deux coups : elle remplit visiblement une de ses promesses de campagne par un coup politique et s’assure dans le même temps une visibilité médiatique en entérinant ce changement d’image de Grenoble par un formidable coup de com’.
De la pertinence de l’affichage publicitaire
Dans de nombreuses métropoles, la pollution visuelle due à l’affichage publicitaire est criante (notamment dans certaines entrées d’agglomérations), au point que beaucoup d’entre nous n’y prêtent même plus attention… En outre, avec le développement d’Internet et de ses publicités de plus en plus ciblées, la pertinence de l’affichage est aujourd’hui à interroger.

Pourtant, ce n’est pas le point de vue de Jacques Séguéla, cofondateur et vice-président de l’agence de publicité Havas, qui s’oppose farouchement à la décision de Grenoble : « Internet, c’est chez soi, c’est loin, c’est avant l’achat. L’affichage dans la rue au contraire (…) c’est le dernier écran dans la rue. C’est le moment où la marque vous rappelle ses valeurs, sa qualité et vous montre son produit ».
La publicité : une happiness therapy ?
Don Draper, de Mad Men et Jacques Séguéla ont au moins une chose en commun : leur vision de la publicité et du bonheur : pour le premier, « la publicité s’appuie sur une chose, le bonheur. Et vous savez ce qu’est le bonheur ? Le bonheur, c’est l’odeur d’une voiture neuve. C’est être débarrassé de la peur. C’est un panneau d’affichage sur le bord de la route qui vous martèle que, quoi que vous fassiez, tout va bien. » Pour le second, « la publicité est marchande de bonheur ». Mais entre le discours des années 60 sur la publicité, les dires des communicants et la réalité, il peut y avoir un monde…

Or un certain nombre d’études ont été menées sur le sujet, et les résultats risquent de ne pas faire le bonheur des annonceurs. En effet, la publicité participerait à l’édification de valeurs matérialistes (notamment en inculquant chez les plus jeunes l’idée selon laquelle l’acquisition de biens matériels serait un élément clé du succès et du bonheur, idée qui ne disparaîtrait pas en grandissant). Ces valeurs auraient ainsi une mauvaise influence sur l’humeur des matérialistes, qui ressentiraient plus d’émotions négatives (stress, angoisse, colère) au cours de leur journée. De plus, la publicité serait source de frustration dans la mesure où elle créerait chez les individus une perception erronée du revenu moyen et de leur propre place dans la répartition des revenus. Elle nous placerait ainsi dans un état d’esprit favorable à la compétition sociale et négatif pour notre félicité. En somme, la publicité créerait un horizon d’attentes relativement irréalistes pour les consommateurs et leur rendrait difficile l’accès au bonheur tant vanté par la réclame.
Epilogue
En voulant protéger ses citoyens contre la pollution visuelle, Grenoble a ainsi porté le débat sur la publicité dans l’espace public sur le plan médiatique national. La décision a été majoritairement applaudie par la société française, et le maire aurait reçu pendant les trois jours suivant l’annonce plus de 300 mails de soutien, dont une grande partie venait de maires avides de conseils méthodologiques pour appliquer la mesure dans leur propre ville. Grenoble pourrait ainsi être la première ville européenne à lancer un mouvement de transition « publicitaire » au sein de son espace public. Mais s’agit-il uniquement d’un microphénomène, ou des prémices d’une nouvelle tendance de politique urbaine ?
Léa Lecocq
@LeaLcq
Sources :
lemonde.fr (1) et (2)
telerama.fr
placegrenet.fr
lefigaro.fr
slate.fr
Crédits photos :
grenoble.fr
images.telerama.fr
images.sudouest.fr
connexionplanning.australie.com
laboiteamalices.fr
roycod.com

Société

Vers une réalité augmentée ?

 
Oculus Rift, quésaco ?
Sous ce nom barbare se cache le gadget qui deviendrait le possible enjeu d’une petite révolution numérique, permettant notamment de créer de nouvelles expériences télévisuelles, cinématographiques, publicitaires et même… sportives !
Créé en 2012 et racheté en 2014 par la société Facebook, ce petit bijou, qui se présente comme un masque recouvrant le regard, permet à son utilisateur de se plonger à 360° dans une réalité virtuelle.
Cette technologie, très en vogue chez les gamers, commence doucement à trouver d’autres preneurs. Le cinéma s’en est en effet déjà emparé, Zéro Point, le premier film en 3D et à 360°, étant sorti en octobre 2014.

Même si l’on peut dire de façon certaine que ce film d’une vingtaine de minutes n’est pas un chef d’œuvre cinématographique – ce dernier se présentant plutôt comme une publicité pour les lunettes que comme un film potentiellement primable à Cannes – cette sortie témoigne tout de même d’une tendance qui tend à se déployer dans le monde du cinéma.

En marche vers une nouvelle expérience cinématographique
La preuve en est, quelques semaines plus tard la chaîne Arte programmait le premier documentaire utilisant ce nouveau gadget. La chaîne a diffusé un documentaire se déployant sur différentes plateformes. Un premier format de 90 minutes pouvait être visualisé sur la chaîne puis en Replay. Dans celui-ci, les téléspectateurs voyageaient dans les paysages de l’Arctique, en ayant l’impression d’être acteurs de la scène : le réalisateur avait opté pour un point de vue subjectif.
Mais le plus intéressant reste le deuxième format proposé par Arte : plusieurs minutes de documentaire étaient mises à disposition des téléspectateurs sur internet, et les possesseurs des lunettes Oculus Rift pouvaient les utiliser et ainsi se plonger dans les paysages en immersion totale. En effet, les lunettes captent les mouvements de tête et donnent l’illusion de se déplacer à son gré sur les lieux du tournage.

Le téléspectateur n’est ainsi plus guidé par le regard biaisé de celui qui tient la caméra. Chaque visionnage devient unique, et totalement personnel. Le film s’échappe de plus en plus des mains du réalisateur et glisse vers celles du spectateur qui devient une triple figure de spectateur-acteur-réalisateur portant l’image où bon lui semble.
Arte, par le biais de ce documentaire, souhaitait sensibiliser les spectateurs aux problèmes climatiques et à ce qu’ils infligent aux magnifiques paysages de l’Arctique. Ce n’est donc pas anodin qu’ils aient opté pour l’utilisation des lunettes car celles-ci, en donnant l’illusion au spectateur qu’il se trouve sur les lieux, permettent une identification plus forte encore que celle à laquelle on pourrait être sujet dans un film traditionnel. Et, c’est bien connu, l’identification du spectateur est une des recettes clé pour le chambouler.

Oculus Rift : un coup de pouce pour les coups de pub ?
La publicité a bien compris les enjeux de cette technologie et s’en est aussitôt emparée. En effet, Volvo, par l’utilisation de ces lunettes, propose aux futurs acheteurs de vivre quelques virtuels instants au volant de leur dernière voiture, et leur donne ainsi le sentiment d’être déjà possesseurs de celle-ci. Volvo semble donc croire que la réalité virtuelle peut avoir un impact sur la réalité sensible. Le potentiel acheteur transfigurerait, par l’achat de la voiture, son expérience factice en une expérience concrète. La marque d’automobiles, plus encore que d’insuffler l’envie d’acheter la voiture, donne l’illusion au consommateur qu’il se l’est déjà appropriée.

Bien d’autres domaines ont également mis la main sur cette technique de la réalité virtuelle : une application sportive permettra bientôt à ses utilisateurs d’avoir l’impression de courir durant le marathon de New- ork. Paul McCartney, lui, propose à son public une application permettant d’assister à la performance de la chanson « Live & Let Die ». Pour en citer d’autre encore, même l’industrie de la pornographie s’y est mise, proposant à ses consommateurs de contrôler les images et ainsi de participer à la scène sans pour autant y être réellement…

Une révolution critiquable ?
Mais des critiques émergent déjà : les utilisateurs témoignent d’une douleur aux sinus, à la tête et aux yeux lors de l’utilisation de l’Oculus Rift, rendant impossible une durée de visionnage trop longue. Ils déclarent également que le format en 600*400 est difficilement perceptible pour l’œil humain, incapable de s’y fixer.
Des progrès restent donc à faire, c’est certain, mais l’on peut tout de même déclarer que cette nouvelle technologie est en phase de provoquer une révolution dans divers milieux qui touchent au numérique. Mais cette révolution est-elle positive ? Cette question mérite d’être posée car cette fois ci, ce n’est plus l’Homme que l’on souhaite augmenter, on passe à un niveau supérieur qu’est la réalité elle-même ! Mais à force de chercher l’augmentation, ne finirait-on pas par aboutir à une réduction, le danger étant que cette réalité augmentée finisse par rimer avec substitution de la réalité ?
Valentine Cuzin
Sources :
konbini.com
siliconvalley.blog.lemonde.fr
Crédits photo :
digitaltrends.com

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froosties
Société

Société de consommation et symbolique des objets quotidiens

La symbolique des produits issus de la grande consommation est de plus en plus puissante et omniprésente dans notre quotidien, notamment en raison d’un processus de »dépublicitarisation ». Il s’agit d’une nouvelle forme de publicité qui « avance masquée », se fait plus discrète et s’immisce désormais à tous les niveaux de notre société. Si elle était déjà présente dans l’espace public elle investit à présent les institutions culturelles à l’instar du musée Haribo.
Mais comment expliquer cette ode contemporaine aux objets du quotidien, si longtemps négligés? Pourquoi mettons-nous aujourd’hui ces objets sur un piédestal ?Zoom sur une nouvelle tendance des plus étranges : la glorification des objets du quotidien.
Un phénomène déjà mis en évidence par A.Warhol et J.Baudrillard
Andy Warhol, artiste new-yorkais des années 1960, organisa une exposition autour des célèbres conserves de Campbell’s Soup. Grâce à la répétition d’images jusqu’à épuisement, le « pape du pop art » mettait en scène le pouvoir symbolique des objets du quotidien. Une manière innovante et efficace de jouer avec la société de consommation et ses excès pour en faire de véritables œuvres d’art.
Dix ans plus tard, Jean Baudrillard, sociologue et philosophe français, publiait deux ouvrages : Le système des objets et La société de consommation devenus des références dans les sciences de l’information et de la communication. L’auteur y analysait notamment le sens nouveau des objets du quotidien.
Malgré la justesse de leur vision, ces personnalités pouvaient-elles prévoir l’ampleur que prendrait ce phénomène ? Pouvaient-elles concevoir que nous collectionnerions un jour les objets du quotidien comme de véritables objets fétiches ? Le phénomène prend une ampleur telle, que la collection des objets triviaux est aujourd’hui parfaitement intégrée dans les stratégies des marketeurs et distributeurs.
Vers une mise en scène des objets du quotidien ?
Cette tendance semble être due à la manie 2.0 de mettre en scène notre quotidien sur les réseaux sociaux, et illustre bien le phénomène d’ »extimité de soi » décrit par Serge Tisseron qui consiste à mettre en avant une partie de son intimité.
Attention cependant : il n’est pas question d’afficher son quotidien tel quel : pas de photos montrant notre vaisselle qui s’amoncèle ! Il s’agit plutôt de partager des photos retouchées pour donner une touche vintage au dernier café branché déniché par nos soins. Bref, on magnifie notre quotidien et les objets qui nous entourent.
Dès lors comment expliquer l’importance grandissante que l’on accorde à des objets que nous jetions auparavant sans même un regard?
La chercheuse du GRIPIC, Caroline Marti de Montety, apporte un élément de réponse, en montrant dans l’essai nommé « La fin de la publicité ? » comment les marques sont impliquées dans les processus de productions médiatiques et culturelles. Elle énonce que « cette institutionnalisation de la muséification des marques est en cours ». Son étude lui permet de mettre en lumière le fait que les marques s’insèrent de plus en plus dans notre culture et sont omniprésentes dans notre société spectaculaire. Il semble donc normal que les produits que nous vendent les marques s’immiscent à leur tour dans notre vie, jusqu’à ce qu’on les affectionne, les chouchoute et les « starifie ».
L’impertinence du luxe : une nouvelle étape dans l’affirmation de cette tendance
Preuve que cette tendance existe, les marques de luxe, investissent à leur tour cette mouvance et la mettent à l’honneur dans leurs dernières collections.
En effet, Chanel a récemment organisé un défilé dans un faux supermarché; évènement analysé ici même dans un précédent article

Peut-on penser qu’avec une empreinte de marque forte, tout peut se vendre ? Suffirait-il d’apposer le miraculeux logo Chanel pour que des objets du quotidien prennent une valeur ajoutée ? Il semble que les marques aient décidé de surfer sur ce nouveau phénomène en intégrant les objets de la grande distribution dans leurs créations. Un processus qui magnifie encore plus ces objets jusqu’à les ériger au statut d’œuvre d’art consommable.
Cela n’aboutit pas pour autant à une démocratisation du luxe, bien au contraire ! Il se joue des codes, flirte de façon éhontée avec nos habitudes et avec notre modeste quotidien ! Ce n’est plus pour dénoncer la société de consommation mais définitivement pour la sublimer et nous provoquer! Warhol le visionnaire, avait proclamé dès 1975:  » tous les grands magasins deviendront des musées et tous les musées deviendront des grands magasins ». Une prédiction qui semble désormais, s’être bien tristement réalisée !
Analyse de cas : co-branding Anya Hindmarch et Kelloggs

Une illustration de cette tendance pourrait être le cas de co-branding entre les marques Anya Hindmarch et Kelloggs. En effet, la marque de maroquinerie Anya Hindmarch , reprend, dans sa nouvelle collection les motifs de la marque de céréales Kellogg’s. On observe ici un double phénomène: Anya Hindmarch reprend le motif des paquets de corn flakes et les boîtes de céréales vendues en magasin mettent en scène ses sacs. On ne sait presque plus faire la différence entre la boite de céréales et le sac en cuir haut de gamme. Ceci est donc la preuve que ce phénomène brouille la limite entre objet du quotidien et objet de mode.
Parfait ! Demain j’achète un paquet de Froosties que j’utiliserai en sac à main : économies à l’horizon !
Enfin, avant de vous débarrasser de vos objets du quotidien, songez que vous pourriez tenir entre vos mains, les reliques des musées de demain.

Clara Duval
Sources:
La fin de la publicité ? – Caroline Marti de Montety, Valérie Patrin-Leclère et Karine
Berthelot-Guiet
La société de consommation – Jean Baudrillard
Le système des objets – Jean Baudrillard
Wikipédia.fr
Instagram
Anya Hindmarch
Colette.fr
Leparisien.fr
Crédits photos:
Leparisdunechicfille.com
Amazonaws.com
beachpackagingdesign.com
joyana.fr

fruits et légumes moches
Publicité et marketing

Parce qu’il n’y a rien de mal à être moche !

 
Clémentine introvertie, pomme rejetée, carotte démotivée ? Tel est le nouveau combat d’Intermarché qui lutte en faveur de ces laissés pour compte, ces imparfaits. En effet, c’est à l’occasion de la journée mondiale contre le gaspillage, le 16 octobre dernier, que la marque de grande distribution a choisi de diffuser sa campagne contre le gaspillage des « talents » de nos chers fruits et légumes, mais pas n’importe lesquels : les fruits et légumes moches !

La carotte démotivée

La clémentine introvertie

La pomme rejetée

En réalité, cette campagne avait déjà été lancée par l’hypermarché dès mars dernier à Provins, en Seine-et-Marne, et avait eu un succès immédiat autant auprès des consommateurs locaux que dans les médias. Déclinée à travers différents supports (affichage, vidéos mises en ligne sur Youtube, dégustations sur place), la campagne met en scène des fruits et des légumes exclus du système de distribution pour des raisons esthétiques et de calibre, alors que leurs qualités gustatives restent les mêmes, voire supérieures (un fruit que l’on qualifierait de « moche » car il serait trop mûr ou abîmé, aurait ainsi tendance à être plus sucré que les autres !). En effet, d’après la FAO (l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) environ 40% des fruits et légumes récoltés ne remplissent pas les critères de beauté imposés par les centrales d’achat et par leurs cahiers des charges, et ne sont donc jamais consommés. Certains même sont condamnés à pourrir au pied de l’arbre qui les a vus mûrir. Invités à goûter des préparations issues de ces produits rejetés (soupes de carottes et jus d’orange en tous genres), les clients du supermarché de Provins leur reconnaissent des qualités gustatives bien réelles et achètent volontiers ces déshérités, qui, soulignons-le, sont vendus 30% moins cher que les produits « normaux ».
 

 

Très vite, l’idée se répand, et Monoprix, Auchan et Leclerc commencent à commercialiser leurs propres légumes moches, notamment sous le label « Quoi ma gueule ? » créé par le collectif Les gueules cassées de Renan Even et Nicolas Chabanne. Les fruits et légumes sont toujours aussi laids, classés hors calibre et présentés dans un emballage sommaire, mais ils sont vendus moins cher que les autres. Rapidement, radios et journaux s’emparent du thème et relayent l’initiative des Gueules cassées, qui finissent même par faire l’objet d’une émission culinaire sur M6, « Gaspillage alimentaire : les chefs contre-attaquent ».

 
C’est lors de la journée mondiale de la lutte contre le gaspillage qu’Intermarché décide de généraliser son initiative de début d’année, et va même jusqu’à s’associer au food truck « Cantine California » à Paris. Et ce sont les vidéos, cette fois-ci diffusées à la télévision, qui ont le plus de succès. En effet, comment ne pas s’attendrir face à cette clémentine complexée par sa petite difformité ? Comment ne pas s’enflammer face aux discriminations que subit cette pomme rejetée ? Car après tout, comme il est dit à la carotte : « il n’y a rien de mal à être moche ! ». L’initiative semble aussi s’élargir à d’autres produits alimentaires – ainsi, certains artisans (boulangers, confiseurs, bouchers et charcutiers) ont décidé de mettre le pied à l’étrier, et commenceront à commercialiser à la mi-novembre sous le label des Gueules Cassées leurs produits difformes, mais tout aussi bons, et surtout moins chers. La lutte contre le gaspillage devient sexy, surtout si elle se fait à moindre coût pour le consommateur, et si elle permet à l’enseigne qui s’en réclame de se (re)construire une image de marque.
L’imparfait, nouvelle norme ?
Derrière l’initiative d’Intermarché et les efforts faits par les enseignes de grande distribution, on retrouve une nouvelle tendance de communication qui cherche à déplacer la norme vers l’imparfait : ainsi, la vidéo sur la clémentine a des airs de lutte contre le body-shaming et celle sur la pomme semble prôner la diversité et se battre contre l’uniformité… Par conséquent, on assiste à une montée en force de la défense de l’imparfait et de l’irrégulier dans la publicité et dans le marketing. Et cela ne se limite pas au secteur de l’alimentation : Maisons du Monde nous dit dans ses dernières publicités : « soyez fous, soyez-vous », GAP défend le « dress normal », et on peut même acheter une poupée Barbie alternative aux mensurations semblables aux nôtres, la poupée Lammily ! Enfin, la marque Desigual a fait de Winnie Harlow, mannequin canadienne de 19 ans atteinte de Vitiligo, une maladie de peau, sa nouvelle égérie pour sa collection automne-hiver 2014-2015, en soulignant que « les différences sont le sel de la vie ».
Désormais, les fruits et les légumes peuvent être eux-mêmes, puisque l’imperfection n’est plus une tare, mais une preuve d’authenticité et de qualité. Et s’il en était de même pour nous ?
Léa Lecocq
@LeaLcq
Sources
Nouvelobs.com
Lesgueulescassées.org
Laréclame.fr
Liberation.fr
Slate.fr
Gala.fr
Crédits images:
Lareclame.fr- Pomme – Patate – Carotte
Intermarche.com
Lesgueulescassees.fr

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