Société

Téléréalité : business, influences, idoles

Que nous aimions ou non la téléréalité, il y a forcément un moment où nous y avons été confrontés : en zappant, pendant les vacances, par simple curiosité, ou bien par habitude, même si certains parfois ne l’avouent pas. Comme l’affirme le journaliste Jeremstar dans sa récente autobiographie, la téléréalité a pris un tournant grâce à l’avènement de Snapchat, Instagram et Twitter. Les candidats ne prennent plus part à la télé-réalité pour l’expérience, mais pour l’argent, le business.
Métier : candidat de téléréalité. Vraiment ?
Aussi incroyable que cela puisse paraître, être candidat de téléréalité est devenu un métier à temps plein. Bronzer autour d’une piscine, faire la fête en boîte de nuit, se mettre en couple à l’écran, voire être trompé sont des activités très lucratives. Les réseaux sociaux deviennent de véritables extensions des programmes qui nous sont proposés. Chaque candidat utilise son Snapchat, son Instagram pour recréer une sorte de nouvelle téléréalité. Il en est le réalisateur et évidemment, le principal acteur. En ouvrant leurs stories, nous pouvons découvrir un format semblable aux émissions. Un processus communicationnel narcissique et divertissant, mais plaisant pour le spectateur, qui se sent plus proche de la personnalité qu’il a pu apprécier à l’écran. Il se sent invité à vivre son quotidien avec lui, en dehors des programmes. On assiste alors à une scénarisation de leur vie (ou du moins la partie qu’ils veulent bien montrer) qui est rythmée par leurs sorties en clubs, leurs règlements de compte truffés de grossièretés avec d’autres candidats, ou encore leurs vacances dans des lieux bucoliques.

Puis, comme dans un média traditionnel finalement, les vidéos éphémères sont entrecoupées de nombreuses pauses publicitaires. Sont présentés avec des codes promotionnels, des kits de blanchiments dentaires, des thés détox, des produits et accessoires de beauté en tout genre. Mais tout ceci est loin d’être du bénévolat : les candidats sont rémunérés pour leurs placements de produits, et très grassement selon leur notoriété. Nous entrons ici dans une logique de course aux followers : plus le candidat « buzz » et fait parler de lui dans un programme, plus il est suivi sur ses réseaux sociaux, plus les marques veulent établir de juteux partenariats avec lui, et ainsi de suite… Certains évidemment, « coûtent » plus cher que d’autres et ont réussi à se faire un nom dans le monde de l’entreprise. C’est le cas de Julien Tanti, qui a sa propre marque de vêtements, une pizzeria, un salon de coiffure et de tatouages… Ou encore sa comparse des « Marseillais », Jessica Thivenin, qui a son propre salon de beauté. Ces candidats très populaires se sont hissés au sommet de cet empire du vide. Ils font de leur propre personne un véritable commerce, une marque à part entière, et gagnent de 3000 à 50 000€ par mois. Astronomique pour des personnes qui sont surtout connues pour leurs perles dans les zappings tv, n’est-ce pas ? Dès lors, nous pourrions les considérer comme des self-made men, des artisans de leur propre réussite à partir de presque rien, à la vue de leur ascension fulgurante en seulement quelques années.

Les nouvelles idoles des jeunes ?
Certains articles sur ce sujet affirment que la tranche d’âge concernée par la téléréalité serait les 15-30 ans. C’est là qu’ils se fourvoient. Les personnes ayant entre 20 et 30 ans actuellement ont, certes, grandi avec la téléréalité : des programmes comme Secret Story ou la Star Academy ont agrémenté leur enfance ou leur adolescence. Mais les idoles de l’époque étaient plus Lady Gaga, Pitbull ou encore les héros de High School Musical, que les candidats de téléréalité.
En revanche, dans la nouvelle téléréalité, qui est devenue un business et non plus un simple jeu, ce sont les 10-18 ans qui sont le plus concernés. Nous pouvons le constater tout simplement en regardant les réseaux sociaux des candidats : les commentaires et les réactions sont ceux des plus jeunes. Le plus souvent, ceux qui font le déplacement lors de rencontres, de meet-up, sont des préadolescents, des adolescents, voire parfois des plus petits.
Que nous le voulions ou non, la téléréalité fait parler d’elle et fait partie des mœurs. Ce n’est pas un succès éphémère comme certains l’avaient prédit. Cela va bientôt faire 17 ans, depuis avril 2001, date de la première diffusion du Loft Story sur M6, que des programmes en tout genre rythment nos vies et exercent une certaine influence. Des candidats, voire des « personnages » se sont démarqués, ils font désormais partie intégrante de la culture populaire. Les téléspectateurs, quant à eux, ne semblent pas se lasser d’un concept qui est pourtant lassant, tant il reprend sans cesse les mêmes thèmes, schémas et structures. Le déclin de l’empire financier et culturel du vide va-t-il être provoqué par un manque de renouveau ?

Florence Arnaud
LinkedIn : Florence Arnaud
 
Sources :

Jeremy Gisclon. Jeremstar par Jeremy Gisclon, ma biographie officielle. Éditions Hugo Doc, 2017. ISBN : 9782755632057.
Mustapha Kessou. Star de la télé-réalité, un métier en or, Le Monde, publié le 10/06/2017. Consulté le 31/10/17.
Agnès Chauveau. La téléréalité, l’opium des jeunes ?, Huffington Post, publié le 24/10/2013. Consulté le 31/10/2017.
Jean-Baptiste Duval. Les Marseillais vs le Reste du monde : le vrai business des stars de l’émission de télé-réalité, Huffington Post, publié le 04/09/2017. Consulté le 31/10/17.
Amandine Pointel. Le placement de produits, nouveau business pour les candidats de télé réalité, Le Parisien, publié le 22/02/17. Consulté le 31/10/17.

 
Crédits photos :
N°1 : Fanch Drougard / W9
N°2 : Capture d’écran de la chaîne YouTube « Snapchat Red » qui recense les vidéos Snapchat polémiques des candidats.
N°3 : Capture d’écran d’une photo provenant du compte Instagram de Jessica Thivenin.
N°4 : France 3 Champagne-Ardenne / A.Blanchard
 

Société

« Si je me flingue en live, combien de screenshots ? »

« Si je me flingue en live, combien de screenshots ? »
Nekfeu, La réalité augmentée
Voilà une provocation qui révèle bien l’invasion de la réalité augmentée dans notre vie quotidienne. Pokémon Go nous avait habitués à nous prendre des gens en pleine face dans la rue, le nez collé à leur portable… Désormais la réalité augmentée risque de créer des attroupements. « S’il vous plaît, soyez conscients de votre entourage » affiche néanmoins Snapchat. Après son rachat de Zenly, qui a permis la géolocalisation de tous ses contacts sur une map en temps réel – ce qui a abouti à la mise à nu de nombreux mensonges, lapins et autres tensions chez les Millennials – Snapchat a lancé une nouvelle fonctionnalité. Depuis le 3 octobre, des œuvres d’art en réalité augmentée peuvent être admirées dans les quatre coins du monde : Central Park, Hyde Park, Washington Square Park, le Champ de Mars… et même Buckingham Palace ! Pour cela, Snapchat a lancé un partenariat avec Jeff Koons, connu pour ses sculptures dites kitsch, et particulièrement pour ses Balloons Dogs. Chaque individu peut désormais admirer ses créations dans l’un des endroits répertoriés ci-dessous, en sélectionnant un filtre sur l’écran de son smartphone.

Politique

Hollande, geek malgré lui

Hollande et les réseaux sociaux : je t’aime … Moi non plus
En janvier, l’Elysée inaugurera le compte Snapchat du président de la République. Peu friand des réseaux sociaux, préférant selon ses dires de 2013 la « conversation directe » avec les Français, François Hollande y a pourtant progressivement accru sa visibilité au fil de son quinquennat. Très utilisé pendant la campagne présidentielle, son compte Twitter @fhollande a été laissé à l’abandon plusieurs mois avant que le président en personne ne le réactive le 1er janvier 2014. Des critiques dénonçant un président au silence anachronique ont commencé à se faire entendre, le contraignant à retisser sa Toile. Sans surprise, il jouit d’un nombre spectaculaire de followers qui relayent en masse chacun de ses courts messages. Son équipe a annoncé début octobre son arrivée sur un réseau social plus ludique, facile d’accès, intuitif et surtout plus jeune : Instagram. Il est alimenté très régulièrement et constitue une sorte de carnet de bord. Un roman photo qui offre à n’importe quel utilisateur l’opportunité de consulter l’agenda du Président. Mais il contribue aussi à donner l’image d’un François Hollande proche de ses concitoyens, quasiment accessible. On le voit ainsi profondément affecté alors qu’il réconforte une personne touchée par le tragique accident d’autocar de Puisseguin : cette publication et la légende qui l’accompagne témoignent que le président est dans l’affect, qu’il partage la douleur de ses concitoyens, et qu’il est un homme avant tout. Au même titre que biens des utilisateurs d’Instagram, il se met en scène et donne à voir ses moins faits et gestes, ce qui tend à l’humaniser.

#Hyperprésident ?
De là à dire que cette présence sur les réseaux sociaux contribue à désacraliser sa fonction, il n’y a qu’un pas – qu’on ne franchira pas. Car justement, cette surabondance des publications peut avoir un effet de réassurance. Au lendemain des attentats de Paris, les équipes du président ont publié une image du conseil de défense qui se tenait à l’Elysée. Les visages sont fermés, les traits sont tirés, et chacun a le nez plongé dans ses feuilles ou le regard tourné vers le président. L’instant est solennel, et le sérieux, le studieux et le sobre qui émanent de cette photo renvoient l’image d’un président bien entouré et conseillé, qui s’active vraiment en coulisses – mais peut-on encore parler de coulisses ? – à l’heure où ses concitoyens sont plongés dans l’angoisse et le deuil. Il y a une dimension paternaliste à tout cela,probablement savamment orchestrée par les conseillers en communication du Président. Ce compte permet de montrer un Francois Hollande dynamique qui multiplie les déplacements et les rendez-vous diplomatiques en France comme à l’étranger, en conseil des ministres comme auprès des dirigeants allemands, russes ou italiens. Le pouvoir des images s’exerce là à l’extrême : chaque prise de vue représente un enjeu différent du quinquennat. L’omniprésence du Président sur ces photographies est une manière comme une autre de faire comprendre qu’il est sur tous les fronts.

Séduire la jeunesse
Voici venue l’heure de Snapchat. Dans l’équipe du Président, on insiste sur le côté novateur de la chose : il s’agit d’informer autrement, de donner un regard plus singulier, se devine surtout en filigrane une opération de séduction à l’adresse des jeunes. Les 18-34 ans constituent 71% des utilisateurs du réseau social. A cet âge où les opinions politiques se forgent, la construction d’une figure politique accessible et en phase avec son époque peut avoir un impact considérable sur les jeunes électeurs. Le vote des jeunes étant crucial pour l’échéance de 2017, on comprend que le Président et ses conseillers cherchent à diversifier les supports – quitte à surprendre. En effet, le recours par les politiques à ce réseau était jusqu’alors circonscrit aux États Unis. Il s’opère donc une certaine américanisation de la vie politique française, avec des hommes d’Etat érigés au statut de vedette, mettant leur personne et leurs proches en scène en permanence. D’autant que le principe de Snapchat étant d’auto détruire les photographies diffusées. Cela laisserait penser qu’il en est ainsi car les photos sont légères, humoristiques voir compromettantes – en témoigne les filtres que Snapchat a récemment incorporé à ses fonctionnalités. Quel est donc le sens de cette démarche quand on est le Président de la République ? C’est surtout la fonction « Story » qui intéresse ses conseillers en communication. Les photos sont rendues universelles et donc visibles par tous pendant 24 heures. Elles permettent donc une immersion des utilisateurs dans l’antichambre du pouvoir. En dévoilant les coulisses des campagnes, les candidats veulent sans doute montrer qu’ils mènent des campagnes participatives, dont le militant est une partie intégrante et non un simple adjuvant à l’élection. Toujours est-il que l’ex-président fantôme des réseaux sociaux est en passe de devenir un aficionado du petit fantôme sautillant de Snapchat.

Erwana Le Guen
Sources :
– Huffington Post, « Twitter / Facebook, Hollande renoue avec les réseaux sociaux »
– Quora, « How can Snapchat influence the 2016 US election? »
– L’Obs, « François Hollande débarque sur Snapchat en janvier, on vous explique pourquoi »
Crédits photo :
Le Lab d’Europe1
Instagram @fhollande
Instagram @fhollande
Slate.fr

SNAPCHAT LUXE
Société

Snapchat, nouveau pass VIP des anonymes

Snapchat, l’application de partage de photos et de vidéos que nous connaissons tous, est devenue le nouveau terrain de jeu de la mode, de la haute-couture et du luxe. Qui l’eut cru ? Certainement pas ses créateurs, deux étudiants de Stanford, dont l’inspiration venait du scandale Anthony Weiner, un élu new yorkais plutôt coquin. Désormais, Snapchat rapporte gros et son utilisation va bien au delà de l’échange de sextos et de grimaces habituels. Snapchat est devenu un réseau social incontournable et la mode l’a bien compris.
Snapchat, le nouveau pass VIP des défilés incontournables
Vous adorez la mode mais la mode vous snobe ? Vous vous verriez bien en backstage ou au premier rang des plus grands défilés ? Malheureusement, votre statut d’étudiant anonyme et votre découvert bancaire ne vous permettent actuellement pas de copiner avec les marques les plus prestigieuses. En attendant d’être à la mode ce que Sarah Jessica Parker est à Sex and the City (car le jour viendra les amis, ne perdez pas espoir !), Snapchat devient le pass VIP des anonymes. En effet, les plus grands noms de la mode ont pris d’assaut l’application pour notre plus grand plaisir.
C’est la partie « story » de l’application qu’utilisent le plus les marques. Celle-ci leur permet d’optimiser leur visibilité. Il vous suffit d’ajouter leurs comptes et vous aurez accès à leurs snaps durant 24h. La présence des marques sur Snapchat reste cependant ponctuelle, le but est de promouvoir des événements tels que l’ouverture d’une nouvelle boutique, l’annonce d’une succession à la direction artistique ou encore, une nouvelle campagne publicitaire.
Burberry en est le meilleur exemple. La prestigieuse marque londonienne n’est pas en reste lorsqu’il s’agit de présence digitale et cela notamment grâce à son directeur artistique de génie, Christopher Bailey. Après les cabines d’essayage en réalité augmentée ou encore la chaîne Apple Music dédiée à la marque, Burberry nous a donné accès à la conception de sa dernière campagne publicitaire via Snapchat avec le seul, l’unique, Mario Testino. Durant 24h, du 22 octobre à 18h jusqu’au lendemain même heure, on a pu voir en direct le célèbre photographe de mode shootant la nouvelle campagne de la marque. En septembre dernier, Burberry avait d’ailleurs révélé au grand public les looks de sa dernière collection dans une story exclusive.
Pendant certaines périodes de l’année néanmoins, Snapchat se met aux couleurs de la mode. Lors des Fashion Weeks, les marques sont très présentes. Certaines, sans aller jusqu’à nous faire découvrir les défilés eux-mêmes, nous donnent à voir leurs backstages. C’est le privilège qu’a accordé récemment Victoria’s Secret à ses nombreux fans à travers le monde. La marque de lingerie est connue pour ses défilés grandioses regroupant une liste d’invités triés sur le volet et les plus beaux mannequins du monde, rien que ça ! 

De nombreuses femmes à travers le monde se sont réunies autour de la story Victoria’s Secret et sans même le savoir, se sont lamentées en communauté. Des résolutions similaires ont alors été prises : 1. lâcher le chocolat que l’on a actuellement dans la main, 2. faire 20 abdos (là tout de suite !), 3. s’inscrire dans une salle de sport.

Snapchat + luxe = succès ?
Les 8000 captures d’écran faites de la story Michael Kors lors de la Fashion Week de New York témoignent du succès de la combinaison Snapchat et mode. Celle-ci plaît au public car elle est la promesse d’une authenticité qu’on ne trouve pas ailleurs. À l’inverse d’Instagram, Snapchat permet très peu de retouches photos. On a accès à un contenu peu contrôlé, capturé à chaud et donc plus vrai. De plus, cette combinaison est plus proche de nous. Avec Snapchat, la mode et le luxe, d’ordinaire si loin du grand public, atteignent notre sphère intime. La mode devient plus accessible, plus humaine et ainsi, suscite le désir. Le public a l’impression d’avoir un laissez-passer entre les mains qui lui permet d’avoir accès aux coulisses de la mode. C’est si bon, le temps d’un snap, de se prendre pour Andréa dans Le Diable s’habille en Prada !
L’aspect éphémère des snaps intéresse beaucoup les marques. Il permet de se montrer sans trop se dévoiler et surtout, force l’attention. La courte durée d’un snap oblige l’utilisateur à y être attentif à une époque où il est de plus en plus difficile de capter l’attention du public durablement.
La cible « digital natives »
L’utilisation de Snapchat par les marques est avant tout une stratégie d’entreprise. En effet, 71% des utilisateurs de l’application ont moins de 25 ans. Il s’agit donc d’attirer de futurs consommateurs. Le but est d’approcher la génération Y via un canal de marketing original, qui leur parle. Snapchat est une manière pour les marques de rester jeunes et au goût du jour. Ainsi, en s’intéressant à ses potentiels futurs consommateurs, les marques évitent de vieillir.
On peut néanmoins s’interroger sur l’efficacité d’une telle stratégie : les jeunes qui suivent aujourd’hui la story Valentino deviendront-ils de futurs consommateurs ? Les digital natives sont séduits par le couple Snapchat-marques notamment parce qu’ils aiment l’instantanéité mais rien ne prouve un réel impact sur les ventes.
Luxe et Snapchat : la démonstration en images d’un profond changement dans la culture d’entreprise
La présence des marques sur Snapchat est révélatrice d’une prise de conscience. Alors que la croissance du marché mondial du luxe a ralenti, le luxe prend le poids de la nécessité du digital. Longtemps réfractaire au digital, le monde du luxe comprend maintenant que ses nouveaux consommateurs évoluent rapidement, et qu’il doit évoluer avec eux.
L’engagement dans le digital du groupe LVMH par exemple, pourrait aller plus loin, en rendant disponible à la vente en ligne toutes ses maisons. Le succès du site de ventes en ligne de Cartier dément l’idée commune liant ventes en ligne et dégradation de l’image de marque.
Une chose est sûre, les réseaux sociaux allègent les dépenses publicitaires et une plus grande ouverture du luxe au e-commerce permettrait sûrement une augmentation des ventes et une plus forte rentabilité.
Yasmine Guitoune
Sources :
ELLE, Burberry dévoile son défilé en avant-première sur Snapchat, 18/09/15. Consulté le 10/11/15 –  http://www.elle.be/fr/96168-burberry-devoile-son-defile-en-avant-premiere-sur-snapchat.html
Poyer, Marine. Burberry : la campagne printemps-été 2016 réalisée en direct sur Snapchat, ELLE, 22/10/15 – Consulté le 10/11/15 – http://www.elle.fr/Mode/Les-news-mode/Burberry-la-campagne-printemps-ete-2016-realisee-en-direct-sur-Snapchat-3006621
Vincent, Anthony. Pourquoi Snapchat captive la mode ? Grazia. 15/04/15. Consulté le 10/11/15 – http://www.grazia.fr/mode/news/pourquoi-snapchat-captive-la-mode-754224
Blanchot, Valentin. Luxe et réseaux sociaux : Burberry se lance sur Snapchat. Siècle Digital, 04/05/15 – Consulté le 10/11/15 – http://siecledigital.fr/2015/05/luxe-reseaux-sociaux-burberry-snapchat/
Malka, Raphaël. Burberry – Snapchat , zoom sur le partenariat Luxe & Social Media de la rentrée! My Digital Luxury Galaxy. Consulté le 10/11/15 – http://www.mydigitalluxurygalaxy.com/burberry-snapchat-zoom-sur-le-partenariat-luxe-social-media-de-la-rentree/
Luxusplus. La génération Y ciblée par les géants du luxe sur Snapchat, 12/06/15. Consulté le 10/11/15 -http://luxusplus.fr/revue-presse/475-snapchat-les-geants-du-luxe-visent-les-consommateurs-de-demain?utm_content=buffer03522&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_campaign=buffer
Challenges. Le luxe doit rattraper son retard dans le digital, 22/04/15. Consulté le 10/11/15 -http://www.challenges.fr/finance-et-marche/20150422.REU9528/analyse-le-luxe-doit-rattraper-son-retard-dans-le-digital.html
Crédits images :
Photo de une : Burberry
Victoria’s Secret
Twitter
Tumblr

Société

Snapchat : from Sexting to Teaching

Jeudi 26 février, un nouveau client de poids débarquait sur Snapchat : Dan Bilzerian. Pour ceux qui ne le connaissent pas, celui qui s’autoproclame le « King of Instagram » est devenu célèbre sur les réseaux sociaux en publiant des photos de son mode de vie « libéré », composé en grande partie de fêtes arrosées, d’armes à feu en tout genre ou de soirées en compagnies de jeunes femmes sans complexes. Cependant, difficile de régner sur deux royaumes à la fois, face à cette arrivée en grande pompe et une première story évocatrice (prise de son lit avec pour compagnie un revolver chargé et une top modèle dans son plus simple appareil), Snapchat a réagi dans la foulée, bannissant le compte au bout de… 6 heures d’existence.
Dan Bilzerian 0 – 1 Ghostface Chillah (notre petit fantôme adoré)
Tu ne croyais pas si bien dire
Cette sanction prise rapidement par les modérateurs du réseau social peut étonner. L’argument principal venait du fait que ces contenus publiés publiquement par le biais du module « story » étaient accessibles à tous, et donc aux mineurs. Sur le papier, la raison est valable, dans les usages, elle étonne venant de Snapchat. Pour rappel, le petit fantôme qui soufflera sa quatrième bougie en septembre prochain a été crée par deux étudiants de Stanford qui avaient eu cette idée suite au scandale qui avait vu l’élu Anthony Weiner démis de ses fonctions pour avoir échangé des photos à caractère sexuel avec de nombreuses femmes.
Le sexting, un pilier en cours de démolition
Si les usages se sont aujourd’hui démocratisés, il ne faut pas oublier pour autant que l’application s’est développée en partie grâce au « sexting » (vous êtes majeurs et vaccinés, on ne vous fera pas de dessins). Une étude réalisée par des élèves de l’université de Washington (disponible ici) analysant les usages des « Snapchatters » et montre que 15% des usagers ont déjà envoyé des snaps à caractère sexuel et que près de 25% ont déjà envoyé des traits d’humour assez connotés. Cependant, les images n’ont pas toujours le caractère éphémère que la marque leur adosse. Il est toujours possible de prendre des captures d’écran (même de manière cachée grâce à des applications tierces), ce qui peut devenir problématique, surtout face à de nouvelles pratiques fermement condamnées comme le « Revenge Porn » (lorsque des cœurs brisés publient sur Internet des clichés ou des vidéos compromettantes de leurs ex en mentionnant même parfois l’adresse de leur lieu de résidence, pour plus d’infos on en parle ici). N’oublions pas non plus les ennuis que l’appli s’est attirée en gardant trop longtemps cette image sur les stores, ou enfin le scandale qui avait éclaté lorsque des hackers ont récupéré des dizaines de milliers de photos qui étaient censées avoir disparu.
Les usages semblent pourtant considérablement changer: le fantôme a fait son petit bonhomme de chemin et compte plus de 100 Millions d’utilisateurs actifs (dont plus des deux tiers ont moins de 25 ans). L’application fait un carton chez les très jeunes et il est temps pour la marque d’opérer quelques changements si elle veut perdurer sans créer de scandales dans un futur proche. A ce propos, rappelons qu’après avoir refusé plusieurs propositions d’achats de plusieurs milliards de dollars, la société devrait être réévaluée à 19 milliards de dollars et vend des espaces éphémères de 24h aux annonceurs pour la modique somme de 750.000 dollars. Il serait donc judicieux d’éviter de tarir le filon avec quelques petits scandales liés à la nudité. C’est dans cette optique que la marque déclare dans ses nouvelles consignes « Keep your clothes on ! »

Une plateforme à destination des adultes
A l’occasion du Safer Internet Day, Snapchat a inauguré sa nouvelle plateforme : le Snapchat Safety Center. Ce nouveau site au design enfantin a pour vocation de sensibiliser les parents et les éducateurs aux usages que peuvent faire leurs enfants de l’application de messagerie par l’image. L’entreprise a développé un partenariat avec trois associations qui luttent pour la sécurité d’internet. On y retrouve des études propres aux différents usages du service ainsi que des liens vers le site de support et de prévention de l’application. Un guide explicatif de six pages à destination des parents et des éducateurs est également disponible. Doit-on donc se rassurer d’une telle décision de la part de ce nouveau géant ? Cette plateforme mettant en scène le petit fantôme et ses amis (la famille s’est considérablement agrandie) est-elle tout à fait innocente ?
Sensibilisez vos enfants, mais surtout parlez-en !
Sur cette plateforme la marque se met en avant, elle s’autoproclamme accompagnatrice de la jeunesse, participant d’une certaine manière à l’émancipation et au développement de celle-ci. On ne reviendra pas sur ces déclarations typiques mais certaines formules sont assez intéressantes tout de même.
Because Snapchat is an important way many young people communicate, parents and teachers should talk with them about how they’re using Snapchat.
Snapchat est ici incontournable, le terme « because » renforce cette idée. Les parents et les professeurs devraient parler de cette application et de ses usages à leurs enfants. Le discours est fort, il affirme qu’il est du devoir des parents de traiter de ce sujet avec leurs petits, pour les protéger, mais aussi les instruire. De là, à l’usage même des adultes pour promouvoir l’usage de l’application à leurs enfants, la frontière semble aisément franchissable. L’usage de la figure professorale est également très fort, il serait important de traiter de ces sujets à l’école, comme si le bon usage de Snapchat faisait partie des essentiels de la scolarité.
Help your kids and students understand how and when to report issues, and encourage them to be good to their friends and responsible members of the Snapchat community.
Le doute ne semble plus permis, la marque propose ouvertement d’encourager les élèves à être de bons membres de la communauté Snapchat.
En grandissant toujours plus vite et en réunissant toujours plus d’utilisateurs de plus en plus jeunes, la marque se devait d’opérer un virage plus éthique pour faire perdurer son incroyable expansion. En 2015, elle s’ouvre à de nouvelles voies avec, par exemple, un premier pas dans les médias via le module Discover et se doit d’apparaître plus sérieuse au vu des sommes qu’elle génère. Pour ce faire, le fantôme doit renier une partie de ce qui l’a fait grandir, quitte à suspendre définitivement aujourd’hui les comptes dérogeant aux nouvelles règles. Etait-ce nécessaire pour devenir encore plus grand ? Les prochains mois nous le diront.

Valentine Cuzin
Sources :
snapchat.com
rtl.fr
Crédits photo :
Safety center snapchat

discover snapchat fastncurious
Agora, Com & Société

Snapchat lance Discover (et sa monétisation ?)

Fin janvier 2015, l’application des 15-25 ans de partage de photo et de vidéo Snapchat a annoncé le lancement d’un nouveau service : Discover. Cette nouveauté permet aux utilisateurs de « switcher » depuis leurs partages personnels vers des contenus interactifs d’actualité ou de divertissement fournis par d’importants médias tels que CNN, National Geographic ou encore Vice. Chaque page propose tous les jours une nouvelle offre interactive actualisée (photos, vidéos, textes etc.). La firme qui ne générait jusqu’alors aucun revenu et qui a été valorisée à plus de 10 milliards de dollars serait-elle entrain d’enclencher sa monétisation en créant à travers Discover des espaces publicitaires potentiellement très juteux ?
Snapchat comme outil marketing prometteur
« Ce que nous vendons à Coca-cola, c’est du temps de cerveau humain disponible ». Cette célèbre phrase de Patrick Le Lay, ancien PDG de TF1, résume bien les enjeux rencontrés par les annonceurs et les médias. En effet, ce qui intéresse les marques dans leur stratégie médias, c’est de trouver les supports les plus adaptés à leur cible : toucher le plus possible les consommateurs potentiels et de la façon la plus efficace.
Une étude récente menée par la chaîne de télévision anglaise Sky News a montré que 18% des 16-24 ans seulement utilisaient des médias dits « mainstream » (comprendre « médias traditionnels » tels que la presse écrite, la télévision et la radio) pour s’informer de l’actualité. En effet, les réseaux sociaux sont devenus en quelques années la première source d’information de cette tranche d’âge tant sollicitée par les marques.
C’est pour s’adapter à de telles mutations que les entreprises de médias classiques se sont de plus en plus imposées sur la toile, principalement sur Facebook et Twitter. L’information délivrée prend la forme de ce que l’on pourrait appeler des « digest news » : il s’agit d’une information « prémâchée » dans le sens où leur contenu est succinct, synthétique et ne pousse pas l’internaute à l’interprétation ou à des questionnements. Le but in fine étant encore et toujours d’attirer les annonceurs, la publicité étant leur source de revenu principale.

Le format et le principe même de l’application Snapchat semble très attrayante en termes de publicité et de marketing. Les marques s’y intéressaient d’ailleurs de plus en plus en postant des vidéos ou des spots dans la rubrique « stories » de l’application. Cela leur permettait de toucher un public jeune (15-25 ans), très précieux et difficile à atteindre. Le principe de Snapchat repose sur le caractère éphémère des images et des vidéos qui disparaissent au bout de 3 à 10 secondes. Cela force l’utilisateur, potentiel consommateur, à délivrer de l’attention le temps de la visualisation : le caractère éphémère du contenu permet de focaliser efficacement l’attention de l’utilisateur.
Ce caractère éphémère se retrouve dans la nouvelle fonctionnalité de Snapchat, Discover. Les médias d’information présents proposent des contenus disponible pendant seulement 24 heures dans un format au sein duquel des insertions publicitaires semblent faciles. Bien que Snapchat ne s’en vente pas encore en ces termes, il y a de fortes chance que ce modèle économique ait été choisi pour amorcer la monétisation de l’application au petit fantôme déjà valorisée à 10 milliards de dollars.
Le risque d’une « ringardisation » et d’un détournement des utilisateurs
Snapchat est un réseau social et sa communauté risque de s’en détourner dans le sens où Discover n’a pas été conçu sur ce modèle. Parmi les avantages à s’informer à partir des réseaux sociaux, on trouve principalement le ciblage qui va être fait par les utilisateurs. En effet, les internautes peuvent choisir quels médias, quelles marques ils vont suivre selon leurs centres d’intérêts. Les données récoltées vont ensuite permettre une publicité ciblée de la part des annonceurs. L’offre s’adaptera aussi en fonction de ce que vous suivez, lisez, regardez. C’est le principe même de Facebook.
Or, Discover n’offre aucun ciblage. Le contenu est choisi par les partenaires financiers de l’application qui vont tenter de captiver une audience qui n’a pas choisi sur quoi elle allait « s’informer ». L’offre est la même pour tous les utilisateurs. Discover n’est pas « social » et l’équipe de Snapchat l’affirme « Discover n’est pas un média social. Les médias sociaux nous disent quoi lire à partir de ce qui est le populaire. Nous voyons les choses différemment. Nous comptons sur les rédactions et les artistes, pas sur les cliques et les partages, pour déterminer ce qui est important ». Il s’agit en quelque sorte d’un retour au modèle de la télévision des années 1950, où les téléspectateurs regardaient tous la même chaîne sans aucun choix possible.

Le business model de Discover semble avoir pour but de capter du « temps de cerveau disponible » et non pas d’informer les internautes sur l’actualité en choisissant et en traitant des faits marquants de l’actualité. Il n’y a rien de social là dedans car aucune interaction entre les utilisateurs à lieu : pas de partages, pas de likes…
Cette mutation d’un réseau à l’origine social en un média qui semble construit sur un modèle désuet dans un contexte où il est acquis que les internautes veulent choisir ce qu’ils voient, pourrait conduire à une « ringardisation » de Snapchat. D’autant que ses utilisateurs sont très jeunes, connectés et habitués aux pratiques des nouveaux médias.
Cependant, Snapchat n’est pas la première plateforme sociale à opérer une transition vers une fonction de publication de contenus et à capitaliser sur le storytelling. Les marques se servent par exemple, d’Instagram pour faire de la « native advertising » (publicité native). Il s’agit selon Charles Gros (expert des médias online) de la « descendante directe du publireportage sur supports journalistiques » qui propose « des contenus publicitaires littéralement intégrés au contenu des sites internet ».
Alice Rivoire
Crédits images :
adweek.com
theguardian.com
huffingtonpost.fr

Com & Société

La guerre des réseaux sociaux, ou l'éveil de Snapchat

 
Depuis une semaine, les utilisateurs de la célèbre petite application ont pu constater une nouvelle évolution dans le fonctionnement de cette dernière: en effet, il est désormais possible de parler à ses contacts Snapchat par un système de messagerie instantanée, mais aussi de les voir avec un outil de discussion vidéo en temps réel. Un pas de géant pour Snapchat, qui, jusque là, ne servait “qu’à” envoyer des photos plus ou moins intéressantes à ses amis.
Car Snapchat, au départ, c’est l’application sans prétention, qui se veut amusante et qui rentre parfaitement dans la culture de l’image que nous avons aujourd’hui: elle cumule à la fois l’attrait contemporain pour le cliché (au sens propre comme figuré: avec des applications comme Instagram, on s’est rendus compte d’abord de l’importance grandissante de la photo dans notre société, qui voit foisonner de nombreux “artistes” en herbe, armés de smartphones et de quelques filtres un peu rétro, mais aussi, et par là même, de stéréotypes et de catégorisations liés à l’image, avec des hashtags spécifiques qui rangent les photos dans des cases pré-définies et qui conditionnent le photographe) et l’éphémère. Le fait que ces photos “fantômes” disparaissent au bout de quelques secondes peut être rassurant et pousse à envoyer toutes sortes de situations mises en images plus ou moins drôles par l’application (mais gare au “Screenshot”).
En soi, Snapchat n’était donc jusqu’à présent qu’une application ludique et assez unique en son genre, qui ne faisait de l’ombre à personne. Forte de son succès, elle faisait son petit bonhomme de chemin toute seule, sans jamais vraiment menacer ses congénères. La seule exception fut peut-être l’apparition de filtres photo qui n’étaient pas sans rappeler Instagram, mais rien de bien méchant.
Et voilà que Snapchat se jette à l’eau. Après un snap vidéo envoyé par la Team Snapchat à tous ses utilisateurs en guide de teasing, où les Snapchatteurs ont pu découvrir une conversation par messagerie instantanée avec vidéo entre deux personnes, Snapchat a rendu disponible une mise à jour qui, on s’en doute, va révolutionner l’utilisation de l’application.
Car avant, Snapchat, c’était simplement raconter en images ce qu’on faisait, une excuse marrante pour prendre des selfies, une décomplexion de l’outil photographique tant utilisé mais aussi beaucoup critiqué à l’heure actuelle. On comptait sur le caractère évanescent des photos, sur la petite mention “screenshot” pour se dire que de toute manière on saurait si on avait été immortalisé.
Maintenant, avec l’apparition de cette nouvelle mise à jour, Snapchat ne sert plus uniquement à ça, mais aussi à communiquer par vidéo et par messagerie instantanée, ce qui représente un changement considérable.
Avant, le seul semblant de “discussion” mis à disposition par l’application se limitait aux 45 caractères que l’on pouvait insérer sur une image. A présent les utilisateurs peuvent réellement chatter, avec toujours cette logique de l’éphémère (les messages disparaissent si l’on n’appuie pas dessus pour les sauvegarder). Autre changement: Snapchat met une nouvelle limite à son culte de l’éphémère en rendant maintenant possible le fait de pouvoir utiliser les photos déjà présentes dans la bibliothèque photo de l’utilisateur: une option qui vient nuancer le côté “instantané” des photos échangées par le biais de l’application.
La communication par vidéo, également, est une avancée importante: si avant, l’application permettait d’envoyer des petits clips vidéo de 9 secondes maximum (un peu sur le modèle des Vines), il est désormais possible d’avoir une vraie conversation en images, comme sur Skype ou FaceTime (à la différence près qu’il faut garder le pouce maintenu sur l’écran, ce qui peut être contraignant).
Alors, comment cette avancée est-elle justifiée par l’entreprise? « Jusqu’à présent, nous avons estimé qu’il manquait à Snapchat une partie essentielle de la conversation : la présence. Il n’y a rien de mieux que de savoir que vous avez toute l’attention de votre ami lorsque vous chatez” ont posté des représentants de l’application sur un blog.
Ce qui est intéressant cependant face à ce changement, c’est qu’il survient quelques jours à peine après une importante mise à jour de Facebook[1], qui impose à ses utilisateurs de passer par l’application Messenger pour envoyer des messages privés sur la version mobile. Ladite application a à son tout tenté d’innover en mettant à disposition une « selfie cam », permettant de prendre rapidement un autoportrait et de l’envoyer directement.
Snapchat s’inscrit donc dans la lignée de Facebook en développant à son tour ses fonctionnalités. L’avenir nous dira quel sera le prochain coup dans cette guerre des réseaux sociaux, menée par l’image.
 
 Camille Gross
Sources
LePoint
LeMonde
 

 

[1] http://tempsreel.nouvelobs.com/vu-sur-le-web/20140429.OBS5539/pourquoi-facebook-vous-demande-d-installer-messenger.html

Snapzheimer
Agora, Com & Société

Epargnez-moi cette émotion programmée

 
Le 17 avril, en s’appropriant Snapchat, l’outil de partage éphémère de photos, la campagne Snapzheimer, imaginée par Proximity BBDO, a tenté de faire vivre symboliquement aux jeunes l’expérience de la maladie d’Alzheimer. Cette campagne marque une véritable innovation dans l’usage des réseaux sociaux mobiles puisqu’elle transforme l’usage de l’application en message à part entière. Grâce à Snapchat, la campagne s’est s’invitée dans l’insouciance du quotidien des jeunes et s’est appliquée à détourner l’expérience d’un de leur média préféré afin de les sensibiliser sur la réalité de la maladie d’Alzheimer. Une seule fois et pas plus.
Sensibiliser la nouvelle génération à une « maladie de vieux » : Alzheimer
Le problème est de taille : comment intéresser des jeunes hyper connectés à la maladie de l’isolement, de la déconnexion ? Pour y parvenir, Proximity BBDO a décidé d’utiliser un outil de leur quotidien, Snapchat, et d’en faire le média inattendu d’une campagne de sensibilisation.
Prendre les jeunes au « piège » de leur usage de Snapchat. Les alerter et puis disparaître pour les avertir de l’urgence de cet enjeu de société. Avec cette campagne, plus que jamais, le média devient le message, l’incarnation virtuelle d’un mal dont souffrent aujourd’hui  850 000 Français.
Snapzheimer : l’exemple de la bonne prise de parole
Ce jeudi 17 avril, 1 million d’utilisateurs Snapchat, sélectionnés grâce à la base de données du groupe partenaire Cache Cache, ont reçu un Snapchat un peu différent : des photos souvenirs se sont affichées puis, au bout de 10 secondes, ont disparu pour laisser place à un message de sensibilisation.
La campagne, en détournant l’application Snapchat, visait à toucher les jeunes proactifs à même de montrer ces clichés à leur entourage. À terme, cette opération se veut donc transgénérationnelle. Il s’agissait ici de choquer la jeunesse en détournant, d’intéresser les familles en intriguant par la technologie. Proximity BBDO a porté la réalisation de cette campagne astucieuse afin de montrer aux jeunes que leur média préféré peut aussi être l’incarnation d’un mal dont leurs grands-parents peuvent souffrir.
L’habilité de cette campagne réside donc dans sa démarche, mais aussi dans ce qu’elle ne fait pas, à savoir  créer une énième page Facebook ou inonder l’espace public d’une logorrhée verbale attendrissante. Avec cette campagne, le message s’ancre dans le temps sans harceler le public. En somme, il s’agissait là de changer la vision qu’avaient les gens de Snapchat, de telle manière qu’à chaque cliché,  ils pensent à la maladie d’Alzheimer.
Une bonne démarche pourtant trop rare, car sensibiliser c’est suggérer, et non choquer
Dans L’Agamemnon d’Eschyle, Clytemnestre tue Agamemon et Cassandre à l’abri des regards, dans une pièce cachée des yeux des spectateurs de la pièce. Dans Orange Mécanique, Alex viole à l’abri des regards, mais cela n’a pas empêché chaque spectateur d’être choqué par la violence de la scène. Pourquoi ? Parce qu’elle était suggérée.
L’objectif de la catharsis1 est le même que celui des campagnes de sensibilisation : faire prendre conscience des travers de l’existence afin de mener une meilleure vie. La force de la catharsis, comme la force de la campagne de sensibilisation, est de suggérer, de faire émerger en chaque personne les travers qui affleurent.
Nul besoin d’aller dans le gore, dans le pathos excessif qui dégoutte, embarrasse, et n’aboutit qu’à une banalisation de l’extrême. Et pourtant, trop de campagnes de sensibilisation s’enferment dans ce défaut.  Il faut au contraire croire à la force du suggestif, dans une société de l’obscénité où tout se montre, tout se dit en permanence. Dans ce flot quotidien d’émotions déversé par les médias, il est impératif de manœuvrer différemment.
Il ne s’agit plus d’imposer au spectateur une émotion, une musique larmoyante ou des visages en gros plan, mais au contraire, de le faire participer, de se servir de son expérience, de son vécu pour qu’il puisse se convaincre lui-même. La démarche n’est pas neuve : Sophocle et Euripide n’ont pas attendu le Brand Content participatif pour comprendre qu’il n’était ni bienséant ni efficace d’imposer une réalité choquante à un public.
De fait, on comprend bien que les campagnes de sensibilisation répètent malheureusement les défauts de notre société (révélations, obscénité). Montrer de plus en plus pour émouvoir s’apparente alors à une lourde erreur. La force de l’émotion est dans ce suspense léger et silencieux, qui suit la fin d’un roman.
Je ne suis pas saisi de la beauté du voyage d’Ulysse quand il échoue sur l’île de Calypso, mais quand je referme le livre, ma main sur la quatrième de couverture, alors je comprends que ce récit ne me quittera plus.
 
Arnaud Faure

Crédit photo :
Pierre Peyron – La mort d’Alceste – Musée du Louvre Paris
1. La catharsis est l’épuration des passions par le moyen de la représentation dramaturgique

snapchat piston stage
Les Fast

T’avais un piston ?! – J’avais Snapchat

 
« Tu vas faire ton stage chez DDB Oslo !! Trop de chance ! T’avais un piston ?!
– J’avais Snapchat. »
Les fans de selfies éphémères vont enfin pouvoir mettre leur incroyable concision au profit d’une cause durable : le stage (et l’épopée de sa recherche). Et vous, étudiants à la ramasse, vous allez enfin pouvoir ajouter un contact utile à vos 40 amis.
En effet, avec The Snapchat Pitch, l’agence DDB Oslo vient de vous lancer un défi créatif des plus audacieux. Le principe est simple : faire le pitch de votre idée du siècle (si tant est que vous l’ayez trouvée) en moins de 10 secondes sur Snapchat pour l’envoyer à DDB_Oslo et tenter de décrocher un stage dans l’agence de vos rêves (le pitch devant être une idée exploitable pour un client réel de DDB, forcément). Si votre créativité réussit à triompher de vos millions de concurrents virtuels, alors vous aurez l’honneur suprême de décrocher un entretien, avec en prime un billet d’avion à destination d’Oslo, tous frais payés par l’agence.
Dans le pire des cas, vous avez donc Snapchaté une énième fois (et vous vous êtes un peu creusé la cervelle). Au mieux, vous vous octroyez un week-end norvégien à moindre coût. Honnête.

Innovant, amusant, intéressant et… intelligent : la dimension de réalité se fond ici dans la virtualité pour un crowdsourcing dissimulé derrière le côté « funky » du concept. Avec un tel processus de recrutement, c’est autant d’idées nouvelles que de Snapchats envoyés, et ce à moindre effort et à moindre coût. The Snapchat Pitch, ou comment tirer parti au mieux des étudiants prêts à tout pour être employés ou décrocher LE stage au sein de l’agence. Mais après tout, ils le font tous. Eux ont le mérite d’être originaux.
 
Eugénie Mentré
Sources :
Iletaitunepub.fr

Snapchat
Archives

Jacques a dit : Snapchat tout ce que tu veux !

 
A l’instar de Facebook, immense réseau social fondé par le très jeune Mark Zuckerberg, Snapchat démarre comme projet d’étude de deux étudiants de Stanford : Evan Spiegel et Bobby Murphy. Il est lancé en septembre 2011 et très vite, début 2013, la société de capital risque Benchmark, prend le pari d’investir 13,5 millions de dollars dans la start-up, ainsi que Facebook qui tente de racheter l’application pour 3 milliards de dollars, des sommes qui en disent long sur l’enthousiasme que suscite cette invention.
Le fonctionnement est simple. Il s’agit d’un système de partage de photos et de vidéos, que l’on envoie à un cercle d’amis – des contacts que l’on ajoute – comme sur Facebook ou Instagram. Ce qui diffère radicalement cependant, c’est qu’une fois la photo prise, sa durée de visualisation est modifiable de 1 à 10 secondes par l’expéditeur et « l’existence » de l’image ou pour ainsi dire sa conservation, est limitée pour le destinataire.
Comment interpréter les différents enjeux de ce média apparemment innovant qui promeut le côté éphémère des publications en sous-entendant une sécurité des données ?
En 2013, il semblerait que la photo communique plus de chose que les mots. Que ce soit sur Facebook ou sur Instagram, les images dominent et inondent la page d’actualité.
Sur Snapchat, le modèle se différencie en ce qu’il possède un caractère éphémère, trait particulièrement recherché chez les utilisateurs en quête de sécurité et de confidentialité. Dans un monde où toute donnée est conservée, les internautes craignent la divulgation d’informations personnelles, de laisser leur image sans aucun contrôle ou de se voir trahis par des photos compromettantes qui, une fois postées sur la toile, n’y seront pas retirées de sitôt. La disparition en quelques secondes de ces dernières est donc la panacée pour bon nombre d’addicts au partage compulsif de photos.
Snapchat a trouvé la solution : partager, puis supprimer. Le fait de ne pas garder de traces outrepasse l’autocensure que chacun se pose à soi-même. Il en ressort une plus grande liberté dans la prise d’images et la spontanéité n’en est que plus accrue. Avec Snapchat, les barrières n’existent plus, chacun n’envoie que ce qu’il contrôle et ne reçoit que ce que l’émetteur a choisi de lui faire parvenir. Plus question de tags, ni de profil visible pour 200 ou 300 « amis », il n’y a un lien qu’entre l’émetteur et le récepteur, tous deux avec la même volonté : faire partager des instants de vie sélectionnés et envoyés sans crainte.
Le paradoxe est notable : la photo en temps qu’objet, qui n’en est déjà plus un avec les nouvelles technologies, n’est donc plus faite pour être conservée, mais doit absolument être supprimée. Il n’est donc plus question de souvenirs, mais de flux constants de partage en quelque sorte.
De nos jours, tout semble pouvoir être partagé, sans limites. Innombrables sont les internautes capturant chaque moment de leur vie. Comment faire la distinction entre ce qui doit ou non être posté?
Le monde est saturé d’images et Snapchat n’est qu’une application de plus tournant autour de la monstration. Dans la prise de photo, même confidentielle ou éphémère, le côté voyeur est sous-jacent. Et Snapchat ne fait qu’accroître cette tendance. Le voyeurisme est occulté par le sentiment de confiance diffusé par l’application et incite donc inconsciemment les utilisateurs à prendre de plus en plus d’images sans censure, et ainsi perdre peu à peu toute perception d’intimité.
Snapchat veut se différencier des autres médias. Par la suppression de chaque photo envoyée, l’application donne une certaine garantie de sécurité, mais pour combien de temps encore ? Et peut-on véritablement parler de sécurité sur internet ?
En effet, tout utilisateur, même le moins aguerri, sait comment faire une capture d’écran : communément appelé un « screen shot ». Cette fonction neutralise en partie l’aspect éphémère dont l’application se targue. En envoyant une image, même à des amis, qui soit dit en passant, ne le sont parfois pas réellement, la capture d’écran est incontrôlable.
Comment savoir si le récepteur va photographier l’image que l’on envoie, comment alors juger ce qui se doit d’être éphémère ou ne pas l’être ? Comment maîtriser la notion de propriété ? Lorsqu’un utilisateur fait une capture d’écran d’une photo, cela est signalé à l’envoyeur, mais il est alors trop tard, et l’envoyeur n’est plus le seul en possession de sa photo qui devait, au départ, disparaître à jamais.
De plus, très récemment, une nouvelle fonctionnalité « Snapchat Stories » est apparue, discréditant le fondement même de l’application. On peut en effet conserver l’historique commenté de nos photos, en illimité pendant 24 heures. Même si les destinataires peuvent être sélectionnés et limités, ce qui restreint grandement la diffusion de ces photos, le système commence à changer. À partir de là, il est difficile de ne pas penser au géant Facebook, qui est passé d’inoffensif réseau social à vendeur d’informations à destination de la publicité ou encore de la NSA.
Les snaps sont effacés très rapidement après leur ouverture et après 30 jours s’ils n’ont pas été lus. Mais Micah Schaffer, chef de la confiance et de la sécurité chez Snapchat a avoué, il y a peu, avoir dû fournir certaines photos aux autorités dans le cadre d’enquêtes. Est-ce un bien ou un mal ? À chacun de juger en fonction de ce qu’il décide d’envoyer.
Snapchat est divertissant, innovant, tout beau, tout nouveau. Pour le moment. Comment savoir en effet si la NSA n’est pas en train de collecter les quelques 350 millions de clichés pris par jour ? Personne ne pourra se plaindre a posteriori, les cas Facebook et LinkedIn ayant fait assez de bruit comme cela, mais ce qui est certain c’est que la servitude à ces applications, toutes autant qu’elles sont, est en réalité tout à fait volontaire.
 
Agathe Gindele
Sources :
Le site Clubic.com