Michaël Llodra
Société

Double faute

 
Le sport est, on le sait, un élément culturel qui est symbole de valeurs, et ce sous toutes ses formes, collectives ou individuelles. Parmi les sports les plus « nobles » qui existent, le tennis culmine en tête. On recense près de 30 millions de pratiquants licenciés rien qu’en Europe, et les tournois du Grand Chelem font partis des grands événements sportifs annuels, mobilisant des millions de téléspectateurs chaque année.
Mais malgré l’atmosphère classieuse qui enveloppe le monde très fermé des tennismen professionnels, nous assistons de temps en temps à quelques petits débordements, qui nous rappellent à chaque fois que rien ni personne n’est à l’abri de la « boulette ».
Dernièrement, c’est le français Michaël Llodra qui en a fait les frais. Lors de son match dimanche contre Ernests Gulbis durant le tournoi d’Indian Wells, il s’est laissé emporter face à la pression et s’est calmé les nerfs verbalement sur un groupe de supporters chinois, lâchant un assez indélicat « fucking chinese » à leur encontre. Un journaliste présent a immédiatement tweeté l’événement, et le pouvoir de viralité de Twitter a fait le reste. L’info s’est répandue comme une trainée de poudre, et en récompense, le joueur français a gagné une amende de 2500 dollars pour « abus verbal » et « obscénité audible », ainsi qu’un sale coup à sa réputation.
Evidemment, face à ce torrent de protestation, Llodra a décidé de réagir. Il a rencontré un journaliste chinois afin de présenter ses excuses, mais aussi beaucoup plus. En effet, Michaël Llodra a justifié ses propos d’une manière pour le moins inhabituelle. Il aurait déclaré ceci au journaliste : «Mes mots n’étaient pas contre la Chine. J’aime les Chinois. Je pourrais tout à fait faire l’amour à une Chinoise.» Ces propos, rapportés par le New York Times, ne ressemblent pas vraiment à ce que les personnalités sportives ont l’habitude de dire lorsqu’ils se retrouvent dans des situations similaires. Car si l’affaire Llodra est à suivre, ce n’est pas la première fois qu’un joueur dérape en plein match, sous l’œil et les oreilles des médias.
Cet incident n’est pas sans rappeler la mésaventure de Joachim Noah, fils de Yannick, lors d’un match qu’il disputait avec les Chicago Bulls en mai 2011, il y a un peu moins d’un an. Le joueur français avait été filmé en train de prononcer une insulte homophobe envers un supporter qui avait de toute évidence dû avoir une conversation particulière avec Noah lors de ce match. Celui-ci avait d’ailleurs écopé d’une amende de 50 000 dollars, et s’était excusé auprès de la presse, expliquant, tout comme Llodra, qu’il avait eu cette réaction « dans le feu de l’action ».
Et bien sûr impossible d’oublier le drop-kick légendaire d’Eric Cantona sur un supporter lors d’un match qu’il disputait en 1995 pour Manchester United, alors qu’il était au sommet de sa gloire. S’en était suivi une débâcle journalistique autour du « kung-fu kick » que le joueur avait préféré ignorer, lors d’une conférence de presse où il éclaboussa les journalistes de sa poésie.
Finalement, ces incidents, malgré le mal qu’ils causent au sport et aux joueurs qui les causent, montrent bien que malgré la surmédiatisation et le statut d’idole dont ils peuvent jouir parfois, les sportifs restent des êtres humains qui peuvent craquer sous la pression. Toutefois, ce qui les différencie des individus lambda, c’est que lorsqu’ils vont trop loin, tout le monde le sait. Ce doit être la rançon de la gloire.
 
Emilien Roche
Crédits photo : ©Panoramic

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Balle de football américain au sol représentative du Super Bowl Américain
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La publicité, grande gagnante du Super Bowl

Commençons avec une devinette : quel est le jour de l’année où les Américains consomment le plus de nourriture ? Okay, Thanksgiving, that was an easy one. Et le deuxième sur le podium ? Réponse : le Super Bowl Sunday. Le what ?
Le Super Bowl, c’est la finale du championnat national de football (américain, of course). Mais c’est aussi 1,25 milliards d’ailes de poulet, 4000 tonnes de guacamole, 14 500 tonnes de chips et surtout, environ 100 millions de téléspectateurs. Ce dimanche‑là est presque considéré comme un jour férié à part entière, le match est regardé en famille ou entre amis, et la consommation suit le mouvement, ainsi que les taux d’audience ! Le Super Bowl XLV (la 45ème édition du match depuis la toute première en 1966) est même à ce jour l’émission télévisée américaine la plus regardée de l’Histoire.
111 millions d’Américains rassemblés devant leurs téléviseurs par la seule beauté du sport ? Pas tout à fait. Chez l’oncle Sam, un match de football est toujours accompagné d’une fanfare, de cheerleaders, de l’hymne américain… Autant dire que lors du Super Bowl Sunday, le spectacle est à son comble ! Chaque année, le processus de sélection de la ville qui organisera la grande finale s’apparente aux sélections olympiques. Important aussi, le choix de l’artiste qui aura l’honneur de chanter l’hymne américain, et de celui qui animera la mi‑temps par un mini‑concert (mais avec un maxi‑public). Cette année pour le Super Bowl XLVI, qui aura lieu le 5 février, ce sont Indianapolis, Kelly Clarkson, et Madonna qui ont raflé la mise.
Mais pour les téléspectateurs, le spectacle ne se joue pas uniquement sur le terrain, il est aussi dans les coupures publicitaires. Eh oui, quand on s’appelle Coca Cola, Doritos ou Budweiser et qu’on s’adresse au tiers de la population américaine à travers un spot qui peut coûter jusqu’à 100 000 dollars la seconde, on s’arrange pour ne pas louper son coup. Résultat : les publicités diffusées lors du Super Bowl sont bien souvent des merveilles d’ingéniosité et de drôlerie, et sont une des raisons pour lesquelles tant d’Américains se regroupent devant leur télé ce soir-là. Dans une société dite de plus en plus publiphobe, quel drôle de phénomène que celui-là: la pub est appréciée, voire plébiscitée, elle est presque appréhendée comme une forme d’expression artistique, à la manière du cinéma ou de la photo. Alors que les pauses publicitaires sont traditionnellement pour les téléspectateurs un moment propice au zapping ou à la satisfaction des besoins les plus élémentaires de l’organisme, ici les annonceurs s’efforcent de contrer le phénomène et de retenir les Américains dans leur canapé à l’aide de talentueux exercices de style. D’une certaine façon, pendant le Super Bowl, la pause pipi c’est le moment où le match reprend ! Selon Stephen Master, le vice président de l’institut de recherche et de sondage Nielsen, près de 50% des téléspectateurs allument la télé pour regarder les publicités, plus que pour regarder le match*.
Néanmoins, on peut s’interroger. Les bijoux publicitaires dévoilés lors du Super Bowl Sunday valent-ils vraiment leurs 3,5 millions de dollars (pour un spot de trente secondes) ? Il semble pourtant que les marques trouvent leur compte dans cet investissement. En effet, l’audience atteinte par les publicités du Super Bowl ne se limite pas aux quelques 111 millions d’Américains qui auront passé le dimanche devant le match. Les publicités du Super Bowl sont un tel phénomène que désormais on voit fleurir sur Internet les listes récapitulatives et autres « tops des 20 meilleures pubs du Super Bowl ». Si par ailleurs, on tient compte de la dimension affective qui lie les consommateurs à ces perles attendues chaque année avec impatience, on imagine sans peine l’impact que peut avoir un spot au Super Bowl pour les marques. Faire partie des happy few qui communiquent lors du Super Bowl est déjà en soi une raison d’être au cœur de la conversation ! En témoigne l’attention que reçoivent dès aujourd’hui GoDaddy.com, Doritos, Skechers, Teleflora, Pepsi, ou encore Kia pour avoir annoncé qu’ils diffuseraient un spot lors de ce Super Bowl XLVI.
 
Esther Pamart
* Source: money.cnn.com
Crédits photo : ©Anderson Mancini Flickr

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Al-Jazi Foot
Société

Al-Jazi quoi ?

Le 6 décembre 2011, Al-Jazeera (ou Jazira pour les intimes) rentre dans la danse de l’attribution des droits télé de la Ligue des Champions, jusqu’à présent détenus par TF1 et Canal+. Pour les passionnés de curling ou ceux qui ne jurent que par « les valeurs de l’ovalie » — le rugby quoi —, la Champions League en VO c’est le top of the top du football européen. Pendant huit mois, les trente-deux meilleures équipes européennes se livrent une lutte sans merci pour régner sur le vieux continent. Outre la gloire — pour un footeux, remporter la CL, c’est aussi beau qu’une coupe du monde — une telle compétition c’est aussi l’occasion de remplir les caisses des clubs grâce aux juteux droits télé que l’UEFA (l’instance dirigeante du football européen) distribue en fonction de leurs performances dans la compétition. À titre informatif, l’UEFA balance plus de 750 millions d’euros chaque année aux Real Madrid, Manchester United et autres Milan AC ; le vainqueur de la coupe aux grandes oreilles — comme Mickey ouais c’est marrant — pouvant récolter à lui seul plus de 30 millions d’euros.
Tous les quatre ans les droits sont renégociés entre l’UEFA et les chaines de télé intéressées. Des appels d’offre sont lancés, et les plus généreux raflent la mise. Problème, cette année un petit nouveau coiffé de son keffieh est venu bouleverser le game : les Qataris d’Al-Jazira Sport. Jusqu’ici TF1 et Canal+ se partageaient les lots mis en jeu: TF1 récupérait les 13 premiers choix dont la finale, pendant que Canal+ raflait le reste (133 matchs, plus des émissions spéciales).
Côté qatarien on n’a pas pour habitude de s’embarrasser avec des histoires d’argent. Alors si Canal+ proposait 31 millions pour ses 4 lots habituels, les Qataris ont posé 60 millions sur la table. Le double, en toute décontraction. Bertrand Méheut — PDG de la télé du Plus — essayait de camoufler l’échec avec des « oh mais vous savez le foot n’est qu’un élément parmi d’autres de notre offre ». Ouais, pas à nous Bertrand. Humiliation suprême, Charles Biétry, ex-directeur des Sports chez Canal viré comme un malpropre en 1998, prenait la tête d’Al-Jazeera Sports France. Belle quenelle glissée à son ex-employeur. Pour sauver la face, et éviter de virer la ribambelle de consultants sportifs qui officient sur Canal — sachant que chaque ex-entraineur de Ligue 1, ou pseudo international français aussi mauvais soient-ils avec un sifflet, un ballon ou un micro peuvent postuler à un poste chez Canal, ça fait un sacré nombre — Méheut a ramassé les miettes en piquant le lot historique de TF1.
Résultats des courses, les soirées Champions League vont coûter un peu plus cher que la Domino’s pizza à 7€99 du mardi soir. Il faudra s’abonner soit à Al-Jazira soit à Canal+ pour se régaler devant les exploits de Benzema et ses copains.
Cette information faisait en fait écho à une précédente brève qui est passée un peu plus inaperçue. La même Al-Jazira s’était offert un petit lot de matchs de Ligue 1 — le championnat français qui nous offre parfois des petits bijoux comme un succulent Dijon – Valenciennes au stade Gaston-Gérard —, et ce pour 90 millions d’euros. Les emplettes des Qatariens font en réalité partie d’un dessein bien plus grand.
Petit rappel : si vous étiez sur une autre planète l’été dernier, le PSG — club de la capitale, éternel prétendant à devenir un « grand d’Europe »  — a été racheté par les mêmes Qatariens via Qatar Sport Investment. L’objectif est donc simple: promouvoir le club et le football français en France mais aussi dans tout le Moyen-Orient par le biais du championnat de France et la Ligue des Champions à laquelle le PSG participera l’année prochaine, sauf cataclysme. Effectivement, le Qatar accueillera sous 45 degrés le Mondial 2022, donc il est urgent de s’y mettre pour essayer d’insuffler la passion du football dans une région pas particulièrement portée sur le ballon, mais prometteuse puisque 65% de la population a moins de 25 ans.
Cependant Al-Jazira ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Plus ambitieux, Al-Jazira Sport pourrait jeter son dévolu sur la retransmission des Euro 2012 (Polo-Ukraine) et 2016 (France) diffusés en règle générale sur TF1 et M6.
Petit à petit, Al-Jazira vient grignoter le peu de sport retransmis gratuitement qui survivait sur les chaines gratuites. La question n’est pas tant de savoir si l’action d’Al-Jazira est légitime étant donné que de tels rachats profitent au football français dans son ensemble, et qu’il est normal que le plus offrant récolte son dû. En effet, le résultat est le même avec Canal+ qu’Al-Jazira : le foot quitte la sphère du gratuit. Que les matches de Ligue des Champions se retrouvent sur les chaines payantes est somme toute la conséquence attendue d’une compétition qui se place dans une logique purement économique ; certains clubs — comme l’Olympique Lyonnais — frisant la banqueroute en cas de non-qualification. Mais que des compétitions comme l’Euro mettant aux prises les équipes nationales du continent échappent peu à peu aux chaines gratuites semble être un dévoiement non souhaitable. Effectivement, le football et le sport en général ne peut se résumer à une affaire de gros sous. La télévision reste aujourd’hui le seul moyen de vivre ensemble — pour un pays — un moment de communion que seul le sport peut nous offrir. Il serait dommage que certains soient privés de ce spectacle parce que certaines chaines auraient failli à leur mission.
 
PAL

Laurent Blanc lors d'une conférence de presse à Paris
Société

« Je crois que bon… »

6 juillet 2010. Boulevard de Grenelle, siège de la Fédération Française de Football.
 
Les journalistes sportifs rapatriés de Johannesbourg sont là pour assister à la première conférence de Laurent Blanc en tant que boss des Bleus. L’ex-Bordelais pénètre dans la salle de presse avec son combo chemisette bleue ciel et pull Lacoste noué autour du cou. La dégaine d’un premier communiant. Forcément on est obligé de se taper un retour ému sur les événements de Knysna et l’épisode du bus. Lolo sue beaucoup et lit clairement ses fiches pour éviter tout raté sur le sujet chaud du moment. Bon… ça commence bien. On a connu entrée en matière plus charismatique.
À l’époque, Blanc traine la figure du sauveur, avec pour seule mission, celle de faire aimer à nouveau ce foutu maillot frappé du coq. Challenge accepted. Il était de toute façon entendu qu’il ne pourrait pas être plus mauvais que son prédécesseur aux gros sourcils. Donc si défi il y a, il est clairement à sa portée.
Pourtant l’état de grâce ne va pas durer bien longtemps ; guère plus que celui du père Mitterrand en 1981. En effet à la mi-avril, Mediapart veut se faire son petit WikiLeaks à la française — toute proportions gardées donc. D’après le journal en ligne, Blanc et ses copains de la FFF voulaient se lancer dans une refonte « bleue Marine » de la formation des jeunes footballeurs. Il était question de privilégier la technique au physique, discriminant de fait, selon la logique toute singulière de Blanc, les « Blacks » qui seraient « grands, costauds, puissants » selon les mots du sélectionneur des Bleus. Ouïe, premier caillou dans les crampons du « Président ».
Ainsi, il va s’avérer difficile de faire aimer une équipe dont les responsables refuseraient des gosses de 13 ans —  les Bleus de demain — sous prétexte qu’ils sont « trop costauds » autrement dit « trop colorés ». Finalement Mister White s’en sort blanc comme neige après la double commission d’enquête commandée par le Ministère des Sports, où on avait sans doute un peu peur de perdre l’homme dit « providentiel ». Allez trouver un entraineur pour reprendre l’Equipe de France à un an de l’Euro…
Le deuxième coup de trique va se jouer à la fin de l’été 2011. Se trouve alors mis en cause Jean-Pierre Bernès, agent de Laurent Blanc et d’une dizaine d’internationaux français. Au cours d’un rassemblement à Clairefontaine, Florent Malouda — qui ne fait pas partie de l’écurie Bernès — se serait plaint de l’omnipotence de l’agent, dénonçant un hypothétique favoritisme de Blanc envers les poulains de JPB. Les premiers suspects sont vite identifiés: Rami et Menez — clients de Bernès — trustent les places de titulaires bien que les deux postes ne manquent pas de concurrence. Lorsque l’on connait la valeur financière de l’étiquette « international français » pour un joueur, on est en droit de s’interroger sur les intentions de l’attelage Bernès-Blanc. Rappelons que Wanderlei Luxemburgo — ex-sélectionneur du Brésil — avait touché des pots de vin d’agents de joueurs contre la distribution de capes internationales.
Alors certes, tout n’est pas noir pour Laurent Blanc. L’EdF va à l’Euro en Polo-Ukraine sans passer par la case « barrages », l’équipe est invaincue depuis 17 matchs — comme celle de Domenech entre 2004 et 2005 d’ailleurs. Mais alors que sa mission était de faire oublier le camouflet sud-africain — symbole d’un foot business individualiste —, Blanc a fait planer les soupçons du racisme et du copinage sur cette même équipe, et sur la Fédération. Au fil des casseroles, le « Président » a fermé sa communication comme Domenech avait pu le faire et semble ainsi perdre son pari de rendre cette équipe accessible et aimée.
 
PAL

Le Calendrier des Dieux du Stade 2010 par François Rousseau
Société

Les Dieux du Stade

Il nous fait rêver, excite notre curiosité, électrise l’atmosphère, érotise le quotidien, met de l’ambiance dans les réunions Tupperware et dans les salles de muscu. Les femmes en sont folles, les hommes jaloux. A quelques semaines du déballage des cadeaux, zoom sur le phénomène du calendrier des Dieux du Stade, qui connait depuis 2004 un succès foudroyant.
Apparu en 2001, le calendrier des Dieux du Stade montre des athlètes, principalement des rugbymen, dans des poses érotiques illustrant chaque mois de l’année. Dès 2004, un DVD du making-off sort en parallèle du calendrier, contribuant à son succès. Cette année, les Dieux du Stade innovent encore, avec la sortie en juin prochain d’un livre du photographe 2010 des Dieux du Stade, Tony Duran, qui montre cette fois les joueurs totalement nus.
Il n’est alors peut-être pas si incongru de se demander : les Dieux du Stade, ode au sport ou ode au corps ?
Dans la société sensible à l’apparence que nous connaissons, les Dieux du Stade apparaissent à la fois comme une adéquation et comme une provocation.
Une adéquation avec les valeurs de jeunesse, de beauté extérieure et de perfection physique véhiculées par une société qui se veut profonde en se montrant superficielle. Et en effet, nul ne peut contester la beauté sans pareille des modèles du calendrier, mis en valeur par des photographes de talent. Les corps ressortent dans toute leur force majestueuse, les muscles salliants, érotisme se conjugue avec virilité pour un cocktail explosif. Dans cette perspective, le calendrier n’est rien de plus qu’une mise en valeur du Corps, pimentée par une pointe de sensualité.
Néanmoins, les Dieux du Stade sonnent aussi comme une provocation dans une société qui, bien que vouant un culte au corps parfait, n’a jamais autant rougi devant sa nudité. Malgré les publicités qui dévoilent les corps, les esprits ont rarement été aussi éloignés de la libération sexuelle des années 1970. Face à cette beauté brute et sans artifice, les regards se baissent, les joues rougissent, et les lèvres esquissent des sourires gênés. On avance l’argument de la plaisanterie pour l’offrir ou se l’acheter. Qui ose dire qu’il aime les Dieux du Stade pour l’esthétisme des photos et la nudité des corps ?
Mais les Dieux du Stade, ce n’est pas que des corps, de la beauté, de l’art, c’est aussi un ballon de rugby, le culte de l’ovalie à l’état pur. C’est un hymne au sport ainsi qu’aux valeurs qu’il véhicule : amitié, solidarité, fidélité, courage, force, l’essence même du rugby. C’est une main tendue vers tous ceux qui revendiquent cette ligne de vie sans pour autant faire du rugby. C’est enfin un cadeau aux amateurs (et surtout aux amatrices), qui peuvent s’enorgueillir d’un sport dont le courage ne se montre pas que sur le terrain, mais encore devant l’objectif. Car au-delà des considérations économiques qu’avanceront certains, il faut un certain courage pour poser ainsi, nu, lascif, abandonné devant l’objectif, en s’exposant ainsi au regard des autres, les nôtres en l’occurrence.
Originalité française, les Dieux du Stade ont de quoi faire parler d’eux. Et encore de quoi nous surprendre. Gageons que cette année sous le sapin, la rugbymania qui a enflammé le pays ces derniers mois n’est pas près de s’éteindre !
 
Julie Escurignan
Crédits Photo : ©François Rousseau/Stade.fr