secret story
Société

Secret story is back !

 
Amateurs de culture télévisuelle, réjouissez-vous : l’émission qui rythme vos étés reprend vendredi. L’occasion de revenir sur la pierre angulaire de la télé réalité qu’est le fameux casting. Eternelle prise de tête des producteurs, c’est lui qui va faire du concept initial un succès fulgurant ou un flop retentissant (R.I.P « le Carré Viiip »). Des candidats pas assez charismatiques ou trop mous et c’est le drame : le téléspectateur vaque à des activités plus productives. Du coup, on cherche désespérément la recette miracle pour créer ce mélange optimal de « personnalités » qui donnera un coup de fouet aux audiences. Le problème, c’est qu’une fois le subtil dosage trouvé, il est usé jusqu’à la corde. Chaque année donc, on prend les mêmes et on recommence. En apparence un seul mot d’ordre : DI-VER-SI-TE des profils. En réalité, on a affaire à une sélection calibrée au millimètre pour toucher à la fois la ménagère, les jeunes, les vieux, la masse et les minorités (et on dit bien TOUTES les minorités : visibles ou non, ethniques ou religieuses, même les chauves ont eu leur candidat l’année dernière en la personne du charismatique Kevin). Vous pensez voir des candidats à l’écran ? Vous avez surtout affaire à des arguments massues, qui visent à prouver que non, la chaine n’est ni homophobe, ni raciste, ni âgiste, ni sexiste, ni même débile. Alors, quel grand cru nous réservent-ils cette année ?  Typologie d’une crétinerie annoncée :
-le vieux :

Il est là pour ratisser une audience un peu plus large. Non ce genre d’émission ne s’adresse pas exclusivement aux 13-17 ans, puisque de charmants trentenaires peuvent y participer !  C’est la touche de maturité censée crédibiliser le show et « vieillir » un peu son image. Le problème ? Le vieux aussi a cinq ans d’âge mental.
-l’hystérique :

Elle crie. Tout le temps, contre tout le monde, du matin au soir. Son rôle est provoquer un sentiment d’antipathie et de montrer en creux que si les autres participants ne sont pas très futés au moins eux sont paisibles. Le téléspectateur peut facilement l’identifier comme la méchante, et dans un huis clos où rien ne se passe, elle permet de relancer l’action au moindre signe de vaisselle mal faite ou de brosse à dent déplacée.
-la victime :

Peut-être l’archétype le plus pervers de ce genre d’émission. La victime, c’est celle que tout le monde déteste et qui a tout le temps les yeux rouges. Mais attention, le but n’est pas de susciter de la compassion : on s’aperçoit très vite qu’elle est encore plus détestée que l’hystérique, par les autres participants comme par le public. Chaque année on assiste donc au même lynchage programmé, notamment sur les réseaux sociaux. Bien pratique, car cette haine facilite la cohésion d’une communauté autour d’un rejet commun.
-le génie :

C’est la caution intello, pour parer aux reproches habituels sur la nature abrutissante du programme. « J’ai passé mon bac à 14 ans », « J’ai un QI d’Einstein », voilà pour la minute culture, et tant pis si au bout de deux semaines le génie en question se balade à poil avec son slip sur la tête.
-la bimbo :

 Elle est la valeur sure de la téléréalité, car elle provoque invariablement les mêmes réactions épidermiques : concupiscence, jalousie et mépris, un cocktail explosif qui fait à tous les coups grimper l’audimat.  C’est elle qui buzz le plus, il lui suffit pour cela d’allier syntaxe approximative et décolletés plongeants.
-le gay :

Là encore, le personnage est au-delà de la caricature. C’est la commère de la maison, il adore Madonna et les Uggs, aucun cliché n’est trop énorme. Paradoxalement son homosexualité n’est jamais évoquée directement de quelque manière que ce soit au cours de l’émission. Peut-être par peur de choquer un public plus « conventionnel » ? Dans tous les cas, ces contradictions révèlent un marketing de niche finalement pas très gay friendly.
Cette année encore on peut parier que les équipes de production reprendront dans les grandes lignes ce schéma de base qui a fait le succès de Secret Story. Il n’est cependant pas exclu que de nouvelles trouvailles soient au programme, histoire de renouveler un concept qui commence à s’essouffler. Les paris sont ouverts !
 
Marine Siguier

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Société

Un passé qui ne passe pas

Le Frankfurter Allegemeine Zeitung a lâché une véritable bombe le 26 avril dernier: Horst Tappert (1923-2008), l’homme qui a incarné pendant un quart de siècle (1974-1998) et 281 épisodes le célèbre inspecteur allemand Derrick, aurait été, en 1943, engagé dans les Waffen-SS.
Quand la banalité du mal se cache derrière celle du bien
Le coup est d’autant plus rude que la série est chargée en symboles. Diffusée dès le début des années 70, elle a contribué à améliorer l’image du pays, marqué par la « banalité du mal », notamment à travers les valeurs incarnées par son personnage clé : un peu terne, conservateur mais honnête et travailleur. Diffusée dans 102 pays, la série illustrait le succès du « made in Germany ».
A l’annonce de la nouvelle, la consternation est grande, particulièrement en Allemagne, où Horst Tappert est une icône télévisuelle. En Bavière, on envisage de lui retirer le titre de « commissaire honoraire de la police bavaroise » qui lui avait été décerné en 1980. Les différentes chaînes de télévision déprogramment les épisodes qu’elles devaient diffuser. « Nous ne voulons pas honorer un acteur qui a menti de cette façon sur son passé », explique le producteur de la chaîne norvégienne Max. Ces décisions suscitent nombre de polémiques.
Entre éthique et politiquement correct
Il ne faut bien sûr pas omettre le devoir de mémoire. Un tel passé ne peut être mis sous silence, et à coup sûr, les habitués de la série auraient désormais porté un autre regard sur leur inspecteur préféré. L’affaire pose en effet un problème d’éthique : peut-on continuer à accepter sur nos écrans un ancien nazi ? D’autant que la série fait face à un paradoxe assez gênant, puisque Derrick se caractérisait par son pacifisme, sa volonté d’éviter l’usage des armes, et sa lutte quotidienne pour la justice. Clin d’œil sadique du nazi, ou marque d’un caractère pacifiste en rédemption ? La réponse est peut-être effrayante… ou non. C’est bien ce qui dérange : on n’en sait rien.
C’est pourquoi les médias et les politiques sont accusés de ne réagir que conformément à la « bien pensance », en tenant le même discours diabolisateur. Le politiquement correct prend (encore) le pas sur l’analyse et la réflexion. Or on est à même de se demander si le passé certes trouble, mais non complètement élucidé, de Horst Tappert justifie cette diabolisation. « Les documents dont nous disposons pour le moment ne permettent pas de comprendre les circonstances de son engagement, ni s’il a été soumis à des pressions au moment de s’engager », explique au Spiegel l’historien Jan Erik Schulte. De fait, la réponse n’est pas simple.
Une polémique née de faits encore flous
Historien spécialiste du nazisme, Guido Knopp estime qu’«on ne doit pas se précipiter pour le clouer au pilori», en rappelant que la Waffen SS était une «troupe criminelle» mais que tous ses soldats n’étaient pas forcément coupables d’exactions. En effet, de grandes zones d’ombre demeurent ; Tappert a-t-il intégré cette division par conviction ou par pressions ? En effet, si jusqu’en 1940, la Waffen-SS est exclusivement constituée de volontaires devant prouver leur filiation aryenne, ce n’est plus aussi vrai trois ans plus tard. Face au manque de troupes, elle renonce à l’engagement volontaire et élargit le recrutement.« La pression pour devenir Waffen-SS était très forte en 1943, surtout sur les jeunes hommes », souligne l’historien allemand.
Pourtant, cette complexité de l’affaire ne transparaît pas dans les médias, au vu des titres de presse de ces derniers jours. La communication est claire : le sujet est tabou. 70 ans après, il effraie toujours, ce qui explique l’ampleur des réactions ; Tappert est un nazi, on l’enterre et on n’en parle plus. La honte d’avoir encensé un nazi pendant des années, de n’avoir rien vu, la peur de ces souvenirs qui hantent encore notre inconscient collectif,… beaucoup de choses expliquent la construction de ce tabou. La prégnance dans les esprits européens d’un passé qui ne passe pas est encore bien visible.
D’ailleurs, cette posture pseudo-éthique oublie non seulement que l’on ne connaît pas toute l’histoire, mais oublie plus largement l’Histoire elle-même en alimentant le portrait manichéen de cette Allemagne du début du siècle : les soldats allemands semblent avoir, aux yeux des journalistes européens, acquis le monopole international de l’horreur. Or il est peut-être dangereux de réduire la barbarie humaine au nazisme.
D’où les interrogations qui entourent l’arrêt des diffusions de Derrick : peut-on aller jusqu’à bannir complètement un acteur et sa série ? Peut-on s’asseoir sur la série, instrument de la réhabilitation d’une Allemagne salie par les crimes du nazisme ? Nier complètement cette deuxième existence de Tappert, celle que l’on connaît le mieux, ne pourra pas, à priori, nous apporter la « rassurance » dont on a encore besoin.
 
Bénédicte Mano

Société

L’émission qui va vous faire aimer la télé-réalité

 
A un mois du lancement de la septième saison de Secret Story, FastNCurious s’intéresse à une émission qui pourrait bien vous faire changer votre regard sur ce genre tant décrié qu’est la télé-réalité.
Et si on parlait social business ?
En matière de télé-réalité, on pensait avoir tout vu. Si, en France, les émissions de télé-réalité sont généralement tout public, d’autres pays n’hésitent pas à utiliser des moyens plus contestables : de la prostitution au cannibalisme en passant par la zoophilie, tout est bon pour faire monter la courbe d’audience[1]. Et les chaînes auraient tort de se priver puisque les spectateurs sont au rendez-vous. L’ambivalence autour de ce genre télévisuel peut se résumer en une phrase : la majorité de la population s’accorde à critiquer la tv réalité et pourtant tout le monde la regarde.
Plutôt que de lutter contre le système, une femme, Anna Eliott a eu l’idée de l’utiliser à des fins plus louables. En 2009, cette jeune américaine crée Bamyan Media. Nouvelle venue dans le milieu de la télé-réalité, Bamyan Media propose une idée simple afin de se différencier de la concurrence : puisque la télé-réalité nous a habitués au pire, pourquoi ne pas s’en servir aujourd’hui pour révéler le meilleur ?
Elle développe ainsi un concept d’émission qui vise à mettre en compétition les entrepreneurs sociaux d’une même nation.
El Mashrou3 : ils n’ont pas d’argent mais ils ont des idées
Ainsi, avant la fin de l’année, l’Egypte connaitra sa première émission de télé-réalité mettant en compétition de jeunes entrepreneurs sociaux et intitulée « El Mashrou3 – The Project ».
Si sur le fond, le concept est innovant, sur la forme, rien ne change. Les recettes qui font le succès d’audience de la télé-réalité sont appliquées à l’identique. Après avoir reçu plus de 900 candidatures, El Mashrou3 présente les initiatives de 14 participants âgés entre 18 et 35 ans. A travers des mises en situation concrètes, ils doivent démonter leur capacité à être de bons entrepreneurs. Chaque semaine, ils devront faire face à un jury qui éliminera l’un d’entre eux. Le gagnant remporte la somme d’argent lui permettant de réaliser son projet. Mais les perdants ne sont pas oubliés. En plus de la formidable couverture médiatique que représente l’émission, chacun d’entre eux repart avec un service l’aidant à mener à bien son entreprise.
Ce type d’émission peut-il marcher ? De toute évidence, la réponse est oui, puisque Bamyan Media n’en est pas à son premier coup médiatique. En 2009, la boîte de productions lance en Afghanistan un projet identique. Résultat : succès inattendu de la saison, l’émission a réussi à rassembler jusqu’à 7 millions de téléspectateurs pour un pays comptant seulement 30 millions d’habitants.
A quand un projet similaire en France ?
 
Angélina Pineau
Sources :
Site de El Mashrou3/The Project
Le trailer de l’émission
Très joli site de la boîte de productions « Bamyan Media »
Article sur El Mashrou3
 

 

[1] A ce sujet, très bon article de Neon Mag « Quand la télé-réalité tombe dans le trash »

Culture

« Real humans »

 
Le 4 avril 2013 sur Arte sera diffusée la série à succès suédoise « Real Humans » (Äkta Människor). Cette œuvre de science-fiction, diffusée pour la première fois en janvier 2012, se déroule en Suède, dans un futur proche, où les hommes cohabitent avec des hubots (androïdes inspirés des modèles actuels japonais). Compagnons utiles et intimes, les hubots prennent peu à peu visage humain, et deviennent capables de ressentir des émotions et d’accomplir des actions malhonnêtes.
En s’attachant au destin d’une famille et de ses hubots, le créateur de la série, Lars Lundström, s’échappe des représentations traditionnelles de la science-fiction pour accentuer la dimension dramatique de l’intrigue. Les scènes sombres, rappelant l’univers silencieux de la série Les Revenants, s’opposent aux décors pastel d’une banlieue futuriste, pour mieux accentuer la division de la société sur la question des hubots. La série se noue autour d’une intrigue avant tout policière, basée sur le quotidien de personnages ordinaires.
Ainsi, leur existence s’intègre parfaitement dans la fiction réaliste permise par l’intimité des foyers. Ce qui interroge le créateur, c’est avant tout le rapport social et les conflits psychologiques entre hubots et humains. Véritable miroir, la machine reproduit les réactions de son propriétaire, se soucie de sa santé et de son bien-être, allant même jusqu’à investir la place d’un amant ou d’une mère. Mais cette fonction de compagnonnage trouve ses limites dans le regard d’une partie de la société, qui fait front contre cette mixité dérangeante. Dénonçant les rapports amoureux et sexuels avec les hubots, les déviances du marché noir qui en fait d’idéales prostituées tout comme les couples affichés, « Real Humans » s’apparente aux groupes d’extrême droite. Ici, les parallèles avec notre société sont constants.
Real Humans est donc un excellent hybride des films de science-fiction, tel qu’ Intelligence Artificielle de Spielberg. Il s’agit de reproduire par la fiction les angoisses et les travers de la société. Derrière le masque grossier des hubots, se cache la sempiternelle interrogation : l’homme est-il bon ? Pourtant, là où True Blood accentue les vices et les imperfections, Real Humans semble hésiter. Le malaise grandit à mesure que le doute s’installe quant au rôle du hubot dans la société. L’homme doit-il aimer sa créature ou en avoir peur ? D’ailleurs, le sous-titre de la série, « Qu’avons-nous encore fabriqué ? » nous rappelle l’idée d’une science babélienne qui s’acharne à dépasser le divin. Ce thème de prédilection se retrouve dans la pensée de Mary Shelley avec Frankenstein ou le Prométhée moderne, où elle reproduit entre l’homme et sa machine l’idée du Créateur. Ce rapport conflictuel nourrit toute une mythologie parfaitement distillée dans la série, à l’image de la réponse d’un hubot sur la question de son origine : « Nous venons de vous, de votre imagination ».
En effet, l’étrangeté des hubots, avec leurs yeux bleus électriques et leurs visages lisses, est révélée dès les premières secondes de la série, lorsqu’ un groupe de hubots libres cherche à fuir la destruction. Dotés d’une conscience, d’opinions et d’initiatives, cette bande incarne l’innovation à son extrême, l’homme-machine parfait.
Cette hypothèse s’inscrit dans la continuité du mécanisme de Descartes et traverse les imaginaires collectifs depuis les premiers automates jusqu’aux avancés de l’électronique avec le courant cybernétique de l’après-guerre.
Aujourd’hui, le robot intrigue toujours, comme le prouve l’exposition achevée début mars au Musée des Arts et Métiers : Et l’Homme…créa le robot[1]. On pouvait y découvrir les progrès des robots chirurgiens, des prothèses nouvelle génération et s’interroger sur le robot de demain. Tout nous indique que le futur proche de Real Humans pourrait être le nôtre, et c’est sur cette vraisemblance que se joue l’intrigue. Proche de l’angoisse de la série Les Revenants[2], Arte développe à l’instar de Canal+, la dimension transmédia qui nourrit le succès attendu de la série. Ainsi, vous pouvez découvrir sur le site[3], dès la diffusion du premier épisode, le 4 avril 2013, le Hubot Market dans lequel il est possible de constituer son propre robot et de le partager sur les réseaux sociaux.
 Clémentine Malgras

 

[1] Le site de l’exposition :

[2] Lien vers le dossier Fast’NCurious consacré aux Revenants : http://fastncurious.fr/category/edito/dossiers

[3] Le site de la série Arte : http://www.arte.tv/fr/real-humans-100-humain/7364810.html

 

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Société

Jacques a dit : « Nan mais allo quoi » ?

 
Si vous êtes un être humain âgé de 3 à 133 ans, vous en avez forcément entendu parler. Pour les autres, voici la chose :

 C’est LA vidéo qui fait le buzz depuis plusieurs semaines, mettant en scène Nabila, personnage phare des Anges de la téléréalité, en pleine réflexion métaphysique. Ce n’est certes pas la première phrase aberrante et grammaticalement incorrecte lancée par un candidat du télécrochet. Ce qui est plus étonnant c’est la rapidité avec laquelle elle a été diffusée par un certain nombre de relais culturels, à la base assez éloignés les uns des autres, jusqu’à atterrir  dans la bouche de votre propre grand-père en plein déjeuner familial (véridique !). Genèse de la démocratisation d’une phrase culte.
 
Réflexivité de la culture beauf
Clarifions d’emblée la situation : les candidats de la téléréalité sont rarement des lumières, mais pas non plus bêtes à ce point. Dans Les Anges comme ailleurs, on force le trait des caractères, et notre Nabila se retrouve priée de faire des réflexions en adéquation avec son corps de bimbo. Vertigineuse mise en abyme où des gens un peu crétins doivent faire semblant de l’être encore plus pour satisfaire une audience qui veut se sentir intelligente. Ou l’application scrupuleuse de la théorie de la négativité mise au point par le pape de la téléréalité John de Mol : l’idée est de de montrer la lie de l’humanité pour flatter les bas instincts du spectateur.
Cependant si grâce à ce génial concept ces émissions sont massivement regardées elles restent taboues, la règle d’or étant de ne jamais en parler en société, du moins au premier degré. On se retrouve donc face à un phénomène assez paradoxal, à la fois très populaire et extrêmement confidentiel. Donc même si une grande partie de la France a été ravagée par la rupture de Samir et Aurélie, on évite quand même d’en parler dans le métro le matin.
Alors comment expliquer ce qui passe au travers du filtre social ? La « bogossitude » de Vendetta dans La Ferme Célébrités, le « ça va Senna ça va ! » d’Amélie dans Secret story, ou les ébats de Charles-Edouard et Loana dans la piscine du Loft pour les ancêtres sont désormais mythiques et font partie de l’imaginaire collectif. Ces références peuvent être évoquées ouvertement et comprises par énormément de personnes aux profils socioculturels pas forcément proches de celui du fan lambda. La téléréalité touche ainsi indirectement une nouvelle cible, et cette popularisation passe par un angle original : l’ironie. Elle permet d’instaurer une certaine distance avec ce qu’on regarde, autorise le divertissement sans passer par une adhésion, perçue comme humiliante. Ce qui explique que beaucoup y voient un moyen d’évoquer sans complexe les temps forts de certains épisodes dans l’espace public, notamment sur internet.
 
Le relais geek
La multiplication des références à la téléréalité sur le web et principalement dans les réseaux sociaux contribue à donner au genre ses lettres de noblesse. Le second degré, Saint Graal des communautés de l’internet, permet de revaloriser et de moderniser l’objet télévisuel. Dans le cas Nabila on a vu fleurir des parodies faisant référence à un certain nombre de codes culturels estampillés « geek » :
Version Hitler

Version Seigneur des anneaux

Nabila et Cloclo
 
Et pour finir, la parodie de parodie, ou la collision de deux cultures différentes : l’émission elle-même devient second degré en s’appropriant les codes de la contre-culture du net

Ces reprises et beaucoup d’autres se sont répandues de façon virale sur les réseaux sociaux, démocratisant massivement les aventures de Nabila et consorts, en y apposant le label « humour décalé ». Cette deuxième étape attire alors l’attention des médias de masse plus « traditionnels », et l’ « effet Nabila » se fait ressentir jusque dans des sphères très éloignées de la cible première de l’émission.
 
Passage au mainstream
Les médias de flux se mettent à parler eux aussi de cette histoire de shampoing. Mais de la même manière que la vidéo a été parodiée pour s’adapter aux valeurs du net,  elle est ici reformatée par le décryptage. Des émissions cataloguées plutôt bobo se proposent non pas (jamais ô grand jamais) de relayer telle quelle une émission populaire issue des limbes de la TNT, mais d’analyser un phénomène quasi-sociologique. L’honneur est sauf. C’est donc auréolés d’une crédibilité journalistique intacte qu’Audrey Pulvar, Alexandra Sublet, ou Yann Barthès se mettent eux aussi à utiliser leur main comme combiné pour tenter d’expliquer les raisons du buzz national.
La preuve en vidéo

C’est ainsi que la boucle est bouclée : le désormais célébrissime « Non mais allo quoi ? » repasse par la télévision qui l’a vu naitre, en empruntant cette fois les chaines les plus regardées, aux heures de grande écoute qui plus est. On n’est pas passé loin du JT de France 2. L’audience la moins connectée et donc généralement  la moins susceptible  d’être touchée par ces engouements éphémères est ici frappée de plein fouet.
Moralité : le dialogue entre les médias renforce le buzz. Chaque support s’approprie la vidéo en y injectant les valeurs qui lui sont propres, et mobilise ainsi sa communauté attitrée. On se retrouve donc face à une diversité des contenus médiatiques de plus en plus importante, où des évènements au départ condamnés à circuler au sein d’un cercle restreint d’initiés se retrouvent un bref moment sous le feu des projecteurs. Pour le meilleur et pour le pire.
 
Marine Siguier

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Société

Ils sont forts ces British !

Il paraît que la télévision, toujours plus énervée par la concurrence d’Internet, redouble d’efforts pour rivaliser et attirer davantage d’annonceurs. La rumeur court depuis que BSkyB, l’opérateur de télévision par satellite britannique, a fait le pari de relancer les publicités locales. Très répandues dans les années 1970 au cinéma (pour un restaurant asiatique du quartier par exemple), BSkyB compte les remettre à jour sur le petit écran.
Le retour de la publicité personnalisée
Mais d’abord, comment cela fonctionnerait-il exactement ? Sky reste assez flou sur ce point. Il prévoit le lancement d’un nouveau service dans quelques mois nommé « AdSmart ». Celui-ci proposerait plusieurs « gammes de solutions pour répondre aux besoins des marques », comme l’énonce Andrew Griffith, le directeur financier de Sky. Or pour les annonceurs, l’enjeu est de taille. Il s’agit pour eux de s’adresser directement aux foyers désirés en fonction de leur composition, de leur localisation ou de leurs programmes favoris. BSkyB entend aller très loin en leur permettant de diffuser leurs publicités dans des zones géographiques précises, voire dans quelques maisons ciblées dans une rue donnée.
Mais encore ?
Andrew Griffith explique aussi : « on pourrait par exemple réserver les cinq dernières secondes d’une publicité automobile à un concessionnaire local, ou bien proposer plusieurs variantes pour une case publicitaire. » En fait, « AdSmart » sera disponible sur les 7,3 millions de décodeurs haute-définition de l’opérateur dans des foyers en Grande Bretagne. Ainsi la chaîne diffusera ces spots personnalisés par-dessus les spots dits « linéaires » de façon fluide pour les téléspectateurs qui n’auront pas désactivé cette nouvelle fonction sur leur boîtier. Quant à la segmentation des foyers, l’équipe de Sky serait aidée par des entreprises spécialisées dans la gestion du risque de crédit, en bons connaisseurs des revenus et des modes de vie des consommateurs.
Jackpot pour Sky qui pense attirer non seulement les annonceurs locaux mais aussi les plus grandes marques. Ces dernières pourraient voir dans ce système un moyen de diminuer les pertes liées aux campagnes publicitaires classiques. Comme le souligne Anthony Ireson, directeur marketing de Ford en Grande Bretagne, « la moitié de notre travail est gâché. La publicité personnalisée est un moyen de cibler les gens à qui vous avez besoin de parler. » Ainsi, le Financial Times estime même que des marques haut de gamme comme Porsche qui ont toujours laissé de côté la télévision car trop « grand public », pourraient être attirées par une telle approche.
Cependant, le prix n’a pas encore été déterminé. Un ciblage plus précis devrait être plus cher, mais Sky prendrait alors le risque de faire reculer les annonceurs locaux censés être les principaux intéressés.
Une réponse au défi numérique
Apparemment, le projet a déjà été tenté aux Etats Unis par les chaînes ComCast et Time Warner Cable en 2008 sous le nom de Canoe Project. Si aujourd’hui leur offre a évolué principalement vers des vidéos diffusées en différé (et non en direct comme le souhaite BSkyB), l’idée de départ était d’adapter les outils de personnalisation d’Internet à la télévision. BSkyB espère même exploiter les comportements des foyers sur le web. Les mots clefs tapés dans les fameuses barres de recherche génèrent bien des publicités ciblées sur Internet. Pourquoi ne pas imaginer diffuser des publicités sur les chaînes de télévision à propos de prêts hypothécaires dans une famille qui en aurait fait la recherche sur le net ? C’est en tout cas ce qu’argumente l’opérateur. Mais ils oublient les bonnes vieilles interrogations sur le respect de la vie privée des internautes et des consommateurs, encore et toujours présentes et prégnantes. Le cas BSkyB n’est pas sans rappeler celui de l’EyeSee ou celui des chaînes françaises utilisant les données personnelles. L’opérateur entend de plus personnaliser les annonces en fonction des goûts des familles, détectés à partir de leurs habitudes télévisuelles. On se demande alors s’ils pourront déjà aller jusque là.
Effectivement, il semble que le projet de BSkyB soit (un peu trop) ambitieux. L’opérateur de télévision par satellite se perd dans les promesses. Il est aussi envisagé de créer un service de publicités interactives (le spectateur pourrait par exemple appuyer sur un bouton et « visiter » la voiture aperçue), alors que les questions de prix et de vie privée ont à peine été soulevées. Or, rappelons le contexte économique et social dans lequel nous nous trouvons. La diminution des budgets des annonceurs et la méfiance croissante des consommateurs envers les entreprises et les publicités sont des obstacles à intégrer dans leur stratégie. On attend la suite !
Camille Sohier
Source : article du Financial Times « La télé vous regarde » sélectionné par le Courrier International.

Culture

Splash, comme un cheveu sur la soupe

Un vrai faux flop ?
Retour sur une émission qui a agité le monde médiatique et suscité moult réactions dans l’opinion publique : Splash. Un concept « nouveau » : des valeurs, des vedettes, du spectacle, du vrai, du naturel… La promotion de l’émission depuis fin janvier n’est pas passée inaperçue. TF1 a lancé en grande pompe sa nouvelle émission du vendredi soir importée des Pays Bas. Les journalistes ont été intransigeants, en partie dépités, les blogueurs se sont manifestés, les twittos aussi, à leur façon, Jean-Marc Morandini a décrypté… Bref tout le monde en a parlé et tout le monde en a entendu parlé. Un nuage médiatique s’est formé avant le lancement de l’émission et s’est transformé en orage pendant sa diffusion. Un orage plutôt avantageux, c’est en effet grâce à lui que l’émission est tout de même restée au-dessus de la barre des 5 millions de téléspectateurs. Une orchestration parfaite plus qu’un buzz naturel.

Plus de mal que de peur ?
Si le fond de l’émission autant que la forme, ont suscité l’émoi des téléspectateurs et des professionnels, on peut s’interroger sur l’avenir de cette recette : une émission de divertissement qui se situe à la croisée des mondes, entre différents genres télévisuels. Elle parvient à s’imposer le vendredi en prime time sur la première chaîne grâce à l’orchestration totale de son lancement à sa production en passant par sa réception. Combien de temps encore va-t-on continuer à critiquer, à juger des émissions sans se rendre compte que l’on participe à leurs déploiements ? Il ne s’agit en aucun cas d’un jugement des téléspectateurs, chacun se divertit comme il l’entend, tant qu’il en est conscient. Pour aborder la question de l’enjeu de ce type d’émission il faut accorder au média télévisuel un certain pouvoir sur les individus.
Splash, parmi tant d’autres, c’est une adaptation du fond et de la forme pour trouver la recette miracle du succès coûte que coûte. On ne se situe pas vraiment dans la télé-réalité, trop télé-poubelle, mais on prône des valeurs humaines, tel que le dépassement de soi, comme justification de l’existence de l’émission et de la participation des « vedettes ». Un peu comme dans une autre émission elle aussi diffusée le vendredi soir, Koh Lanta, là aussi Denis Brogniart avait bien précisé qu’il ne voulait pas qu’on parle de télé-réalité… Splash, du divertissement pur et dur alors, mais qui sait mêler différents codes sans les rendre trop visibles, mais sans les nier complètement non plus.
Sur la forme, TF1 réussit encore un tour de maître, effet de buzz bien orchestré avant et pendant l’émission qui contribue à son succès, à le déclencher même. Un peu comme ça avait été le cas pour The Voice : le nuage formé par les critiques, les détracteurs, tout cela joue en faveur de la chaîne. Commentaires sur commentaires, critiques, débats, rumeurs : tant qu’on en parle on s’assure le succès. Si on voulait vraiment faire disparaître un programme on ne pourrait qu’opter pour l’abstention et l’ignorance, la meilleure des armes. Et c’est ce qui finira irrémédiablement par arriver, les téléspectateurs ne se laissent pas berner indéfiniment.
Le divertissement certes, et sur TF1 d’accord, mais avec une telle recette qui assure à la chaîne succès et rentabilité, tout devient possible. « Le concours des meilleurs tailleurs de haies ? », « Qui veut tondre ma pelouse ? », « Conduite avec les stars, les stars repassent leur permis ? »… La télévision, publique comme privée, n’a-t-elle pas aujourd’hui plus que jamais une responsabilité ? Si le divertissement doit rester rentable et libre dans sa composition, le média lui-même ne devrait pas faire le sourd quant à sa responsabilité sociale. On a su mettre un point d’honneur à ce que les entreprises assument leur responsabilité sociale et environnementale, ici elle prend peut-être un sens un peu différent, mais la télévision ne pourra pas continuer de passer à côté pendant longtemps.

Margot Franquet
Sources :
François Jost, « « Splash » sur TF1 : sous son apparente vacuité, une émission calibrée pour le succès », Le Plus Nouvel Obs
Nathalie Nadaud-Albertini, « « Splash » sur TF1 : pourquoi c’est un bon concept », Le Plus Nouvel Obs
L’express.fr
My TF1 Replay, Splash le grand plongeon

Publicité et marketing

Les comédiens hors des planches : la promotion spectacle

 
Introduction
Sur les planches, ce sont les rois du rire et de l’improvisation. En dehors, les cartes sont redistribuées et le contrat de communication, instauré entre l’humoriste et son public, est ébranlé. Dans la tête du téléspectateur, de l’auditeur,  les humoristes sont toujours drôles. C’est d’ailleurs cette caractéristique qui pousse les producteurs à les inviter sur différents plateaux de télévision.
Pour assurer la promotion de leur spectacle à la télévision,  les comédiens français bénéficient de cadres d’énonciation  télévisuels – divertissement pur, émissions d’actualité et d’information, «infotainment». L’enjeu est de maîtriser le contrat de communication en fonction de l’environnement médiatique et du public visé par l’émission, généralement populaire. Plus facile à dire qu’à faire.
 
De « Vendredi tout est permis » à « Vivement Dimanche » : du rire et encore du rire !  
Les émissions de divertissement proposent aux comédiens une situation de communication rattachée à leur univers qui rappelle la salle de spectacle. Il n’y a pas de décalage sémiotique entre un plateau de télé orienté vers le divertissement et la mise en scène de plusieurs humoristes sur ce même plateau. Ainsi,  les comédiens peuvent montrer qu’ils sont toujours drôles, qu’ils savent improviser selon les situations et qu’ils s’insèrent parfaitement dans la programmation télévisuelle du téléspectateur.
Néanmoins,  le contrat de communication est parfois volontairement flouté. La promotion du divertissement est de moins en moins assumée et les formes de communication se dépublicitarisent en s’insérant dans le divertissement.  Le 17 janvier 2011, Michel Drucker reçoit Jamel Debbouze dans « Vivement Dimanche », l’occasion pour Malik Bentalha, poulain de Jamel Debbouze, de faire une de ses premières interventions à la télé pour la promotion de son spectacle « Malik se la raconte » :
Michel Drucker : « Qu’est-ce tu peux dire pour te présenter ? »
Malik Bentalha : « Je m’appelle Malik Bentalha. J’ai 21 ans. En général, les gens disent que j’fais plus gros. »
(Rire)
Ici, la réplique provient du spectacle mais entre dans une logique de fausse improvisation  qui prend le public en otage en ne lui laissant que deux choix : rire parce que c’est drôle ou rire parce que ça le met mal à l’aise.

« Vendredi tout est permis », la nouvelle émission d’Arthur constitue l’environnement parfait pour montrer le potentiel comique de l’artiste. Dans l’émission du vendredi 8 février 2013, Arthur appelle Rachid Badouri pour effectuer quelques pas de danse sur Michael Jackson avant de lancer : « Faut aller voir le spectacle de Rachid parce que non seulement tu danses mais tu as un sketch sur Michael Jackson ! », ce qui permet à Badouri de placer une réplique de son show : « Je voulais même devenir blanc, j’étais jaune et je voulais devenir blanc. » Lors des émissions de ce type en prime time,  la promotion des artistes tend à devenir son propre objet et à créer une émission multi-promotionnelle, parasitée par une publicité incessante qui participe du divertissement populaire.
 
 
Les humoristes prennent la parole dans le débat public : rien qu’une histoire de casquette !
Être humoriste reste un métier à temps partiel, on ne peut pas être drôle tout le temps. Les humoristes prennent de plus en plus de poids dans le débat public, surtout depuis la dernière campagne présidentielle de 2012. Selon un sondage Ipsos, publié en automne dernier, les humoristes gagnent en crédibilité car ils sont perçus comme « hors-système » et donc dignes de confiance. À travers leur prise de parole hors-scène, les humoristes deviennent de véritables leaders d’opinion et influencent de plus en plus leur public, à l’image de Guy Bedos, Stéphane Guillon ou  encore Jamel Debbouze. Le 21 novembre 2011, Guy Bedos, humoriste, est invité dans l’émission de Laurent Ruquier « On n’est pas couché » pour parler de son nouveau spectacle. Pourtant,  la conversation  tourne dès le début à l’affrontement  entre E. Zemmour et G. Bedos sur la question du logement. Parler du spectacle devient ensuite difficile car la casquette de Bedos n’est plus celle de l’humoriste mais celle du militant social.

Il en va de même pour les présentateurs ou sportifs qui se reconvertissent dans le one-man show.  Arthur n’était jadis qu’un présentateur ordinaire du PAF,  jusqu’en 2005 où il passe de l’autre côté de la barrière en montant son one-man show « Arthur en vrai ». Résultat: Arthur présente ses émissions de télévision avec plus d’humour pour inciter son public à le suivre en salle. L’actualité de l’artiste détermine son mode d’expression et son rapport avec le public, ce dernier subissant, malgré lui, la promotion d’une actualité brûlante.
 
Steven Clerima

Société

Le Vendée Globe ou l’écriture épique du Grand large

 
Le 10 novembre dernier, les vingt skippeurs au départ de la course du Vendée Globe nous avaient embarqués dans une rêverie collective que l’exploit de François Gabart, le vainqueur, a transformée en fantasme national.
 
Ces héros qui communiquent : la fabrique de mythes
Le périple de ces Conquistadores contemporains, aux compétences techniques et informatiques incroyables, a fasciné un demi-million de passionnés rassemblés sur la course en ligne Virtual Regata, mobilisé plus de 900 000 personnes au Sables-d’Olonne  venues acclamer leurs champions, généré plus de 650 000 ouvertures de session de lecture sur le flux vidéo du site officiel de la course à l’arrivée du vainqueur le 27 janvier.
Pour cette nouvelle édition, chacun des bateaux avait embarqué une caméra, ce qui a profondément renforcé l’intérêt pour cette course, permettant un flux d’images ininterrompu.  « Probablement que l’image est la nouvelle écriture du large. »  explique Kito de Pavant (Groupe Bel, abandon quelques heures après le départ). Au travers de résumés quotidiens, on a assisté lors de cette édition du Vendée à une véritable sérialisation du temps  réel. « Il semble que la voile, ou du moins le Vendée Globe, soit définitivement rentrée dans un processus de « sportification ». Ce barbarisme désigne ces sports qui ne l’étaient pas complètement, mais le sont devenus et sont totalement intégrés à la culture de la webcam et des réseaux sociaux» avance Cardon, sociologue et spécialiste des images. Le récit du large nous est désormais livré bien avant que les marins reviennent à terre, un virement de bord à la fois progressif et  incroyable pour ceux qui, avant, attendaient au ponton le récit d’une épopée inédite délivrée par les navigateurs, seuls détenteurs des péripéties de leurs traversées.
 
La parole suspendue
« Le silence est la condition de la parole. » écrivait le philosophe JB Pontalis. L’image, comme la performance, parle d’elle-même sans que le marin ait besoin d’en évoquer les contours. Le récit du large serait voué au romanesque et à la rhétorique de la parole suspendue. Suspendre le temps du discours comme pour laisser vibrer les rafales de vent dans les voiles et les vagues sur la coque. L’indicible du large suggérait- il que la rationalité de la parole doive céder le pas à la poésie de l’image? Ou au contraire, l’image « prêt-à-consommer » dissout-elle le mythe et la dimension romanesque de l’écrit ? Peut-on faire confiance à ce récit imagé, livré et produit par le héros lui-même ? La construction du mythe, issue de la fabrique audiovisuelle, ne serait qu’une illusion, dans la mesure  où « le marin donne à voir ce qui peut nourrir la couverture de la course. Mais il peut aussi en cacher une partie », sourit Kito de Pavant. En effet, suivant de près la stratégie de son mentor Michel Desjoyeaux, Gabart a préféré ne pas révéler le problème technique qu’il a rencontré dès le début de la course avec la pompe à injection de son hydrogénérateur de secours, une turbine permettant de faire de l’électricité avec le déplacement de l’eau et du bateau.
 
La Paris-matchisation des vainqueurs : une rafale médiatique inédite
Cette édition du Vendée Globe aura été la plus rapide (78j 02h 16min) mais également la plus couverte par la presse qui s’est appliquée à construire cette admiration que suscitent les marins du Vendée Globe. Le philosophe Laurent de Sutter expliquait dans Libération : « L’admiration est une étrange émotion. Elle consiste à ressentir comme un bien le fait qu’il y ait  plus grand que soi. (…) Puisque nos héros, dans le cas des stars, nous semblent de plus en plus fabriqués, nous préférons nous tourner vers ceux qui restent, à nos yeux, porteur d’une aura d’authenticité. » Mais quand bien même nos derniers héros seraient ces marins à l’allure authentique, il semblerait que cette édition aurait également annoncé le processus irrémédiable de « peopolisation », ou de « paris-matchisation » de ces figures mythiques. En témoigne le numéro hebdomadaire de Paris-Match du 30 janvier, où figure en couverture la famille Gabart enfin réunie avec François, Henriette et Hugo (tel Ulysse, Pénélope et Télémaque) sous le titre «  Le Petit Prince des Océans ».
Pour poursuivre sur cette vague homérique, voici comment la présentatrice de France 2, Catherine Ceylac, accueillit Gabart et Le Cléac’h (dauphin du Vendée) sur le plateau de Thé ou Café le 9 février dernier :
« Nous avons deux invités, alors vraiment des invités, euh très performants. Ce sont des héros. Vous en avez entendu parler, nécessairement, vous les avez déjà peut-être vu, déjà entendu, mais je pense qu’ils vont nous dire des choses différentes. Ce sont nos héros du Vendée Globe : c’est François Gabart et Armel Le Cléac’h. (…) et je me suis dit en le voyant (Gabart) dans les coulisses, en fait, il est normal le garçon! On imaginait un surhomme, 2,20m, 100kg. »
 La présentatrice entendait peut-être par « dire des choses différentes » des révélations sur la libido des deux marins durant la course quand elle leur a posé sobrement la question « Pratiquez-vous l’onanisme en mer ? », qu’elle a dû traduire de façon plus explicite aux jeunes hommes qui ne comprenaient pas le terme biblique employé pour parler de masturbation. On peut se demander si cette question a véritablement sa place sur une chaîne du service public et plus encore dans un média généraliste de masse.
Cette médiatisation s’éloigne du personnage silencieux, rugueux, de la figure littéraire, comme avait pu l’incarner Tabarly et comme l’incarne toujours Francis Joyon (qui avait été victime d’un accident en mer suite à son refus d’accoster à Brest à son arrivée de la traversée de l’Atlantique pour éviter les journalistes et les fans). Ces jeunes navigateurs, charismatiques et hypercommuniquants, ont dû affronter des océans déchaînés et des tempêtes indomptables. Mais c’est en passant la ligne d’arrivée qu’ils se seront confrontés à la plus redoutable des intempéries : la rafale médiatique.
Pendant ce temps, les retombées médiatiques de cette Odyssée ont été évaluées à près de 145 millions d’euros. Double performance : sportive et médiatique ; qui devient ainsi mythique.
 
Margaux. Le Joubioux – envoyée très spéciale  du Celsa Voile aux Sables-d’Olonne.
                    
Le Celsa voile est l’association de voile du Celsa qui rassemble une quinzaine d’étudiants engagés dans la 45eme édition de la Course Croisière EDHEC. Cet évènement sportif étudiant se déroulera à Brest en Avril, et sera l’occasion de porter les couleurs et les valeurs de leur école sur l’eau, aux manœuvres d’un Dufour 34, ainsi qu’à terre lors de tournois sportifs. Si vous souhaitez soutenir le Celsa Voile, n’hésitez pas à rejoindre l’équipe sur Facebook et à nous contacter par mail celsa.voile@gmail.com
 
 
Sources :
-Libération- articles du journaliste sportif Jean Louis Le Touzet
– Emission du Thé ou Café sur France 2
– Le site officiel du Vendée Globe
 

Culture

ZOMBIES 2.0

 
Aujourd’hui, Elsa Couteiller, Léo Fauvel et Noémie Sanquer nous proposent une analyse de la stratégie média mise en place par Canal+. Si la chaîne cryptée a réussi à mettre en place une stratégie de bouche à oreille, il est dommage que Canal+ n’ait pas prolongé de manière plus efficace la série sur Internet. Ce modèle américain de communication n’a pas été mené jusqu’au bout, entraînant une certaine déception chez des téléspectateurs habitués.
 
Les Revenants, zombies qui font le buzz
Le fameux bouche à oreille aura bien fonctionné pour Les Revenants. Plus grand succès de toutes les créations originales de Canal+, les abonnés de la chaîne ont su faire partager leur engouement pour cette série et ses  zombies d’un nouveau genre.
Le coffret de la Saison 1 a donc dû être déposé sous de nombreux sapins ce Noël.  Les abonnés de Canal+ voulant faire découvrir aux non abonnés cet ovni télévisuel.
Le buzz a été fondé sur la qualité-même de la série. Considérons ici le buzz comme le fait de faire parler d’un produit avant même son lancement, en entretenant un bouche à oreille savamment orchestré et des actions ciblées auprès des leaders d’opinions (ici, les journalistes).
Ceux-ci, dès le 17 octobre, ont pu, pour les plus chanceux, visionner jusqu’à 6 épisodes en avant-première. En sont ressortis de nombreux articles élogieux qui ont mis l’eau à la bouche des téléspectateurs. La saison 1 des Revenants était annoncée comme l’événement télévisuel de l’automne.
Un site internet interactif () a également été mis en place en amont de la diffusion du premier épisode de la série. Il avait pour objectif  de faire découvrir les personnages et l’atmosphère si  particulière de la série.
En outre, Twitter a su se rendre vite indispensable aux personnes qui ont suivi Les Revenants, et ce, au travers du hashtag #LesRevenants.  Au-delà des live tweets qui ont été organisés lors de chaque diffusion d’un nouvel épisode, Twitter est devenu le rendez-vous incontournable pour les tweetos ayant adhéré à la série.
Ce n’est pas étonnant étant donné que Twitter privilégie l’émotion à travers le caractère instantané du mode de communication. En tout, ce sont presque 22.000 tweets qui ont été échangés pendant toute la première saison des Revenants.
La série laisse le téléspectateur à la fin de chaque épisode avec son lot de questions restées sans réponse. Les Revenants ont réussi, pour cette première saison, le coup de maître de faire revenir  les abonnés à la même heure chaque lundi soir. Au vu du succès, on oserait presque parler de « télévision cérémonielle »  en référence à l’analyse de Daniel Dayan et de Elihu Katz dans La télévision cérémonielle : Anthropologie et histoire en direct.
La cérémonie se prolongeait souvent sur Twitter et sur la fan page de Facebook de la série. Deux lieux où les téléspectateurs pouvaient exposer leurs différentes théories et s’aider mutuellement en tentant de dissiper le mystère.
La fan page enregistre le lundi 7 janvier 2013, plus de 28.000 « J’aime ». La série, depuis son lancement le 26 novembre 2012, n’a cessé d’accueillir les questionnements et les félicitations des téléspectateurs, enjoués après chaque épisode.
Canal+ tenait ainsi les téléspectateurs en suspense et cela jusqu’à la diffusion du dernier épisode de la série le 17 décembre dernier. Et là, changement de ton perceptible chez les fans. La déception pouvait se lire dans leurs messages, que cela soit sur Facebook ou sur Twitter. La frustration était trop forte.
Un retour de flamme pour Les Revenants qui pourrait avoir un impact sur le succès de la saison 2 actuellement en cours d’écriture.
 
Les Revenants – Aspect Transmédia
 

Trois semaines (et un certain nombre de festivités hivernales) après la diffusion de l’épisode 8, les critiques fusent encore sur la fin décevante de la première saison. Gageons cependant que cette note sombre ne sera pas particulièrement préjudiciable à l’accueil de la saison 2, tant l’engouement initial avait été impressionnant mais aussi constant – l’audience n’a pas quitté les alentours des 1,4 millions de téléspectateurs, un chiffre impressionnant sur l’ensemble des abonnés de Canal+.
Tout cela étant dit, il ne s’agit pas ici de prophétiser sur les succès futurs des Revenants, mais de soulever une question : la réaction des publics avait-elle été prise en compte dans l’accompagnement de la série ? La couverture transmédia était assez maigre, n’incluant que le site interactif et ses quelques indices, ainsi bien sûr que l’intense mise en valeur de ces derniers sur les réseaux sociaux.

Les indices, donc. Tous n’étaient visibles sur http://lesrevenants.canalplus.fr que durant le temps de diffusion d’un ou deux épisodes, afin bien sûr d’entretenir une certaine dynamique de la part des visiteurs. Leur contenu, pour sa part, était résolument ancré sur les personnages – et particulièrement les revenants. Seul le dernier indice, une coupure de journal associée à l’épisode 8, tendait à donner des informations sibyllines sur l’univers plus général de la série. Et c’est là un choix surprenant.
Canal+, tout comme le réalisateur et scénariste Fabrice Gobert (voir son interview ici) avaient évidemment prévu le risque de laisser le spectateur sur sa faim. D’un point de vue scénaristique, l’idée restait de développer l’univers à mesure que les personnages le découvraient, et sans donner trop de clés au spectateur. La comparaison qui vient immédiatement en tête est alors Lost, au genre également fantastique et championne des révélations qui n’en sont pas. Mais justement, l’accompagnement transmédia était dans ce cas résolument tourné vers la création d’un univers, et d’une mythologie très riche, sur l’île elle-même au moins autant (si ce n’est plus) que sur l’histoire des personnages. Résultat : 6 saisons de cliffhangers à répétition, et un succès qui en fait encore aujourd’hui un cas d’école.

L’erreur (si c’en est une) des Revenants a peut-être été de ne pas puiser dans ce type de méthode, et de garder une interactivité squelettique et trop fidèle à l’esprit de la série elle-même : c’est-à-dire une histoire cohérente et révélée par petits morceaux, là où Lost marchait à coups de rebondissements sans réel fil conducteur. Rappelons d’ailleurs que The Spiral, le très ambitieux projet transmédia d’Arte, avait été diffusé à peine deux mois auparavant, créant un précédent majeur en matière d’accompagnement de séries françaises (même si nous parlons ici d’un projet proprement européen).
Reste peut-être que contrairement à The Spiral, la série Les Revenants devait composer avec un genre fantastique qui n’est pas exactement commun parmi les productions Canal+, et françaises en général. Les publics habitués à The Walking Dead et autres Twin Peaks n’étaient pas forcément ouverts à cette initiative de suspense « à la française », qui servait de lourd argument de vente à la série mais devait définir un contrat de lecture d’un genre nouveau. L‘opportunité était sans doute trop belle pour ne pas créer quelque chose d’atypique, volontairement lent par opposition à la profusion de l’accompagnement des séries américaines.
Mais voilà : la série avait été perçue dès le premier épisode comme une sorte de Messie hexagonal, qui pouvait enfin rivaliser avec les productions étrangères et se libérer des clichés cent fois revus dans le PAF. Or, ces modèles américains ou anglais ont également établi celui d’un flot intense de paratextes, que Canal+ n’a pas fournis en quantité suffisante. Sans aller jusqu’à dire que la déception finale a uniquement été causée par ce manque de contenu transmédia, nous pouvons tout de même espérer que la chaîne retiendra la leçon pour la saison 2.
 
Les Revenants : Les morts aussi cultivent les RP…
Pour faire un buzz, il existe différentes recettes : de l’absence totale d’informations au déversement de teasings et de pseudo-spoilers, chacun choisit son orthodoxie. Canal+ l’a bien compris lorsqu’il s’est agi de faire la promotion des Revenants, et a fait le choix judicieux du juste milieu. Ni trop peu, ni pas assez, la campagne d’avant la diffusion du premier épisode était justement dosée, même en termes de relations presse.
En effet, Canal+ maîtrise l’exercice, au vu de toutes ses créations originales. Il est, de manière générale, extrêmement difficile de passer à côté de la sortie de l’une d’elle, qu’on soit abonné ou non à la célèbre chaîne privée. À travers les campagnes d’affichage, certes, mais aussi par le nombre d’articles publiés avant même la date de sortie de la série. Fidèle à sa politique habituelle, Canal+ a convié un certain nombre de journalistes à une diffusion en avant-première des épisodes des Revenants. Tous les épisodes ? Non, Canal+ n’a cédé que les six premiers, ce qui, me direz-vous, est déjà important dans une série conforme aux canons Canal+, c’est-à-dire de huit épisodes par saison. Mais si nous regardons en arrière, alors que nous avons vu tous les épisodes, c’est un choix qui reste polémique. On entend ici et là que les deux derniers épisodes ont été décevants, en tout cas pas à la hauteur du reste de la série. Les producteurs en étaient-ils conscients ? Ont-ils voulu cacher la faiblesse scénaristique supposée de cette fin de saison ?

Mais revenons à nos moutons, c’est-à-dire à nos journalistes, à qui on a accordé également moult interviews avant la diffusion des Revenants aux abonnés de Canal+. On entend surtout Fabrice Gobert, créateur et réalisateur de la série, mais aussi quelques-uns des acteurs comme Anne Consigny (Claire, mère de Camille) ou Frédéric Pierrot (Jérôme, le père), qui enrobent la série de mystère et surtout, la distinguent clairement du film dont elle est inspirée mais qui avait finalement fait un flop auprès du grand public. La politique de Canal+ a donc été, à l’image de la série elle-même, de peu en dire et de tout suggérer. La diffusion des premiers épisodes aux journalistes – ce lien créé avec la presse que Canal+ connaît et maîtrise bien – a conduit à l’encensement de la série par les journalistes avant même qu’elle ne soit connue du public, à qui Canal+ a accordé un amuse-gueule : les douze premières minutes du premier épisode de la série, où le ton est clairement donné. Musique au temps suspendu, rythme angoissant, gros plans haletants, nous n’avons pu attendre la sortie de la série qu’avec impatience. Mais il est très clair que si Canal+ n’avait pas fait de la série un événement à ne pas manquer, il en aurait été tout autrement. Pour cela, la chaîne ne se contente pas d’une campagne de communication et de publicité classique avec grandes affiches et petits teasings, le tout aux heures de grande affluence sur Canal+, mais exploite au maximum un lien privilégié avec les journalistes.
Mais faire parler de la série ne signifie pas se cantonner à discuter de ce qui s’y passe. Fabrice Gobert, l’homme sur-interviewé de la pré-diffusion des Revenants, a parfaitement conscience qu’avec sa série, il s’insère dans des débats d’actualité : la mort, le deuil, l’absence et tout le questionnement qui les entoure. Dès lors, le pari de Canal+ est d’inclure Les Revenants dans une réflexion sociale grâce à laquelle les téléspectateurs peuvent s’identifier aux personnages de la série. Des journalistes de tous horizons, du Monde à Paris Première, ont évoqué le débat, de telle sorte que Les Revenants, avant même sa diffusion, devenait une référence culturelle pour évoquer la question de la mort.
Le cocktail de complicité et de surprise, entre Canal+ et les journalistes, a permis l’effervescence actuelle autour de la série. En parlant de surprise, Fabrice Gobert cultive l’art du mystère : une saison 2 ? Pas sûr, mais pourquoi pas. Ne parlons même pas de la sortie extrêmement rapide, due sans doute au cryptage de Canal+ qui réduit considérablement le nombre de spectateurs rentables de la série, sortie qui n’avait pas été annoncée dans les délais classiques. Une surprise destinée à se retrouver au pied d’un sapin de Noël tardif ? Probable…
 
Elsa Couteiller (pour « Les Revenants, zombies qui font le buzz »)
Léo Fauvel (pour « Les Revenants, aspect transmédia »)
Noémie Sanquer (pour « Les Revenants : les morts aussi cultivent les RP »)
 
Sources « Les Revenants, zombies qui font le buzz » :
http://www.lexpress.fr/culture/tele/serie-tele-pourquoi-l-episode-final-des-revenants-a-decu-alors-qu-il-est-reussi_1203275.html
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/743489-les-revenants-sur-canal-une-serie-fantastique-pas-si-mortelle-que-ca.html
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1998_num_38_145_370446
Sources « Les Revenants, aspect transmédia »
http://mediacommons.futureofthebook.org/mcpress/complextelevision/transmedia-storytelling/
http://www.experience-transmedia.com/hebdomedia-transmedia-19-11-2012/
http://lesrevenants.canalplus.fr/
http://www.reviewer.fr/dossiers/television/18434/les-revenants-la-saison-2-la-fin-le-createur-de-la-serie-nous-dit-tout.html
http://www.liberation.fr/ecrans/2012/09/03/arte-dans-la-spiral-du-transmedia_843561
Sources  « Les Revenants : les morts aussi cultivent les RP »
http://series-tv.premiere.fr/News-video/Les-Revenants-l-equipe-nous-dit-tout-3575690

“Les Revenants” Création Originale Canal+ – Les premiers Teasers


http://www.huffingtonpost.fr/2012/11/26/les-revenants-canal-plus-serie-zombies-_n_2190426.html
http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20121124.FAP6421/les-revenants-sur-canal-decryptage-de-la-serie-la-plus-attendue-du-moment.html
http://www.spin-off.fr/actualite-2771-25112012-Le-createur-des-Revenants-repond-a-nos-questions.html