Normcore
Société

Normcore: tendance à la normale

 
Alors que les différentes collections de haute-couture ont été présentées à New York, Milan ou encore Paris au cours des dernières semaines, un nouveau mot fait trembler le monde de la mode: Normcore. Le nom est explicite, composé de « norm » et de « hardcore » : il s’agit d’une normalité exacerbée, devenue tendance. Ce terme a émergé dans un article de Fiona Duncan dans le New York Magazine du 26 février dernier, avant d’être repris partout. Le concept lui, vient du constat suivant: il est devenu impossible aux Etats-Unis de différencier des jeunes locaux du touriste américain moyen. Sandales, jean, t-shirt uni et large: ce look voit triompher des marques jugées basiques mais pas habituellement à la mode ni originales, telles que Uniqlo, Birkenstock ou en France Decathlon.

Le normcore vient donc renverser toutes les habitudes de tendances, puisqu’il s’agit d’un refus de faire du choix vestimentaire un enjeu capital. Se démarquer n’est plus une finalité, ce qui vient contrer la démarche hipster, dont le point de départ était bien de sortir du « mainstream » et d’affirmer sa singularité. Cette tendance hipster semble avoir atteint un point très paradoxal, car tous ses participants en refusent l’étiquette, devenue elle-même trop commune. Or pour le normcore, l’étiquette est salvatrice, elle permet d’être tendance, et non pas un simple touriste américain qui a privilégié l’aspect pratique de sa tenue.

Un mouvement émerge souvent avec une figure de proue. Or dans le cas du normcore, c’est Steve Jobs qui a été choisi, étant connu pour faire ses conférences Apple en col roulé et jean, alors que celles-ci étaient retransmises dans le monde entier. Il apparaît alors que le normcore émerge comme tendance à un moment où le code vestimentaire au travail se relâche. Certains domaines y sont plus propices que d’autres, mais venir travailler en basket est si fréquent que la tendance normcore peut se développer sur un public assez large. A la condition d’un cadre de travail plus décontracté s’ajoute celle d’un contexte médiatique particulier. Pour exister sur Internet, notamment sur les réseaux sociaux, chacun est conduit à tenter de se démarquer en permanence. Cet effort à produire serait responsable d’une certaine lassitude, une volonté de revenir dans la norme. On refuserait donc la concurrence acharnée qui sévit sur les réseaux sociaux par le fait de se fondre dans la masse plus globale de la population occidentale. Enfin, ce style est porté par une jeune génération, qui semble vouloir retourner aux lignes épurées qui ont marqué leur enfance dans les années 1990. Entre nostalgie, code vestimentaire possible et volonté de ne plus se différencier à tout prix, le normcore répond bien à des conditions d’émergence particulière, qui justifient également le succès du terme. Cela rappelle même le thème de campagne du président François Hollande, désireux d’être un « président normal ».

Mais cette tendance n’est pas sans soulever de nombreux paradoxes. Tout d’abord, la volonté de se fondre dans la masse est bien contredite par la revendication du style. Comment être normal en se revendiquant d’un style? Or, l’étiquette est décisive pour éviter d’être confondu avec les touristes basiques. Le normcore semble de fait moins un non style qu’un style nonchalant, ne laissant pas voir la réflexion qu’il y a derrière. C’est là qu’on atteint le paradoxe le plus fort lié au normcore: il faut avoir l’air de ne pas avoir prêté attention à sa tenue, alors que c’était le cas, pour donner une impression de simplicité. Le normcore – qui était pourtant un refus de se démarquer – devient alors un moyen de communication sur sa personnalité. Beaucoup de significations peuvent ainsi être attachées aux choix vestimentaires de Steve Jobs, allant d’une volonté de se différencier des autres directeurs de grandes marques, d’apparaître plus décontracté à celle de laisser l’accent sur les visuels de la marque. Le normcore n’est donc pas une simple envie de s’habiller au plus simple. Des valeurs y sont accolées. Comme dirait l’aphorisme « less is more », cette simplicité et normalité revendiquées ne sont en fait qu’une façade pour faire croire à une personnalité décontractée. La volonté de sortir des sentiers battus en revenant à un style peu répandu n’est pas sans rappeler la démarche hipster, tant la banalité était laissée de côté par une course à l’originalité permanente. Enfin, il ne faut pas oublier que cette tendance se fonde sur la banalité occidentale, voire nord-américaine, ce qui conduit à relativiser la notion de globalité, car elle ne peut évidemment s’appliquer au monde entier. La tendance normcore est bien un style au même titre que les autres, qui dit beaucoup de choses sur ceux qui l’adoptent et sur des évolutions de société.
Cette tendance raconte aussi comment les médias peuvent mettre en lumière des faits qui n’auraient nullement attiré l’attention en temps normal. En effet, comment débusquer la normalité basique de celle qui vient d’une tendance, si ce n’est pas l’émergence d’une étiquette normcore qui fait le buzz?
 
Astrid Gay 
Sources
Slate
NYmagazine
Photo de couverture : Musemagazine

Neknomination
Com & Société

Neknomination : le jeu à boire 2.0

 
Quel est le point commun entre Isaac Richardson, jeune gallois ayant étudié la grammaire, Ross Samson, joueur star du rugby écossais et votre pléthore d’amis Facebook ? Vous ne voyez vraiment pas ? Réjouissez-vous ! Vous pouvez vous targuez d’appartenir au cercle très privé des internautes encore épargnés par le phénomène « neknomination ».
Venu tout droit d’Australie, cet étrange néologisme est né de l’esprit embrumé de deux étudiants de l’université de Scotch – le hasard fait décidemment bien les choses – au cours d’une soirée bien arrosée. Hybridation des termes « neckling » (boire cul sec) et « nominating » (désigner), le neknomination offre aux adeptes des jeux à boire un nouveau terrain d’expression : le web et ses réseaux sociaux.
Fini le temps des shots entre copains au pub du coin, l’exhibition 2.0 s’exporte jusqu’au fond des verres ! La règle de base, on ne peut plus simple, est propice à la propagation. Réalisée face caméra, la mission, une fois acceptée, consiste à boire d’une traite 50 centilitres d’alcool avant d’inciter deux de ses amis (au minimum) à faire de même. La vidéo est ensuite postée sur Youtube, Facebook ou Twitter et laisse 24 heures aux nominés pour relever le défi. Visible publiquement, ce selfie d’un nouveau genre institue un rapport de force entre le buveur, qui présente son exploit ; ses nominés, invités à suivre son exemple ; et le public, intangible mais bien influent, que constitue leur cercle d’amis. Tout refus est en effet soumis au joug facebookien et au jugement des pairs.
La principale crainte des personnes désignées ? Passer pour un « lâche » ou pire, quelqu’un qui ne sait pas s’amuser. Sur les réseaux, les remarques  faussement reconnaissantes mais rarement contestataires se multiplient. « Merci à mon copain de m’avoir nominée à ce jeu débile » déclare Anna, 19 ans, non s’en s’être recoiffée au passage.
Majoritairement apprécié par les jeunes qui y voient une occasion d’afficher leur « branchitude », les individus les plus influençables peuvent être amenés à renier leur libre arbitre sous la pression du groupe.
Bien qu’éthiquement contestable, la tendance du  neknomination  aurait pu rester anecdotique si les conséquences de ses dérives s’étaient cantonnées au cadre de l’égocentrisme digital.  Comme tout jeu, neknomination invite à la surenchère et à la réécriture des règles.
Si certains font le choix de remplacer l’alcool par des mélanges toujours plus écœurants (le but du jeu est  alors d’avoir l’estomac le plus résistant) ou  préfèrent boire dans des positions et des lieux d’exception (au choix : à cheval, tête renversée au-dessus des toilettes, aquarium géant, océan, pont suspend, etc…), d’autres franchissent les limites de l’inconscience en augmentant les degrés d’alcool et les doses ingérés. Quatre personnes sont déjà mortes des suites de ce jeu au Royaume-Uni. Triste ironie ou don du sort, la plupart des victimes sont vite devenues trop malades pour mettre en ligne leur performance.
Il a suffi de quelques mois pour que l’idée originale des amis australiens se répande comme une trainée de poudre et mette feu à la toile. Alertées par l’ampleur de la contamination, les autorités sont rapidement confrontées à l’impuissance de leurs moyens d’action. Face à un géant Facebook qui refuse de censurer des contenus qui ne sont en rien contraires à son règlement, la riposte des pouvoirs publics s’organise autour des médias plus classiques et des campagnes de sensibilisation que relaie la Police Nationale. Les messages subliminaux qui y sont véhiculés s’affranchissent d’un ton trop souvent moralisateur. Au traditionnel slogan « l’alcool est dangereux pour la santé » semble succéder un tout autre mantra : la jeunesse ne rend pas invincible.
Ce qui n’était au départ qu’un simple jeu est devenu un enjeu « de vie ou de mort » repris massivement par les médias. Sur les sites dédiés à l’information, les commentaires désapprobateurs pullulent. Instrumentalisé, le neknomination y est dépeint comme le reflet d’une société vouée à la décadence.
Loin de ces considérations pessimistes, un utilisateur de Facebook aurait trouvé le moyen de faire taire les médisances en ajoutant une note d’espoir à cette symphonie plutôt sombre.  Désabusé à l’idée d’avoir été nominé par l’un de ses contacts, Julien Voinson décide de prendre le contrepied du Neknomination. Il relève le défi vidéo tout en en modifiant les règles au point de créer un tout nouveau jeu : « smartnomination » (une réponse « intelligente » à la « désignation »).
Le principe?  Se filmer en train de réaliser une bonne action avant d’encourager deux de ses amis (ou plus) à faire de même, puis poster la vidéo sur les réseaux sociaux. Salué par la blogosphère, son initiative pourrait bien être le premier maillon d’une longue chaîne de solidarité. Dons de repas et de vêtements mais plus encore, don de temps, ce « smartselfie » semble réussir là où tous les autres ont échoué : sensibiliser son auteur à la misère du monde.
Alors certes, cette mise en scène de soi va à l’encontre d’une solidarité idéalement « désintéressée » mais peut-on réellement le lui reprocher ? Le smartnomination  fait figure de prétexte au rassemblement ce qui, au pays du narcissisme digital, est déjà un bel exploit.
Bonne ou mauvaise, l’influence ne l’est qu’entre les mains des hommes qui la créent. Outil au service d’une jeunesse débridée, instrument de mort ou vecteur de charité, les réseaux sociaux abolissent une fois de plus les frontières.
 
Marine BRYSZKOWSKI
Sources
BBC
ABCNews
Telegraph
TheGuardian
Metro
Huffingtonpost
SudOuest
Youtube

Société

Rooftopping, serez-vous à la hauteur ?

 
Se promener dans les villes d’Amérique du Nord le nez en l’air, c’est dépassé ! Désormais, on les admire les pieds dans le vide, au bord du gouffre, cheveux au vent. Tel est le leitmotiv du rooftopping. A l’origine, il s’agit d’un mouvement artistique urbain dont Tom Ryaboi est le précurseur. Ce photographe canadien s’est fait connaître grâce à ses photographies vertigineuses prises depuis le sommet de gratte-ciels.

Grâce à internet, il n’a pas fallu longtemps à ce phénomène pour s’exporter de l’autre côté de l’Atlantique. De cette façon, le rooftopping devient une dynamique urbaine portée  principalement par les jeunes. Cette diffusion le fait passer du statut de pratique d’avant-garde à celui de tendance. Si la jeunesse canadienne et américaine possède le terrain de jeu idéal pour « rooftopper », ce sont les jeunes russes qui passent maître de cet art. Deux d’entre eux Vitaly Raskalov et Alexander Remnev ont été remarqués pour leur goût du risque sans pareil. Et pour cause, toute mesure de sécurité leur semble superflue. Sans câble, ni gants, se tenant d’une seule main, ils narguent l’objectif le corps suspendu dans le vide. Leur escalade ne se limite pas aux gratte-ciels, ils grimpent au sommet de grues ou de ponts. Ils prennent une photographie et la partagent sur les réseaux sociaux. Rappelant les Yamakasis, ce gang de jeunes hommes agiles qui escaladent les buildings dans le film d’ Ariel Zeitoun sorti en 2001, ces Russes sont sans cesse à la recherche de montées d’adrénaline plus extrêmes.

Quelles sont les motivations du rooftopping ? L’engouement développé par la jeunesse pour ce mouvement montre qu’il répond à leurs aspirations ; à la fois leur désir de dépasser leurs limites et leur besoin de reconnaissance. La preuve immatérielle de l’exploit accompli, la photographie joue un rôle primordial car elle engendre une rétribution symbolique sous forme de nombre de vues, de « likes » ou de « tweets ». Une mise en scène de soi est évidemment en jeu. Il s’agit de montrer son audace, sa témérité voire son inconscience face au danger.
Mais, plus généralement, le rooftopping s’inscrit dans une logique d’individualisation et de personnalisation. Il permet à l’individu de se réapproprier l’espace urbain. Il traduit le désir de s’extraire de la masse qui grouille au sol, de retrouver une individualité, presque une âme en se rapprochant de son lieu de prédilection, le ciel. D’être reconnu en tant qu’individu singulier.
Le rooftopping a pris une ampleur. Il s’est diffusé au sein de la société, entraînant sa mutation. Il devient une simple expérience : celle d’investir les toits, d’avoir une vue imprenable sur la ville, de la dominer. Ainsi, il n’est plus réservé à un cercle restreint d’aventuriers, mais peut être pratiqué par chacun. En allant, par exemple, au Perchoir. Situé à vingt-trois mètres d’altitude, ce restaurant gastronomique ouvert cet été est le premier rooftop parisien.

Progressivement, cette tendance passe dans le « mass market » puisque les marques l’intègrent à leur stratégie de marketing  Nissan, par exemple, crée l’événement, du 16 au 21 janvier 2014, en invitant le grand public à découvrir le nouveau Nissan Qashqai autour d’une exposition au bord du vide. Pour l’occasion, Nissan investit la terrasse du Publicis Drugstore des Champs-Elysées, avec vue plongeante sur l’Arc de Triomphe. Les nouvelles technologies permettent de vivre pleinement cette expérience hors du commun en diffusant des images ultra haute définition de rooftopping sur un écran de près de 13 m² au sol.
Parallèlement, Lacoste lance sa nouvelle campagne publicitaire : « Life is a beautiful sport ». Le visuel est celui d’une ville américaine vue de haut avec un homme marchant sur le toit d’un immeuble. Cet homme assuré et audacieux au bord du précipice incarne les valeurs de la marque. En effet, celle-ci déclare dans son communiqué de presse que « ces visuels urbains et minimalistes sont la simple métaphore de ‘l’esprit Lacoste’ qui reste sport et décontracté face aux défis ».

Le rooftopping est donc vendeur. Il suscite l’enthousiasme des foules. Plus qu’un point de vue ou qu’un état d’esprit, il se définit finalement comme une expérience. Et vous, irez-vous rooftopper ?
 
Miléna Sintic
Crédits photos
Tom Ryaboi
Vitaly Raskalov
Aude Boissaye/studio Cui Cui
Jacob Sutton/BECT

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Archives

Jacques a dit « Vapotez ! » (ou pas ?)

 
Chers curieux,
Vous avez tous entendu parler de la cigarette électronique. Cet appareil composé d’une capsule remplie d’un liquide, d’un système de chauffage et d’une batterie.
Qu’y a-t-il dans ce liquide ? De l’eau, des arômes divers et parfois de la nicotine à différentes concentrations. Elle a été créée à la base comme substitut à la cigarette qui aujourd’hui tue environ 50% de ses fidèles consommateurs -ce qui est une intention plus que louable ; en plus d’être dite moins nocive, elle est aussi économique. En effet, le prix d’une e-cigarette varie entre 40 et 150 euros et celui d’une recharge entre 5 et 8 euros. Or une recharge représente l’équivalent de quatre paquets de clopes. Donc, côté fumeurs on se réjouit !
Mais la cigarette électronique, plus qu’une « aide » au sevrage tabagique, constitue un business en plein boom. Le chiffre d’affaire aux Etats-Unis de 2013 est estimé à 1,7 milliards de dollars. En France, on compte 500 000 « vapoteurs », et plus d’un million ont déjà essayé.
Et si la majorité de l’offre se trouve sur internet, le nombre de boutiques spécialisées se multiplie de manière exponentielle.
Entre substitut, alternative fun ou mode « bobo », la cigarette électronique est partout. A croire que tout le monde « vapote » en toute tranquillité. Et pourtant, elle fait parler d’elle, comme l’ont montré les débats houleux au Parlement Européen ce mois-ci. Elle est l’occasion de discours virulents « contre », et de manifestations « pour » comme en témoigne cette photographie tirée de Libération

Personne ne semble d’accord mais tout le monde a une opinion.
L’e-cigarette est une préoccupation de santé publique mais aussi politique car ne l’oublions pas un « vapoteur » reste un électeur.
Le fait est que la cigarette électronique se passe bien de bonne presse, car si sa publicité est interdite, le bouche à oreille semble très efficace. Si la vente aux mineurs est interdite, regardez la sortie des lycées et même des collèges…
Il semble que ni débats, ni réticences n’empêchent de vapoter.
Le véritable problème réside dans le flou et l’ambivalence qui planent autour de la cigarette électronique. Elle n’est pas un médicament alors que les produits qui contiennent de la nicotine ne sont mis sur le marché que sous l’étiquette « médicament ».
Elle se présente comme une alternative moins nocive à la cigarette, mais comment croire à une préoccupation de santé publique quand on sait qu’aucune étude scientifique n’en a prouvé l’efficacité pour arrêter de fumer la cigarette classique ?
La dangerosité du produit est aujourd’hui mal évaluée, de nombreuses erreurs d’étiquetage concernant le dosage ont été décelées.
Et cette ambivalence n’est pas sans incidence sur les stratégies de communication à adopter.
N’est-ce pas plus agréable de commander une cigarette électronique rose à paillettes goût melon que d’aller à la pharmacie acheter un patch? Choisir une e-cigarette devient presque aussi dur que de choisir son téléphone portable tant le choix des couleurs et des formes est différent. Tout est dans le design.
En effet, on n’achète pas un médicament, mais plutôt un accessoire esthétique.
Ne faisons pas les innocents, le large choix des « arômes » séduit en général un public jeune et plutôt féminin. Ceux-ci constituaient déjà la cible des cigarettes classiques au chocolat, les Pink Lady… Alors véritable progrès ?
Ainsi, ce flou profite à ce marché et participe à une redéfinition des arguments de vente et de l’image du produit : la cigarette électronique née comme substitut, devient une alternative fun, respectueuse (fini de déranger son voisin avec sa fumée) et même esthétique…
Quand fumer est « has been », « vapoter » devient branché et ça les grands groupes comme Marlboro, British American Tobacco l’ont compris et commencent à développer et commercialiser leurs propres modèles d’e-cigarettes.
Mais alors santé ou business en premier ?
 
Sophie Cléret
Sources :
http://www.fagg-afmps.be/fr/news/news_cigarette_electronique_2013_04.jsp
http://www.liberation.fr/societe/2013/03/05/fausse-cigarette-de-la-fumee-sans-feu_886567

Com & Société

Peut-on toujours « madonner » le monde à 53 ans ?

 
Ce n’est une surprise pour personne : le nouvel album de Madonna est sorti le lundi 26 mars dans les bacs. Minutieusement préparée, la communication élaborée autour de la parution de cet opus provoquait déjà une scission entre les fans impatients et les autres, partagés entre l’agacement et une curiosité réservée. Toutefois,  chacun à sa manière attendait de pied ferme le retour de la « Reine de la Pop ».
Le titre même se veut accrocheur : « MDNA », initiales qui font évidemment écho aux petits cristaux euphorisants, ainsi qu’au DNA, acronyme anglais d’ADN. On s’attend alors à un album qui serait du « pur Madonna », marqué à la fois par son ADN et ses vertus addictives. La promesse est élevée, et la communication autour du douzième album de la Reine n’est pas là pour le démentir.
L’élément paroxystique de sa promotion est bien sûr sa performance à la mi-temps du  Super Bowl 2012, diffusée sur NBC. La Madone commençait en effet son live en reprenant deux de ses titres phares : Vogue et Music, avant d’enchaîner de façon plus surprenante sur une reprise de Sexy and I Know It de LMFAO. Mais c’était surtout l’occasion de chanter son nouveau single Give Me All Your Luvin avec ses deux nouvelles collaboratrices Nicki Minaj et MIA. Devant environ 114 millions de téléspectateurs, il s’agissait d’un véritable enjeu pour créer l’engouement autour de son album.

Oui mais voilà, déjà, à ce moment, un article du Figaro soulignait : « La prestation était à couper le souffle du côté de la mise en scène. Mais la chanteuse, un peu molle et hésitante dans sa performance, a perdu de sa superbe. ». Un tel propos laisse bien entendre le principal obstacle pour Madonna : personne ne nie sa capacité à surprendre et à proposer des spectacles de qualité, mais là où le doute s’installe, c’est lorsqu’il s’agit de savoir si elle est toujours celle qui casse les paradigmes des tendances musicales, celle qui trône au royaume de la musique populaire.
En effet, celle qui a vendu le plus de disques de tous les temps se confronte à des monstres de la scène musicale, prêts à jouer sur les ressorts les plus efficaces de la communication et de la provocation pour faire parler d’eux. Citons sa principale concurrente Lady Gaga, à la fois artiste la plus suivie sur Twitter et personnalité la plus influente du monde selon le magazine Time . Celle-ci cherche l’innovation à un point tel qu’elle a opté pour un changement de look au jour le jour, la création d’un réseau social (LittleMonsters.com) ou encore des prises de position politiques (la dernière en date : création d’une association pour se battre contre les humiliations subies par les jeunes lors des bizutages). Par ailleurs, l’américaine délurée est tout aussi capable de faire des shows enflammés que des ballades au piano.
En clair : la jeune génération (oui oui, Katy Perry, Shakira, et toute la clique) a formé une nouvelle cour des Grands, dans laquelle on joue certes à provoquer aux niveaux politique et sexuel, mais également à triompher sur Twitter & Co. Voilà pourquoi le nouvel album de Madonna semble décevoir : il semble presque désuet dans les moyens qu’il exploite pour faire parler de lui.  Ainsi, le clip « Girls Gone Wild » paru tout récemment, tire les ficelles du « porno chic » dans un paysage sadomasochiste qui… non seulement ne surprend plus, mais encore fait penser aux premières vidéos de Madonna, illustrant des morceaux comme Erotica.

Madonna : Girl gone wild (2012) par tartenpion333
Enfin, on serait presque tenté de dire que quelque chose sonne « faux » dans cette exhibition de la part de cette femme de 53 ans. Elle serait allée jusqu’à s’écrier « Combien d’entre vous dans cette salle ont vu Molly ? » (pour ne pas dire MDMA) au festival Ultra Music à Miami, propos qui amènera le DJ canadien Deadmau5 à poster sur Facebook : « Très classe, Madonna. Quel super message pour les jeunes fans de musique. Mais au moins, t’es hype et branchée! J’en ai rien à faire de critiquer Madonna. Je peux admirer sa carrière et tout ce qu’elle a fait de bien, mais c’était quoi, cette connerie? C’est ça, ton message? Rechercher de la drogue? Va te faire foutre, putain d’imbécile! ».
On peut donc penser, au terme de cette argumentation, qu’il y a peut-être une erreur dans l’approche de Madonna pour continuer à régner sur le monde de la pop, qui est paradoxale : pour être « in », la diva n’aurait peut-être pas dû surfer sur la puissante vague électro-érotique qui fait la grande tendance du moment. Toutefois, il faut savoir que les plus critiqués sont en général les plus grands, et que l’album de Madonna reste de bonne qualité, beaucoup de journalistes se recoupant dans leur opinion, selon laquelle les singles ne sont pas les meilleurs morceaux, l’album proposant quelques bonnes pistes à l’instar de « Gang Bang » ou « I don’t give A ».
Il revient donc à chacun de faire le choix d’aimer ou ne pas aimer.

 
Lucas Vaquer
Crédits photos: billboard.com  

Invités

La tendance m’a tuer

 
Coincée dans le métro, tu te dis qu’un article sur la tendance s’envisage avec un sourire en coin. Le coup de l’achat d’identité qui s’opère dès lors  que l’on se colle une marque sur le front, cela fait vingt ans que les journalistes te le servent. Avouons-le, il n’est pas rare qu’un titre découvre à la fin de l’hiver qu’au royaume des fashion, un truc « in » peut être « out » et que d’ailleurs ce qui est réputé « out » est archi « in ».
Attends, ne décroche pas, on a une ou deux perles à te servir. D’abord Bourdieu, auteur de « La distinction » – aux Éditions de Minuit qui en 1980 écrivait : « Classeurs classés par leurs classements, les sujets sociaux se distinguent par les distinctions qu’ils opèrent entre le savoureux et l’insipide, le beau et le laid, le chic et le chiqué, le distingué et le vulgaire – et où s’exprime ou se trahit leur position dans des classements objectifs. »
Avoir du goût, être « in » c’est signaler son appartenance à la classe sociale dominante, la stylée, l’inspirée.
Dominant/dominé, tu ne ris plus ? La tendance est une guerre qu’il faut gagner à tout prix. Le plix* bling bling (attention cet article n’est pas politicaly correct) qui s’achète une identité chez Gucci, Dior, Dolce&Gabbana est juste un suiveur, plus grave que celui qui navigue hors marques.
L’apparence c’est violent, saignant.
Tu te souviens au lycée de cette fille longue et fine (on va l’appeler Mia) que les autres tentaient de copier. Et comment elle s’amusait à les égarer dans son jeu de piste impossible. Hier, elle a soufflé à une copine de s’acheter le sac Frison sorti en octobre. Impossible à trouver parce que chez les enseignes au top, les produits, même ceux qui rapporteraient une fortune si on continuait à les vendre, connaissent une durée de vie de deux mois, concept d’excellence, de rareté (et donc de distinction) oblige.
La bonne copine de Mia a tué son papa et sa maman pour s’offrir le Frison (un vintage qu’elle a racheté le double du prix sur le Net). Sauf que Mia à la rentrée, elle arborait un sac en toile de jute venu de Sarajevo. La tendance a tué la copine, tu suis ? Jeu sado-maso : prendre le pouvoir, être prescripteur, décideur. On vote rouge ou bleu peu importe, ce qui compte ce n’est pas de sentir l’air du temps, il n’y a rien à sentir bien sûr. Il convient d’imposer son choix et se faisant de s’imposer soi. La tendance est radicale, sadique, implacable. Il s’agit d’une dictature de l’espèce dominante – celle qui a de l’allure, du caractère – sur le gros du troupeau. Classeurs classés par leur classement type Laguna super in à force d’être out, sac revolver Dior ou sac en plastique Ed, les sujets sociaux commettent parfois la pire des erreurs : croire que le style s’achète chez Colette.
Or, le style est d’essence divine, il est rare, un secret partagé par une poignée d’individus qui sont les rois du monde et le savent. Tandis que les patrons, les généraux s’imposent armes à la bretelle, les princes de la tendance se distinguent l’air de rien par ce petit truc en eux qui fait qu’on ne les arrêtera jamais à l’entrée. Le petit truc n’est vendu nulle part. Et pour cause, il n’existe pas. Pourtant il existe puisque tout le monde y croit.
Corinne Lellouche
*plix : plouc

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Affichage hors-média pour Volkswagen Up par l'agence V
Edito

Pour les grands et les petits !

 
Nous parlions la semaine dernière des tendances pour 2012. Ces tendances ne prennent de l’importance qu’à partir du moment où des entreprises s’en emparent. Ainsi, elles se confirment, s’installent et se développent. Si cela risque de prendre du temps pour certaines, d’autres vont être exploitées, consciemment ou non, dès les premiers mois de cette année. L’agence .V. et Volkswagen, pour leur part, ne perdent pas de temps ! Ces deux instigateurs nous font prendre de la hauteur avec une initiative qui fait tourner les têtes.
En ce mois de janvier froid et pluvieux, les conducteurs bien au chaud dans leurs habitacles roulants auront le plaisir de voir, sur le périphérique parisien, un affichage pas comme les autres. En effet, l’agence .V. n’a pas chômé pour hisser la nouvelle petite citadine Volkswagen Up aux sommets.

Alors vous me direz que cela n’a rien de particulièrement étonnant, après tout, ce n’est qu’une affiche géante. Certes. Cependant, si ce n’est pas très clair sur la photographie, il faut savoir que la voiture est, en fait, bien réelle. En effet, la voiture a été apposée sur l’affiche ce qui donne tout son sens au concept créatif et tout particulièrement à l’accroche qui n’est pas forcément comprise au premier abord. La règle de 10 mètres de haut permet de démontrer la petitesse de la citadine qui ne dépasse pas la barre des 3 mètres. Cela peut rappeler à certains le moment fatidique de la prise de mesure étant enfant : quand sur le bout des pieds, le menton relevé, le dos droit, on essayait désespérément de gagner quelques centimètres pendant que Maman notait une ligne discrète au crayon.
Ici le but est inversé, et s’inscrit directement dans l’une des tendances que nous avons découvertes dimanche dernier. Je vous laisse deviner laquelle…
Navigating the new normal // Chérie j’ai rétréci les gosses
Rappelons rapidement le propos que ce titre ne clarifie pas. Cette tendance prédit de nouvelles initiatives de la part des annonceurs et des marketeurs qui, dans un marché encombré, vont ouvrir leur entrée de gamme aux consommateurs les plus sensibles du portefeuille. Pour cela, ils vont jouer sur les prix ou sur les tailles. Les produits vont devenir plus petits et, par là-même, moins chers, pour se rendre plus accessibles et correspondre davantage aux exigences du consommateur.
Alors, il parait évident que cette nouvelle petite citadine en fait partie. Elle n’est pas la seule et la tendance au mini n’est pas toute récente mais cette année représentera sûrement son apogée. On le constate dans l’automobile, mais aussi dans tous les secteurs. La dernière campagne Coca-Cola Light par exemple, avec ses dolls, repose sur le même ressort. De même que la campagne Chupa Chups qui nous donne à voir Barbie et Action Man, sucette en bouche.
Nous risquons donc de voir beaucoup de campagnes de ce type lors de l’année qui s’annonce. Espérons qu’elles soient aussi impressionnantes que ce dispositif. Au pire, l’agence .V. nous réserve sûrement d’autres belles surprises.
 
Marion Mons

Crédits photo :
©Volkswagen – ©Coca-Light – ©Chupa Chups

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JWT Trends pour 2012
Edito

Retour vers la future année 2012

 
Pour débuter cette nouvelle année, je vous propose, une fois remis de votre cuite d’hier soir, de découvrir les prévisions en matière de tendances pour l’année 2012. C’est la période vous me direz ! Tout le monde y va de son petit rapport, de sorte que l’on ne sait plus à quel saint se vouer. Après avoir procédé à un choix quasi cornélien, je me suis penché sur celui de l’agence américaine JWT.
En effet cela fait près de 7 ans que l’agence publie chaque année un cahier développé par  leur bureau de recherche JWT Intelligence à l’aide d’études quantitatives et qualitatives tenues durant l’année.  C’est donc début décembre que le rapport annuel a fait son apparition, à la fois en print et en digital avec un slideshare et une vidéo teaser de 2 minutes que je vous invite à visionner ci-dessous :
 

 
Parce que tout le monde n’est pas bilingue en anglais et que la synthèse d’idées, parfois complexes, n’est pas toujours accessible, je suggère de se prêter à une petite réflexion sur chacun des concepts abordés dans cette animation.
 
Navigating the new normal // Chérie j’ai rétréci les gosses
Restons sur le sujet de l’accessibilité avec cette première tendance et sa signature pas si évidente.  Loin de moi l’idée de vous en fournir une traduction exacte, cependant il semble pertinent d’y associer l’ouverture. Celle-ci s’opèrera au niveau de l’entrée de gamme grâce à des marketeurs prêts à jouer sur des mini prix et des mini tailles. Autant dire que l’on aura bientôt tout en miniature dans notre cuisine. De quoi reconstituer une vraie maison de poupées !
 
Live a little // Un peu de « laisser-aller » n’a jamais tué personne
Les consommateurs trouveront leur compte dans le tout miniature, car en cette année 2012 difficile, ils vont s’accorder plus de plaisir mais à petites doses. Marre de se serrer la ceinture, de courir le matin, de manger sain et d’être un saint !
 
Generation go // La génération entrepreneuriale
Pendant ce temps, les jeunes, contrairement à ce que l’on peut penser, ne vont pas se tourner les pouces. Face à un marché du travail gelé et bouché, ils n’ont plus d’autre choix que de créer leurs propres opportunités. Cette année va voir fleurir des start-up qui vont peut être, à leur façon, relancer l’économie. Qui sait ?
 
The rise of shared value // Synergie et valeurs pour tous
Avant de s’inquiéter de la montée en puissance des start-up, les entreprises vont surtout s’inquiéter de leur image citoyenne. Renflouer les associations ne suffit plus, il faut maintenant intégrer des problématiques sociales à son business model.  Mais si les entreprises doivent sauver le monde, qui va sauver les entreprises ? Super-État ?
 
Food as the new eco-issue // Manger mieux pour dormir mieux
Les entreprises ne seront pas les seules à mettre la main à la pâte. Les consommateurs vont faire plus attention à leurs choix de nourritures et à ce qu’ils peuvent entrainer comme conséquences pour l’environnement. Les marques vont trouver de nouveaux moyens d’inciter à une consommation toujours plus responsable.
 
Marriage optional // Le mariage, c’est en option ?
Plus responsables en matière d’alimentation mais pas forcément quand on en vient à l’engagement suprême. Des femmes, de par le monde, redéfinissent le concept du « happily ever after » a.k.a.* « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». De toute façon, depuis que la valise à roulettes existe à quoi bon se marier ?
 
Reengineering randomness // Laisser le hasard faire les choses
On contrôle tout, si bien que plus rien ne nous étonne. On se constitue un monde personnalisé pour marquer notre individualité. On se renferme sur soi jusqu’à devenir soi-même plus étroit d’esprit. Cette année sera celle de l’ouverture à une vie faite de découvertes aléatoires et de points de vue divergents, synonymes de « nouveau souffle ».
 
Screened interactions // Miroir, mon beau miroir, qui est la plus belle ?
L’écran s’incrustera partout ! Dans les tables de restaurants, dans les murs, dans les panneaux publicitaires… Le tactile prendra le pouvoir en faisant de chaque écran un pur outil interactif afin de découvrir, commander, acheter, et cela partout, sans oublier, tout le temps.
 
Celebrating aging // L’âge rend plus sage
C’est officiel, on vit plus longtemps qu’avant ! Les mentalités vis à vis de l’âge vont s’en trouver changées. Nous allons y voir les bons côtés et redéfinir à quel moment on devient véritablement « vieux ». Quand vieillir devient « cool »…
 
Objectifying objects // L’objet « objet »
Dans un monde de plus en plus digital, des objets de tous les jours comme les cartes de vœux (c’est la saison) ou les cartes postales disparaissent au profit de leur équivalent numérique. Cependant, les consommateurs sont en demande de matérialité. Un objet que l’on puisse toucher, faire tourner et, pourquoi pas, coller à son frigo.
 
Maintenant vous savez à quoi vous en tenir pour 2012 !
 
Marion Mons
 
Sources :
JWTIntelligence
Slideshare Trends 2012
*c’est-à-dire.

Blogueuse - 3 photos
Société

La tendance des blogs de mode

Vous avez certainement entendu parler des blogueuses de mode, peut être même êtes-vous un fan invétéré de Betty, Garance doré, Balibulle ou de Cookie (dont quelques photos sont présentées ci-dessus), toutes réputées dans la blogosphère de mode. Ces jeunes filles inventives et passionnées par la mode et la photographie livrent leurs secrets sur des blogs qui font à la fois office de journaux intimes et de galeries photos de leurs derniers achats. Dans ces blogs de mode indépendants, ces rédactrices privilégient le ton informel, le quotidien, présentant ainsi la mode comme une pratique ordinaire mais néanmoins créative. Elles expriment cette créativité, non seulement par leurs vêtements, leurs coups de cœur ou leurs dernières tenues, mais aussi par la mise en scène et la technique photographique.
Posant généralement dans des lieux publics, le plus souvent dans la rue (parfois même dans le hall de leur immeuble), elles égalent la gestuelle des mannequins professionnels de Vogue ou de Elle, et sont de plus en plus regardées par les internautes qui bavent littéralement devant leur talent. Ces blogs sont des sources d’inspiration pour des milliers de jeunes femmes qui n’hésitent pas à imiter leurs idoles.
Comment expliquer le succès de ces blogs de mode ? Comment expliquer que ces jeunes femmes, qui n’ont pour la plupart aucune expérience en matière de mode, parviennent à influencer des milliers d’internautes dans leurs choix vestimentaires ?

Dans un monde où les individus ont de plus en plus d’autonomie face aux messages communicationnels des grandes marques, ces blogs semblent parvenir à exercer une influence sur les consommateurs.
Les rédactrices de blogs de mode citent constamment les marques des vêtements qu’elles portent et incitent ainsi à l’achat.
Ces blogs ont donc un pouvoir publicitaire hors normes. Ils orientent notre consommation de manière désintéressée et nous suivons leurs conseils en toute confiance, puisque la relation qui lie la rédactrice aux lecteurs n’est pas commerciale mais se situe dans le domaine du partage de conseils. Les internautes sont incités à l’achat par un processus totalement différent de celui d’une publicité. La nuance tient dans la relation entre l’émetteur et le récepteur : il ne s’agit plus d’un publicitaire qui cherche à vendre, mais d’une femme qui donne des conseils comme le ferait une amie.

Dans La sociologie des tendances, Guillaume Erner affirme que « selon une conviction répandue, nous serions contraints, souvent à notre insu, de suivre les tendances », ce qui  rejoint l’idée commune selon laquelle  « un complot » des tendanceurs et des industriels nous inciteraient aux achats superflus des dernières nouveautés.
Cependant selon lui, il semble qu’aujourd’hui aucune technique publicitaire ne parvienne à convaincre les consommateurs de suivre une mode : « la publicité peut orienter les gouts des individus, elle ne les dicte pas ». Un publicitaire ne peut jamais être certain de pouvoir s’approprier « le temps de cerveau disponible » d’un individu. Ainsi dans le milieu de la mode, la tendance actuelle est celle d’un va et vient de certains modèles, adaptés différemment selon les goûts.
Or cette autonomie s’accentue encore avec les nouvelles formes de communication que sont les forums et les blogs. Ces derniers jouent un rôle important dans la manière qu’ont les consommateurs de se forger une opinion. Ces blogs sont désormais pour Guillaume Erner, bien plus crédibles que la presse spécialisée. Peut-être l’audience a-t-elle plus confiance en ses semblables ? Donner son avis sur un forum ou un blog n’engage à rien et se fait de manière totalement désintéressée, ce qui n’est pas le cas des publications des professionnels, des industriels et des marques elles mêmes. Bien sur, quelques marques ont été tentées d’orienter ces forums à leur profit, mais l’importance du nombre des participants et leurs variétés rend cette manoeuvre impossible.
Dans le milieu de la mode, ces blogs consacrés aux styles vestimentaires se multiplient. Ils contribuent à façonner l’opinion des consommateurs et semblent détenir un pouvoir marketing grandissant, envié par plus d’un publicitaire.
 
Charlotte Moronval

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Couverture du 1er The Good Life
Com & Société

Sauver la presse masculine ? Oui, mais en première !

Yes, the good life, to be free and explore the unknown,
Like the heartache when you learn you must face them alone,
 
Explorer l’inconnu, timidement, craintivement, mais toujours avec un certain panache, une curiosité indéniable… Voilà tout le charme du voyage, de l’exploration.
Le goût de l’ailleurs est intrinsèque à tout bon veilleur médiatique, et il ne fait aucun doute que la mondialisation a renversé la tendance : il n’y a plus besoin d’acheter un billet à un prix exorbitant pour rencontrer l’autre: celui-ci, désormais, se déplace jusqu’à nous.
Cela, «The Good Life», un nouveau magazine bimestriel masculin qui a choisi pour cible l’homme d’affaire ouvert sur le monde, l’a bien compris.
«Bienvenue sur Good Life Airways, merci de bien vouloir attacher vos ceintures et relever vos tablettes. Décollage immédiat»… C’est ainsi que nous accueille une voix féminine et suave sur le site de «The Good Life», accompagnée de l’image animée d’un avion en plein envol.
Le ton est annoncé: la lecture de ce magazine s’imposera comme un voyage. Le clin d’oeil à Frank Sinatra et sa chanson «The Good Life» se lit comme une volonté d’afficher un charme rétro, celui du voyage dans le temps. Mais clairement, la tendance est dans l’envol: le magazine prend pied en France, mais il ne compte pas s’y laisser embourber ; et compte faire parcourir le monde au lecteur à travers 354 pages qui brassent les tendances internationales.
On y découvre tout ce qui pourra faire rêver le citadin du XXIème siècle: des expositions à dénicher «autour du monde», des «city guides» bien garnis, des interviews de décideurs internationaux… Car oui, le directeur de «The Good Life», Laurent Blanc, a sans nul doute saisi une chose : désormais, le citadin moderne ne s’identifie plus à un espace restreint, celui de son quartier, de sa ville, ou même de son pays; mais à un désir d’exotisme et de reconnaissance qui se passe bien de frontières.
Avec ce magazine, la France poursuit une lancée insufflée par la Grande-Bretagne, qui avait elle-même lancé le périodique «Monocle» en 2007. Sage résolution, lorsque l’on sait à quel point la presse masculine actuelle se désinhibe et perd en substance au regard des besoins toujours plus variés des consommateurs.
La première «Une» du magazine, quant à elle, marque bien la ligne de conduite du magazine: la carte de Bombay figure l’exotisme; de même que le cactus implanté dans un Leica. La voiture de collection rappelle que la cible est bien masculine, et le modèle réduit de l’avion Air France évoque également la cible (l’homme d’affaire) mais se veut aussi autoréférentiel: et si le voyage, c’était le magazine lui-même ?
Alors, amoureux de l’étranger… Vous n’avez plus qu’à décoller !
 
Lucas Vaquer
Merci à Mikael Zikos et The Good Life pour leur coopération
Crédits photo : ©IDEAT/The Good Life