je suis passé chez sosh
Société

« Je suis passé chez Sosh » : quand la communauté fait vendre

 

C’est un bien étrange casting que l’opérateur de téléphonie mobile met en scène dans sa nouvelle campagne, lancée il y a quelques semaines. En effet, on peut y voir (ou y entendre, la publicité se déclinant également à la radio) des clients de la marque tenter vainement d’articuler le virelangue « je suis passé chez Sosh », entre deux éclats de rire. Les petites scènettes s’enchainent, mettant en avant des clients de tous âges, de toutes nationalités et de tous sexes. Les participants croient participer à un vrai casting, et se retrouvent mis en difficulté au moment de prononcer cette phrase. Tout cela donne des scènes que les réalisateurs affirment « spontanées » et « naturelles ». Cette publicité, qui ressemble finalement plutôt à un bêtisier invitant le spectateur à rire avec les protagonistes, se termine d’ailleurs par un jeu de mots percutant : « Passer chez Sosh, c’est plus facile à faire qu’à dire ».

 

Au-delà de l’aspect comique et engageant de cette publicité, on peut analyser la volonté affichée de Sosh de mettre en avant sa communauté, et de la consolider en donnant envie de la rejoindre à ceux qui n’en font pas encore partie. En effet, tous les figurants sont également clients chez Sosh dans la réalité : le simple fait qu’ils aient accepté de se prêter au jeu (et avec bonne humeur s’il vous plait) est déjà un argument pour l’opérateur, qui prouve ainsi à quel point ses clients sont satisfaits et au-delà, investis dans la marque. Car le but ici, c’est bien de montrer qu’en s’engageant chez Sosh, il ne s’agit plus seulement de signer un contrat par téléphones interposés avec un opérateur dont on ne connait que le nom, et de craindre d’avoir affaire aux longues minutes d’attente d’un service après-vente déshumanisé. Ce que promet l’opérateur au client qui fait la démarche de le rejoindre, c’est de l’accueillir, presque de l’accepter au sein de cette grande communauté solidaire et joyeuse qu’il met en scène dans cette campagne. La phrase «Il y a plein de bonnes raisons de passer chez Sosh, et c’est vous qui le dites » est d’ailleurs une parfaite illustration de la stratégie mise en œuvre: la marque n’a même plus à vanter ses mérites, puisque les clients le font eux-mêmes. Dans un marché ultra concurrentiel, Sosh a donc décidé de se démarquer, en ne jouant plus sur les prix, mais sur la communauté.

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Car Sosh, c’est avant tout la réponse de l’opérateur historique Orange à l’attaque du challenger Free Mobile. En proposant des prix défiant toute concurrence, celui que l’on qualifie souvent de « quatrième opérateur » a ainsi tout misé dès le départ sur l’argumentaire du prix. Et avec quelques années de recul, il semble possible d’affirmer sans trop s’avancer que Free reste imbattable dans ce domaine, malgré les efforts des autres opérateurs pour s’aligner. Il fallait donc trouver une autre manière d’attirer des clients, et Sosh a choisi le fun, le décalé, bref, de se présenter comme une marque accessible et « amie » des consommateurs. La charte graphique utilisée en est déjà un indice, avec des couleurs pétillantes et des caractères ronds et épais. Les anciennes campagnes avaient déjà posé les jalons de cette stratégie communicationnelle : on peut penser notamment au « social rush », une initiative de Sosh mêlant téléréalité et médias. Les internautes étaient invités à voter pour leur candidat préféré sur les réseaux sociaux, et à la fin de la campagne, un prime time avait été organisé (en partenariat avec Direct Star) au cours duquel les candidats sélectionnés par les votants devaient réaliser des défis. Tout cela a permis à la marque de se constituer une véritable communauté, qu’elle met désormais clairement en avant comme un argument de vente.

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Tous les ingrédients étaient donc réunis pour lancer une campagne comme celle que nous analysons ici. Mélangeant subtilement une pointe de storytelling (elle s’inspirerait d’une private joke qui se serait diffusée dans les bureaux de Sosh) à un peu de la tendance des vidéos sur internet (avec un making of dans lequel les réalisateurs du spot avouent eux-mêmes avoir eu du mal à prononcer cette phrase, tout en échangeant des blagues complices avec les participants), elle utilise tous les procédés efficaces pour construire une véritable symbolique autour de Sosh. On notera d’ailleurs que l’opérateur a un onglet spécial « communauté » sur son site internet, en plus du traditionnel espace client. Chaque abonné peut ainsi se créer un « profil communautaire » qui lui permettra d’interagir avec les autres clients, du simple conseil à la discussion plus personnelle. A l’ère des réseaux sociaux et de l’émergence des communautés dans tous les domaines, Sosh ancre donc sa stratégie de communication dans une tendance plus qu’actuelle. Des questions demeurent cependant: entre les promesses d’une campagne de publicité et la réalité de la complicité entre un individu et une marque, quelle distance demeure ? Et surtout, en intégrant les sentiments dans la relation vendeurs/clients, le risque n’est-il pas d’altérer l’esprit critique de ces derniers ? Voilà les problématiques profondes sur lesquelles cette campagne semble nous inciter à méditer.

Sarah Revelen
Sources:
La réclame
Sosh
Il était une pub
Crédits photo :
La réclame
La réclame
Mode-digital.fr

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