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Tous des bras cassés

 

 

Fun fact: un hélicoptère dans la cour de l’Elysée

Sueurs froides au sommet de l’Etat et comme une atmosphère de révolte partout en France, notamment à Paris. Un hélicoptère était prêt « au cas où », samedi 8 décembre, à décoller de la cour de l’Elysée pour emmener Emmanuel Macron vers des contrées plus sûres et loin, très loin du jaune. À croire que les 600 personnes mobilisées autour du palais — gardes républicains, policiers, gendarmes — n’auraient pas suffit à calmer les craintes de notre jeune président. Événement assez similaire à la « fuite de Varennes » lorsque, dans la nuit du 20 au 21 juin 1791, une berline lourdement chargée du roi Louis XVI et de ses péchés s’éloignait discrètement de Paris en pleine Révolution. Prendre ses jambes à son cou avant que ce dernier ne soit coupé : tel est donc l’enseignement des deux chefs d’Etat. Mais il y a toutefois une nuance entre les deux personnages : quand Louis XVI avait l’humilité de se prétendre seulement monarque absolu, Emmanuel Macron parade en dieu de l’Olympe. Alors comment croire encore en notre Jupiter national qui, comme un roi du XVIIIe siècle, voudrait fuir la fureur du menu peuple ?

Et moi, et moi, et moi

« L’Etat, c’est moi ». « La République c’est moi ». Sur le fond, les idées sont similaires. On pourrait même affirmer sans trop d’hésitation que ces deux phrases ont été prononcées par une seule et même personne. Et pourtant, la première aurait été dite en 1655 par Louis XIV devant les parlementaires parisiens tandis que la seconde fut passionnellement hurlée à un policier par Jean-Luc Mélenchon, un matin de perquisition d’octobre 2018. Comble de l’ironie, M. Mélenchon, sans doute un peu plus dramatique que le Roi-Soleil dans une expression qu’on lui connait, ajouta plus tard devant une foule de journalistes ébahis : « Ma personne est sacrée ». Et là, c’est le drame. Comment deux personnages, censés être radicalement opposés, arrivent à se trouver autant d’affinités ? Comment se fait-il qu’un « homme du peuple » résonne tant avec un souverain de droit divin vieux de plus de trois siècles ? Homme du peuple disait-on, ou plutôt homme de pouvoir. Homme au pouvoir depuis 1983, plus de 30 ans, virulent anti-journalistes (la caduque liberté de la presse, un autre sujet qui rappelle la monarchie), un homme colérique et désormais en quête de reconnaissance éternelle. Un vrai petit monarque du XXIe siècle en somme. Mais notre « sacré » Mélenchon, dans tous les sens du terme, est-il un monarque éclairé, ou un monarque mégalo ?

Bingo!

Dans notre pays qui a un certain goût pour le mystérieux, certains pensent que le président est soutenu par un lobby gay, d’autres affirment depuis son intronisation devant la pyramide du Louvre qu’Emmanuel Macron serait un chef de file franc-maçon. Peu probable… mais ne cherchons pas plus loin, la réponse au grand secret de l’Etat est sous nos yeux. Un pain au chocolat à « 10 ou 15 centimes », un ticket de métro pour « 4 euros et quelques » : bienvenue dans le système économique parallèle des élites de la République. Certes, ces bêtises remontent à 2016 pour les pains au chocolat de Jean-François Copé, et à 2013 pour les tickets de métro de la très parisienne Nathalie Kosciusko-Morizet, mais elles restent pourtant d’actualité. Car si certains s’amusent de l’ignorance de ces deux politiciens et bien d’autres non cités ici, l’erreur reste gravissime, surtout pour notre ami Copé. Le Smic, salaire minimum légal en France, était de 1498,47 euros brut mensuels en 2018, soit à peu près 1200 euros réellement touchés chaque mois. En 2016, il était encore plus faible. Mais finalement peu importe, car si un pain au chocolat coûte 15 ou même 20 centimes, il est plus qu’aisé de vivre avec 1200 euros par mois. La vraie vie est une chose que les politiciens ignorent, et à cause de cela des millions de Français ont faim. Le gouvernement « En Marche » parle aujourd’hui d’augmenter le Smic, mais attendre 2 ans pour réagir à l’erreur de M. Copé n’est pas satisfaisant. Augmenter le Smic de 100 euros pour seulement 50% des personnes concernées par le salaire minimum n’est pas suffisant non plus. Alors à défaut de pouvoir vivre d’amour et d’eau fraiche, il faudra que les Smicards vivent de quelques pains au chocolat supplémentaires avant la prochaine bonne action de l’Etat.

Triste conclusion

25% d’abstention aux dernières élections présidentielles, 57% aux législatives. Un Français sur quatre ne veut même plus choisir son président, et plus de la moitié se moquent de qui seront les députés de l’Assemblée nationale, c’est-à-dire ceux qui votent les lois et contrôlent l’action du gouvernement. Plus effrayant encore : un score de 34% du Front National au deuxième tour des élections de 2017. Jean d’Ormesson disait que celui qui n’est pas de gauche à vingt ans n’a pas de cœur, et que celui qui l’est encore à quarante n’a pas de tête. Aujourd’hui la gauche comme la droite déçoivent, et la plupart des Français ont seulement le cœur gros : parmi eux, beaucoup de jeunes comme nous qui aimeraient peut-être être un peu plus écoutés.

Pierre TERRAZ

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