Société

A l'école des marques

 

Que peuvent avoir Lego, Free et Google en commun ? Le premier crée une école au Danemark. Le deuxième est à l’initiative de la controversée « Ecole 42 ». Le troisième ne se contente plus de Google Scholar, son moteur de recherche des articles universitaires. Il cherche à se placer dans le commerce de l’e-education par la vente de manuels. Mais comme toujours, le mastodonte d’Internet tente d’anticiper. Ainsi, en plus de s’associer avec EdX, le projet du MIT et de Harvard, Google est en train de mettre en place un site tout simplement appelé « mooc.org » qui devrait être terminé en 2014. Acte qui peut paraître anodin, mais vu l’importance que devraient prendre les MOOCs, cela revient à posséder des noms de domaines tels que ecole.com, video.net… Pour la première fois, Google ne cherche pas à créer un mot en partant de rien (YouTube) et se débarrasse de l’omniprésence de son nom (Google Mail, Google Doc, Google Music, Google Reader…)

En quoi cela va-t-il consister ? Et surtout qu’est-ce qu’un MOOC ?

Le procédé est simple. Les Massive Open Online Course sont des cours en ligne proposés par des grandes écoles : Stanford d’abord, puis Harvard, Yale, le MIT, et depuis peu, en France, Polytechnique. Ceux-ci sont rassemblés sur des plateformes, Coursera étant la plus connue. Elle commence d’ailleurs à trouver un système économique, ce qui était loin d’être évident ; car ces cours sont gratuits.

N’importe qui peut y accéder, il suffit de s’inscrire et de sélectionner des cours entre les deux catégories suivantes :

  • les cours « fermés » : programmés dans le temps, il n’est pas possible de les rejoindre à n’importe quel moment, et il faut être à l’heure pour le suivre. C’est le format le plus proche de celui auquel nous sommes habitués. Le professeur parle par vidéo par exemple, l’on peut poser des questions sur des forums, et il faut rendre des devoirs

  • les cours un peu plus sporadiques, souvent moins longs, qu’il est possible de télécharger. Ils sont moins interactifs, mais les forums sont toujours animés.

Certains de ces cours débouchent sur un diplôme numérique (oui, vous pouvez désormais être diplômé de Harvard !) qui atteste la réussite de l’étudiant.

Les MOOCs ont fait, et font toujours face à une vague de scepticisme venant de plusieurs d’acteurs. Il y a d’abord la traditionnelle peur de la dématérialisation et de la disparition du professeur, dont découle le problème de l’assiduité : rester seul devant son écran sans se divertir n’est pas chose aisée. Vient ensuite celui du financement : Coursera a décidé de faire payer les diplômes. Cela fonctionne pour les grandes écoles prisées, mais qu’en sera-t-il pour les plus petites ?

Pour autant, étant donnés les récents positionnements des marques, ce scepticisme a tout l’air d’un leurre. Si même Google décide d’investir, il y a fort à parier que ce secteur a de l’avenir.

Il est clair que l’éducation va être bouleversée par le numérique. Les MOOCs sont loin d’être la seule innovation : entre les classes qui utilisent Twitter pour communiquer et éveiller les enfants, les « serious games », les jeux éducatifs, c’est tout un nouveau marché qui s’ouvre. Etant donné le retard de l’Etat, il pourrait bien être trusté par les grandes entreprises. Reste la question éthique : est-ce sain de passer sa maternelle chez Lego et d’étudier chez (pour ?) Free ?

 

Virginie Béjot

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